Violences sexuelles des casques bleus : Défis et réalisations pour ...

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Le viol, ou la violence sexuelle, même à l’état de menace n’est donc pas pour les
féministes une manifestation d’un désir sexuel, mais d’un désir de pouvoir.
Turshen rassemble un nombre considérable de fonctions du viol vu par les
féministes :
Le viol est perpétré pour remonter le moral des soldats, pour nourrir
leur haine de l'ennemi et leur complexe de supériorité, pour qu'ils
continuent à combattre. Le viol fait partie des butins de la guerre, les
femmes sont violées, car la guerre intensifie chez les hommes le sens de
ce qui leur est dû, le sentiment de supériorité, leur avidité, et le
sentiment que le viol est permis par la société. Le viol est une arme de
guerre utilisée pour répandre la terreur politique, le viol peut ébranler
les fondements d'une société et affaiblir ses défenses, le viol est une
forme de torture, les viols collectifs publics terrorisent et humilient les
femmes, le viol est utilisé pour terroriser les femmes et les murer dans
le silence, et pour les contraindre à fuir leurs foyers, leurs familles et
leurs communautés. Le viol prend pour cible les femmes parce qu'elles
permettent à la population civile de continuer à assurer ses fonctions
dans la société et que sur elle repose la continuité physique et sociale de
cette population, le viol est utilisé à des fins de nettoyage ethnique, il est
conçu pour éloigner les femmes de leur foyer ou pour annihiler leur
aptitude à procréer dans ou pour leur communauté, le viol comme
génocide ravale les femmes au rang de réceptacles reproducteurs pour
les faire porter des enfants de la nationalité du violeur, de son ethnie, de
sa race ou de sa religion, et le viol comme génocide aggrave la terreur
des femmes et les stigmates futurs, car il produit une classe de mères et
d'enfants parias – c'est un viol dont l'auteur sait parfaitement jusqu'à
quel point la victime est rejetée par la société patriarcale et incapable de
s'accepter elle-même 62 .
Le viol est donc loin d’être lié au désir sexuel pour les féministes. Il s’agit
d’une relation de pouvoir qui maintient les femmes dans une position inférieure
par l’intermédiaire d’un état de peur 63 . Il sert à affirmer de manière claire et sans
appel la masculinité au dépend de la féminité. Il est efficace étant donné qu’il
« joue sur les rôles genrés » 64 . Pour Stiglmayer, le viol est un régulateur de pouvoir
inégal entre les sexes permettant de maintenir un ordre entre les sexes 65 .
62 Turshen, Meredith, Op.cit., p. 17.
63 Shorter, Edward, « On writing the history of rape», Signs, Vol.3. No.2 Hiver 1977, p. 471.
64 Carey, Henry F. « Women and Peace and Security: The politics of implementing gender
sensitivity norms in peacekeeping» dans Olsson, Louise et Tryggestad, Torunn L., Op.cit, p. 81.
65 Stiglmayer, Alexandra, Mass rape: the war against women in Bosnia-Herzegovina, University of
Nebraska Press, Lincoln, 1994, p. 57.