Le dernier voyage du Karl Marx
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© H.J. Krysmanski – Proposition <strong>Marx</strong>-Comic – 1.1.2007 7<br />
Vera accompagne <strong>Marx</strong> dans ses promenades à travers Alger.<br />
Quand ils flânent à travers les bazars de la Casbah, <strong>Marx</strong> a le<br />
sentiment d’être oisif, de trahir sa cause, et il se confie à Vera. Il<br />
y a dans son bureau de Londres tant et tant de documents, de<br />
manuscrits à moitié achevés, de notes prises pour les volumes<br />
deux et trois <strong>du</strong> «Capital» - et encore même pour un quatrième<br />
volume. Vera ne comprend par le grand homme. Elle a lu chez<br />
Bebel tout le mérite qui d’ores et déjà lui revient. Et sa sœur de<br />
Dessau, apprenant qu’elle a rencontré le célèbre <strong>Marx</strong>, a été<br />
dans tous ses états à la lecture de sa lettre. Quand <strong>Marx</strong> se<br />
lamente de tout ce qui lui reste à faire, elle lui répond<br />
sentencieusement: «Quoiqu’on fasse dans la vie, on ne sera<br />
jamais satisfait; là-dessus, Dieu et le Diable seront bien toujours<br />
d’accord.»<br />
Quoiqu’il en soit, <strong>Marx</strong> n’arrive pas à maîtriser ses sentiments de<br />
culpabilité, des sentiments qui sont loin d’être diffus: Il se languit<br />
vraiment de son cabinet de travail, le centre de son univers. Et il<br />
se languit de son ami Engels. Dans sa chambre se trouvent plusieurs projets de lettres à<br />
Engels qu’il n’enverra jamais, estimant que même pour son ami le plus proche, ses lettres<br />
seraient trop personnelles.<br />
Lors d’une promenade en bor<strong>du</strong>re de la Casbah,<br />
<strong>Marx</strong> et Vera rencontrent un indivi<strong>du</strong> au visage<br />
émacié, barbu, peintre de son état, la quarantaine<br />
environ. Sous son parasol, il a peint en quelques<br />
rapides coups de pinceau sur son petit chevalet un<br />
escalier qui monte le long de la colline. <strong>Marx</strong> et<br />
Auguste Renoir se défigurent. Peut<br />
être ont-ils aussi échangé quelques<br />
paroles sans importance. Mais<br />
aucun des deux n’apprendra jamais<br />
qui il a, ce jour-là, rencontré.<br />
Mais <strong>Marx</strong> entreprend également<br />
des randonnées avec les autres<br />
hôtes de la pension: »Hier à une<br />
heure de l’après-midi, nous sommes descen<strong>du</strong>s à<br />
Mustapha inférieur d’où le tramway nous a amenés<br />
au Jardin Hamma ou Jardin d’Essai qui sert de<br />
Promenade publique, avec, à l’occasion, des<br />
concerts de musique militaire, et qui est utilisé comme pépinière, pour faire pousser et<br />
propager des végétaux indigènes, enfin pour des expériences botaniques scientifiques et<br />
comme jardin d’acclimatation.“ 4 Madame Casthelaz demande à <strong>Marx</strong> qui, dans sa conception<br />
de l’Etat, sera amené à effectuer les basses besognes, et elle ajoute: «Je ne peux pas vous<br />
imaginer dans un monde ayant été nivelé par le bas, car vous avez sans conteste certains<br />
goûts et attitudes que l’on attribue par ailleurs à l’aristocratie.» - «Moi non plus», lui répond<br />
<strong>Marx</strong>. «Mais ces temps arriveront, mais nous ne seront plus de ce monde.» 5<br />
4 <strong>Marx</strong> à Laura, 13/14 Avril 1882<br />
5 Franziska Kugelmann, dans: Mohr und General, p. 259