Le domaine public maritime de Dakar - Aide Transparence

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10.04.2013 Views

Photo J. H. Sy Le domaine public maritime de Dakar : élites, pouvoir et impunité sous la direction de Jacques Habib Sy, Ph.D Par Jacques Habib Sy, Mamadou Aliou Diallo et Papa Samba Kane Aide Transparence Une ONG régionale d’analyse des politiques économiques et sociales, au service des peuples africains Route de l’Aéroport Près de l’Agence de Voyages Relax * BP 5409 * Dakar-Fann Tel : 221 33 8203660 * Site web: http://www.aidtransparency.org

Photo J. H. Sy<br />

<strong>Le</strong> <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>Dakar</strong> : élites, pouvoir et<br />

impunité<br />

sous la direction <strong>de</strong> Jacques Habib Sy, Ph.D<br />

Par Jacques Habib Sy, Mamadou Aliou Diallo et<br />

Papa Samba Kane<br />

Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong><br />

Une ONG régionale d’analyse <strong>de</strong>s politiques économiques et<br />

sociales, au service <strong>de</strong>s peuples africains<br />

Route <strong>de</strong> l’Aéroport Près <strong>de</strong> l’Agence <strong>de</strong> Voyages Relax * BP 5409 * <strong>Dakar</strong>-Fann<br />

Tel : 221 33 8203660 * Site web: http://www.aidtransparency.org


MAMADOU ALIOU DIALLO<br />

LISTE DES AUTEURS<br />

Specialiste <strong>de</strong> gestion du contentieux aérien et <strong>maritime</strong> et Charge <strong>de</strong> cours <strong>de</strong> droit <strong>public</strong> a<br />

la Faculte <strong>de</strong> Droit <strong>de</strong> l’Universite Cheikh Anta Diop. Titulaire d’un DEA <strong>de</strong> gestion intégrée<br />

<strong>de</strong>s zones côtières et <strong>de</strong>s petites iles et d’un DEA en droit <strong>public</strong>. Auteur <strong>de</strong> nombreuses<br />

<strong>public</strong>ations sur différents aspects du droit <strong>public</strong>.<br />

PAPA SAMBA KANE<br />

Reporter et chroniqueur au « Politicien ». Membre fondateur du « Cafard Libéré ». Grand<br />

reporter, rédacteur en chef, puis Directeur <strong>de</strong> la <strong>public</strong>ation et éditeur <strong>de</strong> plusieurs journaux<br />

quotidiens et périodiques. Auteur <strong>de</strong> centaines d’articles d’investigation et d’ouvrages dont<br />

« <strong>Le</strong>s années <strong>de</strong> braise/ L'envol d'un aigle (portrait satirique d'un prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République)<br />

(1992), « Mémoire corrective (recueil <strong>de</strong> portraits publiés au « Cafard Libéré ») et « Casinos<br />

et machines à sous au Sénégal ; le poker menteur <strong>de</strong>s hommes politiques » (2006).<br />

JACQUES HABIB SY<br />

Titulaire d’un Ph.D en Sciences <strong>de</strong> la Communication <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Howard<br />

(Washington, D.C.), d’une Maîtrise en Communications <strong>de</strong> Masse et Sciences <strong>de</strong><br />

l’Information <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Paris II, Sorbonne et d’un Diplôme <strong>de</strong> Journalisme du Centre<br />

d’Etu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s Sciences et Techniques <strong>de</strong> l’Information. Professeur associé dans plusieurs<br />

universités nord américaines et a dirigé <strong>de</strong>s thèses <strong>de</strong> mémoire et <strong>de</strong> doctorat. Journaliste,<br />

gestionnaire d’agence <strong>de</strong> presse et titulaire <strong>de</strong> plusieurs postes <strong>de</strong> direction et <strong>de</strong> gouvernance<br />

stratégique et programmatique dans <strong>de</strong>s agences régionales africaines, <strong>de</strong>s organisations<br />

internationales et <strong>de</strong>s organismes interétatiques. A participé a l’élaboration et la mise en<br />

œuvre <strong>de</strong> plusieurs initiatives d’intégration régionale et <strong>de</strong> promotion <strong>de</strong> la paix en Afrique.<br />

Membre <strong>de</strong> plusieurs organisations internationales <strong>de</strong> recherche en communication et<br />

expérience décennale en administration <strong>de</strong> la recherche scientifique et technologique aux<br />

plans africain et global. Présentement Directeur d’Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong>, une ONG panafricaine<br />

spécialisée dans l’analyse <strong>de</strong>s politiques économiques et sociales et <strong>de</strong> la gouvernance.<br />

Coordonateur <strong>de</strong> l’initiative africaine <strong>de</strong> protection et <strong>de</strong> promotion <strong>de</strong>s manuscrits anciens.<br />

Auteur <strong>de</strong> plusieurs ouvrages et articles scientifiques.<br />

Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> tient à remercier les enquêteurs <strong>de</strong> terrain et plusieurs autres<br />

techniciens ou ingénieurs qui ont participé à la réalisation <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> dans <strong>de</strong>s délais<br />

très courts. <strong>Le</strong>ur i<strong>de</strong>ntité n’a pas été dévoilée pour éviter <strong>de</strong> leur porter préjudice dans le<br />

travail permanent <strong>de</strong> recueil et <strong>de</strong> déconstruction <strong>de</strong>s faits liés à la gouvernance<br />

démocratique au Sénégal qu’ils mènent <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années.


Amp Aire marine protégée<br />

LIST DES ACRONYMES<br />

Armp Agence pour la régulation <strong>de</strong>s marchés <strong>public</strong>s<br />

Anoci Agence nationale <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong> la conférence islamique<br />

Apix Agence pour la promotion <strong>de</strong>s investissements<br />

Asecna Agence pour la sécurité <strong>de</strong> la navigation aérienne<br />

Cereeq Centre expérimental <strong>de</strong> recherches et d’étu<strong>de</strong>s pour l’équipement<br />

C<strong>de</strong> Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’eau<br />

C<strong>de</strong> Co<strong>de</strong> du <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat<br />

Crd Comité <strong>de</strong> règlement <strong>de</strong>s différends<br />

Dna Deoxyribo Nucleic Acid<br />

Dpm Domaine <strong>public</strong> <strong>maritime</strong><br />

E.U. Etats-Unis<br />

Ifan Institut fondamental d’Afrique noire<br />

Oci Organisation <strong>de</strong> la conférence islamique<br />

Rdc République démocratique du Congo<br />

Sicap Société immobilière du Cap Vert<br />

Sapco Société d’aménagement <strong>de</strong> la petite côte<br />

Uemoa Union économique et monétaire ouest africaine<br />

Unesco Organisation <strong>de</strong>s Nations Unies pour l’éducation, les sciences et la culture<br />

Uicn Union Internationale <strong>de</strong> Conservation <strong>de</strong> la Nature


© Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> – Aid Transparency<br />

Cette étu<strong>de</strong> peut être reproduite avec la permission expresse d’Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong>. Tous<br />

droits <strong>de</strong> propriété intellectuelle et <strong>de</strong> reproduction et <strong>de</strong> stockage sous quelque forme<br />

que ce soit réservés.<br />

Cette étu<strong>de</strong> a été rendue possible grâce à une subvention <strong>de</strong> Open Society Initiative in West<br />

Africa dans le cadre du programme d’Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> sur la <strong>Transparence</strong> Budgétaire en<br />

Afrique <strong>de</strong> l’Ouest. Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> remercie sincèrement OSIWA <strong>de</strong> son assistance<br />

généreuse.


LE DOMAINE PUBLIC MARITIME DE DAKAR :<br />

ELITES, POUVOIR ET IMPUNITE<br />

Une enquête <strong>de</strong> terrain d’Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong><br />

Sous la direction <strong>de</strong> Jacques Habib Sy


Table <strong>de</strong>s matières<br />

Avant propos 8<br />

Chapitre 1 : Introduction 10<br />

Chapitre 2 : Evolution du Dpm <strong>de</strong> la presqu’ile du Cap Vert 17<br />

Chapitre 3 : les chantiers <strong>de</strong> l’Anoci 32<br />

Chapitre 4 : Regards croisés <strong>de</strong>s experts sur le Dpm 40<br />

Chapitre 5 : Lignes <strong>de</strong> fracture environnementale dans la prise <strong>de</strong> décision<br />

Publique 44<br />

Chapitre 6 : Gestion juridique du Dpm 49<br />

Chapitre 7 : Analyse géo spatiale et statistique <strong>de</strong>s violations du Dpm 69<br />

Conclusion 89


Avant-propos<br />

L’objectif <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> est d’attirer l’attention générale sur la gravité <strong>de</strong>s assauts répétés que<br />

l’on a fait subir au <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> (Dpm) <strong>de</strong> la presqu’île du Cap-Vert génération<br />

après génération. Nous avons atteint la côte d’alerte <strong>de</strong>puis belle lurette. C’est pourquoi il<br />

était important qu’un exercice empirique, certes limité, se propose d’évaluer la profon<strong>de</strong>ur du<br />

mal et <strong>de</strong>s pistes <strong>de</strong> réflexion qui ne sont qu’un point <strong>de</strong> départ et non un aboutissement vers<br />

l’absolutisme administratif si caractéristique <strong>de</strong> la chefferie d’Etat sénégalaise.<br />

L’étu<strong>de</strong> a été menée au pas <strong>de</strong> charge, malgré une modicité <strong>de</strong> moyens financiers sans<br />

commune mesure avec les exigences logistiques et <strong>de</strong> pluridisciplinarité requis en la matière.<br />

Grâce à une équipe réduite composée d’un sociologue, d’un journaliste, d’un juriste et <strong>de</strong><br />

plusieurs enquêteurs chevronnés <strong>de</strong> terrain, nous avons pu observer tout le littoral <strong>de</strong> la<br />

presqu’île en l’espace <strong>de</strong> quatre mois et nous entretenir avec une kyrielle <strong>de</strong> personnes<br />

ressources et d’institutions, les unes consentantes, les autres réticentes voire défiantes. Nous<br />

ne nous sommes laissés gui<strong>de</strong>r que par la nécessité impérative <strong>de</strong> coller aux faits<br />

surdéterminants, <strong>de</strong> nous en tenir aux conclusions forcément limitées que nous permettent<br />

pour l’instant l’analyse <strong>de</strong>s données recueillies et <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s voies alternatives qui<br />

puissent tirer le Sénégal et sa fabuleuse presqu’île <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> laisser-aller et <strong>de</strong> laisser-faire<br />

qui l’ont transformée en quelques décennies en une aire marine agressée, en <strong>de</strong>rnier ressort,<br />

par l’égoïsme et la boulimie <strong>de</strong>structrice <strong>de</strong>s élites financières, politiques, intellectuelles et<br />

religieuses.<br />

Contrairement à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>ntes, souvent parcellaires et incomplètes, cette <strong>de</strong>rnière a<br />

procédé au relevé minutieux <strong>de</strong>s cas avérés <strong>de</strong> violations du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong>. <strong>Le</strong>s<br />

dysfonctionnements ainsi observés ont invariablement conduit quelque fonctionnaire à<br />

toujours fermer les yeux moyennant un bakchich à la mesure <strong>de</strong> l’infraction délibérément<br />

commise, ou tel administrateur, promoteur, élu local, agent technique, courtier, autorité<br />

coutumière, agent assermenté et intermédiaire douteux à passer à travers les mailles parfois<br />

trop larges d’un corpus juridique et réglementaire encore inadapté voire aveugle à la tyrannie<br />

d’une petite poignée d’apparatchiks souvent mus par <strong>de</strong>s instincts mal maîtrisés<br />

d’accumulation indue <strong>de</strong>s richesses foncières publiques ou <strong>de</strong> revenus illicites.<br />

Cette étu<strong>de</strong> ne participe donc pas <strong>de</strong> la coquetterie intellectuelle. Elle répond à une nécessité<br />

<strong>de</strong> l’heure. <strong>Le</strong> réformateur sénégalais, et plus particulièrement les gouvernements successifs,<br />

se sont engagés dans une série d’actions et ont posé <strong>de</strong>s actes sur lesquels nous avons cru<br />

<strong>de</strong>voir poser un regard luci<strong>de</strong>, celui <strong>de</strong> l’observateur impartial dont la distanciation avec<br />

l’objet même <strong>de</strong> son sujet, lui restitue la plénitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’indépendance d’esprit face à la<br />

réification du vol comme moyen principal d’accumulation <strong>de</strong>s ressources foncières publiques.<br />

Comme dans toutes les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> ce genre sur la gouvernance dans le contexte d’un système<br />

étatique entièrement concentré entre les mains d’un seul homme, tous les chemins mènent<br />

irrémédiablement au chef <strong>de</strong> l’Etat et à ses collaborateurs les plus directs. Il n’est pas facile <strong>de</strong><br />

disséquer les véritables mobiles qui instruisent la prise <strong>de</strong> décision dans le secret <strong>de</strong>s<br />

délibérations menées sous l’impulsion et l’autorité directes ou indirectes du premier magistrat<br />

<strong>de</strong> la nation. Mais, il n’est pas difficile <strong>de</strong> reconstituer le puzzle <strong>de</strong> contradictions et<br />

d’i<strong>de</strong>ntifier le fil conducteur <strong>de</strong>s décisions relatives aux violations du Dpm. Comme une sorte<br />

<strong>de</strong> DNA, les empreintes <strong>de</strong> ces violations sont inaltérables et laissent la nature et le volume


<strong>de</strong>s constructions entreprises sur le Dpm livrer les secrets <strong>de</strong>s crimes commis sur le Dpm<br />

contre la collectivité nationale.<br />

Nous n’avons pas hésités à i<strong>de</strong>ntifier, par <strong>de</strong>s enquêtes <strong>de</strong> terrain et <strong>de</strong>s recoupements<br />

minutieux, les propriétaires <strong>de</strong> terrains situés dans le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong>. Pour <strong>de</strong>s<br />

raisons évi<strong>de</strong>ntes, nous n’avons pas cru <strong>de</strong>voir violer le caractère confi<strong>de</strong>ntiel <strong>de</strong> certaines<br />

informations, notamment celles relatives à l’i<strong>de</strong>ntité véritable <strong>de</strong>s personnes incriminées en<br />

matière <strong>de</strong> violation du Dpm. D’abord, pour éviter le brouhaha habituel en pareille<br />

circonstance et qui risque <strong>de</strong> parasiter la véracité <strong>de</strong>s faits et leur caractère presque surréaliste,<br />

par endroits, compte tenu <strong>de</strong> l’énormité <strong>de</strong>s violations et <strong>de</strong> leur caractère criminogène<br />

marqué, avec <strong>de</strong>s conséquences incalculables sur la longue durée. Ensuite, il faudra bien, dans<br />

un second temps, que ceux qui sont responsables <strong>de</strong>s dérives que nous dénonçons ici puisse<br />

répondre <strong>de</strong> leurs actes lorsque la nation en aura saisi le bien-fondé.<br />

A la décharge du Chef <strong>de</strong> l’Etat, nous avons pris bonne note <strong>de</strong> son désir d’avoir <strong>de</strong>s données<br />

aussi exactes que possible sur tous les occupants du littoral atlantique <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> à Saint-Louis,<br />

à travers <strong>de</strong>s enquêtes <strong>de</strong> terrain menées, à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, par la Gendarmerie nationale. Nous<br />

avons également pris compte <strong>de</strong> ce que <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs et non <strong>de</strong>s moindres aient su tirer la<br />

sonnette d’alarme par moments, mais sans être entendus, dans <strong>de</strong>s contextes où le système<br />

politique et économique du moment ne laissait généralement aucune place à <strong>de</strong>s initiatives <strong>de</strong><br />

rupture avec l’ordre ancien d’aménagement du territoire, particulièrement du littoral, à <strong>de</strong>s<br />

fins souvent politiciennes voire clientélistes.<br />

Il appartiendra, en <strong>de</strong>rnier ressort, au grand <strong>public</strong>, aux citoyens et citoyennes <strong>de</strong> ce pays, aux<br />

déci<strong>de</strong>urs encore capables <strong>de</strong> discernement d’agir ici et maintenant sur le processus hyper<br />

centralisé <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> décision publique en matière <strong>de</strong> gestion du Dpm, <strong>de</strong> s’emparer du<br />

contenu <strong>de</strong> ce document, <strong>de</strong> le disséquer, mais surtout d’en transcen<strong>de</strong>r les limites à travers<br />

une action résolue <strong>de</strong> transformation sociale au bénéfice <strong>de</strong> tous.<br />

J.H.S.


Chapitre 1<br />

Introduction<br />

<strong>Le</strong> <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> (Dpm) rend compte <strong>de</strong>s mutations géophysiques et<br />

environnementales qui ont marqué d’une empreinte indélébile à la fois les hommes et les<br />

règnes animaux et végétaux <strong>de</strong> la zone côtière ouest africaine <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s temps immémoriaux.<br />

Cette zone qui fait vivre 6 personnes sur 10, abrite <strong>de</strong>s ressources halieutiques estimées à plus<br />

<strong>de</strong> 400 milliards <strong>de</strong> dollars E.U., <strong>de</strong>s populations riveraines qui vivent <strong>de</strong> la pêche et d’autres<br />

activités génératrices <strong>de</strong> revenus cependant que les Etats y ont édifié une industrie touristique<br />

qui, malgré son caractère relativement vétuste en plusieurs endroits, participe <strong>de</strong> manière<br />

décisive à la croissance et à la création d’emplois.<br />

Tout au long <strong>de</strong> cette côte qui a été le théâtre d’affrontements sanglants entre les populations<br />

autochtones et les hégémonismes européens <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s mercantiliste puis impérialiste, les<br />

Etats nouvellement indépendants ont créés <strong>de</strong>s Aires marines protégées (Amp) 1 pour<br />

préserver <strong>de</strong>s parties névralgiques du pillage effréné <strong>de</strong>s ressources littorales et promouvoir<br />

<strong>de</strong>s stratégies adéquates <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong> maintien d’un équilibre<br />

satisfaisant entre les règnes humains, animaux et végétaux.<br />

Comme le montre la carte # 1 ci-<strong>de</strong>ssous, la côte ouest africaine présente une relative<br />

homogénéité à travers une écorégion que se partagent la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la<br />

Guinée Bissau, la Guinée et le Cap Vert sur une distance <strong>de</strong> 3 200 km à l’intérieur <strong>de</strong> laquelle<br />

cohabitent falaises rocheuses et plages sableuses au nord, vasières à mangroves au sud et<br />

archipel volcanique à l’ouest. L’Uicn suggère trois principaux types d’écosystèmes : le<br />

sénégalo-mauritanien à dominance d’upwelling, le capverdien rocheux insulaire et l’estuarienmangrovien<br />

pour la Guinée et la Guinée Bissau 2 . A cette unité éco systémique vient se<br />

superposer une unité pluriculturelle forgée à travers l’histoire et un même substrat social 3 .<br />

1 <strong>Le</strong>s Amp ont été définies comme les vecteurs <strong>de</strong> protection « <strong>de</strong>s habitats sensibles tels que les herbiers marins<br />

ou les mangroves » et qui « abritent en même temps <strong>de</strong>s populations qui ont développé au fil <strong>de</strong>s siècles, <strong>de</strong>s<br />

valeurs culturelles directement liées à l’environnement, qui s’avèrent précieuses pour la gestion actuelle et future<br />

<strong>de</strong>s Amp. Enfin, les Amp jouent un rôle vital dans la reproduction <strong>de</strong>s ressources côtières et marines, la<br />

conservation <strong>de</strong> la biodiversité à l’échelle nationale, régionale et mondiale et la pérennité <strong>de</strong>s cultures <strong>de</strong>s<br />

sociétés du littoral ». <strong>Le</strong> rapport cité <strong>de</strong> l’UICN ajoute : Parmi les 700 espèces <strong>de</strong> poissons recensées, plusieurs<br />

d’entre elles, et en particulier les espèces pélagiques qui vivent en bancs et en pleine eau, se déplacent le long du<br />

littoral en traversant les frontières. Ainsi, par exemple, les sardinelles et les chinchards, si importants pour la<br />

pêche artisanale et industrielle, effectuent <strong>de</strong>s migrations à travers toute la région, et ce sont les mêmes stocks<br />

qui sont partagés par les pêcheurs <strong>de</strong>s différents pays. De la même façon, oiseaux, tortues et mammifères marins<br />

ont <strong>de</strong>s aires <strong>de</strong> distribution qui dépassent largement les frontières nationales. <strong>Le</strong> suivi par satellite a permis par<br />

exemple <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce le schéma migratoire <strong>de</strong>s tortues marines : les milliers <strong>de</strong> femelles qui viennent<br />

pondre sur les plages sableuses <strong>de</strong> l’archipel <strong>de</strong>s Bijagos ou <strong>de</strong>s îles du CapVert se dirigent par la suite vers la<br />

Gambie, le Sénégal et la Mauritanie, où elles exploitent les milieux côtiers pour reconstituer leurs réserves ». Cf.<br />

UICN, « Stratégie régionale pour les aires marines protégées en Afrique <strong>de</strong> l’Ouest »,<br />

http://www.uicn.fr/IMG/pdf/STRATEGIE_REGIONALE_AMP_AFR_OUEST.pdf<br />

2 Voir document <strong>de</strong> l’UICN cité ci-<strong>de</strong>ssus.<br />

3 Voir à cet égard les travaux <strong>de</strong> Cheikh Anta Diop dans son Unité culturelle <strong>de</strong> l’Afrique noire (Paris : Présence<br />

Africaine) et Boubacar Barry à travers son plaidoyer sur l’unité <strong>de</strong> l’ensemble sénégambien s’étirant <strong>de</strong> la<br />

Mauritanie aux confins <strong>de</strong> la Guinée.


Mais le littoral ouest africain est avant tout un fabuleux conglomérat d’habitats dépositaires<br />

d’une biodiversité marine et biologique à la singularité marquée par les récifs coralliens du<br />

Cap Vert, les rarissimes phoques moines, <strong>de</strong>s cétacés <strong>de</strong> toutes sortes comprenant <strong>de</strong>s<br />

dauphins, <strong>de</strong>s orques, <strong>de</strong>s baleines, <strong>de</strong>s lamantins, <strong>de</strong>s hippopotames « marins», <strong>de</strong>s tortues<br />

marines menacées d’extinction, et les plus gran<strong>de</strong>s concentrations mondiales d’oiseaux d’eau,<br />

sans compter <strong>de</strong>s espèces particulières d’algues très riches en protéines, etc 4 .<br />

Carte # 1 : aires marines protégées d’Afrique <strong>de</strong> l’Ouest<br />

Source : UICN, « Stratégie régionale pour les aires marines protégées en<br />

Afrique <strong>de</strong> l’Ouest », sans date ni lieu.<br />

C’est cette gran<strong>de</strong> diversité faunistique et florale qui est menacée par la pêche industrielle<br />

étrangère surtout qui a pillé outrageusement les ressources halieutiques <strong>de</strong>s pays côtiers mais<br />

aussi par l’absence <strong>de</strong> repos biologique <strong>de</strong>s espèces menacées (la Mauritanie faisant figure<br />

d’exception en ce <strong>domaine</strong>) et par la surexploitation économique qui en résulte. Il y a moins<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux décennies, <strong>de</strong> nombreuses ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong> requins, <strong>de</strong> thons et <strong>de</strong> dauphins pouvaient être<br />

très facilement i<strong>de</strong>ntifiées à partir <strong>de</strong>s côtes (voir figure # 1) 5 .<br />

4 Ibid., p. 13.<br />

5 Sur cette question voir l’étu<strong>de</strong> édifiante <strong>de</strong> R. Duguy, Contribution à l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mammifères <strong>de</strong> la côte nordouest<br />

africaine, Rev. Trav. Inst. Pêches marit., 39 (3), pp. 321-332. Il convient, par ailleurs, <strong>de</strong> noter qu’il y a<br />

une baisse remarquable <strong>de</strong>s prises démersales notamment, au point où l’approvisionnement du marché local en<br />

poissons <strong>de</strong> qualité et les activités d’exportation <strong>de</strong>s ressources halieutiques ont chuté <strong>de</strong> façon drastique, ce qui<br />

prive le Sénégal <strong>de</strong> sources importantes <strong>de</strong> <strong>de</strong>vises et <strong>de</strong> la contribution significative du secteur <strong>de</strong> la pêche au<br />

PIB total (2,5 %) et primaire (11 %). Cf. Direction <strong>de</strong>s pêches <strong>maritime</strong>s, « Plan stratégique national


Figure # 1 : Dauphins s’adonnant à leur sport favori au large du littoral yoffois<br />

La presqu’île du Cap Vert abrite une large gamme d’habitats et <strong>de</strong> paysages<br />

morphopédologiques qui comprennent <strong>de</strong>s dunes littorales avec steppe arbustive, <strong>de</strong>s dunes<br />

intérieures avec steppe arborée, la zone <strong>de</strong>s Niayes avec ses dépressions inter dunaires et sa<br />

ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> filaos qui s’étire du Lac Rose à Kambéréén, la forêt classée <strong>de</strong> MBaw et le plateau<br />

<strong>de</strong> Barñi, avec sa forêt <strong>de</strong> baobabs 6 (voir carte # 2 ci-<strong>de</strong>ssous). Parmi les facteurs<br />

environnementaux adverses figure la pression démographique très vive qui pèse sur la ville<br />

(environ ¼ <strong>de</strong> la population totale <strong>de</strong> 12 millions d’habitants vit à Dakaar). Des sources<br />

prédisent que si ces tendances haussières ne sont pas corrigées, il est probable qu’à l’horizon<br />

2015, 6 Sénégalais sur 10 habiteront la région <strong>de</strong> Dakaar 7 . Il y a une corrélation étroite entre<br />

l’intensité <strong>de</strong>s assauts subis par le littoral océanique capverdien et la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population par<br />

département comme le montre la carte # 3 relative à l’évolution démographique en 2002<br />

(Dakaar : plus <strong>de</strong> 955 000 habitants ; Gédiawaay : plus <strong>de</strong> 258 000 habitants ; Pikin : plus <strong>de</strong><br />

768 000 habitants ; Rufisque : environ 284 000 habitants). Comme le souligne une récente<br />

étu<strong>de</strong> conduite sous la direction du Professeur Papa Goumbo Lo, le versant littoral occi<strong>de</strong>ntal<br />

se subdivise en plusieurs faça<strong>de</strong>s qui appartiennent à 7 régions administratives et 17<br />

départements administratifs (Saint-Louis, Dagana, Luga, Kébémer, Tiwawan, Tièss, MBuur,<br />

Dakaar, Pikin, Gédiawaay, Rufisque, Kawlak, Fatik, Fundiuñ, Sigicoor, Biñona et Usuy) 8 .<br />

Cette responsabilité éclatée <strong>de</strong> la gestion du littoral marin implique un niveau <strong>de</strong> coordination<br />

croisée et une fluidité <strong>de</strong> la concertation administrative et <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> décision au sujet<br />

duquel l’Etat du Sénégal n’a pas encore réagi avec la vigueur et l’efficacité requises.<br />

C’est dans le département <strong>de</strong> Dakaar qu’on observe les violations les plus flagrantes et les<br />

plus intenses du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong>. <strong>Le</strong>s raisons <strong>de</strong> cette fréquence alarmante <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong><br />

violation du Dpm à <strong>Dakar</strong> sont nombreuses. Au facteur démographique, il convient d’ajouter<br />

le fait que la quasi-totalité du tissu industriel, du réseau <strong>de</strong>s services, <strong>de</strong>s structures<br />

administratives, <strong>de</strong>s grands collèges, lycées et centres hospitaliers, sans compter le port en<br />

eaux profon<strong>de</strong>s, sont concentrés dans le département <strong>de</strong> Dakaar, ce qui occasionne un<br />

mouvement pendulaire <strong>de</strong> la mobilité urbaine entre le centre ville et les zones périurbaines et<br />

périphériques. Malgré le niveau excessif <strong>de</strong> ressources dévolues à l’amélioration <strong>de</strong> la<br />

d’immersion <strong>de</strong> récifs artificiels », <strong>Dakar</strong>, Juin 2006. Voir également l’étu<strong>de</strong> plus récente du ministère <strong>de</strong><br />

l’Environnement du Sénégal in Ministère <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong> la Protection <strong>de</strong> la Nature, « Rapport national<br />

sur l’état <strong>de</strong> l’environnement marin et côtier », <strong>Dakar</strong>, sans date, p. 14.<br />

6 APIX, « Projet d’autoroute <strong>Dakar</strong>-Diamniado ; évaluation environnementale et sociale du projet d’autoroute<br />

<strong>Dakar</strong>-Diamniado ; rapport final », <strong>Dakar</strong>, Juillet 2006, pp. 50-51.<br />

7 Ibid., p. 70. Sur l’évolution démographique et infrastructurelle <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, voir l’étu<strong>de</strong> détaillée d’Assane Seck,<br />

<strong>Dakar</strong>, métropole ouest-africaine, <strong>Dakar</strong> : IFAN, 1970.<br />

8 In Ministère <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong>s Etablissements Classés, « Formulation d’un programme national<br />

intégré <strong>de</strong> lutte contre l’érosion côtière ; résumé du rapport final », sous la direction du Professeur Papa Goumbo<br />

Lo, Directeur général du Centre Expérimental <strong>de</strong> Recherches et d’Etu<strong>de</strong>s pour l’Equipement (CEREEQ), <strong>Dakar</strong>,<br />

Avril 2008.


mobilité urbaine, notamment dans le cadre <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> l’Anoci, la tendance négative n’a<br />

pas été inversée puisque l’essentiel <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> production industrielle, <strong>de</strong> provision <strong>de</strong><br />

services, <strong>de</strong> commerce, <strong>de</strong> sante hospitalière, d’éducation et d’administration restent<br />

concentrées à Dakaar.<br />

A ces tendances lour<strong>de</strong>s, s’ajoute le facteur surdéterminant <strong>de</strong>s antagonismes <strong>de</strong> classe entre<br />

les élites politiques détentrices du pouvoir économique et d’Etat et la gran<strong>de</strong> masse <strong>de</strong>s<br />

populations pauvres<br />

Carte # 2 : écosystèmes marins et côtiers du Sénégal<br />

Source : Ministère <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong> la Protection <strong>de</strong> la Nature, « Rapport national sur<br />

l’état <strong>de</strong> l’environnement marin et côtier », <strong>Dakar</strong>, sans date, p. 14.


Carte # 3 : <strong>de</strong>nsité du peuplement humain dans la presqu’île du Cap Vert<br />

Source : APIX, « Projet d’autoroute <strong>Dakar</strong>-Diamniado ; évaluation environnementale et sociale du<br />

projet d’autoroute <strong>Dakar</strong>-Diamniado ; rapport final », <strong>Dakar</strong>, Juillet 2006<br />

et travailleuses surexploitées à travers les politiques économiques et sociales en cours 9 . <strong>Le</strong>s<br />

différents directoires politiques qui se sont succédés <strong>de</strong>puis 1960 à la tête <strong>de</strong> l’Etat sénégalais,<br />

n’ont pas manqué d’accaparer les ressources foncières du littoral océanique à leur seul profit<br />

en se taillant <strong>de</strong>s <strong>domaine</strong>s en moyenne 10 à 20 fois supérieurs en superficie aux lotissements<br />

<strong>de</strong> 75 à 150 mètres carrés observés dans les zones périurbaines à très haute <strong>de</strong>nsité humaine.<br />

La commune d’arrondissement <strong>de</strong>s Almadies, à l’exception <strong>de</strong> l’enclave historique <strong>de</strong> Ngoor,<br />

rend compte <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité humaine la moins élevée dans la zone étudiée (en 2002, la Direction<br />

<strong>de</strong> la prévision statistique fixe le nombre d’habitants au km2 <strong>de</strong>s zones dans l’emprise du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> à 2 343 à NGoor et, par contraste, à 21 701 dans la commune <strong>de</strong><br />

Kambéréén et 35 538 dans celle <strong>de</strong>s Parcelles Assainies) 10 . Ces disparités ne sont pas sans<br />

conséquence sur la pression qu’exercent les communautés et les groupes socioprofessionnels<br />

sur les équilibres socio environnementaux <strong>de</strong>s zones concernées.<br />

La quasi-totalité <strong>de</strong>s bâtiments visibles tout au long du littoral et plus particulièrement du<br />

Dpm ont été construits à partir du sable marin extrait <strong>de</strong>s plages ou <strong>de</strong> leur voisinage<br />

9 Cf. Jacques Habib Sy, Pauvreté et hégémonismes ; les sociétés civiles africaines face aux ajustements<br />

structurels <strong>de</strong> type nouveau, <strong>Dakar</strong> : Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong>, 2002, 333 pages.<br />

10 Cf., APIX, doc. cité, p. 72.


immédiat, ce qui a aggravé l’emprise <strong>de</strong> l’érosion sur l’ensemble <strong>de</strong>s côtes sénégalaises. Une<br />

étu<strong>de</strong> récente <strong>de</strong> la Baie <strong>de</strong> Gorée montre l’importance du mouvement <strong>de</strong> recul du trait <strong>de</strong> côte<br />

et le caractère décisif du facteur humain dans l’érosion littorale ainsi notée. L’étu<strong>de</strong> conclut<br />

l’évaluation <strong>de</strong> l’impact du facteur humain en ces termes :<br />

<strong>Le</strong>s hommes interviennent dans le système <strong>de</strong> façon chronique, sans<br />

lui permettre <strong>de</strong> réagir aux déséquilibres qu’ils déclenchent. <strong>Le</strong>s<br />

différentes activités (extractions massives <strong>de</strong> sables et <strong>de</strong> coquilles)<br />

et les constructions humaines (habitations trop près du rivage)<br />

interfèrent avec les processus côtiers, notamment en réduisant les<br />

apports sédimentaires au littoral et peut-être en modifiant les<br />

directions <strong>de</strong>s houles. <strong>Le</strong> facteur humain contribue à l’amplification<br />

<strong>de</strong>s phénomènes d’érosion côtière, augmentant à la fois l’aléa (recul<br />

du trait <strong>de</strong> côte) et l’enjeu (donc la vulnérabilité). <strong>Le</strong> risque connaît<br />

donc une croissance exponentielle basée sur la surenchère <strong>de</strong>s<br />

ouvrages <strong>de</strong> défense face à l’agressivité croissante <strong>de</strong>s agents<br />

naturels 11 .<br />

11<br />

Cf. Karine Guerin, « Dynamique du littoral sableux <strong>de</strong> Tiaroyes à Bargny(Baie <strong>de</strong> Gorée – Sénégal) »,<br />

Mémoire <strong>de</strong> Maîtrise, Université <strong>de</strong> Paris I, juin 2003.<br />

Ce phénomène <strong>de</strong> dégradation avancée du littoral et <strong>de</strong> ses causes a également été pris en charge à l’occasion du<br />

bilan présenté dans le cadre du Sommet <strong>de</strong> Johannesburg sur l’Agenda 21. <strong>Le</strong>s auteurs <strong>de</strong> l’évaluation<br />

soulignent, en effet, que « les <strong>de</strong>ux principales activités économiques côtières que constituent la pêche et le<br />

tourisme, dépen<strong>de</strong>nt étroitement <strong>de</strong> la préservation <strong>de</strong>s milieux naturels. On sait que les côtes sableuses tout<br />

comme les vasières à mangrove sont <strong>de</strong>s milieux fragiles. On sait également que dans les portions littorales les<br />

plus riches tout particulièrement la Petite Côte, le Saloum et la Casamance la <strong>de</strong>nsification <strong>de</strong> la population et<br />

<strong>de</strong>s activités consommatrices <strong>de</strong> ressources et d’espaces naturels qui l‘accompagne, ont <strong>de</strong>s effets induits<br />

préjudiciables à l’environnement ».<br />

L’étu<strong>de</strong> citée décline ainsi qu’il suit la gamme d’atteintes aux équilibres écologiques et environnementaux :<br />

pollutions industrielles et urbaines <strong>de</strong>s eaux côtières à <strong>Dakar</strong>, à Saint-Louis mais aussi tout au long <strong>de</strong> la Petite<br />

Côte, première zone <strong>de</strong> production ostréicole et halieutique du pays ; pollution <strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> surface et <strong>de</strong>s nappes<br />

phréatiques sur toute la presqu’île du Cap Vert mais aussi dans toutes les concentrations urbaines (Saint-Louis,<br />

Kayaar, Rufisque, etc) ; extraction abusive <strong>de</strong> sable marin dont l’importance <strong>de</strong>s prélèvements est <strong>de</strong>venue<br />

supérieure aux apports par la mer ; modifications et recul du trait <strong>de</strong> côte, amincissement <strong>de</strong>s plages littorales,<br />

etc. ; exploitation abusive <strong>de</strong>s massifs forestiers côtiers et déforestation généralisée sur l’ensemble <strong>de</strong> la Petite<br />

Côte ; exploitation abusive <strong>de</strong>s forêts <strong>de</strong> mangroves dans le Saloum et en Casamance ; multiplication <strong>de</strong>s dépôts<br />

d’ordure non contrôlés, tout particulièrement sur les bordures littorales et à proximité <strong>de</strong>s principaux centres <strong>de</strong><br />

pêche et <strong>de</strong> transformation du poisson ; constructions privatives sur la bordure littorale qui constitue pourtant un<br />

<strong>domaine</strong> imprescriptible <strong>de</strong> l’Etat sur 100 m <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur à partir du trait <strong>de</strong> côte, et modifications<br />

subséquentes <strong>de</strong>s dynamiques côtières (construction <strong>de</strong> murs, d’épis, d’installations portuaires maçonnées) ;<br />

utilisation et <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> sites protégés tels que les amas coquilliers du Saloum à <strong>de</strong>s fins industrielles<br />

(production <strong>de</strong> chaux, <strong>de</strong> ballast) ; fragmentation et <strong>de</strong>struction d’écosystèmes littoraux qui sont cause <strong>de</strong> la<br />

raréfaction, voire <strong>de</strong> la disparition <strong>de</strong> la biodiversité végétale et animale, tout particulièrement dans le <strong>domaine</strong><br />

<strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> faune ; en milieux marin et estuarien, les ressources vivantes qui ont contribué au développement<br />

économique du Sénégal sont aujourd’hui menacées <strong>de</strong> raréfaction, voire <strong>de</strong> disparition, du fait d’exploitations<br />

excessives ou inadaptées. Atteintes aux espèces par le non respect <strong>de</strong> la réglementation en vigueur : capture<br />

d’individus trop petits ; pêche avec <strong>de</strong>s moyens inappropriés (mailles on réglementaires, explosif, chasse sousmarine<br />

avec bouteilles, utilisation <strong>de</strong>s feuilles <strong>de</strong> palétuviers comme leurres par la pêche aux poulpes, confection<br />

<strong>de</strong> perches pour la pêche à partir <strong>de</strong> palétuviers…) ; gaspillage <strong>de</strong>s captures (rejet <strong>de</strong>s espèces <strong>de</strong> faible valeur<br />

marchan<strong>de</strong>) ; exploitation excessive <strong>de</strong>s mollusques marins (cymbium) et estuaires (arches, huîtres) ;<br />

introduction d’espèces allochtones (crassostrea gigas) ; exploitation industrielle illégale (bateaux pirates) ;<br />

atteintes aux milieux benthiques par chalutage sur <strong>de</strong>s fonds interdits ; altération <strong>de</strong>s milieux côtiers par rejet <strong>de</strong><br />

sous-produits <strong>de</strong> transformation (écailles, coquille, poissons non commercialisables…). En 1997, à la suite d’un<br />

ensemble d’investigations menées sur l’ensemble du territoire sénégalais, un bilan effectué par le Ministère <strong>de</strong><br />

l’Economie, <strong>de</strong>s Finances et du Plan, constatait en matière <strong>de</strong> protection <strong>de</strong>s eaux et <strong>de</strong> conservation du littoral


Une évaluation plus récente <strong>de</strong>s causes et conséquences <strong>de</strong> l’érosion côtière indique les<br />

facteurs naturels et anthropiques suivants : « élévation du niveau marin, déficit sédimentaire,<br />

instabilité naturelle <strong>de</strong>s pentes, ruissellement superficiel, construction d’ouvrages<br />

perpendiculaires à la côte, construction <strong>de</strong> bâtiments sur les plages, prélèvements <strong>de</strong> sable <strong>de</strong><br />

plage ». Toutes les évaluations scientifiques convergent vers la même conclusion quant aux<br />

causes premières <strong>de</strong> l’érosion du littoral marin : les causes anthropiques, c’est-à-dire d’origine<br />

humaine priment, suivies par l’élévation du niveau marin (20 % <strong>de</strong> l’érosion côtière) 12 . <strong>Le</strong>s<br />

effets négatifs sont nombreux et inquiétants : disparition à terme <strong>de</strong>s plages, constructions et<br />

infrastructures littorales, chutes partielles <strong>de</strong> falaises ou agression <strong>de</strong> zones basses <strong>de</strong>s plages<br />

avec comme conséquence l’abandon <strong>de</strong> villages et sites touristiques, <strong>de</strong>struction <strong>de</strong>s<br />

écosystèmes marins et côtiers. En outre, les effets induits <strong>de</strong>s gaz à effet <strong>de</strong> serre, notamment<br />

le réchauffement climatique pourraient conduire à une élévation accélérée du niveau marin<br />

dans une fourchette comprise entre 2 à 5 fois du niveau actuel 13 . Des simulations géo<br />

climatiques indiquent que, dans ces conditions, le Sénégal perdrait entre 55 et 86 km2 <strong>de</strong><br />

plages cependant que l’aggravation <strong>de</strong> l’érosion côtière qui s’ensuivrait sur 6 000 km2 <strong>de</strong><br />

zones basses estuariennes aboutirait à <strong>de</strong>s inondations dévastatrices qui concerneraient<br />

environ 150 000 habitants. La valeur <strong>de</strong>s pertes ainsi subies par le Sénégal pourrait se situer<br />

entre 500 à 700 milliards <strong>de</strong> dollars EU, soit l’équivalent <strong>de</strong> 12 à 17 % du PNB <strong>de</strong> 1990 14 . En<br />

novembre 2006, lors d’une conférence à Nairobi sur le réchauffement climatique, consacrée<br />

aux risques pour l’Afrique, le Programme <strong>de</strong>s Nations Unies pour l’environnement (Pnue)<br />

lançait un cri d’alarme, prévenant que, dans moins <strong>de</strong> 70 ans, les inondations pourraient<br />

causer la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> 30% <strong>de</strong>s infrastructures côtières en Afrique et provoquer <strong>de</strong>s<br />

déplacements massifs <strong>de</strong> populations 15 .<br />

A elles seules, ces menaces <strong>de</strong>vraient être suffisamment dissuasives pour amener les<br />

déci<strong>de</strong>urs <strong>public</strong>s, l’élite intellectuelle et politique, et la population dans son ensemble à<br />

placer la gestion du Dpm au rang <strong>de</strong> sur priorité nationale voire sous-régionale et régionale.<br />

un nombre impressionnant <strong>de</strong> dysfonctionnements tels qu’« une importante dispersion <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>s<br />

responsabilités administratives en matière <strong>de</strong> gestion et <strong>de</strong> protection <strong>de</strong>s eaux ; une législation et <strong>de</strong>s normes en<br />

<strong>de</strong>çà <strong>de</strong> la nécessité ; <strong>de</strong>s rejets industriels, urbains, et agricoles qui provoquent (…) la contamination <strong>de</strong> certains<br />

puits d’eau potable et l’insalubrité <strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> baigna<strong>de</strong> sur tout le littoral (…) ; <strong>de</strong>s milieux naturels en danger<br />

(érosion <strong>de</strong>s côtes ; dégradation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s lacs côtiers ; fragilisation <strong>de</strong>s estuaires <strong>de</strong>s lagunes et<br />

<strong>de</strong> mangroves) ; (…) ». Ce premier bilan, sans concession pour les actions à entreprendre a permis au<br />

Gouvernement sénégalais d’envisager rapi<strong>de</strong>ment un certain nombre d’actions tant sur le plan juridique que sur<br />

la plan <strong>de</strong> la sensibilisation <strong>de</strong>s populations et <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> préservation, voire <strong>de</strong> réhabilitation ».<br />

In Nations Unies, Sommet <strong>de</strong> Johannesburg 2002, profil du Sénégal, New York : United Nations, 2002, pp. 79-<br />

80.<br />

12 Voir l’étu<strong>de</strong> du Ministère <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong>s Etablissements Classés, « Formulation d’un programme<br />

national intégré <strong>de</strong> lutte contre l’érosion côtière ; résumé du rapport final », sous la direction du Professeur Papa<br />

Goumbo Lo, Directeur général du Centre Expérimental <strong>de</strong> Recherches et d’Etu<strong>de</strong>s pour l’Equipement (Cereeq),<br />

<strong>Dakar</strong>, Avril 2008, p. 8.<br />

13 Ibid., p. 9<br />

14 Ibid., p. 9<br />

15 In Jeune Afrique du 19 au 25 novembre 2006.


Chapitre 2<br />

Evolution du Dpm <strong>de</strong> la presqu’île du Cap Vert<br />

<strong>Le</strong>s parties du littoral concernées par la notion <strong>de</strong> Dpm qui fait partie du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong><br />

naturel <strong>de</strong> l’Etat sont, contrairement aux affirmations souvent avancées, bien décrites par la<br />

loi : « …les rivages <strong>de</strong> la mer couverts et découverts lors <strong>de</strong>s plus faibles marées, ainsi qu’une<br />

zone <strong>de</strong> 100 mètres <strong>de</strong> large à partir <strong>de</strong> la limite atteinte par les plus faibles marées. » (Article<br />

2 <strong>de</strong> la loi n° 76-66 du 2 juillet 1976 portant Co<strong>de</strong> du Domaine <strong>de</strong> l’Etat). Cette définition a<br />

été héritée du droit français qui a lui-même été influencé par la définition que Colbert a donné<br />

<strong>de</strong> cette notion qui appartient à l’un <strong>de</strong>s <strong>domaine</strong>s <strong>de</strong> souveraineté les plus importants <strong>de</strong><br />

l’Etat. Il convient <strong>de</strong> reconnaître que l’évolution environnementale et éco systémique locale et<br />

globale est venue bousculer en quelque sorte les vieux dogmes relatifs aux limites<br />

intrinsèques du Dpm. <strong>Le</strong> lais et le relais sont, en effet, <strong>de</strong>venus <strong>de</strong>s notions difficiles à placer<br />

dans <strong>de</strong>s limites à l’exactitu<strong>de</strong> mathématique compte tenu <strong>de</strong> l’imbrication <strong>de</strong> plus en plus<br />

étroite <strong>de</strong>s facteurs anthropiques et naturels locaux et globaux dans le mouvement <strong>de</strong>s vagues<br />

et l’instabilité subséquente <strong>de</strong>s traits <strong>de</strong> côtes. Une doctrine plus récente suggère que le Dpm<br />

ait comme point <strong>de</strong> départ les routes qui bor<strong>de</strong>nt le littoral lorsqu’elles en épousent le contour<br />

et comme point d’aboutissement le trait <strong>de</strong> côte le plus stable 16 . Dans les zones surplombées<br />

par <strong>de</strong>s falaises plus ou moins hautes, la question reste malgré tout entière compte tenu <strong>de</strong>s<br />

dégradations significatives que peuvent faire encourir à l’évolution environnementale la<br />

construction <strong>de</strong> bâtiments en dur, la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> la circulation automobile et les vibrations ainsi<br />

occasionnées à travers la croûte terrestre adjacente aux corniches et une présence humaine<br />

marquée sur la longue durée.<br />

La délimitation du Dpm participe donc d’une exigence pressante au regard du droit <strong>de</strong> la mer<br />

et <strong>de</strong> la loi sur le Domaine national qui a connu <strong>de</strong>s remises en cause suffisamment sérieuses<br />

pour que le législateur sénégalais ait décidé <strong>de</strong> la revisiter et <strong>de</strong> proposer à la sanction <strong>de</strong><br />

l’Assemblée nationale et du peuple souverain le vote d’une nouvelle loi sur la gestion <strong>de</strong> la<br />

terre et <strong>de</strong>s eaux. Cette question est détaillée dans le chapitre suivant.<br />

A se promener sur le littoral, tout le mon<strong>de</strong> se rendra compte <strong>de</strong> l’occupation massive du Dpm<br />

le long <strong>de</strong>s côtes dans toute la presqu’île du Cap Vert. Ce phénomène s’est accéléré <strong>de</strong> façon<br />

remarquable <strong>de</strong>puis quelques années, et, est lié, à la boulimie foncière qui s’est emparée <strong>de</strong>s<br />

élites politiques, administratives et religieuses <strong>de</strong>puis un <strong>de</strong>mi-siècle.<br />

A partir <strong>de</strong> 2000, avec la chute <strong>de</strong> l’ancien régime et l’arrivée aux affaires du pouvoir libéral,<br />

les nouveaux conquérants du Dpm n’ont pas fait dans la <strong>de</strong>ntelle. Très vite, <strong>de</strong>s projets d’un<br />

gigantisme inapproprié sont sortis <strong>de</strong> terre et ont été imposés à <strong>de</strong>s fins d’ « embellissement »<br />

et <strong>de</strong> préservation <strong>de</strong> la mobilité urbaine, ce casse-tête quotidien <strong>de</strong>s automobilistes dakarois<br />

et <strong>de</strong> sa banlieue surpeuplée. <strong>Le</strong>s anciennes et nouvelles élites politiques et économiques<br />

particulièrement gourman<strong>de</strong>s <strong>de</strong> terres, encouragées dans leur boulimie foncière par un Etat<br />

16<br />

Ce point <strong>de</strong> vue a été avancé par Pierre Atepa Goudiaby, l’architecte conseil du Chef <strong>de</strong> l’Etat, au cours d’un<br />

entretien avec Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong>.


laxiste à souhait, se taillent rapi<strong>de</strong>ment, au cœur même <strong>de</strong>s zones les plus convoitées du Dpm<br />

dakarois, <strong>de</strong>s terrains <strong>de</strong> 1 000 m2 en moyenne et y érigent <strong>de</strong>s villas dignes <strong>de</strong> Saint Tropez<br />

ou <strong>de</strong> Beverley Hill.<br />

Cette ambiance <strong>de</strong> ruée vers l’or brun (le foncier <strong>maritime</strong>) n’est évi<strong>de</strong>mment pas propice au<br />

respect <strong>de</strong>s lois et règlements, et quasiment, toutes les occupations <strong>de</strong> terrains sur le Dpm<br />

occi<strong>de</strong>ntal et oriental sont sujettes à caution, notamment celles faites dans le sillage <strong>de</strong>s<br />

travaux <strong>de</strong> l’Agence nationale <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong> la conférence islamique (Anoci).<br />

Apparemment, <strong>de</strong>s porteurs <strong>de</strong> projets ayant eu du mal, en <strong>de</strong>s circonstances normales, à<br />

trouver les autorisations nécessaires, se sont engouffrés dans la brèche <strong>de</strong>s urgences <strong>de</strong>s<br />

déci<strong>de</strong>urs <strong>public</strong>s pour obtenir les sésames nécessaires.<br />

Dans ces conditions, il y a lieu <strong>de</strong> s’inquiéter <strong>de</strong> la sécurité <strong>de</strong>s bâtiments et autres lieux<br />

d’habitations construits sur la faça<strong>de</strong> <strong>maritime</strong>, trop près <strong>de</strong> la mer, ainsi que celle <strong>de</strong>s<br />

personnes les occupant. Il faut compter parmi ces bâtiments, les infrastructures routières et les<br />

ouvrages fonctionnels, ainsi que les hôtels et cliniques, construits ou encore en construction<br />

dans le cadre <strong>de</strong> la tenue au Sénégal du sommet <strong>de</strong> l’Organisation <strong>de</strong> la conférence islamique<br />

(Oci), en avril 2008. « Ces périls qui frappent a nos portes » sont vieux comme <strong>Dakar</strong> 17 , et la<br />

presse locale a déjà mis l’accent sur les risques induits par l’avancée <strong>de</strong> la mer, les séismes,<br />

les glissements <strong>de</strong> terrain et le réchauffement climatique sur le littoral dakarois. Un tabloï<strong>de</strong><br />

souligne que l’urbanisation inconsidérée <strong>de</strong> cet espace est un facteur aggravant pour ces<br />

risques 18 . <strong>Le</strong>s mêmes craintes sont relayées dix ans après par <strong>de</strong>s architectes locaux qui<br />

soutiennent que les arguments selon lesquels ces constructions sur les falaises constitueraient<br />

<strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong> stabilisation <strong>de</strong> la roche et contribueraient à stopper ou ralentir l’érosion <strong>de</strong>s<br />

côtes ne sont pas recevables. Ils les voient plutôt comme <strong>de</strong>s facteurs aggravants et invitent<br />

les autorités au réalisme en ayant recours aux techniques éprouvées en matière <strong>de</strong> protection<br />

côtière. Selon eux, les vibrations subies par les côtes du fait <strong>de</strong> la multiplication <strong>de</strong> gros<br />

17<br />

Interviews croisées <strong>de</strong> plusieurs architectes que nous avons préférés tenir dans l’anonymat, pour <strong>de</strong>s raisons<br />

évi<strong>de</strong>ntes.<br />

L’évolution du Dpm porte la marque indélébile laissée par l’histoire même <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> en tant que<br />

capitale administrative, politique et commerciale après l’abandon <strong>de</strong> Saint-Louis. La Médina adossée à la Porte<br />

du Millénaire a été créée par l’arrêté général du 24 juillet 1914 cependant que ses limites actuelles ont été fixées<br />

par l’arrêté local du 6 novembre 1916. Sur la base d’un principe <strong>de</strong> ségrégation déjà testé et appliqué au Congo,<br />

à Saint-Louis, dans les escales du Sénégal et les postes <strong>de</strong> la Côte d’Ivoire, l’administration coloniale française<br />

fait <strong>de</strong> la Médina une partie <strong>de</strong> la commune <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> <strong>de</strong>stinée aux « indigènes » soumis à <strong>de</strong>s règles particulières<br />

<strong>de</strong> réglementations hygiénistes (Cf. Poinsot J. et al., <strong>Le</strong>s villes d’Afrique noire entre 1650 et 1960, Paris :<br />

Documentation Française, 1989, pp. 128-9). C’est en fonction <strong>de</strong> cette opération <strong>de</strong> lotissement urbain en<br />

direction <strong>de</strong>s indigènes établi sur une vaste plaine lotissée sous forme <strong>de</strong> damier, avec <strong>de</strong>s rues sommairement<br />

chiffrées en guise d’i<strong>de</strong>ntification, que sont érigés en bordure <strong>de</strong> mer les Abattoirs municipaux, l’ancien<br />

cimetière musulman, le Camp <strong>de</strong>s tirailleurs sur l’emplacement actuel <strong>de</strong> la Cité Police. <strong>Le</strong>s colons Français se<br />

réservent la part du lion sur le littoral en construisant <strong>de</strong>s villas rési<strong>de</strong>ntielles sur tout le côté ouest qui est balayé<br />

en permanence par les vents frais <strong>de</strong> mousson durant l’hivernage (« Ma<strong>de</strong>leine I » et « Ma<strong>de</strong>leine II » en face <strong>de</strong>s<br />

Iles Ma<strong>de</strong>leine), une Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine à la pointe extrême Est du Plateau et en construisant <strong>de</strong>s bâtisses en<br />

tuile rose tout au long <strong>de</strong>s principales artères du Plateau, du Cap Manuel et <strong>de</strong> la pointe <strong>de</strong>s Almadies. <strong>Le</strong> plan<br />

directeur <strong>de</strong> la presqu’île du Cap Vert élaboré par Pinet-Lapra<strong>de</strong> et réalisé entre 1946 et 1956 donne à <strong>Dakar</strong> la<br />

triple vocation <strong>de</strong> point d’appui militaire, <strong>de</strong> grand port et <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ville « multiraciale ». L’ouvrage cité <strong>de</strong><br />

Poinsot suggère que « la ville est divisée en quatre zones disposant chacun d’un règlement particulier : 1/ une<br />

double zone rési<strong>de</strong>ntielle africaine et européenne dans la partie occi<strong>de</strong>ntale <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> ville, au nord <strong>de</strong> la vieille<br />

ville ; 2/ une zone commerciale et administrative centrée sur le quartier sud et en bordure du port <strong>de</strong> commerce ;<br />

3/ une zone industrielle avec quatre secteurs (industries normales, insalubres, <strong>de</strong> la pêche et secteur<br />

d’extension) ; 4 un ensemble <strong>de</strong> terrains réservés, comprenant les secteurs non aedificandi, les espaces libres, les<br />

secteurs <strong>de</strong> cultures, boisement, carrières et gisement » (Cf. Poinsot, Op. Cit., pp. 220-21).<br />

18<br />

Cf. le supplément <strong>de</strong> Sud Quotidien numéro 19 du 27 janvier 1999. Ces propos sont du Professeur Isabelle<br />

Niang Diop, Maître <strong>de</strong> conférence en Géologie côtière,


chantiers qui vont chercher <strong>de</strong>s emprises à <strong>de</strong>s profon<strong>de</strong>urs incertaines fragilisent la roche.<br />

<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>ux nouvelles voies <strong>de</strong> la Corniche où la circulation à gran<strong>de</strong> vitesse est <strong>de</strong>venue la<br />

norme ne contribuent pas non plus, <strong>de</strong> leur point <strong>de</strong> vue, à stabiliser les côtes. En tout état <strong>de</strong><br />

cause, ils en appellent au respect <strong>de</strong>s lois organisant l’occupation du Dpm 19 .<br />

L’occupation massive et illégale du littoral dans la presqu’île du Cap Vert, n’est pas une<br />

affaire nouvelle, mais elle a pris une tournure alarmante ces <strong>de</strong>rnières années avec<br />

l’avènement <strong>de</strong> nouvelles élites politiques, économiques et religieuses, ces trois catégories se<br />

retrouvant parfois à travers les mêmes personnes. La Corniche <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, qui bor<strong>de</strong> la ville<br />

d’est en ouest est le lieu privilégié <strong>de</strong> cette mainmise peu soucieuse <strong>de</strong> légalité, malgré tout un<br />

arsenal <strong>de</strong> co<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> lois, <strong>de</strong> plans d’aménagement et <strong>de</strong> directives superbement ignorées par<br />

ceux qui sont chargés <strong>de</strong> les faire respecter : les mêmes coteries, bien évi<strong>de</strong>mment, qui<br />

occupent ces espaces <strong>de</strong>stinés à une jouissance collective démocratique, respectueuse <strong>de</strong>s<br />

normes environnementales et <strong>de</strong>s consignes <strong>de</strong> sécurité.<br />

La décision prise par les autorités <strong>de</strong> l’Etat, à travers l’Anoci, d’embellir la corniche <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong><br />

et <strong>de</strong> construire <strong>de</strong> nouvelles infrastructures hôtelières sur cette faça<strong>de</strong> <strong>maritime</strong> <strong>de</strong> la capitale<br />

du Sénégal, a transformé cette précipitation, faite d’initiatives individuelles quelque peu<br />

mondaines, en une véritable industrie d’accaparement <strong>de</strong> cet espace <strong>public</strong> à <strong>de</strong>s fins privées.<br />

<strong>Le</strong> Dpm peut faire l’objet d’actes administratifs autorisant son occupation sous diverses<br />

formes (concession, bail, etc.), mais « à titre précaire et révocable », dit expressément<br />

l’article 13 du Co<strong>de</strong> du Domaine <strong>de</strong> l’Etat 20 (2). En principe donc, toute construction dans cet<br />

espace est soumise à <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> durée (avec les baux, par exemple) et obligations<br />

architecturales qui en garantissent la précarité, comme la construction sans emprises sur les<br />

sols. Or, avant les chantiers <strong>de</strong> l’Anoci, mais surtout pendant, on a vu s’ériger le long <strong>de</strong> la<br />

corniche, en contrebas <strong>de</strong>s falaises, sur les plages, taquinant l’eau, <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s bâtiments<br />

d’habitation ou <strong>de</strong>stinés à un usage <strong>public</strong> comme <strong>de</strong>s hôtels ou <strong>de</strong>s cliniques, et même <strong>de</strong>s<br />

écoles privées qui ont l’air <strong>de</strong> tout sauf <strong>de</strong> cabines démontables.<br />

Imposants et massifs, indifféremment construits en contrebas <strong>de</strong> la falaise ou au-<strong>de</strong>ssus d’elle,<br />

elles ont pour première particularité <strong>de</strong> montrer au passant l’opulence <strong>de</strong> leurs propriétaires<br />

pour les rési<strong>de</strong>nces individuelles hauts <strong>de</strong> gamme, les complexes rési<strong>de</strong>ntiels, les hôtels 5<br />

étoiles, les cliniques pour les grosses bourses, les parcs d’attractions et les clubs privés –<br />

certains <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers datant <strong>de</strong> l’époque coloniale ou étant <strong>de</strong>s survivances entretenues par<br />

l’ancien régime et ayant encore, apparemment, <strong>de</strong> beaux jours <strong>de</strong>vant eux.<br />

Secon<strong>de</strong> particularité <strong>de</strong> ces constructions, elles <strong>de</strong>nsifient, avec la nouvelle infrastructure<br />

routière et ses ouvrages lourds, le mur <strong>de</strong> béton entre l’océan et la ville, privant ainsi <strong>Dakar</strong>,<br />

une presqu’île étroite, <strong>de</strong>s vents marins qui l’empêchaient d’étouffer <strong>de</strong> chaleur.<br />

Une petite randonnée, étape après étape, <strong>de</strong> l’axe quittant le môle 1 du Port <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> pour<br />

s’engager dans la corniche Est jusqu’à Yoff Waraar sera instructive sur les violations<br />

19 Ces interviews d’architectes ont eu lieu en fin septembre 2008. <strong>Le</strong>s architectes en appellent aussi à l’éthique<br />

dans la distribution et l’occupation <strong>de</strong> ces espaces dont la jouissance revient <strong>de</strong> droit aux Sénégalais <strong>de</strong> toute<br />

condition. Ils regrettent qu’aujourd’hui les enfants <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> Plateau ne puissent, comme eux, à leur âge, se<br />

baigner dans toutes ces plages <strong>de</strong> la côte est <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> qui sont ou privatisées <strong>de</strong> fait ou polluées. <strong>Le</strong> phénomène<br />

n’est pas nouveau, admettent-ils, mais il a atteint <strong>de</strong> nos jours un niveau insupportable. « Aujourd’hui, il faut<br />

faire <strong>de</strong>s distances considérables pour trouver une plage fréquentable », concluent-ils, sous ce chapitre.<br />

20 Co<strong>de</strong> du Domaine <strong>de</strong> l’Etat, Livre II, titre V.


flagrantes <strong>de</strong>s dispositions juridiques sur le Dpm. De nombreux observateurs s’accor<strong>de</strong>nt sur<br />

le fait que 2000 est une année repère dans l’histoire <strong>de</strong>s violations du Dpm. Il y a comme une<br />

sorte <strong>de</strong> ruée sur les réserves foncières littorales <strong>de</strong> l’Etat par les mêmes classes dirigeantes, à<br />

travers les mêmes procédés, aux mêmes fins, ou pire. De fortes présomptions d’opérations<br />

financières frauduleuses, notamment <strong>de</strong> blanchiment d’argent, pèsent sur certaines <strong>de</strong>s<br />

constructions immobilières luxueuses qui poussent comme <strong>de</strong>s champignons dans <strong>Dakar</strong>, en<br />

contradiction flagrante avec l’état <strong>de</strong> pauvreté avancé du pays.<br />

Notre randonnée renseignera aussi sur le peu <strong>de</strong> cas fait du bien-être <strong>de</strong>s populations<br />

riveraines, et donc, forcément <strong>de</strong>s questions environnementales qui conditionnent tout<br />

développement durable.<br />

On n’aura pas parcouru cinq cents mètres que la vue sur l’île <strong>de</strong> Gorée est perdue, bouchée<br />

par « <strong>Le</strong> Lagon I » et « <strong>Le</strong> Lagon II », avec leurs entrées surélevées. <strong>Le</strong>s hôtels, eux, sont<br />

construits en contrebas <strong>de</strong> la falaise, avec restaurant sur un ponton s’enfonçant dans la mer 21 .<br />

Un mur <strong>de</strong> clôture allant au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s surfaces occupées par les bâtiments protège, et interdit<br />

au promeneur, l’accès <strong>de</strong> la plage jouxtant ces établissements qui datent du début <strong>de</strong>s années<br />

60. <strong>Le</strong> fait accompli fait, ici, office <strong>de</strong> loi. Avant la construction du mur, la plage dite « plage<br />

<strong>de</strong>s enfants » était timi<strong>de</strong>ment fréquentée par le <strong>public</strong>. Apres, même ceux qui, connaissant la<br />

réglementation, insistèrent un temps en passant par la berge, finirent par se lasser <strong>de</strong>s<br />

brima<strong>de</strong>s et autres remarques <strong>de</strong>s vigiles, sinon <strong>de</strong>s obstacles physiques érigés par les<br />

exploitants. Aujourd’hui, dans l’enten<strong>de</strong>ment populaire, cette plage est <strong>de</strong>venue « la plage du<br />

Lagon II ». Pourtant c’est l’une <strong>de</strong>s plages les moins dangereuses <strong>de</strong> la presqu’île puisque la<br />

Baie <strong>de</strong> Gorée est relativement bien protégée <strong>de</strong>s houles agressives et <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong><br />

sable qui sont la marque distinctive <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> côtière qui s’étire <strong>de</strong> Yoff à l’estuaire <strong>de</strong><br />

Ndar.<br />

Un peu plus loin, le fantôme qu’est <strong>de</strong>venu le restaurant « <strong>Le</strong> Niani », ravagé par un incendie<br />

alors que <strong>de</strong>s bruits couraient sur sa convoitise par une autorité au plus haut sommet <strong>de</strong> l’Etat,<br />

interpelle. Cet établissement a aussi été autorisé par l’ancien régime socialiste et date <strong>de</strong>s<br />

années 70. Imposant et construit avec emprise sur le sol, ce restaurant va disparaître pour<br />

laisser la place, selon toute vraisemblance, a une structure paramédicale <strong>de</strong> luxe, une clinique<br />

<strong>de</strong> thalassothérapie, massage, kinésithérapie, et dont les promoteurs, <strong>de</strong>s Libanais, seraient<br />

proches <strong>de</strong> la famille prési<strong>de</strong>ntielle. La structure serait située juste <strong>de</strong>rrière les murs du palais<br />

<strong>de</strong> la République.<br />

Plus bas, peu avant la plage <strong>de</strong> l’anse Bernard (Téru Baay Sogi, <strong>de</strong> son nom traditionnel), les<br />

clubs quasi coloniaux, exclusivement réservés à une clientèle française (« L’Union amicale<br />

corse », le « Club <strong>de</strong> bridge », « Fédération sénégalaise (sic) <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong> tir », « <strong>Le</strong>s<br />

caïmans », Club multisports <strong>de</strong> rugby, <strong>de</strong> pétanque, <strong>de</strong> tennis, etc.) s’étirent le long <strong>de</strong> la<br />

corniche Est. Ils seront sûrement laissés à leurs usagers privilégiés qui, eux aussi, vont<br />

privatiser <strong>de</strong> façon tranchée leur part <strong>de</strong> plage.<br />

Ce qui ne va pas être le cas pour les pêcheurs et promeneurs <strong>de</strong> Téru Baay Sogi, plage <strong>de</strong><br />

débarquement pour la pêche artisanale, <strong>de</strong> baigna<strong>de</strong> et <strong>de</strong> villégiature pour nombre <strong>de</strong><br />

<strong>Dakar</strong>ois. Cette plage est âprement convoitée <strong>de</strong>puis toujours par <strong>de</strong>s promoteurs immobiliers<br />

et pourrait, prochainement, tomber dans l’escarcelle d’hommes d’affaires et <strong>de</strong> fonctionnaires<br />

peu scrupuleux.<br />

21 C’est le cas du Lagon I et <strong>de</strong> l’Hôtel Teranga dont l’Etat est le co-propriétaire.


Sur les rochers, peu avant la plage <strong>de</strong> sable, trône une villa léchée par les vagues. Elle<br />

appartenait à l’origine à la Société nationale <strong>de</strong>s eaux du Sénégal (Sones).<br />

A côté du site va être construit un hôtel, « L’hôtel <strong>de</strong>s Sirènes » dont le propriétaire serait le<br />

roi du Maroc, Mohamed VI 22 . Quoi qu’il en soit, le projet est connu qui va occuper toute cette<br />

plage, « pieds dans l’eau », et au-<strong>de</strong>là, vers les falaises argileuses et friables au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong><br />

l’unique plage restante et encore accessible au <strong>public</strong> dans cette partie du littoral, <strong>de</strong>rrière<br />

l’hôpital principal et l’ambassa<strong>de</strong> <strong>de</strong> Gran<strong>de</strong> Bretagne, à quelques encablures <strong>de</strong> l’hôtel<br />

Savana.<br />

<strong>Le</strong> Savana, un vieil occupant, lui aussi pieds dans l’eau, interdit l’accès <strong>public</strong> à toutes les<br />

plages et criques plaisantes qu’il surplombe, ne se privant pas <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s murs où il faut,<br />

afin d’empêcher l’accès <strong>de</strong>s ces lieux par la berge. Or, l’aménagement <strong>de</strong> commodités pour un<br />

libre accès à la berge, au nom <strong>de</strong> l’intérêt général, est une condition à l’obtention <strong>de</strong><br />

concessions et baux pour l’exploitation <strong>de</strong> sites touristiques balnéaires. <strong>Le</strong> principe du libre<br />

accès au <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> intègre l’idée que les servitu<strong>de</strong>s d’utilité publique<br />

comprennent les servitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> passage, comme on peut le noter au niveau <strong>de</strong>s plages<br />

comprises entre Saly Portudal et la Somone. En réalité, aucun <strong>de</strong>s concessionnaires visités<br />

entre le restaurant « Terrou-bi » et l’hôtel restaurant « <strong>Le</strong> Virage » qui appartiennent tous<br />

<strong>de</strong>ux à <strong>de</strong>s Libanais 23 ne se prive d’interdire au <strong>public</strong> l’accès <strong>de</strong>s plages qu’il occupe, soit par<br />

22 La prodigalité du Chef <strong>de</strong> l’Etat sénégalais vis-à-vis <strong>de</strong> son homologue marocain est étonnante puisque M.<br />

Wa<strong>de</strong> aurait également fait don à Mohammed VI, roi du Maroc, d’un terrain adjacent à sa rési<strong>de</strong>nce secondaire<br />

<strong>de</strong> Poponguine.<br />

23 La communauté libanaise a été installée au Sénégal en 1883 par le colonialisme français qui l’a imposée<br />

comme une classe tampon pour barrer la route du commerce local aux populations indigènes. C’est ainsi qu’elle<br />

a largement bénéficié <strong>de</strong> facilités bancaires pour s’implanter et occuper presque majoritairement certains endroits<br />

du « Plateau » <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>. Sur cette question précise, voir Samir Amin, <strong>Le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s affaires sénégalais. <strong>Le</strong>s<br />

commerçants Libanais ont été <strong>de</strong> façon récurrente violemment pris à partie au cours <strong>de</strong> combats <strong>de</strong> rue et <strong>de</strong><br />

manifestations <strong>de</strong> masse qui ont eu lieu à <strong>Dakar</strong> en diverses pério<strong>de</strong>s. <strong>Le</strong> racisme légendaire <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong><br />

majorité <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> cette petite minorité dont certains sont <strong>de</strong>venus d’éminentes personnalités du dispositif<br />

institutionnel <strong>de</strong> gouvernance, du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s affaires, <strong>de</strong> l’industrie sportive et même <strong>de</strong>s partis politiques du<br />

Sénégal pose, à l’évi<strong>de</strong>nce, un problème <strong>de</strong>s plus sérieux du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la question nationale.<br />

La double nationalité acquise par la plupart <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> cette minorité ethnique ne change rien aux données<br />

du problème, bien au contraire. Elle le complexifie puisqu’il y a au moins <strong>de</strong>ux à trois générations <strong>de</strong> Libanais<br />

d’origine qui sont nés au Sénégal, y ont fait souche, mais sont farouchement habités par un instinct grégaire et se<br />

sont très rarement mêlés aux populations indigènes, à quelques exceptions près, notamment à travers le mariage<br />

dans les <strong>de</strong>ux sens. <strong>Le</strong> même phénomène est observable sur toute la côte ouest africaine et dans <strong>de</strong>s pays<br />

enclavés <strong>de</strong> l’hinterland continental. En Afrique <strong>de</strong> l’Est, ce sont les <strong>de</strong>scendants <strong>de</strong>s ressortissants <strong>de</strong> l’In<strong>de</strong><br />

introduits par le colon britannique pour construire les chemins <strong>de</strong> fer <strong>de</strong>s zones agricoles et minières les plus<br />

fertiles vers le port <strong>de</strong> Mombassa qui contrôlent très largement le commerce local. En Sierra <strong>Le</strong>one et au Libéria,<br />

ce sont les ressortissants Libanais, Israéliens ou <strong>de</strong>s Juifs <strong>de</strong> différentes nationalités qui exploitent <strong>de</strong> manière<br />

presque monopolistique, en tous cas oligopolistique dans <strong>de</strong>s secteurs précis, le commerce (légal et illégal) <strong>de</strong>s<br />

diamants, du riz et <strong>de</strong> l’électroménager. En Ethiopie, la brève occupation italienne a permis à <strong>de</strong>s Italiens<br />

d’installer <strong>de</strong>s restaurants chics et <strong>de</strong> monopoliser cette industrie bien après le départ <strong>de</strong> la soldatesque italienne.<br />

Au Rwanda et au Burundi, les Grecs ont été utilisés comme force tampon contre les intérêts commerciaux<br />

autochtones. En RDC, les Belges ont testé à une échelle jusque-là inconnue en Afrique, le développement séparé<br />

en tant que mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> gouvernance sans parler <strong>de</strong> l’Afrique du Sud, <strong>de</strong>s anciennes colonies portugaises et<br />

espagnoles et, bien entendu, la Cote d’Ivoire où 30 à 50 000 Français et <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> Libanais monopolisaient<br />

presque entièrement jusqu'à une date récente l’industrie <strong>de</strong> substitution d’importation et le commerce local. Au<br />

Sénégal et à travers toute la côte ouest africaine, le même modèle prévaut encore aujourd’hui (sur ces questions,<br />

le lecteur voudra bien consulter l’abondante littérature qui existe et notamment l’ouvrage <strong>de</strong> Chancellor<br />

Williams, The Destruction of Black Civilization, Chicago : Third World Press, 1976, Thomas Pakenham, The


l’action <strong>de</strong> vigiles privés, soit en occupant les parties les plus prisées <strong>de</strong>s plages qui leur sont<br />

contiguës.<br />

Après le Savana, au premier virage vers le Cap Manuel, un projet sort <strong>de</strong> terre : l’hôtel Gorée,<br />

152 chambres qui seront construites quasiment sur l’eau. Comme le montre la maquette sur<br />

l’affiche géante annonçant le chantier, l’hôtel offrira à ses clients « une vue imprenable sur<br />

l’île <strong>de</strong> Gorée », écrivent les promoteurs, le groupe Mixta. Encore un hôtel prévu dans le<br />

cadre du sommet <strong>de</strong> l’Oci, aujourd’hui <strong>de</strong>rrière nous, mais toujours en construction, comme<br />

tous les autres prévus par les organisateurs, ainsi que les cliniques, eux aussi inscrits dans le<br />

même cadre et qui tar<strong>de</strong>nt à sortir <strong>de</strong> terre.<br />

Quand on contourne la pointe la plus avancée <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, le Cap Manuel où se situe le chantier<br />

du futur hôtel Gorée <strong>de</strong> Mixta, en contrebas <strong>de</strong>s rochers, et qui abrite sur ses hauteurs la<br />

rési<strong>de</strong>nce du représentant <strong>de</strong> l’Union européenne jusqu’ici seul face à l’île <strong>de</strong> Gorée, on tombe<br />

sur les chantiers d’une future clinique. Elle est située en haut <strong>de</strong> la falaise qui fait face aux îles<br />

<strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine, <strong>de</strong> l’autre côté <strong>de</strong> la route qui contourne l’imposant bâtiment <strong>de</strong> l’ancien<br />

tribunal <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, tombé en ruine, en attendant son accaparement (selon une rumeur<br />

persistante) à <strong>de</strong>s fins <strong>de</strong> spéculation immobilière. « La clinique <strong>de</strong> la vision », clinique<br />

ophtalmologique, propriété <strong>de</strong> la Sarl Lynn, appartiendrait à <strong>de</strong>s Libanais, ce que tend à<br />

confirmer le nom <strong>de</strong> l’architecte du projet, un certain Sleiman. Elle est <strong>de</strong>stinée à une clientèle<br />

à hauts revenus économiques comme toutes celles qui fonctionnent déjà ou vont fonctionner<br />

sur le littoral dans un proche avenir. <strong>Le</strong>urs propriétaires ont délimité leurs enclaves<br />

territoriales en violation <strong>de</strong> tel ou tel Co<strong>de</strong>, entre autres, ceux <strong>de</strong> l’Environnement, <strong>de</strong> l’Eau,<br />

<strong>de</strong> l’Hygiène, <strong>de</strong> l’Urbanisme, un arsenal juridique qu’on aura contourné ou interprété au<br />

bénéfice <strong>de</strong> promoteurs dont les préoccupations sont aux antipo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> la majorité <strong>de</strong><br />

la population.<br />

A moins <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cents mètres du chantier <strong>de</strong> la future clinique, la « Clinique du Cap », elle<br />

aussi contrôlée par un groupe Libanais, fait face à la rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> l’ambassa<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> France,<br />

installée <strong>de</strong> l’autre coté du goudron. La clinique se tient à coté <strong>de</strong> sa voisine mitoyenne, la<br />

villa du défunt prési<strong>de</strong>nt du Cameroun, Ahmadou Ahidjo. La clinique comme la villa <strong>de</strong> l’ex<br />

prési<strong>de</strong>nt exilé au Sénégal avant sa mort sont en plein dans le Dpm. <strong>Le</strong>ur construction a été<br />

autorisée par l’ancien régime socialiste, apparemment dans les mêmes conditions rendues<br />

possibles par l’existence <strong>de</strong> passe-droits, les mêmes qu’aujourd’hui, sur le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>de</strong><br />

l’Etat. Ici cependant, les constructions n’empiètent pas sur les rivages, et, les rares<br />

promeneurs ou exploitants artisanaux <strong>de</strong> la mer encore tentés par les berges difficiles d’accès<br />

<strong>de</strong> cette zone ne rencontrent pas d’opposition à leurs activités.<br />

Plus bas, sont installés les monuments désormais « historiques » que sont l’Institut Pasteur,<br />

bâtisse coloniale à bonne distance <strong>de</strong> la mer et l’hôpital Aristi<strong>de</strong>s <strong>Le</strong> Dantec 24 , large <strong>domaine</strong><br />

Scramble for Africa, New York : Avon Books, 1991 et Walter Rodney, How Europe Un<strong>de</strong>r<strong>de</strong>veloped Africa,<br />

Washington, D.C.: Howard University Press, 1982).<br />

Il est donc temps que cette question du statut <strong>de</strong>s minorités étrangères installées en Afrique et qui participent le<br />

plus souvent outrageusement au pillage en règle <strong>de</strong>s ressources <strong>de</strong>s pays qui les accueillent soit revisitée par les<br />

Africains selon leurs intérêts propres et dans le respect <strong>de</strong>s droits reconnus aux minorités, mais sans qu’une telle<br />

reconnaissance ne conduise à <strong>de</strong>s abus <strong>de</strong> nature raciale, économique, financière ou commerciale, au détriment<br />

<strong>de</strong>s majorités autochtones, comme on le voit présentement partout en Afrique.<br />

24 Des rumeurs persistantes indiquent la volonté étatique <strong>de</strong> désengorger le centre-ville en construisant un grand<br />

hôpital à l’emplacement <strong>de</strong> l’ancien terrain <strong>de</strong> golfe utilisé jusque récemment par l’élite coloniale au « Terrain<br />

Golfe » contigu au carrefour menant aux « Hamos » <strong>de</strong> Gédiawaay. En récupérant les terrains <strong>de</strong> <strong>Le</strong> Dantec, du


hospitalier, qui respire grâce à sa proximité avec l’océan qu’il surplombe à distance<br />

respectueuse du Dpm. Plus loin, en bifurquant à gauche, le Camp Dial Diop, siège <strong>de</strong> l’Etat<br />

major <strong>de</strong> l’armée sénégalaise, puis le lycée Lamine Guèye (ex Van Vollenhoven) 25 .<br />

La prochaine étape <strong>de</strong> notre randonnée sur la corniche est le grand complexe hôtelier et <strong>de</strong><br />

loisir, le « Sakhamon », anciennement connu comme le « Club antillais ». On a déjà érigé en<br />

ces lieux un hôtel restaurant à la décoration intérieure naïvement baroque. De façon évi<strong>de</strong>nte,<br />

les propriétaires sont <strong>de</strong>s Libanais et participent activement à la gestion quotidienne <strong>de</strong><br />

l’établissement. <strong>Le</strong> périmètre hôtelier s’étend et s’agrandit sur le côté gauche, privant ainsi<br />

pour <strong>de</strong> bon à d’éventuels visiteurs l’accès à la pente rai<strong>de</strong> qui mène vers la plage en<br />

contrebas. <strong>Le</strong> gros chantier créé à l’occasion <strong>de</strong>s nouveaux travaux engagés <strong>de</strong>puis quelques<br />

temps a déjà causé <strong>de</strong>s dégâts visibles sur la chaussée dont le goudron est lézardé sinon<br />

crevassé par endroits en raison <strong>de</strong>s travaux d’excavation menés dans cette zone non<br />

aedificandi. Comme toutes ces immenses bâtisses qui colonisent le littoral, le complexe ajoute<br />

aux perturbations environnementales et augmente les risques <strong>de</strong> perturbations<br />

environnementales, en violation <strong>de</strong> toutes les dispositions légales. Construit avec <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s<br />

emprises sur le sol et la roche, il interdit l’accès <strong>de</strong> la berge à la collectivité. Ensuite, sa<br />

structure, surtout à hauteur du restaurant, plus élevée que celle <strong>de</strong> l’ex Club, obstrue la vue<br />

magnifique, <strong>de</strong>puis le rond point <strong>de</strong> la place Soweto, sur l’océan, avec en toile <strong>de</strong> fond les<br />

îlots Sarpan et un ciel fantastiquement beau au coucher du soleil.<br />

<strong>Le</strong>s promoteurs <strong>de</strong> ce complexe <strong>de</strong> loisirs qui seraient <strong>de</strong>s Libanais ont cependant <strong>de</strong> qui tenir.<br />

<strong>Le</strong>urs voisins immédiats, l’ambassa<strong>de</strong> d’Iran et la rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> feu Djily Mbaay (rachetée par<br />

une célèbre famille libanaise) sont également construits sur un terrain non aedificandi et leurs<br />

très hauts murs font plus qu’obstruer la vue sur l’océan : ils empêchent la brise marine <strong>de</strong><br />

souffler sur toute la zone <strong>de</strong>s ministères adjacents <strong>de</strong> l’Education nationale, du Tourisme et <strong>de</strong><br />

l’Economie et <strong>de</strong>s Finances…<br />

Entre ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers privilégiés installés par l’ancien régime, s’est niché un tout nouveau<br />

complexe rési<strong>de</strong>ntiel privé <strong>de</strong> luxe au nom évocateur d’« E<strong>de</strong>n Rock », lui aussi, construit sur<br />

les rochers, avec l’aval <strong>de</strong>s nouvelles autorités.<br />

Des qu’on s’engage sur l’avenue <strong>de</strong> la République, à hauteur du musée <strong>de</strong>s Armées, tout un<br />

ensemble <strong>de</strong> maisons, en face du tribunal du Bloc <strong>de</strong>s Ma<strong>de</strong>leines, appartiennent au<br />

Patrimoine bâti <strong>de</strong> l’Etat, dont l’ancienne rési<strong>de</strong>nce d’un ancien Premier ministre. Après, vient<br />

l’immeuble abritant une gran<strong>de</strong> société d’informatique et une ambassa<strong>de</strong> suivie par la villa <strong>de</strong><br />

l’une <strong>de</strong>s filles <strong>de</strong> l’ancien prési<strong>de</strong>nt Abdou Diouf, villa bien située sur le Dpm et dont la<br />

construction avait fait l’objet, à l’époque, <strong>de</strong> controverses médiatiques animées.<br />

Lycée Lamine Gueye, du marché Sandaga (bâtiment insalubre s’il en est, et au surplus en état <strong>de</strong> décrépitu<strong>de</strong><br />

extrêmement avancé) et du Building administratif qui sera remplacé dans l’emprise <strong>de</strong> l’aéroport L. S. Senghor<br />

par une Cité administrative à l’instar <strong>de</strong> celles d’Abidjan, construite <strong>de</strong>puis belle lurette, et <strong>de</strong> Bamako, en voie<br />

<strong>de</strong> finition, l’Etat compte diminuer le flux d’usagers <strong>de</strong>s axes principaux allant au centre ville et ainsi<br />

désengorger Dakaar.<br />

25 Selon <strong>de</strong>s informations données régulièrement par la presse <strong>de</strong>puis l’avènement du pouvoir libéral, et jamais<br />

démenties, l’hôpital, le camp Dial Diop, état-major <strong>de</strong> l’armée nationale et le lycée Lamine Guèye <strong>de</strong>vraient être<br />

délocalisés, parce qu’ils seraient dans le collimateur <strong>de</strong>s nouvelles autorités qui estiment que ces structures<br />

participent en très gran<strong>de</strong> partie au ralentissement <strong>de</strong> la mobilité urbaine. <strong>Le</strong>s autorités sont accusées par<br />

l’opposition <strong>de</strong> vouloir faire main basse sur les immenses réserves foncières que représentent les terrains sur<br />

lesquels trônent ces anciennes reliques du vieux <strong>Dakar</strong> quand il était encore modérément peuplé.


La zone du Dpm qui suit est presque déserte pour l’instant après avoir fait l’objet d’une<br />

gran<strong>de</strong> controverse lorsque l’ancien régime a voulu y ériger un immense mémorial sur la<br />

traite esclavagiste 26 . A un peu plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cents mètres trônait jusque récemment une<br />

immense affiche <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong> suffisamment ostentatoire vantant le dynamisme <strong>de</strong> l’équipe<br />

<strong>de</strong> l’Anoci entourant le Chef <strong>de</strong> l’Etat et son fils qui prési<strong>de</strong> aux <strong>de</strong>stinées <strong>de</strong> cette méga<br />

agence plantée au cœur du dispositif <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s investissements et <strong>de</strong>s grands chantiers du<br />

prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République. Et voici que surgit la porte du Millénaire, controversée mais<br />

néanmoins monument d’utilité collective. Son érection a été le prétexte à un affairisme<br />

inconséquent et précipité avec la construction d’un restaurant 27 en contrebas du monument<br />

qui défie le bon sens. <strong>Le</strong>s grosses vagues au cours <strong>de</strong>s marrées hautes ont commencé à en<br />

endommager la faça<strong>de</strong>, rendant ainsi nécessaire <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> renforcement. Toute cette<br />

partie a été réaménagée avec l’assistance <strong>de</strong> la coopération roumaine pour arrêter l’érosion<br />

extrêmement sévère <strong>de</strong> la falaise en cet endroit qui fait face à l’ancienne « Médina »<br />

« indigène » léguée par la colonisation française.<br />

A partir d’ici, la Corniche à <strong>de</strong>ux voies <strong>de</strong> l’Anoci avec son interminable ban<strong>de</strong> étroite <strong>de</strong><br />

béton dans l’axe médian <strong>de</strong> la route à double sens campe bien la relation conflictuelle entre<br />

les constructions sur le littoral et les exigences d’intégrité <strong>de</strong> l’environnement côtier.<br />

La plage <strong>de</strong> Sumbédjun qui suit remplit une fonction essentielle ; elle sert <strong>de</strong> quai <strong>de</strong> pêche<br />

aux embarcations parties <strong>de</strong> Gét Ndar, un quartier <strong>de</strong> pêcheurs situé à Saint Louis. C’est ainsi<br />

que la place a été baptisée « Téru Gét Ndar » 28 . Un peu plus loin, une autre communauté Lébu<br />

s’i<strong>de</strong>ntifie à travers la flottille <strong>de</strong> petites embarcations <strong>de</strong> ses membres qui se sont rassemblés<br />

dans la partie appelée « Lébu gi ». Chacun <strong>de</strong> ces groupes explique que sa présence sur les<br />

lieux remonte à un passé lointain. Mais l’harmonisation <strong>de</strong>s activités liées à la pêche<br />

artisanale fait singulièrement défaut dans ce réduit du Dpm. <strong>Le</strong>s activités s’entremêlent dans<br />

un désordre in<strong>de</strong>scriptible et en violation <strong>de</strong>s normes environnementales et d’hygiène<br />

publique. <strong>Le</strong>s marchands <strong>de</strong> poissons et produits divers <strong>de</strong> la mer posés sur <strong>de</strong>s étables en bois<br />

branlants et crasseux ou à même le sol côtoient les charpentiers spécialisés dans le rafistolage<br />

ou la construction <strong>de</strong> petites pirogues et les ven<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> carburant gasoil installés dans une<br />

mini station <strong>de</strong> pompage où sont stockés <strong>de</strong>s fûts potentiellement dangereux pour la santé et la<br />

sécurité publiques. <strong>Le</strong>s activités <strong>de</strong> mareyage se mêlent <strong>de</strong> la partie et gênent<br />

considérablement la fluidité du trafic piéton sur ce petit bout du Dpm où foisonnent <strong>de</strong>s<br />

marchands ambulants spécialisés dans le bric à brac, les écailleuses <strong>de</strong> poissons, les ven<strong>de</strong>urs<br />

à la criée, les porteurs venant parfois <strong>de</strong> contrées aussi lointaines que le Burkina Faso ou le<br />

Mali voisin et, bien entendu, les inévitables racoleurs ou « coxeurs » travaillant pour le<br />

compte <strong>de</strong>s taxis stationnés le plus souvent en violation du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la route, malgré la<br />

présence d’un parking récemment construit par l’Anoci mais critiqué par les automobilistes<br />

pour son inaccessibilité et son agencement approximatif. En toile <strong>de</strong> fond, le spectacle qui<br />

s’offre à la vue est celui <strong>de</strong> pirogues aux couleurs bigarrées, amarrées dans l’anarchie la plus<br />

absolue et ballottées en permanence par la houle et les vents du large, ce qui accroît aux<br />

difficultés <strong>de</strong> leur accès ainsi qu’au débarquement à quai <strong>de</strong>s prises halieutiques journalières.<br />

Depuis la construction du « canal 4 » par les colons Français, canal <strong>de</strong>stiné au début à<br />

déverser directement dans la mer les eaux <strong>de</strong> surface et <strong>de</strong> ruissellement venus <strong>de</strong>s zones<br />

26<br />

<strong>Le</strong> Prési<strong>de</strong>nt Abdoulaye Wa<strong>de</strong> a abandonné ce vieux projet en le remplaçant par une énorme statue en bronze<br />

<strong>de</strong> plusieurs dizaines <strong>de</strong> mètres construite par <strong>de</strong>s Coréens et qui surplomberait toute la ville à partir <strong>de</strong>s<br />

Mamelles, en face <strong>de</strong> l’ancien Champ <strong>de</strong> tir militaire.<br />

27<br />

Ce restaurant construit sur le Dpm a réduit singulièrement la taille déjà chétive <strong>de</strong> la plage en cet endroit<br />

précis.<br />

28<br />

Littéralement, « quai <strong>de</strong> débarquement <strong>de</strong>s Gétdariens ».


légèrement plus hautes <strong>de</strong> la Gueule Tapée, <strong>de</strong>s quartiers populaires environnants <strong>de</strong> Fass,<br />

d’une partie du Point E et <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong>s « Sicap » et même du « Grand <strong>Dakar</strong> », la baie <strong>de</strong><br />

Sumbédjun a progressivement été polluée dans une mesure qui s’est aggravée avec<br />

l’explosion démographique sans précé<strong>de</strong>nt et l’absence d’une véritable politique<br />

infrastructurelle d’assainissement et <strong>de</strong> viabilisation <strong>de</strong> très larges zones <strong>de</strong> la presqu’île, y<br />

compris le centre même <strong>de</strong> la ville qui cache, <strong>de</strong>rrière le lustre <strong>de</strong> buildings flambant neufs, un<br />

délabrement <strong>de</strong> l’habitat et une misère choquante.<br />

Il est étonnant que l’Anoci se soit échinée à construire une espèce <strong>de</strong> tunnel <strong>de</strong> cent mètres à 8<br />

milliards <strong>de</strong> francs Cfa, prolongement d’une route asphaltée construite à 4 milliards le<br />

kilomètre, et qu’il ait laissé entier l’assainissement <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong> Sumbédjun qui est tellement<br />

polluée que l’eau est <strong>de</strong>venue un liqui<strong>de</strong> saumâtre aux émanations pestilentielles. <strong>Le</strong>s passants<br />

et les habitués du « Sumbé » ont fini par s’habituer à cette o<strong>de</strong>ur nauséabon<strong>de</strong> qui vous colle<br />

aux narines et a chassé les usagers du Marché artisanal et notamment les touristes friands<br />

d’objets d’artisanat et <strong>de</strong> bijouterie locale.<br />

<strong>Le</strong> bar restaurant (« <strong>Le</strong> Sumbé ») et une boite <strong>de</strong> nuit ont été construits à quelques mètres du<br />

trait <strong>de</strong> côte et continuent d’attirer quelques noctambules impénitents malgré la pestilence <strong>de</strong>s<br />

lieux qui alourdit l’air et rend la respiration laborieuse.<br />

Entre les gargotes, les vespasiennes <strong>de</strong> fortune laissées à l’abandon et rongées par l’aci<strong>de</strong><br />

urinaire, les ateliers mécaniques et le semblant d’usine <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong>s produits halieutiques<br />

construite par la Ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, les quais <strong>de</strong> la baie ne payent pas vraiment <strong>de</strong> mine. Pour<br />

contrecarrer ce fléau, <strong>de</strong>s volontaires se sont organisés afin d’entretenir l’environnement qui<br />

présente un aspect <strong>de</strong>s plus répulsifs.<br />

A côté du bar restaurant « <strong>Le</strong> Sumbé », s’étire le « Village artisanal » dans un espace étriqué<br />

dont chaque mètre carré est occupé par une colonie imposante d’artisans (vanniers,<br />

couturières et tailleurs, bijoutiers, sculpteurs <strong>de</strong> bois, cordonniers, etc). La réorganisation<br />

supposée du Village entreprise par Landing Savané du temps où il était le ministre <strong>de</strong><br />

l’Industrie et <strong>de</strong> l’Artisanat le plus impopulaire du Sénégal a créé plus <strong>de</strong> problèmes qu’il n’en<br />

a résolu. <strong>Le</strong> tracé <strong>de</strong>s lots a été fait dans l’anarchie la plus totale cependant qu’aucun<br />

encadrement digne <strong>de</strong> ce nom n’a été offert aux artisans pour les rendre plus performants tant<br />

du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong> leurs échoppes qu’au plan <strong>de</strong>s techniques <strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong>s<br />

produits proposés à une clientèle qui s’est raréfiée en très gran<strong>de</strong> partie à cause <strong>de</strong>s difficultés<br />

quasi insurmontables d’accès au village, difficultés accentuées par les travaux mal pensés <strong>de</strong><br />

l’Anoci sur cette partie <strong>de</strong> la corniche. Des centaines <strong>de</strong> petits artisans ont ainsi vu leur<br />

clientèle s’évanouir du jour au len<strong>de</strong>main.<br />

<strong>Le</strong>s quartiers populaires <strong>de</strong> la Médina et <strong>de</strong> la Gueule tapée, avec leurs rues étroites et leurs<br />

populations <strong>de</strong>nses étaient déjà peu aérés. <strong>Le</strong>s nouvelles infrastructures sur la corniche,<br />

notamment le toboggan qui contourne en le surplombant le cimetière musulman <strong>de</strong>s<br />

« Abattoirs » et le tunnel qui longe et isole le village artisanal et le marché au poisson <strong>de</strong><br />

Sumbédjun, s’interposent désormais entre leurs maisons surpeuplées et la brise marine. Et<br />

elles constituent un obstacle physique à l’accès <strong>de</strong>s populations à la mer avec laquelle elles<br />

entretiennent <strong>de</strong>s liens quasi sacrés. A travers les âges, leurs habitants ont tissé avec l’océan<br />

atlantique <strong>de</strong>s relations étroites qui ont engendré toute une folk culture faite <strong>de</strong> métiers<br />

familiaux et claniques séculaires, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’exploitation économique <strong>de</strong> la mer, entre<br />

mé<strong>de</strong>cines ou religions traditionnelles et les besoins d’expression d’une<br />

cosmogonie empreinte <strong>de</strong> libations annuelles mémorables, <strong>de</strong> séances d’exorcisme avec rites


sacrificiels où bœufs et moutons étaient immolés par la communauté Lébu 29 précisément en<br />

cet endroit situé entre la Cour <strong>de</strong> Cassation et le parc d’attraction « Magic Land » dont les<br />

propriétaires sont <strong>de</strong>s Libanais.<br />

En plus <strong>de</strong> rendre difficile, voire impossible en certains endroits, l’accès <strong>de</strong> la mer aux<br />

populations pour sa jouissance plaisante ou utilitaire (pêche à la ligne <strong>de</strong> petits poissons <strong>de</strong>s<br />

rochers, cueillette d’oursins et <strong>de</strong> coquillages divers). les constructions sur le Dpm et les<br />

infrastructures hôtelières et routières sur la corniche constituent <strong>de</strong>s agressions culturelles qui<br />

auraient dû faire l’objet d’étu<strong>de</strong>s d’impact environnemental plus attentives aux questions<br />

humaines. En fermant l’accès <strong>de</strong> la Médina et <strong>de</strong> la Gueule Tapée aux véhicules engagés sur<br />

la Corniche, dans un sens ou dans un autre, ses concepteurs en interdisent virtuellement<br />

l’usage à leurs habitants. Revenant <strong>de</strong> la ville, pour aller à n’importe quel point <strong>de</strong> la Médina,<br />

tout automobiliste est obligé <strong>de</strong> bifurquer vers l’avenue Malick Sy pour prendre la rue 6, et<br />

ne pourra plus accé<strong>de</strong>r à la Corniche qu’après avoir traversé tout ce quartier et une bonne<br />

partie <strong>de</strong> la Gueule Tapée en ayant déambulé dans ses rues impraticables aux alentours du<br />

marché éponyme, sauf à prolonger la rue 6 (<strong>de</strong>venue rue 54 dans le quartier <strong>de</strong> la Gueule<br />

Tapée) jusqu’au lycée technique Delafosse par le Canal et ruser en empruntant l’université par<br />

la rue impraticable passant <strong>de</strong>vant la cité Clau<strong>de</strong>l.<br />

Dans le sens opposé, venant <strong>de</strong> Ngor ou Wakaam, les habitants <strong>de</strong> l’un ou l’autre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

quartiers, ne peut plus rallier sa maison en voiture à partir <strong>de</strong> l’avenue <strong>de</strong>s Ambassa<strong>de</strong>urs, à<br />

moins <strong>de</strong> renoncer aux joies <strong>de</strong> la conduite sur la Corniche et aller souffrir les embouteillages<br />

et imprévisibilités <strong>de</strong> l’avenue Cheikh Anta Diop, puis <strong>de</strong> l’avenue Blaise Diagne. La<br />

nouvelle Corniche s’impose dans une intimité envahissante aux habitants <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux<br />

quartiers qu’elle longe sur <strong>de</strong>ux à trois kilomètres, sans que sa jouissance ne leur soit<br />

<strong>de</strong>stinée : toutes les rues perpendiculaires qui donnaient sur l’ancienne Corniche à partir<br />

<strong>de</strong>sdites localités ont été bouchées par la nouvelle infrastructure qui ne permet plus <strong>de</strong><br />

bifurquer à gauche vers la ville.<br />

<strong>Le</strong> cimetière <strong>de</strong> la Médina, véritable nécropole abritant la tombe <strong>de</strong> Cheikh Tourad, dignitaire<br />

<strong>de</strong> la confrérie Khadria, qui reçoit <strong>de</strong>s « pèlerins » <strong>de</strong> tout le pays et jusques <strong>de</strong> la Mauritanie,<br />

celles d’autres figures religieuses tout autant visitées, celles <strong>de</strong> Lamine Guèye et <strong>de</strong> Blaise<br />

Diagne, est un patrimoine historique, un lieu <strong>de</strong> prière, une manière <strong>de</strong> musée. Son accès est<br />

29 Une enquête socio anthropologique aurait vite exposé la profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> cette dimension cosmogonique qui lie<br />

les riverains médinois <strong>de</strong> Sumbédjun à l’océan Atlantique. Témoignages : Mme Anta Tëw n’habite plus la<br />

Médina où elle est née et a grandi à la rue 17. Elle raconte : « Aujourd’hui encore, il m’arrive, quand j’ai un<br />

souci qui me dépasse, ou quand je suis mala<strong>de</strong>, <strong>de</strong> quitter Gédiawaay pour aller là-bas, jeter quelques pièces <strong>de</strong><br />

monnaie et <strong>de</strong> la kola dans la mer. Ma mère qui habite encore ici nous y encourage, mes sœurs et moi ». Mme<br />

Anta Tëw n’est bien évi<strong>de</strong>mment pas la seule à sacrifier à ce type <strong>de</strong> rituel, seulement, les propriétaires du parc<br />

d’attraction ont commencé <strong>de</strong>puis longtemps à interdire l’accès <strong>de</strong> la crique, avant d’entreprendre d’y construire<br />

une structure encore inachevée.<br />

Cierno Ammaat, 56 ans, rue 11 x 16, se souvient <strong>de</strong> ses séjours méditatifs, avec une ban<strong>de</strong> d’amis, sur la tombe<br />

du musicien <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>, le koriste Lalo Kééba Dramé, située au pied d’un gros figuier stérile ; après une<br />

baigna<strong>de</strong> dans l’une <strong>de</strong>s nombreuses criques rocheuses situées <strong>de</strong>rrière le cimetière.<br />

David Dium, 54 ans, ex-habitant <strong>de</strong> la rue 4 x 17, avec un grand sourire nostalgique n’arrive pas à se<br />

débarrasser, encore aujourd’hui, <strong>de</strong> son étonnement quand, pour guérir l’épidémie <strong>de</strong> coqueluche qui sévissait<br />

chez leurs petits frères et sœurs, leurs mamans leur <strong>de</strong>mandèrent, lui et sa ban<strong>de</strong> d’amis en vacance scolaire, <strong>de</strong><br />

ramener <strong>de</strong> leurs randonnées aux abords du cimetière, dans sa partie surplombant la mer, <strong>de</strong>s « batboteurs » -<br />

c’est ainsi qu’ils appelaient une espèce <strong>de</strong> lézard bleu et jaune. L’animal qu’ils s’amusaient à traquer pour le<br />

plaisir, sommairement cuisiné et donné à manger aux mala<strong>de</strong>s, les guérissait quasi instantanément.


<strong>de</strong>venu si difficile que ses visiteurs se font <strong>de</strong> plus en plus rares et que la foule d’humbles<br />

gens qui y venait les vendredis attendre leurs oboles a migré.<br />

Fann Hock, et une partie <strong>de</strong> Fann Rési<strong>de</strong>nce souffrent <strong>de</strong>s mêmes problèmes d’enclavement<br />

que la Gueule Tapée et Médine, mais en connaissent d’autres tenant à la santé <strong>de</strong> leurs<br />

habitants, notamment les insomnies et autres troubles liés aux nuisances sonores induites par<br />

les vrombissements <strong>de</strong>s voitures roulant à gran<strong>de</strong> vitesse sur cette Corniche naturellement<br />

dévolue à une allure <strong>de</strong> promena<strong>de</strong>. Personne ne respecte la consigne <strong>de</strong>s 60 Kms/heure<br />

réglementaires, difficilement applicable, et même paradoxale sur une infrastructure ayant pour<br />

justification <strong>de</strong> rendre facile et rapi<strong>de</strong> l’accès au centre-ville et <strong>de</strong> rendre flui<strong>de</strong> la circulation<br />

<strong>de</strong>s voitures sortant du plateau aux heures <strong>de</strong> pointe. La nuit, les <strong>de</strong>ux voies, avec leurs<br />

largeurs incitatives sont naturellement considérées par certains usagers comme <strong>de</strong>s circuits<br />

automobiles. Et ça vrombit dans les maisons que les trottoirs <strong>de</strong> la Corniche viennent<br />

taquiner, certaines se situant à moins <strong>de</strong> quatre mètres <strong>de</strong> la route qui est venue les trouver là.<br />

Cette veuve désirant gar<strong>de</strong>r l’anonymat trouve que « la façon dont ils ont traité les riverains<br />

que nous sommes prouve que ces gens n’ont aucun sens <strong>de</strong>s responsabilités. A qui on va se<br />

plaindre maintenant ? Et pourquoi ? Est-ce qu’ils vont mettre un agent <strong>de</strong>rrière chaque<br />

automobiliste ? ». Ses griefs ne portent pas seulement sur les bruits, mais aussi sur les<br />

émissions polluantes <strong>de</strong> gaz <strong>de</strong>s pots d’échappement « que les vents amènent jusqu'à nos<br />

chambres », se plaint-elle.<br />

Peu après Sumbédjun, le parc d’attraction « Magic Land », plus près <strong>de</strong> la mer que la Cour <strong>de</strong><br />

Cassation, a été autorisé par les socialistes au pouvoir. Aujourd’hui, couvé par les libéraux,<br />

les promoteurs Libanais <strong>de</strong> ce parc ont privatisé plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cent mètres <strong>de</strong> plages et criques,<br />

les soustrayant aux activités économiques, rituelles et <strong>de</strong> plaisance <strong>de</strong> populations riveraines<br />

n’ayant pas les moyens <strong>de</strong> se payer la piscine et les autres loisirs <strong>de</strong> son voisin, le « Terroubi<br />

».<br />

<strong>Le</strong>s Rahal, eux aussi <strong>de</strong>s Libanais, propriétaires du « Terrou-bi » (<strong>de</strong>ux restaurants, bars,<br />

night-club, piscine, casino et salle <strong>de</strong> machines à sous), sont en train d’étendre leurs activités à<br />

l’hôtellerie avec la bénédiction du pouvoir libéral, en faisant main basse sur un site stratégique<br />

<strong>de</strong>stiné à la surveillance et à la protection <strong>de</strong> la faune <strong>maritime</strong>, et par ricochet, sur une petite<br />

plage, aire marine protégée et zone <strong>de</strong> ponte pour une espèce protégée <strong>de</strong> tortue marine. Or,<br />

cet animal, déjà mis en danger pour les vertus curatives prêtées à sa chair, du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong><br />

la mé<strong>de</strong>cine traditionnelle, est menacé <strong>de</strong> disparition 30 .<br />

<strong>Le</strong>s gar<strong>de</strong>s forestiers que l’extension du « Terrou-bi » a contraints au déplacement avaient<br />

pourtant pu, grâce à leur voisinage avec les pêcheurs traditionnels, sensibiliser ces <strong>de</strong>rniers à<br />

la protection <strong>de</strong>s tortues <strong>de</strong> mer, notamment celle appelée mawo en wolof. Aujourd’hui,<br />

quand ils en prennent une au large, vers les îlots Sarpan, ils la remettent à la mer, en dépit <strong>de</strong><br />

sa réputation aphrodisiaque. On peut légitimement se poser la question <strong>de</strong> savoir qui a bien pu<br />

délivrer l’autorisation <strong>de</strong> construire cet ensemble hôtelier en plein centre d’une aire marine<br />

protégée. L’Anoci a été désignée du doigt, à tort ou à raison. Mais elle a certainement enfreint<br />

les règles <strong>de</strong> l’Eie en installant ses travaux ainsi que tout le personnel administratif ministériel<br />

et municipal dans l’urgence la plus absolue compte tenu <strong>de</strong>s délais insensés qu’elle s’était<br />

30 <strong>Le</strong>s causes <strong>de</strong> cette disparition rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette espèce protégée sont les suivantes : « l’abandon <strong>de</strong> grumes, et<br />

l’éclairage artificiel du littoral et en mer ; la pratique <strong>de</strong> certaines activités telles que les ports, l’exploitation<br />

minière, l’encombrement <strong>de</strong>s plages par les véhicules, le tourisme ; la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong>s habitats marins avec<br />

l’urbanisation littorale ». In Direction <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong>s Etablissements classés, « Rapport national sur<br />

l’état <strong>de</strong> l’environnement marin et côtier », <strong>Dakar</strong>, sans date.


fixée pour construire tous ces hôtels et ces villas <strong>de</strong> luxe qui <strong>de</strong>vaient accueillir les hôtes <strong>de</strong><br />

l’Oci. Nous verrons dans les chapitres suivants que l’Anoci a délibérément violé la loi relative<br />

aux marchés <strong>public</strong>s et transformé durablement le Dpm dakarois en une sorte <strong>de</strong> bombe<br />

écologique qui va plonger <strong>Dakar</strong> et ses habitants dans une impasse environnementale sans<br />

précé<strong>de</strong>nt dans quelques décennies.<br />

La plage « plongeoir » a été conjointement financée par le « Terrou bi » (90 %) et « Magic<br />

Land ». <strong>Le</strong> casino/night club du « terrou bi » a été financé à hauteur <strong>de</strong> 5 milliards <strong>de</strong> francs<br />

Cfa. Un comité <strong>de</strong> suivi et <strong>de</strong> gestion environnementale <strong>de</strong> la plage a été mis en place. Il est<br />

présidé par le sous-préfet <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>-Plateau. C’est dans cette perspective qu’un piège a été<br />

dressé à 100 m <strong>de</strong> la berge pour arrêter les galets qui envahissaient la plage. <strong>Le</strong>s terrains ont<br />

été affectés gracieusement en tant que contrepartie étatique à l’établissement hôtelier qui a<br />

lancé les travaux d’extension et emploierait pour l’instant près <strong>de</strong> 300 employés. Mais la<br />

création d’emplois mal rémunérés le plus souvent et fièrement brandie comme un leitmotiv<br />

dominant représente une maigre consolation par rapport au désastre environnemental que<br />

représente la construction <strong>de</strong> cet hôtel qui obstrue la vue <strong>de</strong> la mer aux passants, privatise <strong>de</strong><br />

facto la plage, met en péril <strong>de</strong>s espèces marines protégées, accélère la fragilité <strong>de</strong> la croûte<br />

terrestre contiguë à la mer et viole, sans l’ombre d’un doute, la loi sur le Dpm.<br />

Derrière le « Terrou bi », le C<strong>de</strong> a aménagé un dépôt <strong>de</strong> production <strong>de</strong> béton armé sur une<br />

superficie <strong>de</strong> plusieurs dizaines d’hectares et sur les berges <strong>de</strong> laquelle venaient pêcher les<br />

a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> la pêche à la ligne ou <strong>de</strong> la plongée sous-marine. L’endroit offrait aux promeneurs<br />

en automobile un site imprenable en face <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine et du centre-ville.<br />

Différents types <strong>de</strong> matériels jonchent le sol y compris le béton produit sur place. Ces<br />

matériaux sont utilisés dans le cadre <strong>de</strong> l’exécution du projet d’élargissement,<br />

d’embellissement et d’aménagement <strong>de</strong> la Corniche Ouest. Il s’agit d’un chantier <strong>de</strong> soutien<br />

aux efforts <strong>de</strong> construction entrepris par l’Anoci et qui sera là jusqu’à la fin <strong>de</strong>s travaux. Des<br />

bureaux provisoires ont également été implantés ici.<br />

Moins d’un kilomètre plus au Nord, le groupe Teylium construit carrément sur le bas <strong>de</strong> la<br />

falaise et sous la houlette <strong>de</strong> l’Anoci, un immense complexe immobilier.<br />

Juste après, la Place du souvenir, construite à coups <strong>de</strong> milliards alors que les populations sont<br />

frappées à hauteur <strong>de</strong> 60 % par une pauvreté <strong>de</strong>s plus abjectes, arbore une esplana<strong>de</strong> en forme<br />

<strong>de</strong> carte géographique <strong>de</strong> l’Afrique construite sur les rochers au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> l’océan. On a la<br />

très nette impression que cette plateforme, récemment achevée à la hâte, est déjà sous la<br />

menace <strong>de</strong> l’érosion, voire, plus sûrement d’une brutale poussée <strong>de</strong> vagues en marée haute, ou<br />

lors <strong>de</strong> ces montées d’eau imprévisibles que connaît la mer en ces endroits.<br />

A côté, un ensemble <strong>de</strong> villas luxueuses est en voie <strong>de</strong> finition. <strong>Le</strong>s villas sont vendues par un<br />

promoteur privé auquel <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> mètres carrés <strong>de</strong> plages sous les falaises ont été<br />

concédées dans le cadre <strong>de</strong>s travaux d’urgence entrepris par l’Anoci peu avant le Sommet <strong>de</strong><br />

l’Oci. <strong>Le</strong>s autorisations avaient été accordées pour loger les hôtes du Sommet. <strong>Le</strong>s travaux<br />

n’ont pu être finalisés à temps, tout comme ceux <strong>de</strong> l’hôtel le « Terrou-bi » supposé, lui aussi<br />

accueillir <strong>de</strong>s hôtes <strong>de</strong> marque <strong>de</strong> la Oumma islamique. <strong>Le</strong> fait qu’aucun <strong>de</strong>s constructeurs<br />

d’hôtel, <strong>de</strong> cliniques et <strong>de</strong> villas sur ces sites privilégiés n’ait pu achever son chantier à temps<br />

(aujourd’hui encore ils construisent ou semblent marquer le pas en plusieurs points du Dpm)<br />

peut légitimement faire penser à une tromperie délibérée sur les délais rendus <strong>public</strong>s par les<br />

responsables <strong>de</strong> l’Anoci, rien que pour légitimer les autorisations <strong>de</strong> construire qui ont été<br />

accordées dans le laxisme le plus navrant.


<strong>Le</strong>s terrains <strong>de</strong> Mermoz Est (10 hectares), allant <strong>de</strong> la trémie se trouvant à hauteur d’« Atépa<br />

Technologies » au prochain rond point aux <strong>de</strong>ux stèles recouvertes <strong>de</strong> céramique, et dont prés<br />

<strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong> la superficie était classées non aedificandi, sont aujourd’hui presque<br />

entièrement bâtis et vendus rubis sur l’ongle aux classes sociales hégémoniques 31 .<br />

Ici certaines villas, société immobilière, ou encore école sont à moins <strong>de</strong> trois ou même <strong>de</strong>ux<br />

mètres en certains endroits, <strong>de</strong> la chaussée en violation flagrante <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> l’article<br />

213 du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’urbanisme stipulant que « l’autorisation <strong>de</strong> construire ne peut être accordée<br />

pour une construction <strong>de</strong>stinée à l’habitation, si elle est édifiée à moins <strong>de</strong> 25 mètres <strong>de</strong> part et<br />

d’autre <strong>de</strong> l’axe <strong>de</strong>s autoroutes et à 25 mètres <strong>de</strong> part et d’autre <strong>de</strong>s routes d’intérêt général ».<br />

Même en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> cet espace « Mermoz-Atépa », véritable cas d’école sur la violation <strong>de</strong>s<br />

lois régissant le Dpm, ailleurs sur la Corniche, très peu <strong>de</strong> constructions respectent ces<br />

dispositions. Circonstance atténuante ou carrément excuse pour beaucoup <strong>de</strong> ses riverains,<br />

c’est la nouvelle Corniche, route d’ « utilité publique » par excellence qui, en s’élargissant,<br />

serait venue à eux.<br />

Une petite pause promena<strong>de</strong> sur la plage <strong>de</strong> la Mosquée <strong>de</strong> la Divinité <strong>de</strong> Waakam permet<br />

d’avoir une vue saisissante <strong>de</strong> ce qu’une citée perchée dangereusement sur la falaise est en<br />

train <strong>de</strong> naître sur ce plateau stratégique. <strong>Le</strong>s contreforts <strong>de</strong> la falaise avant et après le petit<br />

embarcadère aménagé pour les pêcheurs <strong>de</strong> la communauté Lébu sont inlassablement assaillis<br />

par <strong>de</strong>s vagues <strong>de</strong> plusieurs mètres <strong>de</strong> haut qui induisent un niveau <strong>de</strong> perte du trait <strong>de</strong> côte à<br />

hauteur d’au moins 1 mètre par an, selon certaines estimations.<br />

Vers la zone <strong>de</strong>s Mamelles, encore <strong>de</strong>s projets ayant profité <strong>de</strong>s urgences du sommet <strong>de</strong> l’Oci<br />

et qui n’auront pas servi le sommet. Juste après la Clinique <strong>de</strong>s Mamelles, une construction en<br />

contrebas <strong>de</strong> la falaise. <strong>Le</strong> panneau indique la construction d’une « clinique ambulatoire »,<br />

vieux projet d’une dizaine d’années ayant commencé à voir le jour avec les travaux <strong>de</strong><br />

l’Anoci et qui avait aussi servi dans la communication <strong>de</strong>stinée à nous vendre les ambitions <strong>de</strong><br />

l’événement. Or, six mois après le sommet, ce projet porté par <strong>de</strong>s privés Sénégalais est<br />

encore en chantier.<br />

Tout à côté <strong>de</strong> la clinique, un autre projet inachevé lié à l’Oci est désigné par l’imagerie<br />

populaire comme « le projet <strong>de</strong>s Espagnols ». En fait, la construction <strong>de</strong> cet hôtel pieds dans<br />

l’eau viole une règle sur laquelle, semble-t-il, le pouvoir n’aurait pas voulu transiger. En tout<br />

cas, aujourd’hui, les bâtiments presque achevés sont à l’abandon 32 .<br />

31 Des architectes parfaitement au courant <strong>de</strong>s transactions immobilières sur cette partie du Dpm estiment qu’il y<br />

aurait <strong>de</strong>s tenants <strong>de</strong> villas disposant <strong>de</strong> titres fonciers dans cette zone non aedificandi. Cette frau<strong>de</strong> aurait été<br />

rendue possible grâce à <strong>de</strong>s complicités administratives sous l’ancien et le nouveau régimes, plus<br />

particulièrement durant la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> transition électorale entre février et mars 2000. Une notabilité <strong>de</strong> l’ancien<br />

régime aurait disposé d’un permis d’occuper sur quelques milliers <strong>de</strong> mètres carrés <strong>de</strong> terrain non aedificandi<br />

qu’il a pu morceler, et, quelques années plus tard, transformer en titres fonciers en bonne et due forme.<br />

Au cours d’une promena<strong>de</strong> sur la Corniche, en 2002, bien avant que la construction <strong>de</strong> ces villas n’ait été<br />

entreprise, le prési<strong>de</strong>nt Abdoulaye Wa<strong>de</strong> prétendait avoir été choqué par les nombreux chantiers sur le Dpm à<br />

hauteur <strong>de</strong> Mermoz comme ailleurs, et avait ordonné l’arrêt <strong>de</strong> tous les travaux afin d’y « mettre <strong>de</strong> l’ordre ».<br />

Une Haute autorité <strong>de</strong> la Corniche avait alors été créée et dirigée par l’architecte conseil du Chef <strong>de</strong> l’Etat, M.<br />

Pierre Goudiaby Atépa qui a d’ailleurs, par la suite, abandonné cette structure. Cette <strong>de</strong>rnière n’avait pas réussi,<br />

en tout état <strong>de</strong> cause, à arrêter le mouvement frénétique d’occupation du Dpm <strong>de</strong> la presqu’île.


Après le projet espagnol mort-né une tourne à gauche mène vers l’ex Club Med installé là<br />

<strong>de</strong>puis quarante ans, dans une zone où poussent ici et là <strong>de</strong> nouveaux chantiers <strong>de</strong> villas <strong>de</strong><br />

luxe pieds dans l’eau ainsi que <strong>de</strong>s restaurants hôtels et rési<strong>de</strong>nces haut <strong>de</strong> gamme. Si<br />

certaines utilités et villas sont à bonne distance <strong>de</strong> la mer, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la route asphaltée, ici<br />

aussi s’est constituée au fil <strong>de</strong>s ans une véritable chaîne <strong>de</strong> béton faites <strong>de</strong> constructions<br />

diverses avec une emprise, n’ayant rien <strong>de</strong> « précaire et révocable » sur le Dpm. Ce sont<br />

l’hôtel « <strong>Le</strong>s Almadies » (ex Club Med, racheté par un groupe arc-en-ciel comprenant <strong>de</strong>s<br />

privés Sénégalais et étrangers), le Ngor-Diarama et l’Hôtel « <strong>Le</strong> Méridien » <strong>de</strong> Ngor (ancien<br />

Hôtel du Gouvernement général <strong>de</strong> l’Aof, tous rachetés par <strong>de</strong>s parties libanaises en même<br />

temps que le complexe hôtelier « <strong>Le</strong> Calao ») et « <strong>Le</strong> Méridien Prési<strong>de</strong>nt » mis récemment<br />

aux enchères par l’Etat, pour ne citer que les espaces touristiques et <strong>de</strong> plaisance les plus<br />

importants. Ils interdisent tous à la collectivité l’accès à <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> mètres <strong>de</strong> plages.<br />

<strong>Le</strong>s retombées économiques <strong>de</strong> tels établissements sur la communauté Lébu <strong>de</strong> Yoff, Ngor et<br />

Wakaam restent encore incertaines bien que <strong>de</strong>s dizaines d’emplois souvent instables aient été<br />

créés. Par contre, l’impact social <strong>de</strong> ces hôtels haut <strong>de</strong> gamme sur la jeunesse du triangle<br />

NGoor-Yoof-Waakaam est visible à travers la prostitution féminine et masculine qui se<br />

propage comme un cancer et à une vitesse directement proportionnelle à l’aggravation <strong>de</strong><br />

l’extrême pauvreté dans tout le pays. Cette zone touristique est <strong>de</strong>venue un pôle d’attraction<br />

(tout comme celui <strong>de</strong> la Petite côte, et plus particulièrement la station balnéaire <strong>de</strong> Saly<br />

Portudal) pour <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> jeunes désœuvrés qui viennent généralement habiter dans<br />

certains quartiers <strong>de</strong>s villages traditionnels Lébus non loin du « Casino » lui aussi appartenant<br />

à un groupe libanais. Une kyrielle <strong>de</strong> boîtes <strong>de</strong> nuit, <strong>de</strong> maisons <strong>de</strong> passe, <strong>de</strong> pizzerias et <strong>de</strong><br />

« karaokés » a brusquement fait son apparition dans toute la zone <strong>de</strong>s Almadies qui est<br />

<strong>de</strong>venue la plaque tournante <strong>de</strong> la prostitution haut et bas <strong>de</strong> gamme dans la presqu’île du Cap<br />

Vert.<br />

La zone <strong>de</strong>s Almadies a <strong>de</strong> tous temps été convoitée par les élites administratives, politiques<br />

et du secteur privé. Dès la fin <strong>de</strong>s années 1960, les autorités gouvernementales avaient<br />

envisagé d’en faire une zone rési<strong>de</strong>ntielle. Sous la magistrature du Prési<strong>de</strong>nt Abdou Diouf, les<br />

autorités gouvernementales déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à un remembrement <strong>de</strong>s terrains. Mais les<br />

Ngoorois se sont sentis lésés par l’opération. Rien n’a été fait pour réparer les injustices<br />

infligées à <strong>de</strong>s familles qui se sont senties grugées par la perte <strong>de</strong> terrains qu’ils ont défriché<br />

génération après génération mais sans prendre la précaution <strong>de</strong> les faire i<strong>de</strong>ntifier auprès <strong>de</strong>s<br />

autorités concernées. 2001, la ruée vers les terrains remembrés s’accélère. Partout <strong>de</strong>s murs <strong>de</strong><br />

délimitation sont érigés suivis par <strong>de</strong>s villas. Au terme d’une tournée dans la zone, le<br />

Prési<strong>de</strong>nt nouvellement élu, M. Abdoulaye Wa<strong>de</strong>, aurait décidé <strong>de</strong> faire arrêter tous les<br />

travaux et la construction <strong>de</strong> nouvelles habitations. Selon divers témoignages, le Chef <strong>de</strong><br />

l’Etat aurait même fait détruire l’une <strong>de</strong>s maisons délinquantes construites sur le Dpm.


Carte montrant le remembrement <strong>de</strong> NGor-Almadies<br />

Par la suite, un brusque revirement <strong>de</strong> la part du Chef <strong>de</strong> l’Etat permet la redistribution <strong>de</strong>s<br />

terres tant convoitées. Il paraîtrait que c’est le Chef <strong>de</strong> l’Etat lui-même qui aurait avalisé la<br />

cession <strong>de</strong> ces terrains. Aucun témoignage précis n’est cependant venu corroborer cette<br />

allégation. Mais <strong>de</strong>s témoignages concordants permettent <strong>de</strong> savoir que <strong>de</strong>s dignitaires du<br />

parti libéral ainsi que <strong>de</strong>s chefs d’Etat étrangers, tous proches du Chef <strong>de</strong> l’Etat, auraient<br />

obtenu <strong>de</strong>s terrains <strong>de</strong> plusieurs milliers <strong>de</strong> mètres carrés. On cite pèle mêle les noms d’un<br />

chef d’Etat d’Afrique centrale, d’un autre du Maghreb (dont le nom est souvent revenu dans<br />

les cas <strong>de</strong> terrains situés sur les meilleures prises du Dpm et même à Popenguine dans un<br />

espace mitoyen à la rési<strong>de</strong>nce secondaire du Chef <strong>de</strong> l’Etat). On cite également les noms <strong>de</strong><br />

dignitaires du gouvernement et du parti dominant, ainsi que <strong>de</strong>s chantiers ouverts dans le<br />

cadre <strong>de</strong> l’Anoci pour y construire <strong>de</strong>s logements qui <strong>de</strong>vaient abriter les chefs d’Etat<br />

étrangers, hôtes <strong>de</strong> la Conférence islamique.


Cette statue géante <strong>de</strong> plusieurs dizaines <strong>de</strong> mètres trônera au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la capitale au prix ahurissant <strong>de</strong><br />

16 milliards <strong>de</strong> francs Cfa consentis par le Chef <strong>de</strong> l’Etat sénégalais au secteur privé coréen, au détriment<br />

<strong>de</strong>s sculpteurs locaux <strong>de</strong> rang mondial, et, notamment <strong>de</strong> M. Ousmane Sow, une sommité <strong>de</strong> la sculpture<br />

mo<strong>de</strong>rne, dont les œuvres ont longtemps été exposées <strong>de</strong>vant le parvis du Musée <strong>de</strong> l’Homme <strong>de</strong> Paris.<br />

Cette manne d’argent aurait pu entièrement remembrer les Almadies et équiper la corniche Ouest d’oasis,<br />

<strong>de</strong> jardins et <strong>de</strong> parcours sportifs tous ouverts au <strong>public</strong> et aux jeunes en particulier.<br />

Face à ces assauts répétés et considérables du patrimoine foncier <strong>public</strong> voire « traditionnel »,<br />

les mairies <strong>de</strong> Yooff, NGoor et Wakaam ainsi que les Jaraafs Lébus se sont concertés pour<br />

prendre la mesure <strong>de</strong>s choses et adopter une stratégie <strong>de</strong> riposte à la mesure <strong>de</strong>s enjeux liés au<br />

contrôle <strong>de</strong>s terres qui entourent ces communautés <strong>de</strong> pêcheurs-cultivateurs. <strong>Le</strong>s<br />

communautés Lébus se sentent, en effet, menacées par l’explosion démographique et la<br />

<strong>de</strong>nsité humaine au sein d’une presqu’île à laquelle tout les rattache, y compris leurs propres<br />

racines ancestrales, cosmogoniques et religieuses. En outre, les Lébus, ayant été expropriés<br />

une première fois par les colons Français –le terrain entourant l’aéroport a été réquisitionné<br />

pour faits <strong>de</strong> guerre en 1939 et les propriétaires <strong>de</strong> titres, tous Lébus avaient été expropriés. Ce<br />

sont ces mêmes terrains qui ont été cédés par l’administration, sans doute avec l’onction du<br />

pouvoir exécutif, à l’un <strong>de</strong> ses alliés politiques à la très modique somme <strong>de</strong> 4 000 francs Cfa<br />

le mètre carré 33 . L’Asecna s’est également récemment plainte <strong>de</strong> ce que le vaste terrain du<br />

Dpm situé non loin d’un sanctuaire religieux Lébu sur le littoral et qui aurait été cédé au<br />

Khalife général <strong>de</strong>s Tijaan, Serigne Mansour Sy, lui appartiendrait. Dans le périmètre <strong>de</strong>s<br />

Almadies, 140 terrains situés dans les zones d’extension <strong>de</strong>stinées aux Ngorois et<br />

abusivement attribuées à <strong>de</strong> tierces parties feraient l’objet <strong>de</strong> contestations qui doivent être<br />

portées <strong>de</strong>vant les juridictions compétentes. <strong>Le</strong>s milliers d’hectares <strong>de</strong> terrain <strong>de</strong> l’ancien Club<br />

Med auraient été cédés au prix symbolique <strong>de</strong> 200 francs le mètre carré à un consortium <strong>de</strong><br />

privés Sénégalais et étrangers dans <strong>de</strong>s conditions qui ne seraient pas entièrement conformes<br />

aux lois en vigueur. Une autre partie <strong>de</strong> ce site privilégié aurait été cédée à <strong>de</strong>s Américains.<br />

La majorité <strong>de</strong>s Ngorois interrogés estiment que le gouvernement a procédé au<br />

remembrement <strong>de</strong>s Almadies dans l’opacité et l’absence totale <strong>de</strong> transparence. Ils exigent un<br />

audit <strong>de</strong> l’opération surtout au vu <strong>de</strong> ce qu’il y a encore beaucoup d’espaces libres non<br />

occupés et laissés en friche à <strong>de</strong>s fins hautement spéculatives. <strong>Le</strong>s autorités municipales <strong>de</strong><br />

Ngoor pointent du doigt un certain A. D. qui serait l’auteur du remembrement. On lui<br />

reproche, d’avoir accaparé plusieurs terrains <strong>de</strong> 1 500 mètres carrés. D’autres noms sont cités,<br />

notamment ceux <strong>de</strong> O. K. D. et certains <strong>de</strong> ses enfants qui auraient acquis une partie <strong>de</strong> ces<br />

terrains contestés et y auraient construit chacun un immeuble <strong>de</strong> grand standing. <strong>Le</strong>s noms<br />

d’anciens dignitaires <strong>de</strong> l’appareil d’Etat dont un ancien Préfet sont également cités. Ils sont<br />

accusés d’avoir illégalement accaparé plusieurs parcelles alors qu’ils ne <strong>de</strong>vraient pas<br />

33 La presse a largement cite le nom <strong>de</strong> M. MBackiou Faye, un ancien dignitaire du Parti socialiste et maintenant<br />

membre du Parti démocratique senegalais, comme le bénéficiaire <strong>de</strong> cette opération foncière a très haut risque.


énéficier <strong>de</strong> ces terres. Selon les mêmes sources, un ministre d’Etat figure également sur une<br />

longue liste <strong>de</strong> propriétaires <strong>de</strong> terrains contestés par les Ngoorois. Un ancien Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

l’Assemblée nationale qui aurait, en son temps, bénéficié d’une autorisation <strong>de</strong> construire sur<br />

une parcelle <strong>de</strong> 2 000 mètres carrés a dû renoncer à son projet face à la détermination <strong>de</strong>s<br />

jeunes <strong>de</strong> Ngoor qui ont détruit les ouvrages <strong>de</strong> base qui commençaient à émerger.<br />

Dans l’île <strong>de</strong> Ngoor, un ministre d’Etat est accusé, à tort ou à raison, d’avoir mis le grappin<br />

sur un terrain stratégique <strong>de</strong> 1 000 mètres carrés qui appartenait au <strong>domaine</strong> militaire et situé<br />

sur les flancs d’une colline en face <strong>de</strong> la baie océanique alors que les constructions sur l’île<br />

sont interdites, en principe. Cette opération illégale à tous points <strong>de</strong> vue aurait pris place<br />

contre l’avis <strong>de</strong> l’Etat Major militaire. En outre, la loi n’autorise personne à édifier en dur sur<br />

l’Ile <strong>de</strong> Ngoor. On cite également le nom d’un dignitaire <strong>de</strong> l’ancien régime socialiste qui<br />

aurait acquis, en plus d’une villa située sur le Dpm en face <strong>de</strong> la zone Atepa où il habite<br />

présentement, un terrain dans l’Ile <strong>de</strong> Ngoor sur <strong>de</strong>s bases que <strong>de</strong>s dignitaires Ngoorois,<br />

interrogés, ont condamné et regretté.<br />

<strong>Le</strong>s mêmes récriminations sont revenues dans le cas d’un ancien transhumant du Parti<br />

socialiste maintenant membre du Pati démocratique sénégalais dont le terrain situé près du<br />

Méridien Prési<strong>de</strong>nt aurait été acquis dans <strong>de</strong>s conditions contestées par les Ngoorois. Derrière<br />

le Méridien Prési<strong>de</strong>nt, 9 hectares adossés au flanc oriental du village traditionnel <strong>de</strong> Ngoor ont<br />

été remblayés par l’Etat et distribués à <strong>de</strong>s affidés politiques. Dans ce cas-ci, le nom d’un<br />

ancien Premier ministre a été cité parmi les bénéficiaires, sans que nous puissions en apporter<br />

la preuve certaine. Mais les témoignages recueillis à Ngoor même auprès <strong>de</strong> notabilités<br />

locales interpellent l’opinion et méritent un examen attentif.<br />

En vérité, ces remembrements illégaux avaient commencé dès 1991, du temps où les<br />

Socialistes étaient aux affaires, lorsqu’un certain Marcel Prouvost, Français <strong>de</strong> souche établi<br />

au Sénégal, avait bénéficié d’un bail signé par le Gouverneur <strong>de</strong> l’époque qui aurait d’ailleurs,<br />

d’après <strong>de</strong>s témoignages recueillis sur place, acheté l’une <strong>de</strong>s maisons anciennement occupée<br />

par un colon Français. <strong>Le</strong> bail <strong>de</strong> M. Prouvost est scandaleux à tous égards puisqu’il porte sur<br />

un espace les pieds dans l’eau <strong>de</strong> plusieurs milliers <strong>de</strong> mètres carrés et dont le propriétaire ne<br />

s’est pas fait attendre pour initier <strong>de</strong>s travaux au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s hautes vagues, en déplaçant <strong>de</strong>s<br />

tonnes <strong>de</strong> gros rochers d’un point à un autre <strong>de</strong> la côte et en remblayant d’autres endroits <strong>de</strong> la<br />

plage, ce qui a abouti <strong>de</strong> facto à la privatisation <strong>de</strong> cette partie <strong>de</strong> la plage naguère utilisée par<br />

les Ngoorois et les jeunes <strong>Dakar</strong>ois en général qui ne disposent plus <strong>de</strong> l’espace vital dont ils<br />

ont besoin, face à un croît démographique sans précé<strong>de</strong>nt. Depuis lors, M. Prouvost serait en<br />

contentieux légal avec la Mairie <strong>de</strong> Ngoor pour déversement illégal <strong>de</strong> l’eau sale <strong>de</strong> ses égouts<br />

dans l’océan.<br />

La Mairie <strong>de</strong> Ngoor estime que toutes les zones où <strong>de</strong>vaient être édifiés <strong>de</strong>s équipements<br />

collectifs ont été pillées, à l’exception <strong>de</strong> l’école dont la moitié a été donnée à un privé qui<br />

serait porteur d’un projet <strong>de</strong> construction d’une école privée mais qui pourrait bien construire<br />

autre chose à la place. Sur d’autres terrains <strong>de</strong>stinés à <strong>de</strong>s équipements collectifs sanitaires,<br />

l’Etat a laissé construire <strong>de</strong>s villas <strong>de</strong> grand standing au détriment <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> base <strong>de</strong>s<br />

Ngoorois. En outre, la Mairie <strong>de</strong> Ngoor aurait souhaité construire tout au long du Dpm<br />

occi<strong>de</strong>ntal un parcours sportif agrémenté <strong>de</strong> mini restaurants qui ne bouchent pas la vue<br />

<strong>maritime</strong>, d’arbres et <strong>de</strong> jardins avec <strong>de</strong>s oasis tous les 100 mètres accessibles au grand <strong>public</strong>.<br />

Cette passe d’armes entre une mairie contrôlée par <strong>de</strong>s jeunes indépendants qui ont utilisé la<br />

bannière verte pour accé<strong>de</strong>r à la compétition électorale lors <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières municipales montre


ien qu’il y a un niveau croissant <strong>de</strong> contradictions entre les tendances centrifuges du pouvoir<br />

monopoliste d’Etat et les velléités d’indépendance et d’autonomie <strong>de</strong>s collectivités locales<br />

dont les compétences transférées sont un tonneau vi<strong>de</strong> qui ne leur laisse que <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong><br />

manœuvre extrêmement réduites.<br />

Dans ce cas précis, normalement la Mairie <strong>de</strong> NGoor <strong>de</strong>vrait déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong> l’affectation <strong>de</strong>s<br />

terres, comme c’est le cas en ce qui concerne les communautés rurales <strong>de</strong> la Petite Côte en<br />

particulier. Mais ici, l’Etat centralisateur réapparaît dans toute sa lai<strong>de</strong>ur à partir du moment<br />

où le pouvoir exécutif hyper centralisé donne le ton et déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> privatiser l’ancien champ <strong>de</strong><br />

tir libéré par l’armée d’occupation française tout récemment et, sans doute, bientôt, le camp<br />

Archinard abandonné <strong>de</strong>puis quelques temps par les militaires Français, ouvrant ainsi une<br />

compétition féroce entre divers prétendants à ce pactole foncier <strong>de</strong>s plus prometteurs.<br />

Selon plusieurs operateurs privés concernés par ces mouvements suspects dans le registre<br />

foncier, le Chef <strong>de</strong> l’Etat est largement responsable <strong>de</strong> cette situation <strong>de</strong> laisser-faire en ce qui<br />

concerne le mouvement accéléré d’accaparement <strong>de</strong>s terres du Dpm, puisque les terrains<br />

déclassés du Dpm et du patrimoine foncier <strong>de</strong> l’Etat feraient souvent l’objet <strong>de</strong> décrets qui<br />

sont rarement sinon jamais publiés au Journal Officiel, ce qui ajoute au désordre foncier<br />

ambiant déjà suffisamment ravageur.<br />

<strong>Le</strong> projet <strong>de</strong> construction d’une ville nouvelle entre le Lac Rose et l’océan Atlantique dans<br />

lequel serait impliqué l’architecte conseil du Chef <strong>de</strong> l’Etat, M. Pierre Goudiaby va sans doute<br />

soulever le même type <strong>de</strong> problèmes entre l’Etat et les communautés qui, <strong>de</strong>puis la nuit <strong>de</strong>s<br />

temps occupent ces espaces, les mettent plus ou moins en valeur avec les moyens archaïques<br />

dont ils disposent et se voient dépossédées du jour au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> ces terres et <strong>de</strong> ces<br />

espaces marins qui leur ont toujours procuré les moyens <strong>de</strong> survivre à la faim et aux besoins<br />

les plus pressants.<br />

Une vue du Lac Rose et <strong>de</strong> l’océan Atlantique. C’est dans cet espace que l’Etat va bientôt construire une<br />

nouvelle ville (projet Retba, du nom du lac) sans prendre en compte les intérêts vitaux <strong>de</strong>s communautés<br />

<strong>de</strong> pêcheurs et d’agriculteurs qui y sont installés <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s siècles<br />

Dans le cadre <strong>de</strong> ce qu’on appelle le tourisme local, <strong>de</strong>s concessions sont données à <strong>de</strong>s<br />

opérateurs sur le Dpm selon les mêmes modalités maintenant connues d’occupation <strong>de</strong> cet<br />

espace. C’est le cas pour « <strong>Le</strong> Sunugal » l’auberge <strong>de</strong> M. Prouvost citée plus haut. C’est aussi


le cas du restaurant « <strong>Le</strong> Virage » appartenant à un Libanais et situé à l’intersection <strong>de</strong> la<br />

route du même nom menant à l’aéroport Léopold Sédar Senghor et <strong>de</strong> la piste conduisant vers<br />

Yoff Waraar, ce nouveau quartier rési<strong>de</strong>ntiel progressivement implanté sur le rivage, <strong>de</strong>rnière<br />

étape <strong>de</strong> notre randonnée.<br />

Ici, les premiers occupants se mor<strong>de</strong>nt le doigt d’avoir plus ou moins respecté les distances<br />

réglementaires avec la mer. Installés <strong>de</strong>puis trente à quinze ans, ils ont été envahis par <strong>de</strong>s<br />

nouveaux arrivants peu soucieux <strong>de</strong>s lois et <strong>de</strong>s précautions sécuritaires élémentaires. Tout le<br />

long du rivage, il y a dix ans seulement <strong>de</strong>s criques rocheuses disposées astucieusement par la<br />

nature offraient <strong>de</strong>s piscines naturelles aux baigneurs. Des villas <strong>de</strong> grand standing sont<br />

venues obstruer la vue <strong>de</strong> la mer aux anciens occupants <strong>de</strong> Yoff Waraar 34 et à ceux <strong>de</strong>s<br />

villages environnants <strong>de</strong> pêcheurs. Au surplus, les populations riveraines sont sevrées <strong>de</strong> la<br />

brise rafraîchissante venue du large, ce qui fait qu’elles sont étouffées par une chaleur d’étuve<br />

quasiment à longueur d’année. Naguère, cette zone alors aérée, laissait aux promeneurs à<br />

pieds ou en véhicule venus <strong>de</strong> partout <strong>de</strong>s voies d’accès à la mer. Aujourd’hui, elle n’offre<br />

plus que le spectacle d’un dédale <strong>de</strong> rues étroites, d’impasses et <strong>de</strong> chemins impraticables en<br />

voiture. Il est <strong>de</strong>venu presque impossible <strong>de</strong> contourner le quartier par la berge océane comme<br />

au bon vieux temps puisque les maisons privées ont chacune contribué, à quelques exceptions<br />

près, à privatiser les plages dans une mesure qui dépasse l’enten<strong>de</strong>ment.<br />

La question centrale que soulève la gestion du littoral océanique est <strong>de</strong> savoir comment en eston<br />

venu à cé<strong>de</strong>r, à travers <strong>de</strong>s pratiques illégales largement avérées, ce que <strong>Dakar</strong> compte <strong>de</strong><br />

plus précieux et vital à sa survie et son avenir : le Dpm qui la ceinture comme une perle<br />

argentée étincelante <strong>de</strong> beauté naturelle à travers le scintillement <strong>de</strong> ses vagues ondoyantes<br />

sous le ciel dégagé <strong>de</strong>s Tropiques. La prise <strong>de</strong> décision <strong>de</strong> 1960 à nos jours, et certainement<br />

durant la colonisation française, a conduit à <strong>de</strong>s erreurs <strong>de</strong> jugement et <strong>de</strong>s errements<br />

juridiques et économiques d’une gravité extrême qui vont avoir un impact sur les générations<br />

présentes et futures. C’est à l’examen du cadre juridique qui a permis ces dysfonctionnements<br />

que nous allons nous atteler dans le chapitre sur la gestion juridique du Dpm.<br />

Avant cela, le cas <strong>de</strong> l’Anoci mérite d’être examiné compte tenu <strong>de</strong> ce qu’il a induit <strong>de</strong>s<br />

dépenses à hauteur d’environ 385 milliards <strong>de</strong> francs Cfa et qu’il est au centre <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s<br />

controverses politico-financières les plus considérables <strong>de</strong>puis l’accès du Sénégal à la<br />

souveraineté internationale.<br />

34<br />

Une déformation linguistique typique <strong>de</strong> la colonisation française a transformé l’appellation Waraar en<br />

« Ranrhar ».


Chapitre 3<br />

<strong>Le</strong>s chantiers <strong>de</strong> l’Anoci<br />

L’Agence nationale <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong> la conférence islamique (Anoci) a été créée à la<br />

veille du sommet <strong>de</strong> l’Organisation <strong>de</strong> la conférence islamique (Oci) par le Chef <strong>de</strong> l’Etat<br />

sénégalais 35 . Ce <strong>de</strong>rnier a placé son propre fils à la tête <strong>de</strong> cette agence contre l’avis <strong>de</strong><br />

nombreux Sénégalais et notamment <strong>de</strong> l’opposition sénégalaise qui voyait là un conflit<br />

d’intérêts manifeste mais surtout la porte ouverte à <strong>de</strong>s dérapages institutionnels et<br />

professionnels, M. Karim Wa<strong>de</strong> n’ayant pas nécessairement le meilleur profil pour trôner au<strong>de</strong>ssus<br />

d’une manne financière aussi importante avec <strong>de</strong>s implications non moins<br />

significatives aux plans diplomatique, architectural et <strong>de</strong> l’aménagement territorial.<br />

La mission <strong>de</strong> l’Anoci est d’ « organiser, construire et réaliser, mobiliser les financements et<br />

ressources nécessaires à l’organisation du 11ème sommet <strong>de</strong> l’Oci ; accompagner les plus<br />

démunis conformément aux enseignements du Coran ; renforcer la coopération et la solidarité<br />

entre les pays membres <strong>de</strong> l’Oci et le Sénégal 36 ».<br />

Cette mission taille à l’agence un manteau surdimensionné qui couvre les ministères <strong>de</strong><br />

l’Economie et <strong>de</strong>s Finances, <strong>de</strong>s Affaires Étrangères, <strong>de</strong> l’Urbanisme et <strong>de</strong> l’Aménagement du<br />

Territoire, du Patrimoine Bâti, <strong>de</strong> l’Habitat et <strong>de</strong> la Construction ainsi que tous les autres<br />

ministères parties prenantes du 11ème Sommet <strong>de</strong> l’Oci. Autant dire, que c’est tout le<br />

gouvernement qui est placé dans une position d’ouverture exceptionnelle aux <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rata <strong>de</strong> M.<br />

Karim Wa<strong>de</strong>.<br />

En outre, sous le prétexte <strong>de</strong> venir en ai<strong>de</strong> aux démunis, l’Anoci s’est livrée à une exploitation<br />

éhontée <strong>de</strong> la pauvreté extrême qui sévit au Sénégal à <strong>de</strong>s fins ouvertement politiques et<br />

hégémoniques. L’Islam, dans ces conditions, n’a été qu’un fonds <strong>de</strong> commerce pour placer<br />

sur une rampe <strong>de</strong> lancement que l’on croyait imparable le dauphin attitré du Chef <strong>de</strong> l’Etat. La<br />

récente radicalisation <strong>de</strong>s imams et <strong>de</strong>s gui<strong>de</strong>s religieux <strong>de</strong> la zone périurbaine dakaroise, sans<br />

compter les hameaux religieux où le mécontentement social est la chose la mieux partagée,<br />

montre bien que l’entreprise <strong>de</strong> débauchage <strong>de</strong>s imams et <strong>de</strong> distribution <strong>de</strong> minables sommes<br />

d’argent sous les projecteurs <strong>de</strong> la télévision nationale est vouée au départ à l’échec, car on ne<br />

peut pas corrompre tout un peuple tout le temps et espérer que ce <strong>de</strong>rnier ne finira pas par<br />

vous haïr et par faire valoir les arguments hautement dissuasifs <strong>de</strong> la rue.<br />

35 La création <strong>de</strong> l’agence a été contestée par l’opposition sénégalaise qui a rappelé en son temps que<br />

l’organisation <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong>s sommets <strong>de</strong> l’Oci qui revenait au Prési<strong>de</strong>nt Abdou Diouf n’avait pas nécessité la<br />

création d’une agence spéciale et s’était déroulée dans <strong>de</strong>s conditions jugées satisfaisantes. <strong>Le</strong> Chef <strong>de</strong> l’Etat<br />

sénégalais, M. Abdoulaye Wa<strong>de</strong>, a créé, en l’espace <strong>de</strong> quelques années seulement, 32 agences rattachées à la<br />

Prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la République avec un statut d’autonomie administrative et financière en contradiction flagrante<br />

avec les principes <strong>de</strong> la gouvernance démocratique et <strong>de</strong> gestion transparente <strong>de</strong>s <strong>de</strong>niers <strong>public</strong>s.<br />

36 Voir le site <strong>de</strong> l’Anoci : http://www.anoci.com


Dans le même temps, en raison <strong>de</strong> sa position privilégiée <strong>de</strong> Conseiller <strong>de</strong> rang exceptionnel<br />

<strong>de</strong> son père, Karim Wa<strong>de</strong> est délibérément et <strong>de</strong> facto placé au centre du dispositif <strong>de</strong> la prise<br />

<strong>de</strong> décision exécutive, ce dont la presse nationale et internationale, à l’unisson, s’est d’autant<br />

inquiétée, que l’Agence emploie une centaine <strong>de</strong> personnes venus d’horizons les plus divers, y<br />

compris <strong>de</strong>s milieux politiques, diplomatiques et maraboutiques. Dans le même temps, un<br />

mouvement politique dénommé la « Génération du concret » est créé pour soutenir Karim<br />

Wa<strong>de</strong> et le placer dans une position avantageuse sur l’échiquier politique, dans les<br />

mouvements <strong>de</strong> jeunes, les dahiras, les principaux khalifats islamiques du pays ainsi que la<br />

hiérarchie catholique et les différents ordres religieux installés au Sénégal. <strong>Le</strong> déploiement<br />

d’un tel dispositif a été l’objet d’une véritable levée <strong>de</strong> boucliers jusques et y compris au sein<br />

<strong>de</strong> l’appareil <strong>de</strong> direction du Parti démocratique sénégalais.<br />

Au plan institutionnel, l’Anoci est gérée par son Prési<strong>de</strong>nt Karim Wa<strong>de</strong>, son Directeur<br />

Exécutif, Abdoulaye Baldé 37 qui est sous la tutelle directe du Chef <strong>de</strong> l’Etat dans la<br />

nomenclature <strong>de</strong> gestion du gouvernement, et, d’un Conseil <strong>de</strong> surveillance comprenant, outre<br />

les ministres concernés du gouvernement, les Ambassa<strong>de</strong>urs <strong>de</strong>s pays qui ont financé l’Anoci,<br />

<strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong> la société civile (Synpics, Cnp, Raddho, Forum civil), <strong>de</strong>s corps <strong>de</strong><br />

contrôle <strong>de</strong> l’Etat (contrôle financier, Dreat), du Conseil <strong>de</strong> la République, <strong>de</strong> l’Assemblée<br />

nationale et du ministre <strong>de</strong> l’Economie et <strong>de</strong>s Finances.<br />

Malgré toutes les garanties promises par l’Anoci en matière <strong>de</strong> transparence, <strong>de</strong> respect <strong>de</strong>s<br />

normes <strong>de</strong> gestion et du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong>s marchés <strong>public</strong>s et <strong>de</strong> « contrôle technique en temps réel <strong>de</strong><br />

l’exécution <strong>de</strong>s projets », <strong>de</strong>s inquiétu<strong>de</strong>s voire <strong>de</strong>s irrégularités ont été portées à l’attention<br />

générale par <strong>de</strong>s organisations <strong>de</strong> la société civile et <strong>de</strong>s entreprises et architectes sénégalais.<br />

Dans un mémorandum rendu <strong>public</strong>, le Syndicat <strong>de</strong>s architectes du Sénégal a dénoncé la<br />

violation <strong>de</strong>s textes en vigueur qui obligent l’Etat à associer les architectes à la construction<br />

d’infrastructures d’envergure. <strong>Le</strong> Syndicat a également détaillé les irrégularités techniques et<br />

conceptuelles qui caractérisent les chantiers <strong>de</strong> l’Anoci qui n’ont d’ailleurs pu être livrés à<br />

temps, ce qui a occasionné à l’Etat plusieurs surcoûts budgétaires <strong>de</strong> plusieurs milliards <strong>de</strong><br />

francs Cfa. <strong>Le</strong> « tunnel » <strong>de</strong> Sumbédjun a largement été pointé du doigt puisqu’à peine<br />

achevé, il montrait <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> suintement <strong>de</strong> l’eau en plusieurs endroits <strong>de</strong> ses parois<br />

latérales.<br />

L’Entreprise Jean <strong>Le</strong>febvre (Ejl) dirigée par Bara Tall aurait été l’objet d’une cabale montée<br />

<strong>de</strong> toutes pièces, selon les témoignages abondamment fournis à la presse par ce <strong>de</strong>rnier. Ayant<br />

refusé les bases du chantage qui, selon ses propres termes, lui aurait été proposé par M.<br />

Abdoulaye Wa<strong>de</strong>, il est jeté en prison sans autre forme <strong>de</strong> procès. Il lui serait reproché d’avoir<br />

osé refuser <strong>de</strong> manigancer une parodie <strong>de</strong> surfacturation qui aurait permis <strong>de</strong> coincer M.<br />

Idrissa Seck dans une longue détention carcérale sur une base pénale contrefaite dans le cadre<br />

du canular que représente « le scandale <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> Thiès » 38 .<br />

37 Depuis que ces lignes ont été écrites, le Chef <strong>de</strong> l’Etat a encore une fois changé le dispositif institutionnel et<br />

légal du Secrétariat général du gouvernement en le subdivisant en plusieurs enclaves principalement instruites<br />

par l’imperium politique permanent auquel M. Abdoulaye Wa<strong>de</strong> s’est exclusivement soumis <strong>de</strong>puis sa prise du<br />

pouvoir en 2000.<br />

38 <strong>Le</strong> lecteur voudra bien consulter l’enquête menée par Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> sur cette question.


Or, malgré ses démêlés avec le Chef <strong>de</strong> l’Etat dans le cadre <strong>de</strong> l’affaire <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong><br />

Thiès 39 , Bara Tall, se positionne dans les appels d’offres <strong>de</strong> l’Anoci à <strong>de</strong>s prix nettement<br />

compétitifs. Ses propositions sont rejetées sans autre forme <strong>de</strong> procès par l’Anoci sur <strong>de</strong>s<br />

bases contestées par Ejl. L’Agence <strong>de</strong> Régulation <strong>de</strong>s Marchés Publics (Armp), à travers les<br />

arrêts rendus par son Comité <strong>de</strong> Règlement <strong>de</strong>s Différends, déboute Ejl et refuse à l’un <strong>de</strong>s<br />

Conseillers <strong>de</strong> l’Armp l’accès au fond <strong>de</strong> dossier et aux bases juridiques du différend qui a<br />

opposé Ejl à l’Anoci.<br />

D’après Ejl 40 , les prix qu’elle a proposés au sujet <strong>de</strong>s différents lots <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> l’Anoci<br />

sont nettement plus avantageux comme le montre le tableau ci-<strong>de</strong>ssous. Malgré notre statut <strong>de</strong><br />

Conseiller <strong>de</strong> l’Armp nommé par décret prési<strong>de</strong>ntiel 41 , nous n’avons pu accé<strong>de</strong>r au dossier<br />

relatif a cette affaire sous le prétexte qu’il serait confi<strong>de</strong>ntiel. Malgré tout le bien que l’on<br />

pourrait penser <strong>de</strong> l’Armp et <strong>de</strong>s conseillers qui l’animent, il reste que cette organisation est<br />

encore trop proche <strong>de</strong> son parrain étatique, la Primature et le Ministère <strong>de</strong> l’Economie et <strong>de</strong>s<br />

finances, en l’occurrence, sans compter l’Inspection générale d’Etat placée sous l’autorité<br />

directe du Chef <strong>de</strong> l’Etat. Toutes ces structures y sont représentées et développent un point <strong>de</strong><br />

vue naturellement proche <strong>de</strong> leur direction <strong>de</strong> tutelle.<br />

39 Voir à cet égard, la seule étu<strong>de</strong> indépendante rendue publique sur cette sombre affaire par Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong><br />

in Chantiers <strong>de</strong> Thiès : les Faits, <strong>Dakar</strong>, AT, 2004.<br />

40 Cf. JLS, « JLS contre Etat du Sénégal ; Mémorandum <strong>de</strong> Réclamation », <strong>Dakar</strong>, sans date. Dans ce document<br />

rendu <strong>public</strong>, Jls entre en contentieux juridique ouvert avec l’Etat du Sénégal qu’il accuse <strong>de</strong> refuser<br />

systématiquement <strong>de</strong> lui verser la somme <strong>de</strong> Fcfa 7 022 251 034 pour « <strong>de</strong>s travaux exécutés et réceptionnés » et<br />

<strong>de</strong> l’avoir « privée, délibérément, <strong>de</strong> plusieurs marchés pour un montant cumulé <strong>de</strong> Fcfa 104 950 328 156 » alors<br />

que le groupe Talix auquel appartient Jls « était parti pour être un grand conglomérat employant plus <strong>de</strong> 5 000<br />

personnes dans divers <strong>domaine</strong>s d’activités », doc. cit., p. 8. Par ailleurs, dans une lettre adressée à l’Armp le 2<br />

avril 2008 qu’elle a bien voulu mettre à notre disposition, Jls conclut ses réclamations par une mise en gar<strong>de</strong><br />

solennelle « sur l’existence et la protection, par un habillage légal, d’un oligopole (monopole d’un groupe)<br />

constitué <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux et parfois trois entreprises que tout le mon<strong>de</strong> connaît et qui, par un jeu d’ententes totalement<br />

illicites, a fini <strong>de</strong> fausser complètement le jeu <strong>de</strong> la concurrence dans le secteur <strong>de</strong>s routes, tirant le niveau <strong>de</strong>s<br />

prix pratiqués à un niveau jamais égalé, irréaliste et sans commune mesure avec ce qui se fait ailleurs et avec les<br />

possibilités du Sénégal ». Cette accusation est suffisamment grave pour que la Cour <strong>de</strong>s comptes, l’Inspection<br />

générale d’Etat et toutes les structures plus ou moins fictives, en tous cas totalement inefficaces et liées à<br />

l’exécutif sénégalais, interviennent <strong>de</strong> toute urgence pour éluci<strong>de</strong>r cette affaire. Au lieu d’une action décisive,<br />

l’opinion a encore eu droit à la même attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> complicité active du Chef <strong>de</strong> l’Exécutif sénégalais.<br />

41 Dans une lettre <strong>de</strong> démission publique adressée le 28 août 2008 au Chef <strong>de</strong> l’Etat sénégalais, le Directeur<br />

Exécutif d’Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> a formulé ses griefs vis-à-vis <strong>de</strong> l’Armp selon les termes suivants :<br />

« Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République,<br />

« Par voie <strong>de</strong> décret, vous avez bien voulu me nommer, en même temps que d’autres personnalités, Conseiller <strong>de</strong><br />

l’Agence <strong>de</strong> Régulation <strong>de</strong>s Marchés Publics (ARMP).<br />

« Je vous prie <strong>de</strong> prendre acte <strong>de</strong> ma démission <strong>de</strong> cette structure à cette date.<br />

« <strong>Le</strong>s raisons <strong>de</strong> ma démission sont liées au fait qu’après quelques mois <strong>de</strong> compagnonnage avec l’Autorité, je<br />

n’ai pas le sentiment, en mon intime conviction, que l’ARMP peut s’acquitter <strong>de</strong> sa mission en toute<br />

indépendance, compte tenu <strong>de</strong>s liens presque ombilicaux qui la lient au Ministère <strong>de</strong> l’Economie et <strong>de</strong>s Finances,<br />

à la Primature, et, par ricochet, au pouvoir Exécutif dont vous êtes l’incarnation.<br />

« Je suis, par ailleurs, choqué par les développements récents en matière <strong>de</strong> gouvernance démocratique et<br />

financière qui installent le Sénégal, par votre faute et celle <strong>de</strong> votre gouvernement, dans une ère d’instabilité<br />

politique et d’injustice sociale marquées préjudiciables aux intérêts supérieurs <strong>de</strong> la Nation.<br />

« Soyez assuré, Monsieur le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République, <strong>de</strong> ma haute considération.<br />

Jacques Habib Sy ».


Tableau 1 : dépouillement <strong>de</strong>s appels d’offres relatifs aux chantiers <strong>de</strong> l’Anoci<br />

Source : Ejl<br />

Soseter<br />

C<strong>de</strong><br />

Entreprises Capacités<br />

financières<br />

Prix proposes<br />

HTVA<br />

Montants TTC<br />

Appel d’offres du 30/042007<br />

Travaux d'élargissement et d'aménagement <strong>de</strong> la route <strong>de</strong> Wakaam a Dakaar<br />

Groupement<br />

Zakhem<br />

Construction &<br />

Sinco Spa<br />

Jls Sa<br />

Fougerolle<br />

Caution bancaire :<br />

400 millions<br />

Capacité<br />

financière : 5<br />

milliards<br />

Ligne <strong>de</strong> crédit : 1<br />

milliard Sgbs<br />

Caution bancaire :<br />

400 millions<br />

Ligne <strong>de</strong> crédit : 6,9<br />

milliards Bicis<br />

7,8 milliards Cls<br />

Caution bancaire :<br />

400 000 000 Banca<br />

Liverno<br />

Ligne <strong>de</strong> crédit : 3<br />

milliards Banca<br />

Liverno ; 2,5<br />

milliards Impreso ;<br />

10 milliards Cbao<br />

Caution bancaire :<br />

450 millions<br />

Ecobank<br />

Capacité<br />

financière : 10<br />

milliards Ecobank<br />

Ligne <strong>de</strong> crédit :<br />

3, 390 milliards Cls<br />

Caution bancaire :<br />

400 millions Sgbs<br />

Capacité<br />

financière :<br />

10 milliards<br />

20 072 343 372<br />

17 828 449 258 HT<br />

HD HTVA<br />

Impôts et taxes :<br />

742 852 052<br />

18 571 301 310<br />

HTVA<br />

18 822 196 841<br />

Délai : 06 mois si<br />

25 % <strong>de</strong> majoration<br />

23 527 746 051<br />

15 126 377 753<br />

23 685 365 179<br />

Délai : 12 mois<br />

21 914 135 546<br />

Délai : 08 mois<br />

22 765 447 079<br />

Délai : 08 mois<br />

17 849 125 749<br />

Délai : 08 mois<br />

25 766 498 580<br />

Délai : 08 mois<br />

Appel d’offres du 20/12/05<br />

Elargissement et aménagement <strong>de</strong> la Corniche Ouest.Stele Mermoz-Carrefour <strong>de</strong>s<br />

Ma<strong>de</strong>leines


Groupement C<strong>de</strong>-<br />

Kharafi<br />

20 % : Fcfa :<br />

18 903 615 627<br />

15 % : Euro :<br />

5 085 505 808<br />

Délai : 12 mois<br />

Groupement Jls-Sac 50 % : Fcfa :<br />

7 063 285 279<br />

50 % : Euro :<br />

10 767 909<br />

Délai : 12 mois<br />

Groupement Cse-<br />

Brouhan Int. Cc<br />

22 239 547 796<br />

16 669 353 257<br />

23 391 330 717<br />

Lot No 1 : élargissement <strong>de</strong> la Vdn en 2 x 3 voies + assainissement<br />

Lot No 2 : construction <strong>de</strong> 3 échangeurs aux carrefours<br />

Lot No 1 Lot No 2 Pièces manquantes<br />

C<strong>de</strong> 8 786 608 041 13 635 511 304 LT-Ipres<br />

Css- Quitus<br />

Attestation visite<br />

Fougerolle 8 388 406 774 9 870 550 870 Attestation visite<br />

Cse 8 126 838 287 11 829 965 462 Ipres-IT-Quitus<br />

Jls Sa 7 213 575 946 Voieries :<br />

2 602 684 361<br />

Echangeurs :<br />

9 724 279 846<br />

Quitus<br />

Source : lettre <strong>de</strong> réclamations <strong>de</strong> Ejl du 2 avril 2008 BT/BN/08-700 adressée au Prési<strong>de</strong>nt du Conseil <strong>de</strong><br />

régulation <strong>de</strong>s marchés <strong>public</strong>s fourni par Ejl<br />

D’après les témoignages épars recueillis auprès <strong>de</strong> sources informées du secteur privé<br />

national, les prix proposés par Ejl sont 50 % moins chers que ceux qui ont été adoptés pour ce<br />

qui concerne le tunnel <strong>de</strong> Sumbedjun (Ejl : 2,4 milliards ; Henan Chine : 2,5 milliards ; C<strong>de</strong> :<br />

marché adjugé à 5 milliards puis finalement à 10 milliards en raison <strong>de</strong> l’ « absence <strong>de</strong><br />

maitrise <strong>de</strong>s données conceptuelles et techniques » par l’Anoci, disent, à tort ou à raison,<br />

certains critiques <strong>de</strong> l’Anoci).<br />

<strong>Le</strong>s travaux d’élargissement <strong>de</strong> la corniche ouest ont été adjugés à 22 milliards contre 16<br />

milliards au départ puis finalement à 30 milliards proposés par Ejl et rejetés par l’Anoci au<br />

profit du C<strong>de</strong>. Or c’est ce même C<strong>de</strong> qui aurait, contre toute attente et en violation du Co<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>s marchés <strong>public</strong>s, pris en charge l’élaboration <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s préalables qui auraient du être<br />

faites par l’Etat pour placer sur un même pied d’égalité toutes les parties prenantes dans cet<br />

appel <strong>public</strong> à manifestation d’intérêt.


Selon Ejl, les chantiers <strong>de</strong> l’Anoci affichent <strong>de</strong>s prix 50 % plus chers que les chantiers <strong>de</strong><br />

Thiès avec <strong>de</strong>s quantités supérieures et la latérite vendue à 1 800/2 000 francs Cfa par le C<strong>de</strong><br />

contre 1 200 francs Cfa par Ejl. La Vcn <strong>de</strong> Thiès longue <strong>de</strong> 10,9 kms a coûtée 7 milliards<br />

entièrement préfinancés alors que le marché <strong>de</strong> la Vdn élargie avec une route déjà existante et<br />

longue seulement <strong>de</strong> 7 kms aurait été scellée à 22 milliards <strong>de</strong> francs Cfa (soit plus <strong>de</strong> 3<br />

milliards <strong>de</strong> francs Cfa le kilomètre) selon les termes établis par le C<strong>de</strong>. Ce marché particulier,<br />

aurait donc été ficelé à hauteur <strong>de</strong> 22 milliards <strong>de</strong> francs Cfa alors que tout le marché <strong>de</strong>s<br />

chantiers <strong>de</strong> Thiès exécuté par Ejl n’a pas coûté plus <strong>de</strong> 17 milliards <strong>de</strong> francs Cfa entièrement<br />

préfinancés.<br />

L’Etat, et la Prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la République, ont répliqué les mêmes erreurs observées dans le<br />

scandale <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> Thiès en installant tous les processus d’offres <strong>de</strong> marchés <strong>public</strong>s<br />

dans l’urgence la plus absolue, et, pour ce qui concerne certains lots, sans l’aval <strong>de</strong><br />

l’Assemblée nationale, en particulier, à travers une ou <strong>de</strong>s lois rectificatives <strong>de</strong>s finances. Au<br />

lieu <strong>de</strong> cela, nous avons assisté, estiment certains observateurs avertis du secteur <strong>de</strong>s BTP, a<br />

<strong>de</strong>s ententes préétablies entre certaines <strong>de</strong>s entreprises concurrentes, et, parfois en ayant<br />

recours à la conspiration pour maintenir en l’état une forme d’organisation oligopolistique<br />

informelle mais non moins effective.<br />

Selon <strong>de</strong>s témoins qui auraient participé aux négociations, la Prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la République<br />

aurait convoqué au départ les quatre entreprises les plus capables du secteur <strong>de</strong>s BTP (C<strong>de</strong>,<br />

Cse, Ejl et Fougeyrolles), en leur <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r aux étu<strong>de</strong>s préalables en trois<br />

semaines pour exécuter les différents lots du marché <strong>de</strong> l’Anoci. <strong>Le</strong>s dons consentis par le<br />

Koweït ren<strong>de</strong>nt obligatoire la participation d’entreprises du secteur privé <strong>de</strong> ce pays dans<br />

l’exécution <strong>de</strong>s marchés. <strong>Le</strong>s entreprises koweitiennes sélectionnées soutraitent par la suite<br />

avec les entreprises locales sur la base <strong>de</strong>s prix proposés dans les étu<strong>de</strong>s initiales. L’entreprise<br />

Zakhem, basée à Londres, et qui aurait <strong>de</strong>s accointances avec M. Karim Wa<strong>de</strong>, se serait<br />

intéressée avant les chantiers <strong>de</strong> l’Anoci, à la réalisation <strong>de</strong> l’Université du Futur Africain.<br />

L’affaire aurait tourné court en raison <strong>de</strong> ce que M. Karim Wa<strong>de</strong> aurait voulu prendre une<br />

participation majoritaire (51 %) dans les affaires <strong>de</strong> Zakhem qui aurait décliné l’offre. C’est<br />

dans ce contexte, que Zakhem se serait intéressé aux routes secondaires <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong><br />

l’Anoci, cependant qu’Ejl a jeté son dévolu sur la route allant <strong>de</strong> l’Aéroport Lss jusqu’aux<br />

Mamelles et au tronçon <strong>de</strong> route menant au Méridien Prési<strong>de</strong>nt. A cette haute époque du<br />

projet (février 2005), il était prévu <strong>de</strong> tenir la Conférence <strong>de</strong> l’Oci au Champ <strong>de</strong> Tir <strong>de</strong>s<br />

Mamelles ou <strong>de</strong>vait être construit le Centre <strong>de</strong> conférence <strong>de</strong> l’Oci dont la première pierre est<br />

pausée par l’Emir du Koweit. Ce centre international <strong>de</strong> conférences <strong>de</strong>vait comprendre, entre<br />

autres, la construction <strong>de</strong> 170 chambres d’hôtel et <strong>de</strong> 70 rési<strong>de</strong>nces privées pour abriter les<br />

Chefs d’Etat. Ce marché particulier aurait été entaché par une incompréhension qui se serait<br />

installée entre M. Karim Wa<strong>de</strong> et les Koweitiens qui réclamaient à ce <strong>de</strong>rnier le versement <strong>de</strong><br />

2 milliards avancés par les Koweitiens. C’est une péripétie <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong><br />

l’Anoci sur laquelle M. Karim Wa<strong>de</strong> tar<strong>de</strong> à s’expliquer, du moins publiquement, ou à travers<br />

une audit réellement indépendante rendue publique. Finalement, <strong>de</strong>vant le retard considérable<br />

enregistré dans la mise en œuvre <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> l’Anoci, et la tenue <strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong> l’Oci<br />

maintes fois repoussée sur plusieurs années et pour la première fois dans l’histoire <strong>de</strong> cette<br />

institution, la conférence <strong>de</strong> l’Oci a finalement pris place dans le périmètre partiellement<br />

rénové du Méridien Prési<strong>de</strong>nt construit par le régime socialiste <strong>de</strong> M. Abdou Diouf à<br />

l’occasion d’un sommet antérieur <strong>de</strong> l’Oci cependant que certains <strong>de</strong>s hôtes <strong>de</strong> marque ont été<br />

logés dans un bateau <strong>de</strong> plaisance loué en la circonstance à hauteur <strong>de</strong> 6 à 8 milliards <strong>de</strong><br />

francs Cfa, selon <strong>de</strong>s comptes rendus <strong>de</strong> la presse..


Or, par suite <strong>de</strong> cet imbroglio opérationnel, pas une seule brique du centre <strong>de</strong> conférences<br />

dont la construction était projetée n’a été posée par l’Anoci. L’Anoci aurait d’abord préféré<br />

cé<strong>de</strong>r ce terrain à Kharafi, une entreprise koweitienne avalisée par le Fonds koweitien,<br />

entreprise qui aurait eu le privilège, avec le C<strong>de</strong>, <strong>de</strong> réaliser le lot pour l’élargissement et<br />

l’embellissement <strong>de</strong> la corniche ouest. Apres avoir pris un certain pourcentage sur le marché,<br />

l’entreprise Kharafi, composée d’une famille <strong>de</strong> notables koweïtiens, aurait finalement décidé<br />

<strong>de</strong> se retirer abruptement du marché. Par la suite, le terrain <strong>de</strong> plusieurs hectares situé sur le<br />

Dpm et où <strong>de</strong>vait être construit le centre <strong>de</strong> conférences et les villas prési<strong>de</strong>ntielles <strong>de</strong> luxe est<br />

ce<strong>de</strong> à une tierce partie privée sénégalaise 42 dans <strong>de</strong>s circonstances non encore élucidées.<br />

D’apres <strong>de</strong>s sources secondaires, cette opération <strong>de</strong>vrait permettre au Chef <strong>de</strong> l’Etat <strong>de</strong> payer<br />

à un cout défiant l’enten<strong>de</strong>ment la construction dans les fon<strong>de</strong>ries d’une entreprise coréenne<br />

d’une <strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>s statues du continent à hauteur <strong>de</strong> 16 milliards <strong>de</strong> francs Cfa en une<br />

pério<strong>de</strong> où <strong>de</strong>s émeutes quotidiennes rappellent aux preneurs <strong>de</strong> décision que la pauvreté<br />

s’amplifie <strong>de</strong> jour en jour et que l’on s’approche inexorablement <strong>de</strong> la violence comme seule<br />

arme pour se faire entendre. Cette folie dépensière rappelle <strong>de</strong> façon saisissante la<br />

construction <strong>de</strong> la réplique du Vatican à Yamoussoukro par le chef <strong>de</strong> l’Etat ivoirien<br />

aujourd’hui disparu.<br />

La réorientation <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> l’Anoci s’est poursuivie, par la suite, sur la base <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s<br />

faites par les entreprises locales sollicitées en début 2005 et les <strong>de</strong>vis proposés à cet effet. <strong>Le</strong><br />

même modèle financier est également répliqué à travers le parrainage <strong>de</strong>s entreprises privées<br />

du Sénégal par les entreprises koweïtiennes chargées <strong>de</strong> soutraiter les marchés. <strong>Le</strong>s<br />

entreprises koweïtiennes adjudicataires <strong>de</strong>s différents marchés ont soumissionné leurs offres<br />

sur la base du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong>s marchés <strong>public</strong>s du Sénégal. C’est pour cette raison que chaque<br />

année, l’Anoci aurait du être auditée par les agences attitrées du Sénégal, l’Autorité <strong>de</strong><br />

régulation <strong>de</strong>s marchés <strong>public</strong>s (Armp) en tête, malgré sa création récente, et, bien entendu, la<br />

Cour <strong>de</strong>s Comptes et le Parlement, puisque <strong>de</strong>s fonds <strong>public</strong>s du budget national ont été<br />

consentis pour la réalisation <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> l’Anoci à hauteur <strong>de</strong> plusieurs dizaines <strong>de</strong><br />

milliards. L’Anoci <strong>de</strong>vrait veiller à la reddition <strong>de</strong> ses comptes non seulement auprès <strong>de</strong><br />

l’Assemblée nationale mais aussi <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong>s Comptes et <strong>de</strong> l’Armp. Finalement, le<br />

mauvais prétexte choisi pour débarquer l’ancien Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’Assemblée nationale et en<br />

installer un nouveau entièrement à la dévotion <strong>de</strong>s projets hégémoniques <strong>de</strong> l’Exécutif<br />

sénégalais a fini par édifier l’opinion nationale et internationale sur les intentions réelles du<br />

Chef <strong>de</strong> l’Etat quant à l’organisation <strong>de</strong> sa succession par son fils.<br />

L’une <strong>de</strong>s questions les plus épineuses qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait à être élucidée par le directoire <strong>de</strong><br />

l’Anoci a trait au cadre juridique le plus approprié pour ficeler les dons consentis par le<br />

Koweït mais impliquant <strong>de</strong>s entreprises koweïtiennes et sénégalaises ainsi que <strong>de</strong>s fonds<br />

<strong>public</strong>s sénégalais.<br />

Aurait-on <strong>de</strong>mandé aux entreprises sénégalaises <strong>de</strong> faire semblant <strong>de</strong> n’avoir pas été mis au<br />

courant <strong>de</strong>s ententes préalablement établies pour adjuger les différents lots du marché <strong>de</strong>s<br />

travaux <strong>de</strong> l’Anoci, sur la base <strong>de</strong> prix pré arrangés, en violation du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong>s marchés<br />

<strong>public</strong>s, comme le suggèrent certains hommes d’affaires du secteur <strong>de</strong>s BTP ?<br />

42 <strong>Le</strong> nom <strong>de</strong> M. MBackiou Faye a souvent été cité par la presse tabloï<strong>de</strong> privée sénégalaise sans que l’on sache<br />

les circonstances exactes <strong>de</strong> la cession <strong>de</strong> ce site stratégique du Dpm en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la thèse présentée par « <strong>Le</strong><br />

quotidien » et non encore formellement démentie dans ses colonnes à notre connaissance.


Cette question mérite une réponse dénuée d’ambiguïtés tant <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> l’Anoci que <strong>de</strong> la<br />

Prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la République et <strong>de</strong>s autorités gouvernementales concernées.<br />

L’exemple du marché auquel s’intéressait Ejl est édifiant à cet égard. Selon son propre<br />

témoignage, Ejl a refusé « <strong>de</strong> violer la loi en procédant à une soumission frauduleuse par<br />

entente avec les parties impliquées, ce qui est puni légalement par <strong>de</strong>s peines<br />

d’emprisonnement sévères et l’exclusion <strong>de</strong> tous les marchés <strong>public</strong>s pour une durée <strong>de</strong> temps<br />

prohibitive pour une entreprise ». Ejl a préféré attendre la veille <strong>de</strong> l’échéance pour présenter<br />

son offre selon les règles <strong>de</strong> l’art et en tournant le dos à toute possibilité d’une entente<br />

préétablie avec quelque partie que ce soit, compte tenu <strong>de</strong> son expérience traumatisante dans<br />

le cadre <strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> Thiès. Ejl aurait fait, selon Bara Tall, « l’objet d’un intense lobbying<br />

<strong>de</strong> la part <strong>de</strong> hauts cadres <strong>de</strong> l’Anoci pour se caler dans les ententes préétablies et pré<br />

arrangées avec l’onction <strong>de</strong> l’Anoci ». Devant le refus sans équivoque <strong>de</strong> Bara Tall <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r à<br />

ces injonctions illégales, le sort d’Ejl aurait pratiquement été scellé dès ce moment. Ejl<br />

soumissionne malgré tout avec une entreprise koweïtienne, une offre <strong>de</strong> 16 milliards <strong>de</strong> francs<br />

Cfa pour la construction <strong>de</strong> la route <strong>de</strong> l’Aéroport Lss au Méridien Prési<strong>de</strong>nt en passant par la<br />

route d’interconnexion du virage <strong>de</strong> Yoff et la corniche <strong>de</strong>s Almadies. L’offre est<br />

naturellement rejetée, malgré une intervention du Chef <strong>de</strong> l’Etat lui-même après la libération<br />

<strong>de</strong> prison <strong>de</strong> Bara Tall en février 2007. <strong>Le</strong>s circonstances du rejet du dossier d’Ejl dans cet<br />

appel d’offres particulier n’ont pas encore été élucidées par l’Anoci et l’Armp au moment où<br />

ces lignes sont écrites. Comment expliquer, par ailleurs, que cette entreprise, l’une <strong>de</strong>s plus<br />

florissantes et les plus compétitives du marché sénégalais du BTP, ait été exclu <strong>de</strong>puis avril<br />

2007 du pactole <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 107 milliards <strong>de</strong> francs Cfa <strong>de</strong> marchés <strong>public</strong>s engagés par<br />

l’Anoci ? Aurait-on tenté <strong>de</strong> punir Ejl pour avoir refusé l’entente directe illégale à laquelle on<br />

le conviait pour emporter l’un <strong>de</strong>s lots du marché et surtout pour avoir refusé <strong>de</strong> se soumettre<br />

au chantage ignoble auquel on voulait le soumettre en lui <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong> faire un faux<br />

témoignage contre Idrissa Seck pour conforter la thèse <strong>de</strong>s surfacturations dont l’Inspection<br />

générale d’Etat peinait manifestement à prouver le bien-fondé ? Et aurait-on tenté d’asphyxier<br />

délibérément Ejl en refusant <strong>de</strong> lui payer les 7 milliards <strong>de</strong> francs Cfa <strong>de</strong> re<strong>de</strong>vances que lui<br />

doit l’Etat, forçant ainsi cette entreprise à délocaliser ses activités dans la Gambie voisine, en<br />

particulier ?<br />

L’arrêt rendu par le Comité <strong>de</strong> règlement <strong>de</strong>s différends <strong>de</strong> l’Armp aurait soutenu que la<br />

compagnie koweitienne Arabco avec laquelle Ejl avait soumissionné, ne ferait pas partie <strong>de</strong> la<br />

liste <strong>de</strong>s entreprises koweitiennes agréées. Cette assertion serait, selon Ejl, en flagrante<br />

contradiction avec le message téléfaxé aux entreprises soumissionnaires du lot incriminé <strong>de</strong><br />

l’appel d’offres <strong>de</strong> l’Anoci.<br />

Ce sont là <strong>de</strong>s questions très sérieuses et dont les implications judiciaires et politiques<br />

n’échappent à personne et <strong>de</strong>vraient être entièrement clarifiées par MM. Karim Wa<strong>de</strong> et<br />

Abdoulaye Wa<strong>de</strong>.


Chapitre 4<br />

Regards croisés <strong>de</strong>s experts sur le Dpm<br />

Cheikh Ngom et Annie Jouga ont en commun la passion pour un métier qui n’est pas à leurs<br />

yeux, autant qu’ils l’auraient souhaité, au centre <strong>de</strong>s préoccupations <strong>de</strong> la société, ni même<br />

<strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs. Ils portent ici un regard critique sur leur profession, les lois et règlements qui<br />

en dictent la marche ainsi que sur l’éthique et les règles <strong>de</strong> l’art <strong>de</strong> plus en plus négligées<br />

voire violées.<br />

Ils ont forcément à dire sur l’occupation du Dpm, avec ses villas construites sur l’eau, parfois<br />

avec une architecture ayant tout cédé à la mégalomanie <strong>de</strong>s propriétaires, au détriment <strong>de</strong><br />

l’esthétique, <strong>de</strong> la sécurité, <strong>de</strong> la loi, <strong>de</strong>s us et coutumes, <strong>de</strong> la culture.<br />

Bien sûr, il ne faut pas s’attendre <strong>de</strong> nos interlocuteurs à <strong>de</strong>s in<strong>de</strong>xations ciblées, mais le<br />

doyen Ngom se veut clair : « On ne peut aller construire n’importe où sans étudier la<br />

géomorphologie du terrain ». A l’appui <strong>de</strong> son argumentaire, il exhibe un plan, en surface<br />

comme en profon<strong>de</strong>ur, du terrain ayant servi à construire la cité dite « les immeubles roses » à<br />

Mermoz sur la route <strong>de</strong> Waakam, « il y a trente ans ». De son point <strong>de</strong> vue, il est inadmissible<br />

pour un architecte d’accepter un projet sans ce genre d’étu<strong>de</strong>s morphologiques et<br />

environnementales, ajoutant non sans malice : « <strong>Le</strong>s coûts sont bien évi<strong>de</strong>mment à la charge<br />

du promoteur, et certains collègues, pour ne pas paraître chers s’en passent souvent… ».<br />

Annie Jouga, elle, parle « d’éthique », un souci qui <strong>de</strong>vrait imprégner toute décision<br />

architecturale, y compris l’acceptation d’un projet. Elle déplore ce qui se fait aujourd’hui sur<br />

la Corniche avec l’occupation du Dpm par toute une série <strong>de</strong> « projets insensés » et in<strong>de</strong>xe la<br />

« responsabilité <strong>de</strong>s pouvoirs <strong>public</strong>s <strong>de</strong> l’ancien comme <strong>de</strong> l’actuel régime, qui sont les<br />

premiers à enfreindre les lois qu’ils ont eux-mêmes édictées ». Ce qui d’après elle n’absout<br />

absolument pas l’architecte <strong>de</strong> ses obligations diverses. Rejoignant son collègue, qui dit qu’un<br />

architecte doit « s’approprier intellectuellement un projet », elle soutient en avoir refusé un,<br />

tout simplement parce qu’il enfreignait <strong>de</strong> façon évi<strong>de</strong>nte les lois régissant l’occupation du<br />

littoral marin : « Un grand groupe français voulait un hôtel pied dans l’eau sur une plage <strong>de</strong> la<br />

Corniche Est. Aujourd’hui, il parait qu’un hôtel du même type va y être construit. Il a bien<br />

fallu qu’un architecte l’accepte ».<br />

Or, selon Cheikh Ngom, au <strong>de</strong>là <strong>de</strong>s questions techniques et juridiques, <strong>de</strong>s considérations<br />

culturelles plus profon<strong>de</strong>s doivent être prises en compte dans les projets architecturaux,<br />

surtout sur tout ce qui se fait sur le littoral, en bordure <strong>de</strong> mer : « Nous connaissons tous les<br />

rapports entre nos parents Lébus et la mer. On ne peut pas construire n’importe où, n’importe<br />

quoi, au risque d’agresser <strong>de</strong>s croyances <strong>de</strong> très gran<strong>de</strong> valeur culturelle ». Ensuite, il soutient<br />

que « l’architecte doit servir <strong>de</strong> conseiller à son client, aller plus loin que les aspects<br />

techniques, au besoin ».<br />

En racontant une anecdote concernant un <strong>de</strong> ses clients, bénéficiaire d’un titre foncier sur un<br />

terrain à l’ origine classé non aedificandi, Annie Jouga, elle, en rapport avec l’occupation du<br />

Dpm interpelle l’administration dont les acrobaties ne sont pas pour faciliter le travail <strong>de</strong>s


architectes. Elle soutient qu’il faut une nouvelle loi sur le <strong>domaine</strong> national et croit savoir<br />

« qu’une nouvelle loi existe effectivement mais est bloquée quelque part, on ne sait<br />

pourquoi ». Elle se montre particulièrement préoccupée par les constructions sur le littoral qui<br />

augmentent les risques d’érosion <strong>de</strong>s côtes : « Ce n’est pas parce qu’on construit qu’on<br />

sauvegar<strong>de</strong> la côte, même si c’est l’argument <strong>de</strong> certains architectes. »<br />

Pour Cheikh Ngom, la question <strong>de</strong>s constructions sur le Dpm <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong> la part <strong>de</strong><br />

l’architecte, une approche pluridisciplinaire et un maximum <strong>de</strong> souci pour la préservation du<br />

bien <strong>public</strong>. Il s’appuie sur un projet qu’il pilote, la Clinique ambulatoire au pied <strong>de</strong>s<br />

Mamelles : « Nous avons aménagé un chemin qui mène à la berge en contournant nos<br />

installations, et qui permet <strong>de</strong> rejoindre la petite plage où les femmes <strong>de</strong> Ngor se livrent à<br />

toutes sortes d’activités d’exploitation <strong>de</strong> l’océan ».<br />

Une goutte d’eau dans la mer si on considère que <strong>de</strong> tous les projets que l’on a vu il est sinon<br />

le seul, du moins l’un <strong>de</strong>s rares à se préoccuper <strong>de</strong> laisser la plage à son usage <strong>public</strong><br />

traditionnel.<br />

La bonne nouvelle c’est qu’on décèle, certes avec <strong>de</strong>s mots différents, une émotion différente,<br />

chez lui comme chez sa collègue plus jeune, les mêmes préoccupations pour une architecture<br />

responsable. Il n’y a pas ici <strong>de</strong> conflit <strong>de</strong> génération, quant au fond, face aux problématiques<br />

auxquelles l’architecture est confrontée. Cela fait croire qu’il n’y a pas à désespérer <strong>de</strong> voir un<br />

sursaut porté par les plus jeunes pour arrêter les tendances au laxisme et à l’affairisme notés<br />

ici ou là dans la profession.<br />

<strong>Le</strong> radon, un tueur silencieux et ignoré sur le Dpm<br />

D’après <strong>de</strong>s chercheurs Africains, dont l’un a publié une contribution alarmante sur le sujet 1 ,<br />

un gaz, le radon, résultat <strong>de</strong> la désagrégation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux minerais, le thorium et l’uranium,<br />

s’échapperait <strong>de</strong>s failles <strong>de</strong> la roche au niveau <strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nces et hôtels en construction sur la<br />

Corniche Ouest, à hauteur <strong>de</strong> Fann-Rési<strong>de</strong>nce. Il s’agirait précisément <strong>de</strong>s sites où sont en<br />

construction les rési<strong>de</strong>nces « Waterfront » et l’hôtel « Sea Plaza ». Sans qu’il soit dit que ce<br />

sont les seuls endroits d’où fuserait ce gaz cancérigène s’attaquant spécifiquement aux<br />

poumons.<br />

Voici, avant que nous ayons posé la question aux fonctionnaires, ce qu’en dit un autre<br />

chercheur, le Pr. Adams Tidjani, <strong>de</strong> la Faculté <strong>de</strong> Sciences et Techniques <strong>de</strong> l’Université<br />

Cheikh Anta Diop <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> (Ucad), et dont nous leur avons fait un résumé :<br />

« <strong>Le</strong>s <strong>Dakar</strong>ois ont pu constater qu’une mutation progressive et<br />

insidieuse <strong>de</strong> la corniche ouest avait été initiée par les autorités<br />

étatiques <strong>de</strong>puis quelques années. Cette belle corniche naturelle qui,<br />

jusqu’à une date récente, était classée dans le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong><br />

- non appropriée à la construction - avait vu pousser sur ses flancs <strong>de</strong>s<br />

édifices d’habitation. Par la suite, nous avons eu droit à la construction<br />

<strong>de</strong> la Porte du Millénaire qui, aujourd’hui, se trouve menacée<br />

d’affaissement si rien n’est fait pour stabiliser l’édifice (voir Walf du 18<br />

août 2005). Pour cela, l’Etat a été obligé, tout récemment, <strong>de</strong> faire appel<br />

à <strong>de</strong>s experts roumains pour venir à bout <strong>de</strong> ce danger. Dans la même<br />

1 Voir dans le quotidien « Wal Fadjri » du 18 août 2005.


pério<strong>de</strong>, le Parcours sportif a été «aménagé» au grand dam <strong>de</strong> ses<br />

usagers qui ont constaté impuissamment au remplacement du sable par<br />

du béton, ce qui n’est pas sans conséquences sur la santé articulaire <strong>de</strong><br />

ces <strong>de</strong>rniers.<br />

« Tout récemment, un projet nouveau <strong>de</strong> construction du Sea Plaza<br />

Hotel est apparu. L’endroit choisi pour ledit projet est inapproprié à<br />

plus d’un titre. En effet, une étu<strong>de</strong> effectuée par notre laboratoire a<br />

montré qu’une telle construction, à proximité <strong>de</strong> la mer et sur <strong>de</strong>s roches<br />

volcaniques pouvait comporter un risque <strong>de</strong> santé. Dans cette étu<strong>de</strong><br />

publiée dans une revue internationale Nuclear Tracks Radiations<br />

Measurements, Vol. 17, n° 4 (1990) pp. 491-495, 1990, il avait été<br />

montré que la concentration en radon, gaz provenant <strong>de</strong> la<br />

désintégration <strong>de</strong> l’uranium et du thorium, était plus importante en<br />

bordure <strong>de</strong> mer ; mais cette concentration diminuait rapi<strong>de</strong>ment au fur<br />

et à mesure que l’on s’en éloignait. Quand on sait que le radon, qui est<br />

un gaz radioactif d’origine naturelle, inodore, incolore et insipi<strong>de</strong><br />

émanant du sous-sol, dont la présence dans l’air expose les habitants à<br />

une irradiation interne pouvant mener à un risque accru <strong>de</strong> développer<br />

un cancer du poumon, on comprend les risques encourus. Signalons que<br />

le Centre international <strong>de</strong> recherche sur le cancer (Circ), qui dépend <strong>de</strong><br />

l’Organisation mondiale <strong>de</strong> la santé (Oms), a reconnu <strong>de</strong>puis 1987, le<br />

radon comme agent cancérigène. Ce risque est multiplié quand on sait<br />

que le projet <strong>de</strong> construction est à proximité d’une faille ouverte. Une<br />

faille est une cassure géologique à partir <strong>de</strong> laquelle s’échappe <strong>de</strong><br />

manière préférentielle le radon. <strong>Le</strong>s failles ont une influence très nocive<br />

sur les habitants, surtout quand elle est située dans la chambre à<br />

coucher sous un lit ou à l’emplacement <strong>de</strong> bureau par exemple. Pour<br />

preuve, dans une étu<strong>de</strong> effectuée en collaboration avec un laboratoire<br />

du Centre national <strong>de</strong> recherche scientifique (Cnrs) <strong>de</strong> France, nous<br />

avions localisé et délimité une faille sur laquelle avait été construit un<br />

hôpital pour tuberculeux [Pure and Applied Geophysics, Vol. 132, n° 3<br />

(1990) pp. 495-504] ; il est inutile <strong>de</strong> préciser que l’état <strong>de</strong> santé <strong>de</strong>s<br />

patients <strong>de</strong> cet hôpital empirait plutôt que <strong>de</strong> connaître une amélioration<br />

du fait <strong>de</strong> l’émanation préférentielle du radon <strong>de</strong> la faille ; ce qui a<br />

amené les autorités locales à fermer cette structure <strong>de</strong> santé ».<br />

Que dire, dans ces conditions, <strong>de</strong>s exigences relatives aux données <strong>de</strong> base sur l’eau, le sol, la<br />

flore et la faune, l’air, etc. ? Lorsque nous avons évoqué auprès <strong>de</strong> la Direction <strong>de</strong><br />

l’Environnement les risques réels d’émanation du radon, ce gaz cancérigène, dans certains<br />

sites en construction sur la Corniche, le chef <strong>de</strong> la Division Eie et une <strong>de</strong> ses collaboratrices<br />

nous ont renvoyés à Pape Goumbo Lo, chercheur et directeur du Cereq. Contacté par nos<br />

soins, ce <strong>de</strong>rnier nous a fait part <strong>de</strong> ses préoccupations pour regagner les plages perdues en<br />

raison <strong>de</strong> facteurs liés aux activités humaines et naturelles. Il en est à la phase <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong><br />

financements notamment auprès <strong>de</strong> l’Uemoa et d’autres sources. A terme, le projet porté par<br />

le Cereq va sans doute se trouver en position <strong>de</strong> compétition par rapport aux projets<br />

grandiloquents <strong>de</strong> l’Anoci. Lorsque l’Anoci aura fini <strong>de</strong> peupler d’hôtels cinq étoiles une<br />

capitale qui n’est plus que l’ombre d’elle-même, manque d’électricité et se révèle être l’une<br />

<strong>de</strong>s villes les plus sales <strong>de</strong> la région avec un système <strong>de</strong> transport <strong>public</strong> moyenâgeux, on<br />

pourra <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r aux Wa<strong>de</strong> où se trouve l’avantage comparatif du Sénégal en matière <strong>de</strong><br />

tourisme et d’organisation <strong>de</strong> conférences et, surtout, <strong>de</strong> quel droit empêchent-ils aux


générations présentes et futures d’accé<strong>de</strong>r à un <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> en voie <strong>de</strong><br />

privatisation quasi totale, et, en déstructurant les équilibres environnementaux <strong>de</strong> la presqu’île<br />

du Cap-Vert sur la longue durée.<br />

Il est simplement inquiétant <strong>de</strong> constater que l’Etat n’a pris aucune mesure conservatoire pour<br />

faire arrêter les travaux dans les sites contaminés au radon. Or la vie <strong>de</strong> centaines <strong>de</strong><br />

personnes pourrait être mise en danger par l’inertie administrative et politique.<br />

<strong>Le</strong> Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République est directement interpellé par cette question première <strong>de</strong> santé<br />

publique ainsi que les ministres <strong>de</strong> la Santé, <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong> l’Habitat dont les<br />

responsabilités pénales ne pourraient être éteintes après l’abandon <strong>de</strong> leurs fonctions<br />

respectives ou même pendant l’exercice <strong>de</strong> leur mandat gouvernemental puisque, dans le cas<br />

d’une catastrophe en série, ils ne pourraient se réfugier <strong>de</strong>rrière <strong>de</strong> prétendus privilèges<br />

d’immunité qui ten<strong>de</strong>nt, par les temps qui courent à être instrumentalisés dans une mesure qui<br />

frise l’indécence et l’irrespect <strong>de</strong> la loi fondamentale du pays.


Chapitre 5<br />

Lignes <strong>de</strong> fracture environnementale<br />

dans la décision publique<br />

L’impact <strong>de</strong>s infrastructures hôtelières sur le potentiel balnéaire et les mœurs sociales a été<br />

noté dans plusieurs étu<strong>de</strong>s. Une mission conjointe <strong>de</strong> terrain organisée par l’Unesco et<br />

l’Université Cheikh Anta Diop <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> note que les projets <strong>de</strong> la Société d’Aménagement <strong>de</strong><br />

la Petite Cote (Sapco) présentent <strong>de</strong>s avantages (place importante dans la formation du PIB et<br />

la création d’emplois) mais aussi <strong>de</strong>s inconvénients majeurs liés à la privatisation progressive<br />

<strong>de</strong>s espaces littoraux par les sociétés privées étrangères le plus souvent, notamment dans la<br />

zone <strong>de</strong> Sali, et, au développement <strong>de</strong> la prostitution <strong>de</strong> larges segments <strong>de</strong> la population<br />

féminine jeune venant <strong>de</strong> tous les coins du Sénégal 2 . En outre, les auteurs du rapport notent<br />

que « l'impact le plus visible est la consommation d'espace » et ajoutent :<br />

« Ces implantations hôtelières conduisent à une consommation considérable<br />

d'espace. Cette situation aboutit à une logique <strong>de</strong> conflit. Ainsi, la mise en<br />

place du complexe touristique <strong>de</strong> Saly a consacré la "spoliation" <strong>de</strong>s terres<br />

agricoles villageoises.<br />

« Dans cette consommation d'espace une part importante revient aux<br />

rési<strong>de</strong>nces secondaires. Par exemple à Somone, <strong>de</strong> part et d'autre <strong>de</strong> la route<br />

principale, ces rési<strong>de</strong>nces occupent <strong>de</strong> très vastes surfaces jadis utilisées pour<br />

<strong>de</strong>s activités agricoles. Par ailleurs, en jetant son dévolu sur l'espace littoral,<br />

le principal problème que pose le tourisme aux yeux <strong>de</strong>s autochtones est celui<br />

<strong>de</strong> l'accès à leur lieu <strong>de</strong> travail. Ces installations hôtelières qui ont élu<br />

domicile sur le littoral ont ainsi privatisé la plage: lieu d'embarquement et<br />

support <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> transformation <strong>de</strong>s nombreux pêcheurs qui habitent la<br />

Petite Côte ».<br />

Comme l’indique la carte ci-<strong>de</strong>ssous, le développement fulgurant <strong>de</strong> ces stations balnéaires a<br />

causé une déstructuration prononcée <strong>de</strong> l’espace traditionnellement utilisé par les<br />

communautés pour les besoins <strong>de</strong> la pêche artisanale. Elles ont également soustrait du<br />

patrimoine foncier <strong>de</strong>s collectivités locales <strong>de</strong>s centaines d’hectares <strong>de</strong> terres du meilleur cru<br />

propices à l’agriculture et au maraîchage. Un troisième inconvénient lié à la construction <strong>de</strong><br />

telles infrastructures est la privatisation progressive <strong>de</strong>s plages les plus attractives et l’érection<br />

<strong>de</strong> barrières qui empêchent la libre circulation notamment celle <strong>de</strong> riverains se rendant dans<br />

leurs lieux <strong>de</strong> travail 3 .<br />

2 Cf. http://www.unesco.org/csi/act/dakar/dakar1t<br />

3 Ibid., doc. Cit.


La situation <strong>de</strong> Sali est en tous points i<strong>de</strong>ntique à celle qui prévaut dans la presqu’île du Cap-<br />

Vert où se concentre un très grand nombre d’hôtels et <strong>de</strong> stations balnéaires presque tous<br />

contrôlés par le capital étranger, français et libanais en particulier.<br />

Un rapport <strong>de</strong>s Nations Unies présenté à l’occasion du Sommet <strong>de</strong> Johannesburg sur le<br />

Développement durable (2002) établit une nette corrélation entre les tendances contradictoires<br />

relatives aux activités économiques côtières que sont la pêche et le tourisme (et donc la<br />

préservation <strong>de</strong>s milieux naturels) et l’absence <strong>de</strong> planification et <strong>de</strong> mise en œuvre <strong>de</strong>s<br />

besoins <strong>de</strong> base <strong>de</strong>s populations riveraines du littoral et les tendances monopolistes <strong>de</strong><br />

l’aménagement <strong>de</strong>s zones côtières 4 .<br />

Carte # 4 : Hôtels et bungalows <strong>de</strong> week-end <strong>de</strong> la Petite Côte<br />

<strong>Le</strong>s nouvelles rési<strong>de</strong>nces et les hôtels en chantier qui foisonnent sur la Corniche disposent<br />

tous d’autorisations <strong>de</strong> construire délivrées en bonne et due forme par le Service régional<br />

d’Urbanisme <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>. Son chef est formel : «Sinon nous sanctionnons ». Que l’on ne se<br />

4 Voir Nations Unies, Sommet <strong>de</strong> Johannesburg 2002, Profil du Sénégal<br />

www.un.org/esa/agenda21/natlinfo/wssd/senegal.pdf


méprenne cependant pas, la sanction ne va presque jamais jusqu’à la démolition et ne<br />

concerne jamais les hôtels et complexes rési<strong>de</strong>ntiels qui, souvent, ont <strong>de</strong>s dossiers en béton<br />

ficelés avec l’appui <strong>de</strong> l’Agence pour la Promotion <strong>de</strong>s Investissements (Apix). Seuls <strong>de</strong>s<br />

projets <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce individuelle peuvent en souffrir, mais l’arrêt <strong>de</strong>s travaux imposé au<br />

contrevenant sera toujours levé « suite à la régularisation <strong>de</strong> la situation administrative du<br />

terrain ». Sauf si vous avez construit sur un terrain ne vous appartenant pas, il est rare que l’on<br />

arrive à la solution extrême <strong>de</strong> la démolition.<br />

Mieux, par le jeu <strong>de</strong>s déclassements, souvent abusifs, nombre <strong>de</strong> sites en construction sont<br />

aujourd’hui <strong>de</strong>s titres fonciers, dont certains ont évolué progressivement <strong>de</strong> leur statut initial<br />

d’autorisation d’occuper, en passant par un bail, avant <strong>de</strong> finir par un titre foncier monnayable<br />

et, surtout, pour les promoteurs immobiliers, constitutif d’une soli<strong>de</strong> garantie bancaire. Nous<br />

savons, par exemple, que le complexe rési<strong>de</strong>ntiel E<strong>de</strong>n Rock, voisin <strong>de</strong> la Rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong><br />

l’Ambassa<strong>de</strong>ur d’Iran est construit sur <strong>de</strong>ux titres fonciers. D’après une source administrative<br />

souhaitant gar<strong>de</strong>r l’anonymat, c’est le cas pour presque tous les grands projets émergeant sur<br />

la Corniche, « même si les grands groupes hôteliers n’ont pas souvent besoin <strong>de</strong> cela, il leur<br />

suffit d’une autorisation d’occuper ou d’un bail ».<br />

Une fois munis <strong>de</strong>s documents administratifs nécessaires, le promoteur qui se présente <strong>de</strong>vant<br />

le Service régional d’Urbanisme a toutes les chances d’obtenir son permis <strong>de</strong> construire.<br />

Cependant, cette légalité apparente ne doit pas abuser l’observateur attentif. <strong>Le</strong>s<br />

déclassements sont trop nombreux - suprême hérésie certains concernent <strong>de</strong>s terrains<br />

originellement classés non aedificandi - pour <strong>de</strong>s projets dont le caractère d’intérêt général ne<br />

saute pas aux yeux, mais cet aspect n’est pas du ressort du Service régional d’urbanisme.<br />

L’action croisée <strong>de</strong>s ministères <strong>de</strong> l’Environnement, <strong>de</strong> la Pêche et <strong>de</strong> l’Urbanisme pour éviter<br />

les errements et les atteintes aux différents co<strong>de</strong>s qui régissent l’occupation du littoral marin<br />

fait souvent défaut et ne semble pas en tous cas suffisamment huilée pour épingler tous ceux,<br />

et ils sont légion, qui seraient tentés par l’aventurisme et le poncepilatisme.<br />

Toutes ces préoccupations cependant, ont été prises en compte par la loi n° 2001-01 du 15<br />

janvier 2001 portant co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Environnement et son décret d’application, n° 2001-282 du 12<br />

avril 2001 qui sont venus combler une lacune injustifiable du régime socialiste qui, en 1985,<br />

avait fait voter une loi similaire qui n’avait pas fait l’objet d’un décret d’application jusqu’en<br />

2000.<br />

Apparemment le vote <strong>de</strong> cette loi a enthousiasmé les fonctionnaires <strong>de</strong> la Direction <strong>de</strong><br />

l’Environnement et <strong>de</strong>s Etablissements Classés (Deec) qui, avant elle, n’avaient pas leur mot à<br />

dire, ou si peu, sur <strong>de</strong>s constructions et installations aux inci<strong>de</strong>nces environnementales<br />

négatives certaines. En son article L 48, la nouvelle loi dit : « Tout projet <strong>de</strong> développement<br />

ou activité susceptible <strong>de</strong> porter atteinte à l’environnement et à la santé <strong>de</strong>s populations, <strong>de</strong><br />

même que les politiques, les plans et les programmes <strong>de</strong>vront faire l’objet d’une évaluation<br />

environnementale <strong>de</strong>s impacts potentiels avant leur mise en œuvre » 5 . La loi est complétée<br />

par le décret d’application, en son article R 38 : « La réalisation d’une étu<strong>de</strong> d’impact sur<br />

5 Cf. Circulaire n° 0001 PM/SP, du 22 mai 2007. Cette décision fait suite à un Conseil prési<strong>de</strong>ntiel tenu le 12<br />

avril <strong>de</strong> la même année. La circulaire convoque l’article L69 <strong>de</strong> la loi du quinze janvier 2001 : « l’autorisation<br />

d’occupation du Domaine <strong>public</strong> ne doit entraver ni le libre accès au Domaine <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> et fluvial, ni la<br />

libre circulation sur la grève, ni être source d’érosion ou <strong>de</strong> dégradation du site ». Et la circulaire d’en référer à la<br />

loi 76-66 du 2 juillet 1976 portant Co<strong>de</strong> du Domaine <strong>de</strong> l’Etat, en rappelant cette disposition portée sur tout acte<br />

administratif autorisant une occupation, sous quelque statut, du Dpm : «Seules sont autorisées sur les Domaines<br />

<strong>public</strong>s <strong>maritime</strong> et fluvial, à titre d’occupations privatives, les installations légères et démontables ».


l’environnement (Eie) est un préalable à toute autorisation administrative exigée pour la<br />

réalisation d’un projet envisagé » 6 . C’est ainsi que 68 rapports ont été publiés entre 2003 et<br />

2006 et ont concerné divers secteurs 7 . Ces statistiques trahissent l’insuffisance <strong>de</strong>s efforts<br />

consentis par l’Etat pour juguler le mal, surtout au vu <strong>de</strong> l’explosion du secteur immobilier et<br />

du Btp constaté à <strong>Dakar</strong>, et plus particulièrement autour <strong>de</strong> la ceinture foncière qui entoure le<br />

Dpm.<br />

Un an et <strong>de</strong>mi après la circulaire primatoriale <strong>de</strong> 2007, l’Eie est au cœur <strong>de</strong>s préoccupations<br />

<strong>de</strong>s fonctionnaires <strong>de</strong> la Direction <strong>de</strong> l’Environnement qui affirment que tous les projets sur la<br />

corniche ont fait l’objet d’une Eie, et, précise le Directeur adjoint <strong>de</strong> l’Environnement, « d’un<br />

Plan <strong>de</strong> gestion environnemental <strong>de</strong>stiné à réduire les risques sur l’environnement ou à les<br />

annihiler ». Il souligne que le Plan <strong>de</strong> Gestion environnemental ou Plan <strong>de</strong> Suivi<br />

environnemental est un moyen <strong>de</strong> sécuriser les projets, après que l’Eie en ait évalué les effets<br />

négatifs, les risques pour les hommes et « aussi les effets positifs sur l’environnement »,<br />

procédé à une audience publique pour recueillir l’avis <strong>de</strong>s populations touchées par le projet,<br />

produit un rapport validé par un comité technique, et donné une Attestation <strong>de</strong> Conformité<br />

environnementale au promoteur, si le projet est validé.<br />

Seulement, on l’a vu, en 2006, Tourisme et Urbanisme confondus, seuls dix projets<br />

susceptibles <strong>de</strong> toucher aux préoccupations soulevées ici, avec l’occupation apparemment<br />

anarchique du Dpm, avaient fait l’objet d’Eie. <strong>Le</strong> rush constaté aujourd’hui est suscité par une<br />

circulaire vieille <strong>de</strong> moins d’un an et <strong>de</strong>mi. Ce qui indique donc que, même si à la Direction<br />

<strong>de</strong> l’Environnement, notamment par la voix du Chef <strong>de</strong> la Division Pollution immédiate et<br />

Impact Environnemental, on affirme que « tous les projets sur la Corniche ont fait l’objet<br />

d’Eie », on peut raisonnablement penser que nombre <strong>de</strong> chantiers sur la Corniche, notamment<br />

ceux <strong>de</strong> l’Anoci, avaient déjà connu un état d’avancement <strong>de</strong>s travaux qui rendait les Eie,<br />

sinon aléatoires, du moins <strong>de</strong> peu d’effet sur la finalisation <strong>de</strong> ces chantiers, même lorsque le<br />

Directeur général adjoint <strong>de</strong> l’Environnement affirme avoir « fait arrêter <strong>de</strong>s chantiers qui<br />

n’avaient pas fait l’objet d’Eie, ou dont les promoteurs ne respectaient pas les<br />

recommandations du Plan <strong>de</strong> Gestion environnemental ».<br />

En tout état <strong>de</strong> cause, avec les nouvelles constructions sur la Corniche, il est difficile <strong>de</strong> croire<br />

que certains points centraux <strong>de</strong>s Termes <strong>de</strong> référence <strong>de</strong> l’Eie ont pu être respectés,<br />

notamment celui rendant obligatoire « une analyse <strong>de</strong> l’état initial du site et <strong>de</strong> son<br />

environnement : collecte <strong>de</strong> données <strong>de</strong> base sur l’eau, le sol, la flore, la faune, l’air, les<br />

conditions physico-chimiques, biologiques, socio-économiques et culturelles ». En outre,<br />

l’EIE indique clairement la voie à suivre durant la phase <strong>de</strong> pré construction puisque le<br />

promoteur est tenu <strong>de</strong> « soumettre un plan détaillé <strong>de</strong> PSE qui présentera l’évaluation du coût<br />

<strong>de</strong> toutes les mesures préconisées, leur échéancier d’exécution et les structures responsables<br />

en terme <strong>de</strong> suivi ». « Etat initial du site », « phase <strong>de</strong> pré construction », quels chantiers sur la<br />

Corniche auront pu être évalués à ces sta<strong>de</strong>s, à partir <strong>de</strong> fin mai 2007, quand certains travaux,<br />

notamment routiers, étaient quasiment achevés et que d’autres étaient très avancés ?<br />

Quelques Eie dont on semble fier à la direction <strong>de</strong> l’Environnement sont celles concernant les<br />

extensions du « Terrou bi », et <strong>de</strong> « Magic Land », entre autres. Ces <strong>de</strong>ux entités auraient eu<br />

leur quitus malgré le fait que le « Terrou bi », par exemple, a fait démolir un poste <strong>de</strong><br />

surveillance <strong>de</strong>s Eaux et Forets pour bâtir son hôtel sur le Dpm et a dû s’engager, en guise <strong>de</strong><br />

6<br />

Ibid.<br />

7<br />

<strong>Le</strong>s secteurs concernés sont l’Energie et les Mines (21 rapports), les Travaux routiers (17), le Tourisme (6) et<br />

l’Urbanisme (4).


compensation, à construire un nouveau poste, présentement en chantier, <strong>de</strong>rrière l’ex cour <strong>de</strong><br />

Cassation, et, à verser à l’association <strong>de</strong> jeunes <strong>de</strong>s quartiers riverains du « Terrou bi », dans<br />

<strong>de</strong>s conditions que nous n’avons pu éluci<strong>de</strong>r, une subvention s’élevant, paraîtrait-il, à <strong>de</strong>s<br />

dizaines <strong>de</strong> millions <strong>de</strong> francs.<br />

L’extension du « Terrou bi », et même le projet initial, qui aurait été autorisé par les<br />

Socialistes, jurent avec les objectifs <strong>de</strong> la Girmac (Gestion intégrée <strong>de</strong>s ressources <strong>maritime</strong>s<br />

et côtières), financée par la Banque mondiale, le Fonds pour l’Environnement mondial et le<br />

gouvernement du Sénégal. La privatisation <strong>de</strong> plages par le « Terrou bi » et par « Magic<br />

Land » contrevient aux dispositions <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> 2001 citée plus haut, notamment celles<br />

relatives à la libre circulation sur la grève. Or, les aménagements réalisés sur une distance <strong>de</strong><br />

plusieurs dizaines <strong>de</strong> mètres jusques dans la mer 8 , avec un port <strong>de</strong> plaisance pour les clients<br />

du « Terrou bi », sont une forme <strong>de</strong> privatisation à peine dissimulée mais consentie par les<br />

autorités étatiques et surtout les mairies <strong>de</strong>s arrondissements concernés contre le payement<br />

d’une re<strong>de</strong>vance ou d’une taxe.<br />

Ce qu’on peut espérer, c’est que tout cela et d’autres efforts encore qui sont en train d’être<br />

faits ne viennent pas confirmer cette réputation bien connue <strong>de</strong> notre pays qui dispose d’une<br />

inflation <strong>de</strong> textes qui ne font que très rarement l’objet d’une application stricte, comme le<br />

suggère l’ancienne Directrice <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong>s établissements classés qui estimait,<br />

il n’y a guère que « si on mettait en œuvre le Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Environnement <strong>de</strong> la façon la plus<br />

stricte, beaucoup d’unités industrielles allaient fermer » 9 .<br />

8 Dans <strong>de</strong>s conditions similaires, le « Sunugal » logé en plein dans le Dpm <strong>de</strong>rrière « le Casino » a procédé à <strong>de</strong>s<br />

modifications importantes <strong>de</strong> la texture rocheuse <strong>de</strong> l’océan en aménageant un port <strong>de</strong> plaisance et <strong>de</strong>s piscines<br />

fermées à la libre circulation publique.<br />

9 Cf. Wal Fadjri, 18 août 2005.


Chapitre 6<br />

Gestion juridique du Dpm<br />

<strong>Le</strong> <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> est constitué par l’ensemble <strong>de</strong>s biens et droits mobiliers et immobiliers <strong>de</strong><br />

l’Etat et insusceptibles d’appropriation privée 10 . Parmi ces biens, ceux qui jouxtent le rivage,<br />

notamment la mer territoriale et les eaux intérieures, <strong>de</strong> même que la zone dite <strong>de</strong>s pas<br />

géométriques, constituent le Domaine <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> (Dpm).<br />

Il est <strong>de</strong> nos jours, l’objet d’une gran<strong>de</strong> convoitise au Sénégal en général et à <strong>Dakar</strong> en<br />

particulier. Sur une superficie représentant 0,25% du territoire sénégalais, la ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong><br />

concentre 25 à 35% <strong>de</strong> la population du pays et plus <strong>de</strong> 80% <strong>de</strong> l’industrie mo<strong>de</strong>rne, <strong>de</strong> la<br />

production et <strong>de</strong>s services.<br />

Ce phénomène a fait que <strong>de</strong>puis un peu plus d’une décennie le littoral a cessé progressivement<br />

d’apparaître seulement comme un milieu naturel généralement recherché pendant les pério<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> loisirs ; il est <strong>de</strong>venu corrélativement, en raison <strong>de</strong> ses seuls agréments et même en<br />

l’absence <strong>de</strong> justification d’ordre économique, un lieu privilégié <strong>de</strong> développement <strong>de</strong><br />

l’habitat permanent et <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> toutes natures. Ces mouvements <strong>de</strong> concentration<br />

touristique et d’urbanisation ten<strong>de</strong>nt d’ailleurs à se confondre et se conjuguent pour provoquer<br />

une transformation très rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s zones littorales sénégalaises (environ 700 km <strong>de</strong> côtes).<br />

Dans ces conditions, et en dépit <strong>de</strong> l’étendue remarquable <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> <strong>maritime</strong> du Sénégal,<br />

la zone littorale a <strong>de</strong> plus en plus le caractère d’un bien rare. Cette rareté alimente dans<br />

certaines régions, notamment à <strong>Dakar</strong>, une frénésie dans le désir <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong> ces<br />

dépendances et engendre <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong>s occupations illégales.<br />

Malgré l’existence <strong>de</strong> textes <strong>de</strong> loi sur le <strong>domaine</strong> national, le <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat et <strong>de</strong>s textes<br />

spéciaux tels que les Co<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’Eau, <strong>de</strong> l’Hygiène, <strong>de</strong> l’Environnement, et <strong>de</strong> l’Urbanisme,<br />

on recense <strong>de</strong>s violations fréquentes et <strong>de</strong> plus en plus graves du Dpm. Ce chapitre a pour<br />

objet <strong>de</strong> rendre compte <strong>de</strong> ces illégalités, <strong>de</strong> montrer le caractère inefficace <strong>de</strong> la gestion du<br />

littoral dakarois, et <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s remè<strong>de</strong>s.<br />

Des occupations illégales<br />

Une <strong>de</strong>s particularités du Dpm est d’être peu extensible. C’est pour cette raison qu’il doit faire<br />

l’objet d’une utilisation pointilleuse. Son aménagement doit tenir compte <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux impératifs<br />

apparemment contradictoires : d’une part, une exploitation permettant une rentabilisation<br />

optimale <strong>de</strong>s recettes publiques 11 , et, d’autre part, une protection qui garantit efficacement sa<br />

10 Cf. Art. 2 <strong>de</strong> la loi n° 76 – 66 du 2 juillet 1976 portant Co<strong>de</strong> du Domaine <strong>de</strong> l’Etat.<br />

11 L’élargissement <strong>de</strong> l’assiette fiscale qui semble être <strong>de</strong>venu le leitmotiv existentiel <strong>de</strong> l’Etat, et, notamment du<br />

ministère <strong>de</strong> l’Economie et <strong>de</strong>s finances « qui dégaine et tire sur tout ce qui bouge », fiscalement s’entend,<br />

<strong>de</strong>vrait faire l’objet d’une concertation nationale parce que c’est une notion qui participe <strong>de</strong> la gouvernance<br />

démocratique. Elle a même <strong>de</strong>s prolongements constitutionnels qui participent <strong>de</strong>s droits et <strong>de</strong>voirs du citoyen


conservation contre la nature et contre l’homme, tout en le mettant au service <strong>de</strong>s objectifs<br />

généraux <strong>de</strong> l’aménagement du territoire. Ces <strong>de</strong>ux impératifs sont régulièrement chahutés par<br />

les classes aisées au sujet d’un espace où prévalent <strong>de</strong>s occupations sans titre et une impunité<br />

récurrente <strong>de</strong>s délinquants.<br />

Occupations sans titre<br />

L’occupant sans titre est d’abord celui qui n’a jamais bénéficié d’un titre <strong>de</strong> ce genre. Est<br />

également occupant sans titre, celui dont l’occupation a donné lieu à un titre qui, pour une<br />

raison quelconque a expiré 12 .<br />

Titres d’occupation inexistants<br />

Dans cette catégorie on classe <strong>de</strong>s titres qui ne correspon<strong>de</strong>nt pas à la nature <strong>de</strong>s occupations<br />

effectivement constatées sur le terrain. <strong>Le</strong>s différentes sortes <strong>de</strong> titres d’occupations privatives<br />

du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> sont énumérées à l’article 11 du Co<strong>de</strong> du <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat (C<strong>de</strong>) qui<br />

stipule : « <strong>Le</strong> <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> peut faire l’objet <strong>de</strong> permissions <strong>de</strong> voirie, d’autorisations<br />

d’occuper, <strong>de</strong> concessions et d’autorisations d’exploitation…. ».<br />

A <strong>Dakar</strong>, sur la Corniche Ouest (Fenêtre Mermoz sur Mer), beaucoup <strong>de</strong> constructions à<br />

usage d’habitation ont été édifiées à hauteur <strong>de</strong> « Atepa Technologies ». Sur une superficie <strong>de</strong><br />

plus <strong>de</strong> 10 000 mètres carrés, <strong>de</strong>s maisons dont on peine à croire qu’elles peuvent appartenir à<br />

<strong>de</strong>s ressortissants <strong>de</strong> pays sous développés, sont construites par <strong>de</strong>s hommes politiques <strong>de</strong><br />

l’ancien et du nouveau régime et <strong>de</strong> riches hommes d’affaires sénégalais.<br />

Dans la même zone, figurent <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s surfaces abritant <strong>de</strong>s industries <strong>de</strong> plaisance (terrain<br />

<strong>de</strong> golf édifié au profit <strong>de</strong> puissantes communautés étrangères ; centre <strong>de</strong> thalassothérapie ;<br />

club athlétique ; etc). Ces édifices sont construits avec emprise sur le sol. Or, pour qu’il en<br />

soit ainsi, le titre d’occupation doit consister soit en une autorisation d’occuper, en une<br />

concession ou en une autorisation d’exploitation. En effet, l’autorisation d’occuper peut<br />

entraîner une modification <strong>de</strong> l’assiette du <strong>domaine</strong>, mais comme elle est accordée à titre<br />

précaire et révocable (article 13 du Co<strong>de</strong> du <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat), il s’ensuit que le<br />

bénéficiaire ne peut y implanter <strong>de</strong>s édifices avec emprise sur le sol.<br />

Par conséquent, on est bien en présence <strong>de</strong> la forme d’occupation sans titre évoquée plus haut.<br />

mais aussi <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> l’Etat <strong>de</strong> droit et du Chef <strong>de</strong> l’Etat dans un système prési<strong>de</strong>ntiel aussi concentré<br />

et centralisé que celui du Sénégal. Il n’est pas recevable que les plus pauvres paient davantage d’impôts, toutes<br />

choses étant par ailleurs égales, que les segments sociaux les plus riches et les sociétés transnationales étrangères<br />

auxquelles on donne <strong>de</strong>s terres du meilleur cru sur le Dpm, soit gratuitement ou au franc presque symbolique,<br />

cependant que les communautés extrêmement fragiles <strong>de</strong>s bas-fonds évoluent dans les marécages et <strong>de</strong>s zones<br />

inondées en permanence par <strong>de</strong>s eaux insalubres. Cette situation a été rendue possible par la gestion calamiteuse<br />

du Parti socialiste dans une fourchette temporelle quarantenaire, gestion qui est en train d’être rééditée <strong>de</strong> façon<br />

accélérée par le pouvoir libéral, en moins d’une décennie <strong>de</strong> parcours hachuré par <strong>de</strong>s scandales <strong>de</strong> toutes sortes<br />

et une tension sans précé<strong>de</strong>nt du jeu politique inter et intra partisan. <strong>Le</strong> projet <strong>de</strong> réforme <strong>de</strong> la loi en cours sur le<br />

<strong>domaine</strong> national engagé par le chef <strong>de</strong> l’Etat aurait dû commencer par <strong>de</strong>s consultations foraines et au sein <strong>de</strong><br />

toutes les composantes sociales sur l’ensemble du territoire national, au lieu d’être d’abord confiné dans les<br />

cercles étroits <strong>de</strong> spécialistes du droit, certes rompus à l’exercice et l’analyse <strong>de</strong> celui-ci, mais qui, laissés à euxmêmes,<br />

succombent invariablement aux <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rata politiques du commanditaire suprême <strong>de</strong> la nouvelle loi, et<br />

aussi, au caractère conservateur très marqué <strong>de</strong>s sciences juridiques, et, en particulier, du droit foncier et<br />

domanial.<br />

12 Voir à ce propos, M.Caverivire et M.Debene, « Droit foncier sénégalais » ; B. <strong>Le</strong>vrault, n°189


Quant aux concessions et autorisations d’exploitation, l’article 16 du même texte énonce<br />

qu’elles sont réservées aux installations ayant un caractère d’intérêt général, ce qui n’est pas<br />

le cas pour les édifices concernés qui ont, au contraire, un caractère d’intérêt particulier. Ici<br />

encore, on est en présence <strong>de</strong> cas d’occupation sans titre <strong>de</strong> la première catégorie. En<br />

définitive, que les bénéficiaires excipent d’une autorisation d’occuper, d’une concession ou<br />

d’une autorisation d’exploitation, ils restent toujours <strong>de</strong>s occupants sans titre au vu <strong>de</strong> la<br />

nature <strong>de</strong>s constructions qu’ils ont implantées.<br />

Titres d’occupations caducs<br />

La secon<strong>de</strong> forme d’occupation sans titre est constituée d’occupations sur la base <strong>de</strong> titres<br />

caducs. Il s’agit d’occupations prolongées au-<strong>de</strong>là du délai <strong>de</strong> jouissance autorisé.<br />

Sur les côtes <strong>de</strong>s communes urbaines, <strong>de</strong>s occupants sont installés sur les plages pendant <strong>de</strong>s<br />

temps anormalement longs. Il en est ainsi <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> loisirs tels que les « casinos »,<br />

restaurants et autres « auberges » que <strong>de</strong>s particuliers gèrent en y tirant <strong>de</strong>s profits personnels.<br />

Or, selon les articles 12 à 14 du C<strong>de</strong>, l’occupation du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>, quelle que soit sa<br />

forme, est toujours précaire et révocable. Par conséquent, nul ne peut, en principe, être<br />

propriétaire du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> ou l’occuper pendant un délai excédant celui prescrit par le<br />

titre d’occupation. <strong>Le</strong> temps <strong>de</strong> jouissance <strong>de</strong> ces biens est donc limité.<br />

Pour le cas particulier <strong>de</strong>s concessions et autorisations d’exploitation, l’article 16 précité<br />

précise qu’elles peuvent être accordées pour une durée déterminée ou non.<br />

De telles occupations ne peuvent se justifier que par le biais <strong>de</strong> baux emphytéotiques dont la<br />

durée peut dépasser 25 ans, et selon le cas, le temps nécessaire pour amortir le coût <strong>de</strong>s biens<br />

nécessités par l’exploitation. Or <strong>de</strong> tels baux ne sont prévus que pour <strong>de</strong>s dépendances du<br />

<strong>domaine</strong> privé et ne sont pas encore admis pour le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>. Certes, les biens du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong> artificiel ainsi que la zone <strong>de</strong>s pas géométriques peuvent subir une mutation<br />

entraînant leur incorporation au <strong>domaine</strong> privé. Il suffit pour cela qu’ils soient déclassés. Mais<br />

s’agissant <strong>de</strong> biens domaniaux leur vente ne peut avoir lieu que par autorisation législative.<br />

De telles autorisations n’existent pas encore et les occupations sont ainsi prolongées au mépris<br />

<strong>de</strong>s textes, notamment <strong>de</strong> l’article 12 du CDE.<br />

Cette situation est d’autant plus illégale que les autorisations d’occuper et les concessions ou<br />

autorisations d’exploitation du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> ne sont accordées que lorsqu’elles revêtent un<br />

caractère prédominant d’utilité publique ou d’intérêt économique et social (art.18 du C<strong>de</strong>). Au<br />

cas contraire, elles ne peuvent être octroyées à titre gratuit. Or, il est possible <strong>de</strong> constater que<br />

si pour les occupations telles que les concessions <strong>de</strong> plages privées et les restaurants, <strong>de</strong>s<br />

re<strong>de</strong>vances sont perçues, il n’en est pas <strong>de</strong> même pour les maisons à usage d’habitation (qui<br />

constituent l’exemple type d’occupation prolongée du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong>) et <strong>de</strong>s clubs<br />

sportifs tels que ceux édifiés par <strong>de</strong>s étrangers anglo-saxons sur la Corniche ouest, à hauteur<br />

<strong>de</strong> l’Ecole nationale d’économie appliquée.<br />

Enfin, ces installations offrent le plus souvent le spectacle <strong>de</strong> véritables ruptures d’urbanisme,<br />

car érigées sans tenir compte <strong>de</strong>s documents d’urbanisme <strong>de</strong>s zones occupées.<br />

En pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> crise <strong>de</strong> l’habitat cette situation aurait dû inciter les pouvoirs <strong>public</strong>s à insérer<br />

dans les éventuelles clauses ou conditions d’autorisation d’occuper le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong><br />

<strong>maritime</strong>, l’obligation non seulement <strong>de</strong> protéger les biens contre les dégradations, mais aussi,


<strong>de</strong> respecter les plans d’urbanisme existants. Dans les pays dotés d’un système <strong>de</strong><br />

gouvernance respectable, <strong>de</strong> telles conditions sont prévues et strictement contrôlées et leur<br />

violation sanctionnée. 13 .<br />

Une autre manifestation <strong>de</strong>s occupations illégales se trouve dans l’usage abusif <strong>de</strong>s titres par<br />

leurs titulaires.<br />

Un usage abusif <strong>de</strong>s titres consentis<br />

<strong>Le</strong>s droits que l’Etat consent aux titulaires <strong>de</strong> titre d’occupation privative sur le Dpm étant<br />

précaires et révocables, les édifices qui y sont installés doivent être légers et facilement<br />

démontables. Or, non seulement les installations qu’on y trouve sont loin d’être démontables,<br />

mais les bénéficiaires se méprennent sur la nature <strong>de</strong> leurs titres et s’adonnent parfois à <strong>de</strong>s<br />

cessions <strong>de</strong> ceux-ci. Parfois encore, on découvre <strong>de</strong>s bénéficiaires qui occupent <strong>de</strong>s surfaces<br />

plus « étendues » que celles qui leur ont été consenties.<br />

Edifices lourds et difficilement démontables dans <strong>de</strong>s zones non aedificandi<br />

L’article 12 du C<strong>de</strong> stipule : « les permissions <strong>de</strong> voirie sont délivrées à titre personnel<br />

essentiellement précaire et révocable. Elles n’autorisent que <strong>de</strong>s installations légères,<br />

démontables, ou mobiles n’emportant pas emprise importante du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> ou<br />

modification <strong>de</strong> son assiette ... ».<br />

Ainsi lorsque le titre n’octroie à son titulaire que le droit <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s « installations<br />

légères », l’étendue du droit ainsi reconnu est précisément limité. Ces installations ne peuvent<br />

avoir d’emprise sur le sous-sol, sans constituer un abus répréhensible <strong>de</strong> droit. Or il est facile<br />

<strong>de</strong> constater sur nos côtes, <strong>de</strong>s installations sur la ban<strong>de</strong> <strong>de</strong>s « pas géométriques », avec<br />

emprise. Il s’agit d’abord d’installations à usage d’habitation qui dans certaines zones<br />

constituent <strong>de</strong> véritables mitages. Il en est ainsi dans la Baie <strong>de</strong> Hann Yaraax, où les règles<br />

d’urbanisme sont ignorées.<br />

Aux abords <strong>de</strong> la Corniche Ouest et le long du littoral <strong>de</strong> Yoff et <strong>de</strong>s Almadies, ce sont <strong>de</strong>s<br />

projets immobiliers, initiés par <strong>de</strong>s sociétés privées dont les préoccupations <strong>de</strong> rente<br />

immédiate sont en contradiction flagrante avec les exigences d’équilibre social et<br />

environnemental qui servent d’alibi pour construire <strong>de</strong>s hôtels sur les plages ou dans <strong>de</strong>s<br />

zones d’habitation offertes à la vente. A ce titre, on peut citer le récent complexe immobilier<br />

<strong>de</strong> « Water Front » ou les édifices anciens <strong>de</strong> l’hôtel « Océan », du « Casino du Cap Vert », du<br />

Restaurant du « Virage » et <strong>de</strong>s installations à usage d’habitation <strong>de</strong> Yoff Waraar. Ces<br />

installations sont le fait d’hommes d’affaires proches <strong>de</strong> la classe politique dominante<br />

(ancienne et actuelle) et <strong>de</strong> lobbys libanais dont la particularité est <strong>de</strong> s’allier à toute majorité<br />

au pouvoir afin <strong>de</strong> préserver <strong>de</strong>s intérêts acquis par <strong>de</strong>s procédés obscurs.<br />

13 Par exemple, en France, un plan d’aménagement <strong>de</strong> zone pourtant approuvé par arrêté préfectoral et autorisant<br />

l’occupation d’un secteur proche <strong>de</strong> la mer a été annulé par le juge. Voir T.A <strong>de</strong> Nice, 04 Juillet, 1991, SOS<br />

Environnement n°87396.<br />

<strong>Le</strong> plan d’aménagement <strong>de</strong> la zone en question couvrait une superficie d’une centaine d’hectares située dans un<br />

espace naturel entre une ban<strong>de</strong> très urbanisée et une autre ban<strong>de</strong> urbanisée. <strong>Le</strong> juge a considéré qu’une telle<br />

opération couvrant une superficie <strong>de</strong> 105000 m 2 <strong>de</strong> surface hors œuvre nette, dont un <strong>de</strong>s secteurs proche <strong>de</strong> la<br />

mer, <strong>de</strong>stinée à <strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nces hôtelières et <strong>de</strong> tourisme et à <strong>de</strong>s locaux commerciaux et <strong>de</strong> services, ne peut que<br />

dénaturer profondément la baie et participe d’une erreur manifeste.


Quant aux concessions récemment accordées dans la zone <strong>de</strong>s Almadies à <strong>de</strong>s hommes<br />

politiques d’envergure, à <strong>de</strong>s marabouts et à <strong>de</strong>s hommes d’affaires Libanais (encore eux),<br />

leur pertinence se pose pour <strong>de</strong>ux raisons essentielles. D’abord leur conformité à la<br />

<strong>de</strong>stination du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> (à savoir la satisfaction <strong>de</strong> l’intérêt général) est manifestement<br />

sujette à caution, car elles procurent plutôt <strong>de</strong>s profits à cette catégorie <strong>de</strong> citoyens à part dans<br />

<strong>de</strong>s conditions compromettant l’usage que chacun est en droit <strong>de</strong> s’attendre sur cette partie du<br />

<strong>domaine</strong>.<br />

Ensuite, leur affectation à l’utilité publique est contestable, car le montant <strong>de</strong>s recettes<br />

publiques que l’Etat en tire est dérisoire, voire ridicule (moins <strong>de</strong> 20 millions <strong>de</strong> francs Cfa<br />

dans le budget <strong>de</strong> 2007).<br />

Dans cette même catégorie <strong>de</strong> violations flagrantes du CDE, on classe également <strong>de</strong>s villas<br />

construites par la famille d’anciennes autorités politiques au sommet <strong>de</strong> l’Etat telles que celles<br />

qui trônent majestueusement aux abords <strong>de</strong> l’Ambassa<strong>de</strong> du Luxembourg ou encore <strong>de</strong> la<br />

« propriété » d’environ 6 000 mètres carrés à Yoff, propriété qui appartiendrait au Prési<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> la République qui avait promis d’en faire don à l’Etat. Malgré nos investigations<br />

persistantes dans le Journal officiel <strong>de</strong> la République du Sénégal, nous n’avons eu aucune<br />

confirmation que ces terres ont été versées au <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>. Il convient <strong>de</strong> noter qu’en<br />

<strong>de</strong>hors du statut légal <strong>de</strong> ce terrain, le Chef <strong>de</strong> l’Etat a violé les dispositions pertinentes<br />

relatives au Dpm en érigeant un mur <strong>de</strong> clôture qui rend difficile la circulation dans cette<br />

partie <strong>de</strong> la baie océane.<br />

En <strong>de</strong>hors du Chef <strong>de</strong> l’Etat, il y a le cas préoccupant d’un building massif <strong>de</strong> plusieurs étages<br />

planté à quelques mètres seulement <strong>de</strong> la mer au pied <strong>de</strong>s Mamelles. Ce complexe<br />

architectural qui appartiendrait, selon <strong>de</strong>s rumeurs persistantes, au Prési<strong>de</strong>nt du Sénat et Maire<br />

<strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, M. Pape Diop, comporte plusieurs bâtiments qui ont été loués à <strong>de</strong>s organismes <strong>de</strong>s<br />

Nations Unies. Ces <strong>de</strong>ux cas particuliers <strong>de</strong> violation du Dpm sont préoccupants car ils<br />

impliqueraient, s’ils sont avérés, les <strong>de</strong>ux plus hautes autorités <strong>de</strong> ce pays.<br />

La caractéristique commune à toutes ces occupations, est que bien que les autorisations<br />

stipulent clairement le caractère précaire et révocable <strong>de</strong>s occupations, les projets présentés<br />

pour le bénéfice <strong>de</strong> titres d’exploitation privative contiennent l’édification d’installations<br />

durables sur les pas géométriques.<br />

Dans un passé récent, ces projets étaient le plus souvent relatifs à l’installation <strong>de</strong> tentes,<br />

chaises <strong>de</strong> plages dont certains prennent l’allure, le plus souvent, <strong>de</strong> véritables sites hôteliers<br />

avec emprise sur le sol. Il en était ainsi dans l’île <strong>de</strong> Ngor et dans le littoral <strong>de</strong> Yoff. De nos<br />

jours, ce sont véritablement <strong>de</strong>s maisons qui sont construites. On peut également noter le cas<br />

du <strong>domaine</strong> privé en construction sur la plage <strong>de</strong> l’ile <strong>de</strong> Ngor. <strong>Le</strong>s NGorois pointent du doigt<br />

le ministre <strong>de</strong> l’Economie et <strong>de</strong>s finances, Abdoulaye Diop, et seraient sur le point d’intenter<br />

une action pour protester contre cette violation du Dpm et exiger <strong>de</strong> l’Etat qu’il arrête <strong>de</strong><br />

spolier ainsi <strong>de</strong>s espaces qui appartiennent à la collectivité nationale. De telles occupations<br />

nécessitent une procédure spéciale d’autorisation (article16 du C<strong>de</strong>) qui est souvent occultée<br />

ou vidée <strong>de</strong> son sens. En effet, elles nécessitent l’intervention du service <strong>de</strong>s <strong>domaine</strong>s qui<br />

doit préciser le lotissement <strong>de</strong> la parcelle allouée, la superficie du <strong>domaine</strong> occupé, la durée <strong>de</strong><br />

l’occupation, la nature <strong>de</strong>s installations et <strong>de</strong>s activités à y exercer, le nom du bénéficiaire et<br />

le montant <strong>de</strong> la re<strong>de</strong>vance. L’autorisation, la plupart du temps, rappelle également certains<br />

principes <strong>de</strong> l’occupation, notamment sa précarité, son caractère personnel, l’obligation<br />

d’assumer les frais accessoires <strong>de</strong> timbre et d’enregistrement et celle <strong>de</strong> payer l’impôt foncier


correspondant à la surface occupée. Enfin, selon le cas, elle peut préciser que telle autorisation<br />

ne dispense pas le bénéficiaire <strong>de</strong> formuler les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s d’autorisation préalables et d’obtenir<br />

le permis <strong>de</strong> construire, ou que les constructions doivent présenter du point <strong>de</strong> vue esthétique,<br />

un aspect satisfaisant.<br />

Il s’agit donc pratiquement d’un permis <strong>de</strong> stationnement (au lieu <strong>de</strong> permission <strong>de</strong> voirie<br />

comme le stipule l’article 12 du C<strong>de</strong>) ayant un caractère essentiellement révocable et pouvant,<br />

en France, par exemple, être retiré par l’administration pour la sauvegar<strong>de</strong> d’autres intérêts <strong>de</strong><br />

caractère général 14 .<br />

<strong>Le</strong> retrait <strong>de</strong> l’autorisation peut obliger le bénéficiaire évincé à enlever les installations qu’il<br />

avait précé<strong>de</strong>mment édifiées 15 . Cependant si l’administration n’exige pas cette démolition,<br />

elle conserve ces installations qui <strong>de</strong>viennent une dépendance du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> 16 . <strong>Le</strong> permis<br />

<strong>de</strong> stationnement est, en outre, précaire en ce sens que le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> ne doit pas être<br />

grevé <strong>de</strong> droits dont l’exercice serait <strong>de</strong> nature à entraver l’administration dans ses pouvoirs<br />

<strong>de</strong> gestion et d’aménagement. A cet effet, il peut toujours être retiré par l’administration et le<br />

permissionnaire ne peut évoquer un droit à son maintien 17 .<br />

Au Sénégal bien que la procédure d’octroi <strong>de</strong> permis <strong>de</strong> stationnement existe et coexiste avec<br />

celle <strong>de</strong>s permissions <strong>de</strong> voirie, leur application fait très souvent défaut. Ce qui explique en<br />

partie, l’absence <strong>de</strong> sanctions <strong>de</strong>s violations du C<strong>de</strong> qui reste en fait inappliqué. Mais ces<br />

violations ne sont pas les seules à expliquer les remises en cause du principe <strong>de</strong> l’inaliénabilité<br />

du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> : il en subsiste d’autres qui sont relatives au caractère personnel<br />

<strong>de</strong>s autorisations d’occuper et <strong>de</strong>s permissions <strong>de</strong> voirie.<br />

Ventes immobilières sur le Dpm<br />

Ici, la confusion dans la nature <strong>de</strong>s droits octroyés par les titres a engendré <strong>de</strong>s pratiques<br />

manifestement illégales. En effet, l’article 9 du C<strong>de</strong> pose la règle selon laquelle le <strong>domaine</strong><br />

<strong>public</strong> est inaliénable et imprescriptible. L’inaliénabilité est <strong>de</strong>stinée à protéger le <strong>domaine</strong>.<br />

Elle signifie que les bénéficiaires <strong>de</strong> titres d’occupation ne peuvent ni le vendre, ni y<br />

consentir <strong>de</strong>s baux commerciaux, ni y constituer <strong>de</strong>s droits réels. Tout au plus peut-on y<br />

tolérer <strong>de</strong>s droits réels au profit <strong>de</strong>s occupants bénéficiant d’une autorisation temporaire. Mais<br />

ces droits réels ne portent pas sur le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> lui-même, mais sur les réalisations qui y<br />

sont faites.<br />

Par conséquent, les ventes préconisées aussi bien par <strong>de</strong>s sociétés que par <strong>de</strong>s particuliers sont<br />

illégales. C’est dans ce cadre qu’il serait possible <strong>de</strong> ranger la société immobilière « Water<br />

Front » (citée plus haut) qui construit dans les « pas géométriques », sur une surface <strong>de</strong> plus<br />

<strong>de</strong> 1000 mètres carrés, <strong>de</strong>s villas pour les revendre.<br />

Dans la même zone, <strong>de</strong>s Européens et <strong>de</strong>s Libanais possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s villas à usage d’habitation<br />

ou <strong>de</strong>s écoles privées. Cependant, pour l’école située dans cette zone, son appartenance aux<br />

pas géométriques est approximative. Mais, il existe bien <strong>de</strong>s ventes pratiquées sur le Dpm,<br />

14 C.E 05 Nov. 1937 Société industrielle <strong>de</strong>s schistes, Rec. <strong>Le</strong>bon, p.897.<br />

15 C.E 23 Juin 1951, Société Anonyme <strong>de</strong> la nouvelle jetée promena<strong>de</strong> <strong>de</strong> Nice, Rec. <strong>Le</strong>bon, p. 405<br />

16 C.E 20 Mai 1927. Fabre, Rec. <strong>Le</strong>bon p.581<br />

17 Marcel Waline considère qu’il peut même y avoir obligation <strong>de</strong> retrait lorsque la permission s’avère<br />

inconciliable avec les droits d’usage du <strong>public</strong>, in RDP, 1963 p.1174. De même voir C.E, 26 Juin 1979 Dame<br />

Ca<strong>de</strong>t.


notamment sur les pas géométriques. Pour le cas particulier <strong>de</strong>s pas géométriques <strong>maritime</strong>s<br />

ces pratiques illicites sont constatées en zone urbaine ou en zone touristique. L’île <strong>de</strong> Gorée et<br />

les quartiers implantés sur le pourtour <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong> Hann à <strong>Dakar</strong> en constituent <strong>de</strong>s exemples<br />

frappants.<br />

Pour le cas particulier <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong> Hann, son occupation révèle, en plus <strong>de</strong>s irrégularités sus<br />

mentionnées, une violation à la fois du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Urbanisme, du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Eau, du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

l’Hygiène et du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Environnement. Pour cette raison, nous lui consacrons ci-après, un<br />

paragraphe spécial.<br />

Pour ce qui concerne les illégalités relevant <strong>de</strong>s ventes <strong>de</strong> dépendances du Dpm dont il est<br />

question dans le présent paragraphe, il convient <strong>de</strong> noter que, certes, <strong>de</strong> nombreuses parcelles<br />

ont fait l’objet d’un déclassement et d’une immatriculation au profit <strong>de</strong> particuliers permettant<br />

alors à ceux-ci <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r les terrains leur appartenant ainsi en pleine propriété, mais il n’est pas<br />

rare que <strong>de</strong>s constructions soient édifiées sur le Dpm <strong>de</strong> façon illicite.<br />

En zone urbaine, il s’agit le plus souvent d’occupation partielle, le titulaire d’un titre foncier<br />

en lisière <strong>de</strong>s terrains domaniaux « annexant » quelques mètres <strong>de</strong> plage.<br />

En zone touristique, les emprises illicites sont plus évi<strong>de</strong>ntes, mais tout aussi mal maîtrisées<br />

qu’en zone urbaine. Nous avons signalé plus haut la pratique sur la côte au sud <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, où,<br />

à l’initiative d’Européens, et en accord avec les autorités coutumières locales, se sont<br />

multipliées les implantations <strong>de</strong> cabanons <strong>de</strong> week-end sur le Dpm. En imitant les Européens,<br />

la bourgeoisie politico bureaucratique sénégalaise s’est vu « octroyer » <strong>de</strong>s titres d’occupation<br />

privative qu’elle est amenée quelques fois à louer ou à vendre, après avoir transformé les<br />

anciennes cases <strong>de</strong> paille par <strong>de</strong> véritables maisons en dur se dressant au centre <strong>de</strong> terrains<br />

soigneusement clôturés.<br />

Ces ventes illicites sont favorisées par la confusion qui est faite entre les régimes <strong>de</strong>s biens du<br />

<strong>domaine</strong> national et du <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat, notamment du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>de</strong> celui-ci. <strong>Le</strong>s<br />

occupants <strong>de</strong>s terrains du <strong>domaine</strong> national (tout comme ceux du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>) n’ont pas<br />

<strong>de</strong> titre <strong>de</strong> propriété sur les parcelles occupées. Ils n’ont que <strong>de</strong>s titres d’habiter ou<br />

d’occuper 18 . Or le titulaire du permis d’occuper ou d’habiter une parcelle du <strong>domaine</strong><br />

national a <strong>de</strong>s droits réels sur celle-ci, du moins sur les ouvrages construits sur la parcelle<br />

considérée. En particulier, il a la possibilité <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r les « soins et peines » 19 qu’il y a<br />

consentis. Il n’en est pas <strong>de</strong> même <strong>de</strong> l’occupant <strong>de</strong>s dépendances du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong><br />

<strong>maritime</strong>. Celui-ci n’a sur la dépendance occupée qu’un droit d’usage personnel. Ce droit<br />

n’est pas transmissible 20 . Ce sont ces situations juridiques <strong>de</strong>s occupants <strong>de</strong>s <strong>domaine</strong>s <strong>public</strong><br />

et national qui sont ici confondues.<br />

18 Sur ces permis d’occuper ou d’habiter voir M. Caveriviere et M.Debene , Op.cit p 44.<br />

19 La notion <strong>de</strong> « peine » se rapproche <strong>de</strong> celle d’ « impense » c’est à dire <strong>de</strong>s améliorations apportées à un bien,<br />

mais elle englobe une réalité plus large et permet <strong>de</strong> qualifier le résultat <strong>de</strong> l’effort <strong>de</strong> mise en valeur du sol. Voir<br />

à ce propos M. Caverviere et M. Debene, ibid. p 20<br />

20 Sur les ouvrages construits par le bénéficiaire du titre d’occupation, la propriété <strong>de</strong> la personne publique<br />

concédante peut être établie dès le début <strong>de</strong> la concession. Ces ouvrages sont alors qualifiés <strong>de</strong> « biens <strong>de</strong><br />

retour ». La propriété du concessionnaire sur ces ouvrages peut être par contre établie par un contrat prévoyant<br />

une reprise facultative par le concédant. Tant que la reprise n’est pas effectuée les ouvrages <strong>de</strong>meurent la<br />

propriété du concessionnaire. Sur la distinction « biens <strong>de</strong> retour /biens <strong>de</strong> reprise », voir J.M. Auby et P. Bon<br />

Op.cit. p99.


Cette ignorance du droit positif confortée par les insuffisances <strong>de</strong> l’administration, a permis<br />

aux autorités coutumières mais aussi aux titulaires d’autorisations d’occuper le <strong>domaine</strong><br />

<strong>maritime</strong> <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s ventes illicites du <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat. Des auteurs ont souvent qualifié<br />

ces opérations <strong>de</strong> « spéculations » ; il s’agit plutôt, <strong>de</strong> « pratiques tombant sous le coup <strong>de</strong> la<br />

loi pénale » 21 .<br />

Ces auteurs font remarquer : « certains bureaucrates, certaines autorités religieuses ou<br />

traditionnelles ont pu avoir, dans quelques hypothèses, un rôle ambigu, agissant parfois au<br />

mépris <strong>de</strong> la loi foncière mo<strong>de</strong>rne, soutenant au contraire, dans d’autres circonstances l’effort<br />

<strong>de</strong> l’Etat ». <strong>Le</strong> rôle ambigu joué par l’administration se manifeste parfois par le silence gardé<br />

en présence <strong>de</strong> ces pratiques. Parmi ces <strong>de</strong>rnières, on peut retenir la transmission <strong>de</strong>s biens du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> par la voie successorale. Mais celle-ci entre dans le cadre plus<br />

général <strong>de</strong> la méconnaissance du régime juridique du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>.<br />

<strong>Le</strong> cas particulier <strong>de</strong> la Baie <strong>de</strong> Hann<br />

Située sur la faça<strong>de</strong> orientale <strong>de</strong> la presqu’île du Cap-Vert, la baie <strong>de</strong> Hann Yaraax s’étire<br />

<strong>de</strong>puis la pointe <strong>de</strong> Bel-Air jusqu’au village <strong>de</strong> Mbaw, sur environ 10 kilomètres. A cheval sur<br />

le département <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> et celui <strong>de</strong> Pikin Daagudaan, elle représente une zone favorable à<br />

l’habitat, aux installations industrielles, au maraîchage et au tourisme balnéaire. Du point <strong>de</strong><br />

vue <strong>de</strong> l’occupation spatiale, la baie est subdivisée en quatre zones: les zones habitées, les<br />

zones <strong>de</strong> culture, les zones <strong>de</strong> loisirs, et les zones industrielles. Son extension étant bloquée au<br />

sud par les installations industrielles, les réserves <strong>de</strong> stockage d’hydrocarbures <strong>de</strong> Shell et<br />

Mobil et les infrastructures touristiques et plaisancières, c’est par le nord-est qu’une telle<br />

perspective est envisageable, rendant ainsi la compétition (entre populations et industriels)<br />

pour l’occupation <strong>de</strong> l’espace très serrée.<br />

La « sur occupation » qui en a résulté, a accéléré la dégradation du milieu marquée par la<br />

pollution <strong>de</strong>s eaux, l’insalubrité <strong>de</strong> la plage, et la prolifération <strong>de</strong> certaines maladies, et s’est<br />

faite en méconnaissance <strong>de</strong>s textes relatifs à l’hygiène, à l’environnement, à l’eau et à<br />

l’urbanisme.<br />

Méconnaissance du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Hygiène<br />

<strong>Le</strong> Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Hygiène fait l’objet <strong>de</strong> la loi 83-71 du 23 juillet 1983 (J.O. du 5 juillet 1983). Il<br />

comprend 81 articles répartis en 13 chapitres dont quatre intéressent particulièrement la baie<br />

<strong>de</strong> Hann. Il s’agit <strong>de</strong>s chapitres 3 à 6 relatifs aux règles d’hygiène concernant respectivement<br />

l’habitation, les voies publiques, les plages et les installations industrielles. Mais ni les<br />

prescriptions relatives à l’hygiène dans les maisons (<strong>de</strong>s hameaux <strong>de</strong> pêcheurs insalubres), ni<br />

celles concernant les plages (avec le déversement <strong>de</strong>s eaux usées et/ou <strong>de</strong>s déchets fécaux) ne<br />

sont respectées. Cependant il convient <strong>de</strong> noter, pour le déplorer, que malgré ses nobles<br />

objectifs, cette loi souffre d’un déficit criard d’application. Ce déficit trouve son origine dans<br />

l’absence d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> milieu par <strong>de</strong>s sociologues avertis, capables d’évaluer les mentalités <strong>de</strong>s<br />

populations et les réalités du milieu. On pourrait également l’expliquer par l’absence<br />

d’infrastructures <strong>de</strong> base en matière d’assainissement dans cette zone et plus généralement<br />

dans toute la presqu’île du Cap-Vert.<br />

C’est ainsi que l’article L-17 qui stipule que « les matières usées liqui<strong>de</strong>s doivent être<br />

éliminées par <strong>de</strong>s systèmes d’assainissement et que les propriétaires d’immeubles sont tenus<br />

21 Op.cit. p. 272


<strong>de</strong> brancher leurs édifices sanitaires aux réseaux installés selon la distance réglementaire » est<br />

particulièrement inadapté aux habitations rudimentaires <strong>de</strong>s pêcheurs. De même, en<br />

interdisant toute installation d’urinoirs et <strong>de</strong> latrines dans les habitations non conformes aux<br />

normes prescrites, l’article 18 alinéa 5 « invite » implicitement à faire tous les besoins dans le<br />

rivage.<br />

Violation du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’environnement<br />

Institué par la loi n° 2001 – 01 du 15 janvier 2001, ce co<strong>de</strong> dispose en son article L-9 que les<br />

usines, ateliers, dépôts, et d’une manière générale les installations présentant un danger pour<br />

la salubrité publique, l’agriculture et l’environnement, en général, sont régies par la présente<br />

loi. Par conséquent, toutes les industries installées à Hann sont concernées par ce texte.<br />

Malheureusement le déversement d’effluents par la Sotiba (textile), les ICS (chimie)<br />

contrevient quotidiennement aux dispositions du co<strong>de</strong>. Par ailleurs, l’approvisionnement en<br />

matières premières d’industries telles que Shell gaz, Total gaz, Senelec (avec ses <strong>de</strong>ux<br />

centrales <strong>de</strong> Bel-Air et du Cap <strong>de</strong>s Biches) et d’industries agro-alimentaires, pharmaceutiques,<br />

ou plastiques, accroît la <strong>de</strong>nsité du transport <strong>de</strong> matières dangereuses dans cette zone dans un<br />

périmètre étroit où se côtoient <strong>de</strong>s maisons à forte <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population et <strong>de</strong>s nuisances <strong>de</strong><br />

toutes sortes. En effet, la forte concentration industrielle avec notamment <strong>de</strong>s réservoirs<br />

d’hydrocarbures et <strong>de</strong> gaz et <strong>de</strong> dépôts <strong>de</strong> produits tels que l’ammoniac entraîne <strong>de</strong>s risques<br />

d’acci<strong>de</strong>nts et <strong>de</strong> catastrophes élevés 22 .<br />

<strong>Le</strong>s ruptures <strong>de</strong> cuves ou la combustion <strong>de</strong> produits chimiques toxiques avec un important<br />

dégagement <strong>de</strong> gaz sont à l’origine <strong>de</strong> la pollution atmosphérique.<br />

On note dans la zone <strong>de</strong>s fuites d’ammoniac dans les poissonneries (qui rappellent l’acci<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> la Sonacos en 1992) et les rejets dans l’atmosphère <strong>de</strong> solvants d’impression par Carnaud à<br />

Hann Equip. On note également le déversement <strong>de</strong>s produits par la SAR dont les canalisations<br />

reliant les usines et les dépôts <strong>de</strong> Hann connaissent souvent <strong>de</strong>s fuites qui forment <strong>de</strong>s mares<br />

dans certaines concessions avec un risque d’incendie.<br />

Il est vrai que récemment, les jeunes <strong>de</strong>s communautés riveraines se sont investis<br />

sérieusement dans l’assainissement <strong>de</strong> la plage <strong>de</strong> Hann en obtenant <strong>de</strong>s résultats significatifs<br />

qui ont permis <strong>de</strong> mettre un terme aux déversements intempestifs dans la baie <strong>de</strong> produits<br />

chimiques nocifs et nauséabonds et aux jeunes <strong>de</strong> s’adonner au beach soccer. Mais combien<br />

<strong>de</strong> temps durera cette sorte <strong>de</strong> pax romana établie entre les jeunes <strong>de</strong> plus en plus directement<br />

concernés par la protection environnementale et les industries <strong>de</strong> substitution d’importation<br />

implantées ici <strong>de</strong>puis le début du siècle passé pour certains ?<br />

Méconnaissance du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Eau<br />

22 La gran<strong>de</strong> probabilité <strong>de</strong> tels risques est avérée par la catastrophe qui a provoqué la mort, en 1992, <strong>de</strong> plus <strong>de</strong><br />

350 victimes lorsque l’une <strong>de</strong>s usines <strong>de</strong> la Sonacos attenante au cimetière <strong>de</strong> Bel-Air a été le théâtre d’une<br />

explosion causée par l’ammoniaque qui s’est propagé à une vitesse foudroyante. Cette catastrophe a montré le<br />

caractère artificiel du Plan Orsec mis en place par le gouvernement dans <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> catastrophes qui menacent la<br />

vie <strong>de</strong> larges segments <strong>de</strong> la population. Il y a un tel délabrement <strong>de</strong>s équipements indispensables lors <strong>de</strong>s<br />

opérations <strong>de</strong> sauvetage à gran<strong>de</strong> échelle, en mer ou à terre, que l’Etat fait régulièrement appel, à travers le<br />

dispositif Orsec, aux équipements du secteur privé et <strong>de</strong> la base militaire française <strong>de</strong> Waakaam. Tout l’argent<br />

<strong>public</strong> gaspillé dans <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> prestige et dans le train <strong>de</strong> vie extravagant <strong>de</strong> la Prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la<br />

Republique aurait pu permettre <strong>de</strong> combler <strong>de</strong> telles lacunes qui sont l’un <strong>de</strong>s éléments clés <strong>de</strong> la sécurité<br />

nationale.


Faisant l’objet <strong>de</strong> la loi n° 81-13 du 4 mars 1981, il comprend 6 titres et 110 articles, mais<br />

seuls les titres II et V relatifs à la protection qualitative <strong>de</strong>s eaux et aux infractions et sanctions<br />

concernent principalement la baie <strong>de</strong> Hann. Son article 47 (titre II) réglemente la lutte contre<br />

la pollution <strong>de</strong>s eaux, notamment pour satisfaire les exigences <strong>de</strong> la vie biologique <strong>de</strong> la faune<br />

piscicole, <strong>de</strong>s loisirs, <strong>de</strong>s sports nautiques, etc .<br />

A Hann la qualité <strong>de</strong> l’eau s’est dégradée à un point tel que la faune marine y est <strong>de</strong>venue<br />

rare 23 et que les activités touristiques jadis florissantes, ne sont plus aujourd’hui qu’un vieux<br />

souvenir, et, cela, du fait <strong>de</strong>s populations peu respectueuses <strong>de</strong> normes minimales d’hygiène<br />

et du manque <strong>de</strong> volonté <strong>de</strong> l’administration pour y apporter <strong>de</strong>s solutions durables et<br />

appropriées.<br />

Méconnaissance du co<strong>de</strong> l’Urbanisme<br />

<strong>Le</strong> Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’urbanisme fait l’objet <strong>de</strong> la loi n° 88-05 du 20 juillet 1988 qui a repris, dans sa<br />

partie législative la loi 66-49 du 27 mai 1966. Ce texte prescrit le respect <strong>de</strong>s documents<br />

d’urbanisme tels que les plans directeurs d’urbanismes (documents <strong>de</strong> prévision à long terme<br />

permettant d’intégrer la politique d’urbanisme dans une politique générale <strong>de</strong> développement<br />

économique et <strong>de</strong> progrès social).<br />

Dans la zone <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong> Hann, l’étroitesse du territoire et la cohabitation d’habitations avec<br />

<strong>de</strong>s industries, <strong>de</strong>s activités agricoles, <strong>de</strong> loisirs et d’artisanat (avec une domination <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

premières) ont conduit à un véritable mitage <strong>de</strong> l’espace.<br />

L’habitat existant est surtout <strong>de</strong> type villageois, étendu <strong>de</strong> manière non contrôlée. On note<br />

souvent <strong>de</strong>s villas qui contrastent avec l’aspect dominant. L’une <strong>de</strong>s raisons explicatives <strong>de</strong> ce<br />

phénomène est l’ignorance <strong>de</strong>s habitants encore attachés au droit coutumier malgré<br />

l’existence <strong>de</strong>s lois sur le <strong>domaine</strong> national et sur le <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> l’Etat. <strong>Le</strong>s terres sont encore<br />

distribuées par les familles autochtones, en général Lébus. Ce sont d’ailleurs, ces populations<br />

qui ont vendu les terres aux exploitants industriels, commerçants et autres Libanais.<br />

Aucun lotissement n’est fait, aucun respect <strong>de</strong>s plans d’occupation <strong>de</strong>s sols n’est noté. Ainsi<br />

on observe une proximité dangereuse <strong>de</strong>s maisons avec <strong>de</strong>s unités industrielles. <strong>Le</strong> minimum<br />

vital imposé par les plans d’occupation <strong>de</strong>s sols est méconnu par les populations.<br />

Pour le cas particulier <strong>de</strong> la cohabitation contre nature, elle engendre souvent <strong>de</strong>s conflits<br />

entre habitants et industriels. Ainsi, <strong>de</strong>s industriels saisissent souvent les autorités<br />

administratives pour, d’une part, faire état <strong>de</strong> l’antériorité <strong>de</strong> leur implantation par rapport aux<br />

habitations, et, d’autre part, du non respect, par les habitants, <strong>de</strong> la distance <strong>de</strong> sécurité qui<br />

<strong>de</strong>vrait les séparer <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers.<br />

D’un autre côté, <strong>de</strong>s populations, regroupées en associations, se plaignent souvent <strong>de</strong>s risques<br />

potentiels et avérés que font courir les industries, avec l’encombrement <strong>de</strong>s voies, les<br />

pollutions sonores, le non respect <strong>de</strong>s normes <strong>de</strong> conditionnement <strong>de</strong>s produits. <strong>Le</strong>s unités<br />

industrielles ciblées sont surtout: Carnaud Metalbox pour l’émission <strong>de</strong> fumée contenant <strong>de</strong><br />

23 Pourtant durant les années 1950 à 1970, cette baie était un havre <strong>de</strong> concor<strong>de</strong> environnementale entre les<br />

pêcheurs artisanaux et les jeunes qui venaient se baigner dans l’une <strong>de</strong>s eaux alors considérée comme la plus<br />

limpi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la presqu’île et ramasser toutes sortes <strong>de</strong> coquilles vivantes comme les buudj et les sébéét, cependant<br />

que le kannax pouvait être trouvé au large mais surtout dans les zones où foisonnent rochers basaltiques alvéolés<br />

ou épaves naturelles (Baie <strong>de</strong> Gorée, Anse Bernard et Ngor Almadies).


l’oxy<strong>de</strong> <strong>de</strong> zinc provenant du vernis qu’elle utilise pour l’oxydation <strong>de</strong>s boîtes d’aluminium. Il<br />

y a également la Sosenap, souvent accusée d’émettre <strong>de</strong>s gaz toxiques et d’utiliser <strong>de</strong>s<br />

produits chimiques dangereux. Viennent ensuite la C<strong>de</strong>, Mobil, Shell, la Sotiba et la Seras.<br />

A ces types <strong>de</strong> conflits, il convient d’ajouter celui qui oppose périodiquement les riverains aux<br />

concessionnaires <strong>de</strong> plages privées. En effet, ces <strong>de</strong>rniers, du fait <strong>de</strong> la multiplicité <strong>de</strong>s plages<br />

privées, édifient <strong>de</strong>s barrières jusque dans l’eau; ce qui compromet l’accès <strong>de</strong>s populations<br />

dans certains endroits du littoral. L’autorité administrative qui <strong>de</strong>vrait arbitrer ces différents<br />

conflits n’inspire plus confiance aux populations qui voient en elle une complice en ce sens<br />

que c’est elle-même qui octroie les autorisations aux bénéficiaires <strong>de</strong> plages privées.<br />

Empiétements sur les dépendances du Dpm<br />

Des occupants, une fois installés sur la partie qui leur est attribuée arrivent, par endroits, à<br />

étendre frauduleusement la surface occupée. Cette « extension » se fait en plusieurs étapes.<br />

D’abord, on commence par clôturer la partie convoitée, contigüe à la partie déjà occupée.<br />

Puis, si pendant quelques années aucune autorité administrative ne se présente pour contrôler<br />

le respect <strong>de</strong>s plans d’occupation <strong>de</strong>s sols, on y édifie <strong>de</strong>s installations. Ces pratiques ont été<br />

notées dans l’île <strong>de</strong> Ngor, en particulier. Malgré l’ampleur <strong>de</strong>s infractions ainsi relatées, on<br />

constate que les auteurs ne sont pas sanctionnés ou qu’ils le sont insuffisamment.<br />

L’impunité <strong>de</strong>s auteurs<br />

<strong>Le</strong>s auteurs <strong>de</strong>s infractions relatées plus haut enfreignent le droit <strong>de</strong>s usagers, notamment<br />

l’accès aux plages, méconnaissent le caractère personnel <strong>de</strong>s titres d’occupation, et/ou<br />

s’adonnent à <strong>de</strong>s pratiques successorales inconnues en matière <strong>de</strong> domanialité publique. En ce<br />

sens, ils méconnaissent inconsciemment ou délibérément le régime juridique du <strong>domaine</strong><br />

<strong>public</strong> <strong>maritime</strong>.<br />

<strong>Le</strong> C<strong>de</strong> édicte à leur encontre <strong>de</strong>s sanctions qui se sont révélées inopérantes.<br />

Violations répétées du régime juridique du Dpm<br />

Un <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> la domanialité publique est que les dépendances qui en font partie sont<br />

affectées à l’utilité publique. Celle-ci s’entend, d’une part, <strong>de</strong> l’usage direct du <strong>public</strong> et,<br />

d’autre part, <strong>de</strong> l’affectation à un service <strong>public</strong>.<br />

L’usage direct du <strong>public</strong> signifie que les usagers ont le droit d’accé<strong>de</strong>r librement, c'est-à-dire<br />

sans entrave. Ce droit est remis en cause par certains bénéficiaires <strong>de</strong> titres d’occupation.<br />

Par ailleurs, les titres d’occupation sont octroyés à titre personnel, c'est-à-dire que son<br />

bénéficiaire ne peut le transmettre à ses ayant droit. Cette règle est, elle aussi constamment<br />

bafouée.<br />

Restrictions illicites au droit d’accès aux rivages<br />

Du fait <strong>de</strong> la multiplication <strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nces secondaires le long du Dpm et <strong>de</strong> l’octroi généreux,<br />

par l’administration, d’autorisations privatives d’occupation du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> et<br />

consistant en implantation d’escaliers, terrasses, etc., il est <strong>de</strong>venu difficile voire impossible<br />

<strong>de</strong> cheminer librement le long du littoral dakarois. Il en est ainsi dans les plages existant à


côté <strong>de</strong> certains hôtels tels que le « Terrou Bi », le « Lagon I » et le « Lagon II » ou celle<br />

située sous le Phare <strong>de</strong>s Mamelles.<br />

Mais les obstacles au droit <strong>de</strong> circuler sur le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> et au droit d’accé<strong>de</strong>r à<br />

la plage quand <strong>de</strong>s propriétés privées en interdisent l’accès, ne sont pas exactement <strong>de</strong> même<br />

nature.<br />

<strong>Le</strong>s interdictions <strong>de</strong> circuler sur le Dpm affecté au <strong>public</strong><br />

La libre circulation <strong>de</strong>s personnes dans cette dépendance résulte d’une tradition sans<br />

fon<strong>de</strong>ment juridique véritable. En réalité aucun texte n’a institué une quelconque servitu<strong>de</strong> le<br />

long du littoral au profit du <strong>public</strong>.<br />

<strong>Le</strong> principe du libre accès au rivage n’est pas expressément proclamé per se. Il peut<br />

simplement être déduit <strong>de</strong> l’article 6-j du C<strong>de</strong> qui énumère les servitu<strong>de</strong>s d’utilité publique et<br />

précise que celles-ci comprennent les servitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> passage.<br />

Mais l’illégalité <strong>de</strong> telles restrictions peut également être déduite d’une lecture <strong>de</strong> l’article 20<br />

alinéa 1 du C<strong>de</strong> qui stipule : « Nul ne peut, sans autorisation délivrée par l’autorité<br />

compétente, occuper ou exploiter une dépendance du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> ou l’utiliser dans <strong>de</strong>s<br />

limites excédant le droit d’usage qui appartient à tous sur les parties <strong>de</strong> ce <strong>domaine</strong> affecté au<br />

<strong>public</strong> ». L’une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>stinations du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> étant son affectation à l’usage<br />

direct du <strong>public</strong>, toute entrave à l’exercice libre <strong>de</strong> cet usage direct du <strong>public</strong> constitue une<br />

illégalité.<br />

De façon générale, tous les concessionnaires <strong>de</strong> plages naturelles, notamment le « Terrou<br />

bi », méconnaissent cette liberté. Or, au Sénégal, contrairement à la France, le régime<br />

juridique <strong>de</strong>s plages est uniforme. Aussi bien la partie immergée par la marée que la partie<br />

supérieure 24 appartiennent au Dpm. A ce titre les plages, même concédées régulièrement par<br />

les autorités compétentes, doivent prévoir le libre accès à la mer et à la circulation le long du<br />

rivage. A défaut, les interdictions au libre accès à la mer et à la circulation le long du rivage<br />

tomberaient sous le coup <strong>de</strong> l’article 20 du CDE précité en ce qu’il prohibe l’utilisation d’une<br />

dépendance du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> dans <strong>de</strong>s limites excédant le droit d’usage appartenant à tous<br />

sur les parties <strong>de</strong> ce <strong>domaine</strong> affecté au <strong>public</strong>.<br />

<strong>Le</strong>s interdictions d’accès vers la plage<br />

Une autre forme d’entrave à l’usage direct du <strong>public</strong> se manifeste dans l’existence <strong>de</strong><br />

propriétés riveraines interdisant l’accès vers la plage. Il s’agit ici d’accès perpendiculaires au<br />

rivage, préalables à <strong>de</strong> véritables servitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> passage <strong>de</strong>s piétons le long du littoral. En<br />

édifiant <strong>de</strong> telles propriétés (elles sont nombreuses dans la zone <strong>de</strong> la Baie <strong>de</strong> Hann et <strong>de</strong> Yoff<br />

Waraar), l’existence <strong>de</strong> ces servitu<strong>de</strong>s est ainsi compromise. Certaines interdictions sont le<br />

fait d’installations dont rien ne justifie la proximité avec la mer. Il en est ainsi <strong>de</strong>s anciennes<br />

24 Cette partie supérieure est constituée par la zone <strong>de</strong> 100m <strong>de</strong> large à partir <strong>de</strong> la limite atteinte par les plus<br />

fortes marées (Art.5 al. 4 CDE). En France, par contre, cette partie supérieure relève, soit, du <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> la<br />

commune, soit, si elle est affectée à l’usage du <strong>public</strong> et fait l’objet d’un aménagement spécial, au <strong>domaine</strong><br />

<strong>public</strong> <strong>de</strong> celle-ci (C.E, 30 Mai 1975, Gozzoli ; A.J.D.A, 1975, p348), soit enfin, à <strong>de</strong>s personnes privées.


usines <strong>de</strong> la Sotiba, <strong>de</strong> la Sar, d’autres unités dispersées ou encore <strong>de</strong>s Ics à Mbaaw qui, en<br />

plus <strong>de</strong> cela, déversent <strong>de</strong>s effluents dans la mer.<br />

Des transmissions successorales <strong>de</strong>s titres d’occupation<br />

La conception traditionnelle qu’ont les populations du <strong>domaine</strong> survit aux lois mo<strong>de</strong>rnes<br />

« héritées » <strong>de</strong>s colonisateurs Européens. La terre, dans cette conception, était considérée<br />

comme une res nullius, à la merci du premier occupant. <strong>Le</strong>s premiers à s’installer sur les<br />

terres ont considéré celles-ci comme <strong>de</strong>s biens sur lesquels ils ont une propriété pleine et<br />

entière avec tous les attributs du droit <strong>de</strong> propriété qui en découlent : droits d’usage, <strong>de</strong><br />

percevoir <strong>de</strong>s fruits du bien et cession du bien. Avec l’avènement <strong>de</strong> la loi 64.46 du 17 juin<br />

1964 relative au <strong>domaine</strong> national, celles <strong>de</strong> ces terres qui ont été immatriculées au nom <strong>de</strong>s<br />

particuliers sont entrées dans le <strong>domaine</strong> <strong>de</strong> ceux-ci : le droit <strong>de</strong> propriété tacite a été ainsi<br />

expressément consacré par la loi.<br />

Ici aussi, l’ignorance <strong>de</strong>s populations et l’insuffisante <strong>public</strong>ité <strong>de</strong>s réformes contenues dans la<br />

loi 64.46 ont contribué à entretenir la confusion entre les droits <strong>de</strong> propriété <strong>de</strong>s occupants du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>de</strong>s particuliers et les droits précaires et révocables consentis par l’administration<br />

aux occupants du Dpm 25 .<br />

Ainsi, les populations se considérant toujours comme titulaires d’un droit <strong>de</strong> propriété sur les<br />

terres, y compris celles du Dpm, transmettent leurs « droits » à leurs <strong>de</strong>scendants. Ces<br />

transmissions sont même sinon effectuées avec le concours ou le « contrôle » <strong>de</strong>s autorités<br />

administratives, du moins font-elles l’objet d’actes dont la force probante est attestée par <strong>de</strong>s<br />

actes notariés !<br />

Il est vrai que les similitu<strong>de</strong>s entre les conséquences <strong>de</strong> l’affectation d’une parcelle du<br />

<strong>domaine</strong> national et celles résultant d’une autorisation accordée à un particulier d’occuper<br />

privativement une portion du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> peuvent amener les personnes les plus averties<br />

à considérer comme i<strong>de</strong>ntiques les droits <strong>de</strong>s bénéficiaires <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux types d’occupation. En<br />

effet, tous les occupants se voient reconnaître (à titre personnel) 26 l’usage, dans un but<br />

d’exploitation, pour les uns du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> et, pour les autres, du <strong>domaine</strong> national. Par<br />

ailleurs, comme pour le <strong>domaine</strong> national, l’utilisation privative du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> peut, dans<br />

certaines hypothèses 27 , être accordée à titre gratuit. Si l’on ajoute à ces considérations qui<br />

ten<strong>de</strong>nt à assimiler les droits <strong>de</strong>s occupants du <strong>domaine</strong> national et ceux <strong>de</strong> l’occupant du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong>, l’aménagement <strong>de</strong> la réaffectation préférentielle aux héritiers du défunt<br />

affectataire <strong>de</strong> la dépendance du <strong>domaine</strong> national qu’il exploitait, on comprend mieux alors<br />

les illusions qui sous-ten<strong>de</strong>nt la transmission héréditaire <strong>de</strong>s titres d’occupation du Dpm.<br />

Ainsi, malgré la clarté <strong>de</strong>s textes sur l’intransmissibilité <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> l’occupant du<br />

Dpm 28 , <strong>de</strong>s cessions sont pratiquées sur les dépendances <strong>de</strong> ce <strong>domaine</strong>. Il en résulte une<br />

25 A ce propos M. Caveriviere et M .Debene notent : « Trop complexe, le régime juridique se heurte à<br />

l’incompréhension <strong>de</strong>s particuliers mal informés. Tandis que le droit positif est ignoré, c’est la coutume qui sert<br />

<strong>de</strong> référence voire le Co<strong>de</strong> civil ». Ibid., p. 266.<br />

26 Art.12 du CDE pour les permissions <strong>de</strong> voirie et art. 13 pour les autorisations d’occuper.<br />

27 Ces hypothèses sont, il est vrai restrictives et sont prévues à l’article 18 du C<strong>de</strong> qui suspend la gratuité au<br />

caractère prédominant d’utilité publique ou d’intérêt économique et social du projet à effectuer sur la<br />

dépendance.<br />

28 Quant au <strong>domaine</strong> national l’article 6 du décret 72-1188 du 27 oct. 1972 relatif aux conditions d’affectation et<br />

<strong>de</strong> désaffectation <strong>de</strong>s terres du Domaine National (J.O.R.S du 18 nov.1972, p.1894) modifié par le décret<br />

80.1058 du 14 oct. 1980 (J.O.R.S 8 nov. 1980 p.1298) lui même remplaçant le décret 64.573 du 30 juillet 1964


violation du caractère personnel <strong>de</strong>s titres d’occupation édictés pour garantir l’indisponibilité<br />

et, partant, l’inaliénabilité du Dpm.<br />

Si les inconvénients <strong>de</strong> ces violations illustratives <strong>de</strong> l’occupation anarchique du Dpm n’ont<br />

pu être évités par l’application <strong>de</strong>s règles préventives efficaces, il aurait été possible <strong>de</strong><br />

remédier au « mal déjà fait » par <strong>de</strong>s sanctions appropriées. Malheureusement ces règles ne<br />

sont jamais appliquées.<br />

Sanctions inopérantes<br />

Parmi les mesures administratives prévues figurent le paiement <strong>de</strong> re<strong>de</strong>vances et l’astreinte à<br />

l’amen<strong>de</strong> 29 . <strong>Le</strong>s premières sont inadaptées et la secon<strong>de</strong> inapte à faire cesser l’irrégularité.<br />

<strong>Le</strong> caractère inadapté <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances<br />

<strong>Le</strong>s re<strong>de</strong>vances, comme moyen <strong>de</strong> lutte contre les irrégularités d’occupation constatées sur le<br />

Dpm, posent un double problème : elles apparaissent d’abord plus comme une contrepartie du<br />

droit d’occuper le <strong>domaine</strong> que comme une sanction <strong>de</strong> l’illégalité éventuelle <strong>de</strong> cette<br />

occupation. En ce sens, elles constituent <strong>de</strong>s mesures difficilement qualifiables <strong>de</strong> sanctions.<br />

Ensuite, l’effet recherché, c’est à dire l’exploitation rentable du <strong>domaine</strong>, n’est pas totalement<br />

atteint dans certains cas. <strong>Le</strong>s re<strong>de</strong>vances sont, à cet égard, inefficientes.<br />

Des mesures difficilement qualifiables <strong>de</strong> sanctions<br />

La re<strong>de</strong>vance est prévue à l’article 20 du C<strong>de</strong> comme sanction aux infractions constitutives<br />

d’occupation sans titre et d’abus <strong>de</strong> droits d’occupation. Cet article donne compétence aux<br />

agents <strong>de</strong> l’Etat ou les autres personnes habilitées à cet effet pour constater ces infractions afin<br />

<strong>de</strong> permettre le recouvrement <strong>de</strong>s in<strong>de</strong>mnités correspondant aux re<strong>de</strong>vances dont le Trésor<br />

serait frustré.<br />

Il ne s’agit pas alors d’une sanction aux infractions évoquées à l’alinéa 1 <strong>de</strong> l’article 20 qui<br />

parle d’« occupation sans titre » et d’utilisation « dans les limites excédant le droit d’usage<br />

qui appartient à tous ». La re<strong>de</strong>vance ainsi conçue apparaît alors comme le rétablissement du<br />

manquement aux conditions financières <strong>de</strong> l’occupation. Or, ces conditions qui figurent<br />

souvent dans un cahier <strong>de</strong>s charges, peuvent permettre à l’occupant <strong>de</strong> payer les in<strong>de</strong>mnités<br />

correspondant aux re<strong>de</strong>vances par tranches. Celles-ci ne constituent plus une sanction, mais<br />

une obligation résultant d’une clause figurant dans le cahier <strong>de</strong>s charges 30 .<br />

fixant les règles <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s terroirs (J.O.R.S du 29 août 1964, pp.1123 et s), confirme l’existence du droit <strong>de</strong><br />

préférence que l’article 22 du décret 64.573 avait organisé au profit <strong>de</strong>s héritiers. En outre la pratique a apporté<br />

<strong>de</strong>s assouplissements à la règle <strong>de</strong> l’intransmissibilité dans lesquels, pour la majorité <strong>de</strong>s cas, les héritiers se<br />

voient « transmettre » un « droit » qui n’existe pas et les autorités locales interviennent (rarement)<br />

pour harmoniser le fait et le droit.<br />

NB : le décret 80.1051 à son tour, a été modifié par le décret 86.445 du 10 Avril 1986 (J.O.R.S, 10 Mai<br />

1986, p.198).<br />

29 L’amen<strong>de</strong> peut, par ailleurs être considérée comme une sanction juridictionnelle en ce sens qu’elle peut être<br />

prononcée par le juge pénal. Elle constitue une mesure administrative lorsqu’elle est prononcée par <strong>de</strong>s autorités<br />

administratives telle que la douane, le service <strong>de</strong>s eaux et forêts, ou les agents <strong>de</strong> l’urbanisme.<br />

30 C.E., 03 Avril 1940, Compagnie du Gaz <strong>de</strong> Paris, Rec. <strong>Le</strong>bon, p. 117. Pour cette raison, certains auteurs<br />

refusent <strong>de</strong> considérer les re<strong>de</strong>vances comme une sanction administrative. Il s’agira plutôt d’acte <strong>de</strong> gestion ;<br />

voir à ce propos, Auby et Bon, op.cit. p.113. D’autres considèrent la re<strong>de</strong>vance comme l’objet <strong>de</strong> l’obligation<br />

d’une partie au contrat synallagmatique <strong>de</strong> concession. Cf. Dictionnaire <strong>de</strong> droit, Tome 1 : Concession<br />

administrative, n°10.


<strong>Le</strong>s infractions mentionnées à l’alinéa 1 <strong>de</strong> l’article 20 ne peuvent être sanctionnées par <strong>de</strong>s<br />

« in<strong>de</strong>mnités » dont le Trésor serait frustré. Cette incapacité illustre l’inefficience <strong>de</strong>s<br />

re<strong>de</strong>vances comme sanction.<br />

Des mesures inefficientes<br />

<strong>Le</strong> Dpm constitue une richesse <strong>de</strong>s collectivités publiques qui doivent assurer une meilleure<br />

utilisation <strong>de</strong> ses dépendances. Résultant <strong>de</strong> l’accent mis sur la fonction patrimoniale du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong>, cette conception permet à l’administration <strong>de</strong> se procurer <strong>de</strong>s recettes<br />

importantes provenant notamment <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances dues à l’occasion d’occupations privatives.<br />

La re<strong>de</strong>vance exprime donc une opération <strong>de</strong> puissance publique dont la fixation du montant<br />

et le recouvrement incombent aux services <strong>de</strong>s Domaines.<br />

Il serait alors inapproprié <strong>de</strong> considérer les re<strong>de</strong>vances (forme <strong>de</strong> contribution indirecte),<br />

comme moyen <strong>de</strong> sanction <strong>de</strong> l’occupation sans titre (fait illégal). Une première raison tient<br />

au fait que le payement <strong>de</strong> la re<strong>de</strong>vance est dû, même en l’absence <strong>de</strong> cette illégalité. Une<br />

secon<strong>de</strong> raison peut être trouvée dans le fait que le paiement <strong>de</strong> la re<strong>de</strong>vance est sans<br />

inci<strong>de</strong>nce sur la commission <strong>de</strong> l’infraction ; autrement dit un occupant du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> à<br />

jour dans le paiement <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances dues pour la location du <strong>domaine</strong> peut bien utiliser ce<br />

<strong>domaine</strong> au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s limites prévues, commettant ainsi une irrégularité que le paiement <strong>de</strong> la<br />

re<strong>de</strong>vance ne peut effacer.<br />

Aussi n’existe-t-il aucun lien entre les occupations irrégulières du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> et<br />

le paiement <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances.<br />

Par ailleurs, le montant <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances perçues au titre du <strong>domaine</strong> en général et du <strong>domaine</strong><br />

<strong>public</strong> <strong>maritime</strong> en particulier, est dérisoire. En témoigne le barème <strong>de</strong>s prix <strong>de</strong> concession<br />

<strong>de</strong>s terrains domaniaux. <strong>Le</strong> plus élevé concerne <strong>Dakar</strong> Plateau où le mètre carré est vendu à<br />

14.000 francs Cfa !<br />

Pour lutter contre les occupations irrégulières, <strong>de</strong>s mesures ont été préconisées. Mais elles<br />

s’avèrent inaptes à faire cesser les irrégularités.<br />

L’inaptitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s amen<strong>de</strong>s à faire cesser les irrégularités<br />

A la différence <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances, les amen<strong>de</strong>s constituent <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> lutte contre les<br />

illégalités. A ce titre, elles ont un rapport direct avec les occupations irrégulières qu’elles ont<br />

pour but <strong>de</strong> sanctionner.<br />

Mais, force est <strong>de</strong> constater que le paiement <strong>de</strong> l’amen<strong>de</strong> n’a pas pour conséquence <strong>de</strong> faire<br />

cesser l’occupation sans titre ; le paiement ne vaut pas titre d’occupation. De même, il<br />

sanctionne l’occupation prolongée au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> utilisée ou la cession du bien<br />

domanial (à titre onéreux ou par voie successorale), il ne rend ni vali<strong>de</strong> l’occupation extra<br />

tempora 31 , ni valable la transmission du bien. <strong>Le</strong> paiement <strong>de</strong> l’amen<strong>de</strong> ne régularise pas les<br />

abus <strong>de</strong> droit d’occupation.<br />

31 Il a été jugé que si le permissionnaire <strong>de</strong>meure dans les lieux à l’expiration <strong>de</strong> la permission ou du délai<br />

consenti par l’administration, il se trouve être un occupant sans titre et encourt alors une condamnation pénale<br />

pour contravention <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> voirie, C.E., 19 Juin 1964, Meneret, Rec <strong>Le</strong>bon, p.581.


L’inaptitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s amen<strong>de</strong>s à faire cesser les occupations sans titre<br />

L’amen<strong>de</strong> est une sanction aux infractions commises sur le <strong>domaine</strong>. C’est une réaction à un<br />

acte illégal, préjudiciable. Il appartient à l’administration, victime du préjudice, <strong>de</strong> déclencher<br />

<strong>de</strong>s poursuites. <strong>Le</strong> juge répressif peut alors, en plus, condamner le contrevenant à une<br />

pénalité.<br />

Cette situation est prévue à l’alinéa 2 <strong>de</strong> l’article 20 du C<strong>de</strong> qui punit d’une amen<strong>de</strong> <strong>de</strong> 20 000<br />

francs Cfa à 2 millions <strong>de</strong> francs Cfa les manquements aux conditions d’occupation du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong>. Parmi ces manquements on peut raisonnablement placer les occupations sans<br />

titre.<br />

De telles sanctions sont prévues en France en matière <strong>de</strong> contraventions relatives au <strong>domaine</strong><br />

<strong>maritime</strong> par une loi du 19-22 juillet 1792, notamment, en matière d’extraction <strong>de</strong> sable sans<br />

autorisation, <strong>de</strong> dommages causés par les navires dans les ports, ou d’infractions à la police<br />

<strong>de</strong>s ports. Mais, comme elles ne peuvent être substitutives <strong>de</strong>s titres d’occupation et permettre<br />

alors le maintien <strong>de</strong> l’occupant dans la dépendance considérée, ni même faire cesser<br />

l’illégalité, l’administration peut alors recourir à l’exécution d’office, en cas d’urgence, ou<br />

lorsque l’y autorise un texte 32 , pour expulser le contrevenant.<br />

Au Sénégal, par contre, cette procédure n’est pas prévue dans le C<strong>de</strong> qui n’autorise, en plus<br />

du paiement <strong>de</strong>s amen<strong>de</strong>s , que la réparation <strong>de</strong>s dommages, ce qui n’est pas synonyme<br />

d’expulsion.<br />

Tout au plus, peut-on déduire <strong>de</strong> l’article L. 12 ancien du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Urbanisme qui autorise le<br />

tribunal, en cas <strong>de</strong> construction, en l’absence <strong>de</strong> permis <strong>de</strong> construire, <strong>de</strong> prescrire la<br />

démolition et la remise en l’état <strong>de</strong>s lieux, l’expulsion préalable <strong>de</strong> l’occupant.<br />

Malheureusement cet article L.12 n’est pas repris dans le nouveau Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Urbanisme <strong>de</strong><br />

1988. Il en est <strong>de</strong> même <strong>de</strong> l’article L.14 <strong>de</strong> l’ancien Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Urbanisme qui, en cas<br />

d’extrême urgence, permettrait à l’administration <strong>de</strong> prononcer avant toute intervention<br />

judiciaire, le déguerpissement <strong>de</strong>s constructions édifiées sur un terrain sans titre : cette<br />

disposition aussi ne fut pas reprise dans la loi <strong>de</strong> 1988.<br />

Enfin, une pratique <strong>de</strong> l’administration avait été tentée pour résoudre le problème général <strong>de</strong>s<br />

occupations irrégulières. Elle impliquait, lorsque les ouvrages construits étaient compatibles<br />

avec l’environnement, <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r une régularisation a posteriori en vue <strong>de</strong> délivrer à<br />

l’intéressé soit un titre d’occupation ou une autorisation <strong>de</strong> construire. Mais cette pratique<br />

était occasionnelle et n’a pas pu être généralisée car elle allait aboutir à priver d’effet l’Art.20<br />

du C<strong>de</strong>.<br />

En définitive, il apparaît qu’il n’existe pas <strong>de</strong> sanction complémentaire à l’amen<strong>de</strong> prévue à<br />

l’Article 20 pour contraindre l’occupant sans titre à quitter les lieux. Ainsi est-il possible<br />

d’affirmer que les amen<strong>de</strong>s prévues par le C<strong>de</strong> ne permettent pas <strong>de</strong> faire cesser l’occupation<br />

sans titre. Elles sont tout aussi inaptes à régulariser les abus <strong>de</strong> droit d’occupation.<br />

L’inaptitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s amen<strong>de</strong>s à régulariser les abus <strong>de</strong> droit d’occupation<br />

32 Voir C.E., 8 avril 1961, Dame Klein,D. 1961, p.587,déjà cité.


<strong>Le</strong>s amen<strong>de</strong>s ne permettent ni <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r les occupations au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> fixée par le<br />

titre d’occupation, ni <strong>de</strong> rendre licite la cession <strong>de</strong> la dépendance domaniale occupée.<br />

L’une <strong>de</strong>s conséquences <strong>de</strong> la précarité <strong>de</strong>s titres d’occupation du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> est que<br />

l’autorité gestionnaire fixe une durée dans les autorisations d’occuper ou permissions <strong>de</strong><br />

voirie qu’elle délivre. <strong>Le</strong> bénéficiaire du titre d’occupation qui s’installerait dans la<br />

dépendance allouée au-<strong>de</strong>là du temps prescrit est passible d’une amen<strong>de</strong> prévue par l’Article<br />

20 du C<strong>de</strong>. Mais comme pour l’occupation sans titre, cette amen<strong>de</strong> ne fait pas disparaître<br />

l’infraction. Une solution plus hardie aurait consisté en un retrait du titre d’occupation.<br />

<strong>Le</strong> retrait est prévu par le C<strong>de</strong> (articles 12 et 13) mais dans une partie qui inciterait qu’on<br />

l’interprétât plus comme un acte <strong>de</strong> gestion que comme un acte <strong>de</strong> police.<br />

En effet, dans le Titre II du Livre II du Co<strong>de</strong>, intitulé « Gestion - Déclassement - Sanctions »,<br />

les articles 10 à 18 semblent viser spécialement la « gestion » du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>. <strong>Le</strong>s articles<br />

11 à 18 apparaissent comme <strong>de</strong>s explicitations <strong>de</strong> l’article 10 qui commence par : « l’Etat<br />

assure la gestion du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> naturel... ». Quant à l’article 19, il réglemente<br />

essentiellement le « déclassement » <strong>de</strong>s dépendances du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong>. L’article 20, enfin,<br />

est réservé aux « sanctions » <strong>de</strong>s irrégularités constatées dans l’occupation et l’exploitation du<br />

<strong>domaine</strong> <strong>public</strong>, comme en témoigne du reste l’exposé <strong>de</strong>s motifs <strong>de</strong> la loi 76.66 qui titre :<br />

« b) Sanctions (art. 20) ».<br />

Or, en tant qu’acte <strong>de</strong> gestion, le retrait évoqué aux articles 12 et 13 exclut les sanctions aussi<br />

pénales qu’administratives, car il concerne uniquement les utilisations domaniales privatives.<br />

Ce n’est qu’en étant considéré comme peine complémentaire à la sanction pénale d’amen<strong>de</strong><br />

que le retrait pourrait se révéler un bon palliatif à la prolongation illégale <strong>de</strong> l’occupation.<br />

Cette interprétation ne saurait valoir cependant, le législateur ayant prévu que le retrait <strong>de</strong><br />

l’autorisation peut intervenir à tout moment sans in<strong>de</strong>mnité ; ce qui laisse supposer la<br />

possibilité <strong>de</strong> retrait même avant le terme fixé dans l’autorisation, c’est-à-dire sans occupation<br />

abusive.<br />

<strong>Le</strong> droit face aux violations du Dpm<br />

<strong>Le</strong>s irrégularités commises sur le Dpm au Sénégal sont nombreuses et variées. Elles sont dues<br />

à la négligence <strong>de</strong> l’administration qui est souvent con<strong>de</strong>scendante ou complice passive <strong>de</strong><br />

certains manquements. Elles sont accentuées par la lancinante question <strong>de</strong> l’accès au<br />

logement, notamment à <strong>Dakar</strong>, et la volonté <strong>de</strong> la nouvelle bourgeoisie politico<br />

bureaucratique <strong>de</strong> satisfaire <strong>de</strong>s besoins longtemps réprimés.<br />

Des titres d’occupation sont octroyés sans que les retombées financières que <strong>de</strong>vraient<br />

normalement en tirer les recettes publiques ne soient significatives.<br />

Plus fondamentalement, les violations du Dpm mettent en péril non seulement les intérêts <strong>de</strong>s<br />

générations présentes, mais aussi celles qui, dans un ou <strong>de</strong>ux siècles, se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ront<br />

comment nous avons pu leur léguer un Dpm aussi mal géré et fragilisé.<br />

<strong>Le</strong>s irrégularités sont également le fait <strong>de</strong>s populations elles-mêmes. En effet, à Hann, on a<br />

recensé, le déversement d’environ 15 000 mètres cubes d’eaux usées constituées<br />

essentiellement <strong>de</strong> matières organiques et <strong>de</strong> polluants chimiques. Ceci est dû au fait qu’au<br />

niveau <strong>de</strong> la baie, à l’exception <strong>de</strong> quelques cités nouvelles, c’est l’assainissement individuel<br />

qui prédomine. L’absence <strong>de</strong> réseau d’assainissement collectif est due, en partie, à la


typologie <strong>de</strong> l’habitat et à l’étroitesse <strong>de</strong>s parcelles. Cette situation amène les populations à<br />

déverser sur la plage ou dans la mer <strong>de</strong>s eaux usées. A cela s’ajoute les déversements <strong>de</strong>s eaux<br />

usées charriées par les canaux IV et Front <strong>de</strong> Terre, mais aussi les sachets en plastiques jetés<br />

inconsidérément dans la nature. Une autre attitu<strong>de</strong> regrettable <strong>de</strong>s populations est la<br />

<strong>de</strong>struction <strong>de</strong>s panneaux indiquant les plages interdites à la baigna<strong>de</strong>, ce qui, au vu du danger<br />

qu’elles font courir aux baigneurs non avertis 33 , constitue non un délit, mais un crime.<br />

Malheureusement, les populations sont les premières victimes <strong>de</strong> cette situation. C’est ainsi<br />

que la propagation <strong>de</strong> maladies est facilitée dans les zones littorales. Des affections directes<br />

sont enregistrées soit par baigna<strong>de</strong> soit ingestion d’eau contaminée, alors que <strong>de</strong>s affections<br />

indirectes sont également signalées résultant <strong>de</strong> la consommation <strong>de</strong> produits halieutiques<br />

contaminés. Parmi les maladies enregistrées, on trouve la méningite et la tuberculose<br />

pulmonaire, <strong>de</strong>s parasitoses intestinales, la dysenterie, la diarrhée, les salmonelloses, les<br />

<strong>de</strong>rmatoses, le trachome, la bronchite, le paludisme ou encore la fièvre jaune. Une<br />

communication du mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> Hann a révélé que sur une population <strong>de</strong> 1330 adultes, on note<br />

40% <strong>de</strong> paludisme, 30% <strong>de</strong> rhinite, 10% <strong>de</strong> <strong>de</strong>rmatose et 15% <strong>de</strong> pneumopathie. Et sur une<br />

population <strong>de</strong> 991 enfants, la même autorité médicale fait ressortir 25% <strong>de</strong> maladies<br />

diarrhéiques, 19% <strong>de</strong> parasitose, 15% <strong>de</strong> pneumopathies, la gale et les autres infections<br />

cutanées 12%.<br />

Au vu <strong>de</strong> cette situation, il urge <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s mesures hardies tendant à faire cesser la<br />

violation <strong>de</strong>s droits que chaque citoyen a le droit <strong>de</strong> revendiquer sur cette fragile mais<br />

stratégique frange du territoire sénégalais.<br />

En ce qui concerne la défense <strong>de</strong>s côtes contre les actions conjuguées <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong><br />

l’homme, il convient <strong>de</strong> s’inspirer <strong>de</strong>s solutions qui ont fait leurs preuves ailleurs. A ce<br />

propos, les pouvoirs <strong>public</strong>s gagneraient à s’inspirer du gui<strong>de</strong> institué sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

l’Unesco. En effet, lors <strong>de</strong> la Conférence générale <strong>de</strong> 1993, <strong>de</strong> la Commission scientifique <strong>de</strong><br />

l’Unesco, les prési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>s programmes scientifiques à savoir la Commission<br />

Océanographique Intergouvernementale (Coi), le Programme Intergouvernemental l’Homme<br />

et la Biosphère (Mab), le Programme d’Hydrologie Intergouvernemental (Phi) et le<br />

Programme International <strong>de</strong> Corrélation Géologique (Picg) décidèrent <strong>de</strong> lancer un projet<br />

commun qui porterait sur les zones côtières également appelées « Régions littorales ». A cet<br />

égard un groupe <strong>de</strong> travail fut constitué et conçut un gui<strong>de</strong> méthodologique d’ai<strong>de</strong> à la gestion<br />

<strong>de</strong> la zone côtière, afin <strong>de</strong> promouvoir l’application <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong>s recherches conduites<br />

dans ce <strong>domaine</strong> dans le cadre du développement durable <strong>de</strong> cet espace.<br />

Ce gui<strong>de</strong>, largement diffusé par l’Unesco en 1997 est avant tout pratique. Il ai<strong>de</strong> à construire<br />

un système d’information cohérent pour l’ai<strong>de</strong> à la décision capable <strong>de</strong> fournir aux déci<strong>de</strong>urs<br />

et aux aménageurs <strong>de</strong>s éléments objectifs <strong>de</strong> choix.<br />

Par ailleurs, en Afrique <strong>de</strong> l’Ouest existe la Convention relative à la coopération en matière <strong>de</strong><br />

protection et <strong>de</strong> mise en valeur du milieu <strong>de</strong>s zones côtières appelée Convention d’Abidjan du<br />

23 mars 1981 (ratifiée par le Sénégal le 5 août 1984). Il s’agit d’un accord cadre <strong>de</strong> caractère<br />

général qui a trait à la protection et à la gestion <strong>de</strong>s zones côtières et du milieu marin. Elle<br />

énumère les sources <strong>de</strong> pollution qui doivent être maîtrisées et définit les aspects <strong>de</strong> la gestion<br />

<strong>de</strong> l’environnement qui appellent <strong>de</strong>s efforts <strong>de</strong> coopération. Elle contient <strong>de</strong>s dispositions sur<br />

la coopération scientifique et technique, la responsabilité et la réparation <strong>de</strong>s dommages.<br />

33<br />

On a pu compter, en moyenne, jusqu’à une centaine <strong>de</strong> noya<strong>de</strong>s en l’espace <strong>de</strong> trois mois durant les vacances<br />

scolaires dans la presqu’île du Cap-Vert.


<strong>Le</strong>s recherches effectuées dans ce cadre ont permis <strong>de</strong> mieux connaître le profil <strong>de</strong><br />

l’environnement marin et une banque <strong>de</strong> données est disponible sur les problèmes d’érosion<br />

côtière, <strong>de</strong> pollution chimique, bactérienne et sur l’océanographie côtière. Elles ont permis<br />

également d’élaborer <strong>de</strong>s projets spécifiques d’évaluation et <strong>de</strong> protection du milieu marin,<br />

notamment le Projet d’Etu<strong>de</strong>, d’Aménagement et <strong>de</strong> Réhabilitation <strong>de</strong>s Baies <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> et le<br />

Plan d’Action pour la Protection <strong>de</strong>s Eaux et la Conservation du Littoral Sénégalais.<br />

La mise en œuvre <strong>de</strong> ces projets est actuellement paralysée par <strong>de</strong>s considérations politiques<br />

qui amènent le pouvoir en place à remettre en cause beaucoup d’acquis du régime précé<strong>de</strong>nt.<br />

Pour le cas particulier <strong>de</strong>s occupations illégales, il s’agit <strong>de</strong> s’inspirer du juge français qui fait<br />

souvent œuvre prétorienne en sanctionnant sans parcimonie les délinquants, en ordonnant <strong>de</strong>s<br />

déguerpissements <strong>de</strong>s lieux indûment occupés. Mais la récente suppression du Conseil d’Etat,<br />

juge <strong>de</strong> la domanialité publique en France (et à qui le législateur aurait plutôt conféré <strong>de</strong>s<br />

prérogatives en la matière), éloigne cette perspective dans un pays comme le Sénégal dont les<br />

textes fondateurs sur le plan juridique ont été directement puisés du droit français.<br />

La toute <strong>de</strong>rnière décision faisant <strong>de</strong> la gestion du Dpm une compétence transférée pourrait,<br />

dans un contexte caractérisé par une législation encore inachevée et en pleine mutation et une<br />

tendance lour<strong>de</strong> consistant à ne jamais punir les violations récurrentes du Dpm, contribuer à<br />

mettre l’huile sur le feu au niveau <strong>de</strong>s classes hégémoniques. <strong>Le</strong>s mairies, les préfectures et<br />

les sous-préfectures sont encore plus politisées que les ministères et ont une approche<br />

centralement inspirée par le clientélisme et les impératifs <strong>de</strong> survie politique <strong>de</strong>s apparatchiks<br />

du parti dominant. Cette décision ne dédouane pas pour autant le chef <strong>de</strong> l’Etat <strong>de</strong> la nécessité<br />

d’arrêter les constructions illégales sur le Dpm et <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s solutions équitables et justes<br />

pour tous les cas <strong>de</strong> violations du Dpm sur lesquels on ne doit pas laisser le vi<strong>de</strong> juridique<br />

s’éterniser à côté d’un poncepilatisme administratif à la limite du laxisme le plus criminel.<br />

<strong>Le</strong> premier magistrat <strong>de</strong> la nation est sommé d’agir sur tous les dysfonctionnements i<strong>de</strong>ntifiés.<br />

Et il doit inscrire son action dans l’urgence la plus absolue, une urgence tout à fait légitime en<br />

la circonstance.<br />

<strong>Le</strong> Chef <strong>de</strong> l’Etat est également directement interpelé par la nécessité <strong>de</strong> mettre un terme sans<br />

délai et même <strong>de</strong> réviser les décisions relatives aux déclassements précipités <strong>de</strong> plusieurs<br />

<strong>domaine</strong>s fonciers importants <strong>de</strong> la capitale, notamment les réserves et emprises <strong>de</strong> la Foire <strong>de</strong><br />

<strong>Dakar</strong>, <strong>de</strong> la Pyrotechnie, <strong>de</strong> la Voie <strong>de</strong> dégagement nord, du sta<strong>de</strong> Léopold Sédar Senghor,<br />

du camp militaire <strong>de</strong> Ciarooy, du centre émetteur <strong>de</strong> Yeumbel, du champ <strong>de</strong> tir <strong>de</strong> Waakaam<br />

et du camp militaire attenant à ce site, <strong>de</strong>s servitu<strong>de</strong>s aéronautiques autour <strong>de</strong> l'aéroport<br />

Léopold Sédar Senghor, du sta<strong>de</strong> Assane Diouf et <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> captage <strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong><br />

ruissellement entre l'autoroute et la route du Front <strong>de</strong> terre 34 .<br />

En outre, l’Etat ne <strong>de</strong>vrait pas accé<strong>de</strong>r aux propositions scandaleuses <strong>de</strong> l’Apix cédant<br />

littéralement à <strong>de</strong>s parties privées internationales le <strong>de</strong>rnier poumon vert <strong>de</strong> la presqu’île, en<br />

l’occurrence, la forêt classée <strong>de</strong> MBaaw. L’étu<strong>de</strong> d’impact environnemental relatif à la<br />

34 Pour <strong>de</strong> plus amples détails, consulter « L'immobilier à <strong>Dakar</strong> dans une spirale inflationniste ; frénésie<br />

constructive », in http://www.reussir-sn.com/L-immobilier-a-<strong>Dakar</strong>-dans-une-spirale-inflationniste_a423.html


construction <strong>de</strong> l’autoroute à péage 35 montre bien que les émanations toxiques créées par les<br />

voitures et les camions gros porteurs auront un effet négatif à l’interieur d’un radius <strong>de</strong><br />

plusieurs centaines <strong>de</strong> mètres à la ron<strong>de</strong>, dans une zone à très forte <strong>de</strong>nsité démographique,<br />

notamment du côté <strong>de</strong> Dalifort et <strong>de</strong> Pikin Icotaf. Il est prévu dans cette <strong>de</strong>rnière zone <strong>de</strong><br />

« déguerpir » plus <strong>de</strong> 3 000 personnes dont la vie va basculer dans l’incertitu<strong>de</strong>, surtout les<br />

enfants fréquentant les écoles environnantes. Du côté <strong>de</strong> l’autre versant <strong>de</strong> l’autoroute à<br />

péage, les récentes pluies ont montré que les eaux <strong>de</strong> ruissellement n’ont plus d’exutoire et<br />

que <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> ménages sont menacés d’inondations et <strong>de</strong> dégradations <strong>de</strong> leurs<br />

propriétés.<br />

35 Voir APIX, « Projet d’autoroute <strong>Dakar</strong>-Diamniado ; évaluation environnementale et sociale du projet<br />

d’autoroute <strong>Dakar</strong>-Diamniado ; rapport final », <strong>Dakar</strong>, Juillet 2006


Chapitre 7<br />

Analyse géo spatiale et statistique <strong>de</strong>s violations du<br />

Dpm<br />

Cette partie du rapport est axée sur la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s zones enquêtées, la procédure<br />

d’acquisition <strong>de</strong>s terrains du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> et l’impact socio environnemental <strong>de</strong><br />

l’occupation du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong>. La valeur pécuniaire <strong>de</strong>s surfaces du Dpm<br />

i<strong>de</strong>ntifiées comme <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> violation <strong>de</strong> la loi est évaluée en fonction <strong>de</strong>s cours du marché<br />

et <strong>de</strong>s superficies calculées sur la base d’un croisement <strong>de</strong>s cartes géo référencées les plus<br />

récentes du Sénégal.<br />

Tout le littoral du Cap-Vert <strong>de</strong> la clairière <strong>de</strong> filaos <strong>de</strong> Malika, en passant par les corniches<br />

ouest et est, jusqu’à l’usine <strong>de</strong> pêche <strong>de</strong> Yaraax a été parcouru à partir d’un véhicule tous<br />

terrains par une équipe composée d’un sociologue, d’un cartographe spécialiste <strong>de</strong>s systèmes<br />

d’information géographique et d’un assistant chargé <strong>de</strong> recueillir par écrit les données<br />

collectées sur le terrain (coordonnées <strong>de</strong>s bâtiments construits à moins <strong>de</strong> 100 mètres du point<br />

<strong>de</strong> finition <strong>de</strong>s vagues au moment où l’enquête était menée).<br />

La délimitation exacte <strong>de</strong>s terrains situés dans l’emprise du Dpm a été faite à l’ai<strong>de</strong> d’un<br />

appareil portable Gps (Global Positioning System) <strong>de</strong> type Garmin 12 XL.<br />

<strong>Le</strong> tracé <strong>de</strong> côte ainsi obtenu (voir la carte # 5 ci-<strong>de</strong>ssous) à l’ai<strong>de</strong> du Gps a été superposé sur<br />

<strong>de</strong>s photographies aériennes existantes les plus récentes prises par satellite. Ces photographies<br />

ont été préalablement digitalisées pour faciliter le géo référencement <strong>de</strong>s superficies du Dpm<br />

incriminées, superficies qui se sont généralement présentées sous la forme <strong>de</strong> polygones. Des<br />

valeurs relatives aux moyennes <strong>de</strong>s prix du mètre carré <strong>de</strong> terrain, dans les zones du Dpm<br />

subdivisées en segments suivant les tendances du marché <strong>de</strong> l’immobilier et du foncier en<br />

bordure <strong>de</strong> mer, ont été appliquées aux polygones obtenus à partir <strong>de</strong> la carte géo référencée<br />

(voir ci-<strong>de</strong>ssous, les différentes vues obtenues et segmentées en fonction <strong>de</strong>s zones A à H <strong>de</strong>s<br />

parties du Dpm ciblées par l’enquête) (voir cartes # 6 à 13).<br />

<strong>Le</strong>s données socio géographiques obtenues au cours <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong> terrain ont été mises à<br />

l’épreuve <strong>de</strong> nouvelles enquêtes minutieuses <strong>de</strong> terrain menées par nos propres enquêteurs 1 .<br />

Carte # 5 : repérages préliminaires <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> violation du Dpm par GPS<br />

1 Il ne nous est malheureusement pas possible <strong>de</strong> les nommer pour protéger leur i<strong>de</strong>ntité et leur éviter<br />

d’éventuelles représailles.


Ces <strong>de</strong>rniers ont mené les enquêtes à partir <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> MARP qui leur a permis <strong>de</strong><br />

s’adjoindre la participation <strong>de</strong>s populations riveraines ou <strong>de</strong>s préposés à la sécurité ou au<br />

gardiennage trouvés sur place. <strong>Le</strong>s données ainsi recueillies ont été minutieusement vérifiées<br />

auprès <strong>de</strong> sources primaires tels les voisins ou les gens <strong>de</strong> maison, dans le cas <strong>de</strong>s villas déjà<br />

habitées, ou les agents voyers <strong>de</strong>s municipalités concernées. <strong>Le</strong>s attaches d’autorités<br />

municipales ont également été prises pour leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r d’éluci<strong>de</strong>r certains points<br />

contentieux ou même <strong>de</strong> décrire avec exactitu<strong>de</strong> l’évolution sociologique et celle relative plus<br />

généralement à l’aménagement <strong>de</strong> l’espace, dans la zone sous leur juridiction.<br />

Typologie <strong>de</strong> l’habitat dans le Dpm<br />

Plusieurs types d’habitat coexistent dans le Dpm :<br />

• <strong>Le</strong>s villas déjà achevées qui appartiennent à <strong>de</strong>s personnes aisées qui recherchent la<br />

tranquillité, la qualité d’air pur qui fait défaut dans les quartiers surpeuplés <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong><br />

marqués par la pollution sonore et les déficiences notées dans le ramassage <strong>de</strong>s<br />

ordures, le nettoiement <strong>de</strong>s trottoirs et l’assainissement <strong>de</strong>s voiries et <strong>de</strong>s canalisations<br />

<strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> surface, même dans <strong>de</strong>s zones réputées « rési<strong>de</strong>ntielles » comme le<br />

« Point E », les « Almadies », etc. Ces villas appartiennent majoritairement à <strong>de</strong>s<br />

Sénégalais membres <strong>de</strong> la bourgeoisie politico bureaucratique <strong>de</strong> l’ancien comme du<br />

nouveau régime et <strong>de</strong>s milieux d’affaires. <strong>Le</strong>s membres <strong>de</strong> cette bourgeoisie locale<br />

appartenant à l’ancien régime paraissent plus nombreux sur le Dpm puisqu’ils ont été<br />

aux affaires pendant une pério<strong>de</strong> quarantenaire donc suffisamment longue pour avoir<br />

abrité au moins <strong>de</strong>ux générations <strong>de</strong> Sénégalais. Certaines <strong>de</strong> ces villas sont également<br />

occupées par <strong>de</strong>s Libanais et <strong>de</strong>s Français ainsi que d’autres nationalités (Maroc, etc).<br />

• <strong>Le</strong>s villas non encore achevées.<br />

• <strong>Le</strong>s villas dont seulement les fondations ont été creusées et coulées à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> béton<br />

armé ou dont le périmètre <strong>de</strong> construction est entouré <strong>de</strong> murs <strong>de</strong> protection en ciment<br />

ou pierres taillées.<br />

2


• <strong>Le</strong>s hôtels <strong>de</strong> luxe 2 construits pratiquement « les pieds dans l’eau » et privatisant <strong>de</strong><br />

facto, en maintes endroits du Dpm, les plages et la libre circulation sur les portions <strong>de</strong><br />

littoral situées en face <strong>de</strong> leurs établissements ; <strong>de</strong>s constructions avec une<br />

implantation définitive sur le Dpm sont entreprises à travers les piscines privées, les<br />

bar restaurants, les jetées océanes aménagées pour accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s voiliers <strong>de</strong> plaisance,<br />

les espaces avec roches alvéolaires utilisées pour la culture ostréicole ou d’espèces tels<br />

les oursins, les langoustes, les écrevisses, les seiches, les gambas géants et crevettes <strong>de</strong><br />

taille moyenne, etc.<br />

• <strong>Le</strong>s cliniques privées appartenant toutes à <strong>de</strong>s Libanais ou <strong>de</strong>s Etrangers.<br />

• <strong>Le</strong>s établissements cliniques hôteliers spécialisés dans la thalassothérapie pour classes<br />

aisées et touristes étrangers également majoritairement contrôlées par les Libanais.<br />

• <strong>Le</strong>s gargotes restaurants aménagés sommairement à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> bois et <strong>de</strong> chaume avec<br />

<strong>de</strong>s parties en dur abritant <strong>de</strong> véritables infrastructures souvent déversant directement<br />

dans la mer les eaux usées ou en provenance <strong>de</strong>s toilettes.<br />

• <strong>Le</strong>s étals servant à la vente d’objets d’art, <strong>de</strong> roches basaltiques sculptées, etc.<br />

• <strong>Le</strong>s cabanons attirant toute une foule <strong>de</strong> jeunes gens nationaux et étrangers aspirant à<br />

un peu <strong>de</strong> calme et <strong>de</strong> détente et parfois s’adonnant à la consommation d’alcool et <strong>de</strong><br />

drogues dures ou <strong>de</strong> yamba appelé aussi boon, en wolof, la langue véhiculaire du pays.<br />

Ces cabanons agressent le paysage tant du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la salubrité que sur le plan<br />

<strong>de</strong> l’esthétique et l’harmonisation architecturales <strong>de</strong> la presqu’île.<br />

• Des lieux <strong>de</strong> prière islamique sommairement construits par <strong>de</strong>s habitués du Dpm<br />

appartenant aux classes aisées.<br />

• <strong>Le</strong>s habitations anciennes exigües et occupées par <strong>de</strong>s familles nombreuses dans les<br />

villages traditionnels Lébu <strong>de</strong> Ngoor, Yoof et <strong>de</strong>s communautés éparses <strong>de</strong> Malika (où<br />

ont été édifiés <strong>de</strong>s « villages hôtels » <strong>de</strong> fortune qui perdurent et accueillent souvent<br />

<strong>de</strong>s couples clan<strong>de</strong>stins voire <strong>de</strong>s jeunes touristes étrangers en mal <strong>de</strong> sensations fortes<br />

et d’exotisme).<br />

• <strong>Le</strong>s habitations ceinturant toute l’île <strong>de</strong> Gorée mais qui n’entrent pas dans le champ <strong>de</strong><br />

cette étu<strong>de</strong>.<br />

• <strong>Le</strong>s sièges <strong>de</strong> juridiction (ancien siège <strong>de</strong> Mudra Afrique, une école <strong>de</strong> chorégraphie,<br />

<strong>de</strong>venue par la suite le Musée Dynamique, ensuite la Cour suprême et, à présent, la<br />

Cour <strong>de</strong> Cassation) ou démembrements <strong>de</strong> l’Etat (Direction <strong>de</strong> Surveillance <strong>de</strong>s Côtes<br />

au large <strong>de</strong> Mermoz ; sièges <strong>de</strong> l’Organisation internationale <strong>de</strong>s migrations et <strong>de</strong><br />

l’Unifem).<br />

• <strong>Le</strong> siège d’une organisation maçonnique (celle <strong>de</strong> la Rose Croix dont <strong>de</strong>s membres<br />

éminents feraient partie <strong>de</strong>s classes dirigeantes du pays).<br />

• Des complexes sportifs comme le « Club Olympique » (corniche Ouest) dont les<br />

propriétaires sont Libanais 3 ou la salle <strong>de</strong> musculation du « Lagon I » (corniche Est)<br />

appartenant à un Français.<br />

2 La présence <strong>de</strong>s sociétés suivantes a été enregistrée: C<strong>de</strong>, Cse, Simon et Christensen, etc. A côté <strong>de</strong> ces grosses<br />

pointures nous avons noté quelques initiatives moins prestigieuses, à l’instar <strong>de</strong> l’Espace <strong>de</strong> Création Cheikh<br />

Ibrahima Fall.<br />

3 Il n’est pas indifférent <strong>de</strong> noter que la libanisation progressive et presque inexorable <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> Plateau et <strong>de</strong><br />

parties prisées du Dpm participe d’une tendance lour<strong>de</strong> qui s’affirme non seulement au Sénégal, dans plusieurs<br />

villes, mais aussi sur toute la côte ouest africaine, et plus particulièrement en Côte d’Ivoire où les Libanais se<br />

sont rués sur les établissements et les villas laissés vacants par le départ massif <strong>de</strong>s Français durant la récente<br />

guerre civile doublée d’une crise franco-ivoirienne. <strong>Le</strong>s classes moyennes et pauvres africaines commencent à<br />

montrer <strong>de</strong>s signes d’impatience et <strong>de</strong> révolte, pour l’instant sour<strong>de</strong>s, par rapport à ce phénomène.<br />

3


• Un parc <strong>de</strong> jeux pour enfants doublé d’une boîte <strong>de</strong> nuit en construction et d’un<br />

podium pour les concerts musicaux (le « Magic Land » appartenant à <strong>de</strong>s Libanais).<br />

• Des parcours sportifs (corniche ouest, sur plus <strong>de</strong> 3 Kms cimenté récemment et<br />

argileux ou sablonneux par endroits, et Diamalaay) très fréquentés en toute pério<strong>de</strong>.<br />

• Des villages artisanaux (Sumbédjun) et corniche ouest 4 .<br />

• <strong>Le</strong>s chantiers <strong>de</strong> l’Anoci qui ont pris une place considérable dans le Dpm et qui sont<br />

au cœur <strong>de</strong> la compétition politique et médiatique qui entoure présentement la<br />

succession du chef <strong>de</strong> l’Etat.<br />

Typologie <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong>s terrains concernés<br />

<strong>Le</strong>s occupants du Dpm peuvent être classés en quatre catégories à prédominance largement<br />

masculine :<br />

• <strong>Le</strong>s couches moyennes <strong>de</strong> la petite bourgeoisie (cadres, chefs religieux, chefs<br />

d’entreprises, etc) : leur position financière et les allées et venues dans les hautes<br />

sphères <strong>de</strong> décision dont ils bénéficient <strong>de</strong>s largesses moyennant la métho<strong>de</strong> du<br />

bakchich leur permettent d’obtenir <strong>de</strong>s autorisations d’occuper sur le Dpm.<br />

• <strong>Le</strong>s habitants <strong>de</strong>s villages traditionnels (Lébus surtout) : ils invoquent l’argument<br />

selon lequel ce sont leurs ancêtres qui occupaient le Dpm et tout le territoire <strong>de</strong> la<br />

presqu’île et <strong>de</strong> la Petite Côte et affirment qu’ils ne quitteront jamais ces terres et<br />

qu’ils sont en droit <strong>de</strong> vendre les terrains dont ils ont « hérité ».<br />

• <strong>Le</strong>s tenanciers <strong>de</strong> petites échoppes : ce sont généralement <strong>de</strong>s artisans qui exposent<br />

leurs produits sur <strong>de</strong>s étals ou <strong>de</strong> petits commerçants qui gèrent <strong>de</strong>s gargotes ou <strong>de</strong>s<br />

buvettes.<br />

• <strong>Le</strong>s groupes financiers étrangers spécialisés dans l’hôtellerie ou les industries <strong>de</strong><br />

plaisance (libanais, marocains, français, etc).<br />

• <strong>Le</strong>s hommes d’affaires Libanais, Sénégalo Libanais et Sénégalais d’origine libanaise<br />

et les hommes d’affaires Français, Européens et Asiatiques (Chinois, plus récemment).<br />

Description <strong>de</strong>s lieux repérés du Dpm<br />

<strong>Le</strong> Dpm a été subdivisé en 9 parties pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> commodité dans la collecte et<br />

l’analyse <strong>de</strong> données. La segmentation va <strong>de</strong>s zones A à H, la zone du Port <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> ayant été<br />

ignorée puisque relevant d’un statut particulier.<br />

La zone A (Cambéréén/Plage BCEAO : 23,552 hectares) qui s’étend <strong>de</strong>s hameaux<br />

historiques Lébus à la plage <strong>de</strong> la BCEAO présente un Dpm qui commence à être envahi par<br />

les échoppes <strong>de</strong> fortune ou les cases <strong>de</strong> paille prisées <strong>de</strong>s jeunes baigneurs <strong>de</strong> cette zone qui<br />

attire beaucoup <strong>de</strong> gens, compte tenu <strong>de</strong> la beauté <strong>de</strong> ses plages et <strong>de</strong> la très bonne<br />

accessibilité <strong>de</strong> celles-ci. <strong>Le</strong>s populations viennent <strong>de</strong> partout, en famille, en groupe ou<br />

4 Près du « Club Olympique » a été créé l’Espace <strong>de</strong> Création Cheikh Ibrahima Fall (Eccif). C’est une réplique<br />

en miniature du village artisanal <strong>de</strong> Sumbédjun. Elle combine ateliers et galerie d’exposition en plein air. Il s’agit<br />

d’une association qui regroupe <strong>de</strong>s artisans et <strong>de</strong>s artistes. Divers corps <strong>de</strong> métiers y sont représentés (travail du<br />

bronze; différents types <strong>de</strong> sculptures ; sculptures thématisées et personnages sculptés <strong>de</strong> 2-3 mètres <strong>de</strong> haut ;<br />

portrait sur roche volcanique, basaltique et calcaire ; sculptures rocheuses en miniature ; art métallique ; fer<br />

forgé; lit et armoire en fer ; poterie en terra cota et latérite) ; etc.<br />

4


individuellement, pour accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s abris <strong>de</strong> paille et <strong>de</strong>s plages relativement bien tenues par<br />

les jeunes désœuvrés <strong>de</strong>s villages <strong>de</strong> Yoof, Kambéréén, Djammalaay, HLM Grand Médine et<br />

Parcelles Assainies. Malheureusement, les panneaux en béton mis en évi<strong>de</strong>nce pour i<strong>de</strong>ntifier<br />

ces plages comme étant dangereuses et impropres à la baigna<strong>de</strong>, ont été badigeonnées voire<br />

détruites par les tenanciers <strong>de</strong>s cases qui violent délibérément cet espace du Dpm, sous l’aile<br />

protectrice, le plus souvent, <strong>de</strong>s municipalités qui y puisent leur armée électorale, et, dans<br />

l’indifférence totale <strong>de</strong>s populations riveraines <strong>de</strong>s cités nouvellement implantées <strong>de</strong> Djily<br />

Mbaye, Djammalaay, Paaléén, Ouest Foire, Apecsy et Bceao Mer.<br />

<strong>Le</strong> niveau <strong>de</strong> violation du Dpm commence à <strong>de</strong>venir préoccupant surtout lorsqu’il se sol<strong>de</strong> par<br />

<strong>de</strong>s dizaines <strong>de</strong> noya<strong>de</strong>s (entre 30 et 70 par an durant les années sombres) et que les drogues<br />

dures et « douces » y circulent sans entraves, cependant que l’alcool y coule à flots 5 . De<br />

jeunes prostitués <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sexes y sont régulièrement aperçus en compagnie <strong>de</strong> partenaires<br />

Tubaabs, touristes ou non, qui prisent les jeunes victimes généralement âgées entre 14 et 25<br />

ans. <strong>Le</strong>s associations <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> ces lieux pourtant habités par <strong>de</strong>s cadres <strong>de</strong> haut niveau<br />

et <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> professions libérales ainsi que <strong>de</strong>s entrepreneurs <strong>de</strong> petites et moyennes<br />

industries semblent, dans leur gran<strong>de</strong> majorité, totalement amorphes et parfois paralysés par<br />

<strong>de</strong>s divergences à caractère socio politique plus ou moins superficiels. <strong>Le</strong> Maire <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> est<br />

souvent venu battre campagne dans la cité Djily MBaye en faisant <strong>de</strong>s promesses rarement<br />

tenues mais suffisantes pour maintenir en l’état une clientèle politique suffisamment<br />

opportuniste pour tourner le dos aux impératifs <strong>de</strong> gestion participative d’une plage qui,<br />

laissée en l’état, risque <strong>de</strong> porter un préjudice très grave aux jeunes garçons et filles qui la<br />

fréquentent.<br />

Carte # 6 : vue satellitaire <strong>de</strong> la zone<br />

A (Cambérén/Plage BCEAO)<br />

La zone B (Yoff Waraar/Sumbédjun : 71,240 hectares) représente l’un <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong><br />

violation les plus préoccupants du Dpm.<br />

5 <strong>Le</strong> Khalifat Laayèn a souvent fustigé les comportements a-sociaux <strong>de</strong>s jeunes désaxés qui s’abandonnent à la<br />

drogue et à l’alcool dans cet espace pris en tenaille entre les lieux <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong> commémoration les plus<br />

importants <strong>de</strong> la communauté Laayène.<br />

5


Carte # 7 : vue satellitaire <strong>de</strong> la<br />

Zone B (Yoff Waraar)<br />

<strong>Le</strong> projet d’aménagement <strong>de</strong> la Place du Souvenir Africain est aussi en chantier. Mais il est<br />

presque achevé; il y a <strong>de</strong>ux salles d’exposition parallèles baptisées les « 2 panthéons ».<br />

<strong>Le</strong> chantier d’un complexe hôtelier et d’un centre commercial « Sea Plazza » (Première Porte<br />

Mermoz) est en ébullition sous la houlette <strong>de</strong> la Cse et Simon et Christensen, un bureau<br />

d’étu<strong>de</strong> spécialisé dans le génie civil.<br />

La Fenêtre Mermoz sur/mer regroupe une dizaine <strong>de</strong> propriétés privées. Il s’agit en<br />

l’occurrence <strong>de</strong> l’Olympique Club sur la corniche Ouest, qui est un club <strong>de</strong> tennis. Un pâté <strong>de</strong><br />

villas rési<strong>de</strong>ntielles suit sur une longue distance dans le sens <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> la Mosquée <strong>de</strong><br />

la Divinité. Un autre complexe sportif surgit à mesure que nous progressons. C’est un terrain<br />

<strong>de</strong> baseball, <strong>de</strong> basket-ball et <strong>de</strong> soccer qui appartient à l’ambassa<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Etats-Unis. Une<br />

maison en baraque <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux chambres se mêle au décor. Un terrain clôturé long <strong>de</strong> plusieurs<br />

centaines <strong>de</strong> mètres se situe entre cet habitat précaire et la Direction <strong>de</strong> la Protection et <strong>de</strong> la<br />

Surveillance <strong>de</strong>s pêches <strong>maritime</strong>s. Cet établissement faisant face au Club Atlantique<br />

américain est géré par l’état du Sénégal. A proximité, l’Association Culturelle Amorc <strong>de</strong><br />

l’ordre maçonnique <strong>de</strong> la Rose Croix semble n’être accessible qu’aux membres affiliés. Un<br />

autre terrain nu avec 2 containers servant <strong>de</strong> boutique en face <strong>de</strong> la Cité <strong>de</strong>s enseignants<br />

contraste avec le paysage. Toute juste après il y a une agence immobilière gérée par une<br />

professionnelle française.<br />

<strong>Le</strong> grand projet « Waterfront » qui concerne la construction <strong>de</strong> 149 logements en plus d’un<br />

complexe hôtelier serait dirigé par Yérim Sow, le fils <strong>de</strong> Aliou Sow, propriétaire <strong>de</strong> la Cse. Ce<br />

chantier qui est en cours d’exécution couvre une superficie importante. Dans les environs, une<br />

station <strong>de</strong> pompage <strong>de</strong>s eaux usées <strong>de</strong> l’Onas surplombe les 2 boutiques conteneurs. Ensuite,<br />

il y a une agence immobilière, une Ecole Bilingue et un autre pâté <strong>de</strong> maisons.<br />

La Mosquée <strong>de</strong> la Divinité a été construite en 1992. L’initiative est à mettre à l’actif <strong>de</strong>s<br />

fidèles rési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> Waakaam, Ngoor et Yoof 6 . Derrière la Mosquée <strong>de</strong> la Divinité, il y a une<br />

6<br />

Ce collectif, l’Union Musulmane Culturelle Educative Naby Allah, aurait été à la base <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong><br />

cette mosquée par l’architecte Cheikh NGom.<br />

6


aie qui sert <strong>de</strong> quai <strong>de</strong> débarquement aux pirogues <strong>de</strong> pêche qui essaiment sur la plage. En<br />

outre, il y a une station service pour le ravitaillement en carburant <strong>de</strong>s embarcations ainsi que<br />

<strong>de</strong>s bâtiments <strong>de</strong>stinés à conserver les matériels <strong>de</strong> pêches qui sont communément appelés <strong>de</strong>s<br />

« boxes ».<br />

La zone couverte par le quartier Fenêtre Mermoz « Deuxième Porte » est située à environ<br />

<strong>de</strong>ux kilomètres <strong>de</strong> la Mosquée <strong>de</strong> la Divinité. C’est une zone <strong>de</strong> falaises et <strong>de</strong> rochers. Il n’y<br />

a pratiquement pas <strong>de</strong> plage ici. <strong>Le</strong>s habitations construites sur le <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong><br />

sont situées en hauteur. Un Ambassa<strong>de</strong>ur et ancien ministre Sénégalais a commencé à y<br />

couler les fondations d’une villa.<br />

Plusieurs hauts dignitaires politiques possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> somptueuses rési<strong>de</strong>nces au Quartier <strong>de</strong><br />

Fann. D’éminentes personnalités étrangères et <strong>de</strong>s Libanais y ont acquis <strong>de</strong> belles propriétés.<br />

C’est une zone <strong>de</strong> falaises et <strong>de</strong> rochers et les rési<strong>de</strong>nces sont situées sur la partie haute du<br />

Dpm.<br />

La pression foncière a atteint une intensité sans commune mesure, dans la Corniche Ouest. <strong>Le</strong><br />

Dpm y est distribué à <strong>de</strong>s nantis à tours <strong>de</strong> bras. <strong>Le</strong>s constructions y poussent comme <strong>de</strong>s<br />

champignons. <strong>Le</strong>s autorisations <strong>de</strong> construire, qui <strong>de</strong>vraient constituer l’exception y sont<br />

<strong>de</strong>venues la règle. Alors que l’on aurait dû se trouver dans l’univers paisible <strong>de</strong>s rivages <strong>de</strong> la<br />

mer, on a l’impression d’être dans un <strong>domaine</strong> industriel tant les chantiers sont nombreux et<br />

en pleine expansion. Dans cette zone, il y’avait beaucoup <strong>de</strong> plages mais elle ont<br />

pratiquement disparu car elles ont été envahies par les chantiers : on peut citer le vaste<br />

complexe hôtelier dont les terrassements sont en train d’être coulés par un entrepreneur<br />

Espagnol à coté du village artisanal créé par <strong>de</strong>s Baay Faal. Suivent <strong>de</strong>ux lots qui<br />

appartiendraient à un expert en ingénierie financière proche du Chef <strong>de</strong> l’Etat. Une clinique<br />

(non encore fonctionnelle) appartenant à un Libanais est suivie par le complexe hôtelier « Sea<br />

Plaza » qui comprend <strong>de</strong>ux entités (le centre commercial Sea Plaza et le Radisson SA Hôtel).<br />

On attribue l’appartenance <strong>de</strong> ce vaste complexe situé en plein cœur du Dpm à <strong>de</strong> hauts<br />

dignitaires du régime. Suivent le Mémorial du Souvenir dédié au bateau « <strong>Le</strong> Joola », les <strong>de</strong>ux<br />

colonna<strong>de</strong>s couleur sable, vestiges <strong>de</strong> l’époque dioufienne semblent perdus dans ce vaste<br />

espace qui englobe un parcours sportif, l’hôtel « Terrou-Bi » et le « Magic Land ». Un peu en<br />

retrait, l’Anoci a entreposé dans un vaste terre plein ses matériaux <strong>de</strong> construction à côté <strong>de</strong> la<br />

future Briga<strong>de</strong> <strong>de</strong> Surveillance <strong>de</strong> l’Ile Ma<strong>de</strong>leine.<br />

Il y a enfin les pêcheurs traditionnels <strong>de</strong> Sumbédjun dans une Baie que se partagent un<br />

Marché aux Poissons, le Village Artisanal, une Ecole Primaire et le Cimetière <strong>de</strong>s Abattoirs.<br />

Ces installations, bien qu’anciennes, sont toutes situées sur le Dpm.<br />

La Zone C du Cap Manuel : 83, 245 hectares.<br />

Elle va <strong>de</strong> la Baie <strong>de</strong>s Ma<strong>de</strong>leines en passant par les Cap Manuel à la fin du premier tiers <strong>de</strong> la<br />

Corniche Est. Toutes les constructions <strong>de</strong> cette zone sont situées dans le Dpm mais sont en<br />

hauteur sur la falaise à une exception près, celle d’une habitation construite carrément sur une<br />

plage ouverte à la baigna<strong>de</strong>. Dans cette partie <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> la Corniche Est, il y a peu <strong>de</strong> villas.<br />

<strong>Le</strong>s bâtiments qui y prédominent sont <strong>de</strong>s hôtels, <strong>de</strong>s cliniques, un camp militaire, <strong>de</strong>s aires <strong>de</strong><br />

jeux et <strong>de</strong>s clubs socio sportifs appartenant à <strong>de</strong>s associations d’expatriés Français ou <strong>de</strong><br />

Libanais. <strong>Le</strong>s terrains qui appartiennent à cette catégorie du Dpm figurent parmi les plus<br />

prisés. « Elles n’ont pas <strong>de</strong> prix », nous dit un architecte expérimenté. Elles peuvent coûter<br />

jusqu’à 1,5 million <strong>de</strong> francs Cfa voire 2,5 millions <strong>de</strong> francs Cfa le mètre carré.<br />

7


Carte # 8 : image par satellite <strong>de</strong> la zone C du Cap Manuel<br />

La Zone D (2 e tiers <strong>de</strong> la Corniche Est) : 10,614 hectares est <strong>de</strong>venue très prisée et fait<br />

l’objet d’une convoitise ouverte par les quartiers d’affaires internationaux et étrangers<br />

implantés localement sur la longue durée.<br />

Carte # 9 : image satellitaire <strong>de</strong> la Corniche Est (Zone D)<br />

La Zone E (<strong>de</strong>rnier tiers <strong>de</strong> la Corniche Est) : 39,284 hectares. Cette zone peuplée <strong>de</strong><br />

restaurants, d’hotels et <strong>de</strong> clubs fermés reste l’une <strong>de</strong>s zones les plus chères <strong>de</strong> la capitale.<br />

La Zone F (Baie <strong>de</strong> Hann/Yaraax) : 602,917 hectares représente le niveau <strong>de</strong> violation du<br />

Dpm le plus massif et, sans doute, avec le plus <strong>de</strong> conséquences sur l’évolution<br />

environnementale et l’équilibre écologique <strong>de</strong> cette partie du littoral. La plupart <strong>de</strong>s maisons<br />

sont plantées à moins <strong>de</strong> 50 mètres <strong>de</strong>s plus hautes vagues, ce qui à terme va poser <strong>de</strong>s défis<br />

quasi insurmontables au cas où le niveau général <strong>de</strong>s océans s’élèverait par suite <strong>de</strong>s effets<br />

8


attendus du réchauffement <strong>de</strong> la planète et subséquemment <strong>de</strong>s fontes glaciaires en<br />

provenance <strong>de</strong>s pôles.<br />

Carte # 11 : Vue satellitaire <strong>de</strong> la zone F <strong>de</strong> Hann Yaraax<br />

<strong>Le</strong> littoral <strong>de</strong> Guédiawaay (zone G : 916 m2)) présente les caractéristiques d’un espace en<br />

pleine mutation, compte tenu <strong>de</strong> l’explosion démographique dont il est l’épicentre <strong>de</strong>puis<br />

quelques années, et, <strong>de</strong> l’ampleur <strong>de</strong>s inondations qui ont déstabilisé <strong>de</strong>s populations<br />

extrêmement pauvres persécutées par les lacs et les marigots spontanément réhabilités par les<br />

pluies importantes du quinquennat passé mais qui étaient restés dans un état latent pendant<br />

<strong>de</strong>s décennies, compte tenu <strong>de</strong> la sécheresse cyclique qui a frappé le Sahel au cours <strong>de</strong>s<br />

décennies passées. <strong>Le</strong> Dpm violé <strong>de</strong> cette zone reste encore très faible mais pourrait<br />

rapi<strong>de</strong>ment se transmuer en une zone <strong>de</strong> prédilection pour les sans-abris <strong>de</strong>venus nombreux<br />

<strong>de</strong>puis les inondations. Il faut craindre que cette situation ne change radicalement au cours <strong>de</strong>s<br />

toutes prochaines années compte tenu <strong>de</strong>s changements drastiques que vont connaître toutes<br />

ces zones <strong>de</strong>s bas-fonds <strong>de</strong> la périphérie inondée en maintes endroits par <strong>de</strong>s marigots qui ont<br />

débordé <strong>de</strong> leur lit originel ou <strong>de</strong>s lacs qui avaient été ensevelis mais ont refait surface à la<br />

faveur <strong>de</strong>s pluies généreuses <strong>de</strong> l’hivernage 2008 qui ont augmenté le nombre <strong>de</strong>s sans-abri<br />

<strong>de</strong> cette zone.<br />

Carte # 12 : image par satellite <strong>de</strong> la Zone G<br />

(Guédiawaay)<br />

9


La zone H <strong>de</strong> Malika dispose d’un littoral dunaire balayé en permanence par les alizés venus<br />

du large et par <strong>de</strong>s vents charriant le sable fin <strong>de</strong>s plages <strong>de</strong>puis les côtes mauritaniennes. Une<br />

muraille verte <strong>de</strong> filaos y a été implantée sur une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> plusieurs décennies pour<br />

stabiliser les dunes. Malheureusement, toute cette zone a été pillée pour son sable fin prisé <strong>de</strong>s<br />

camionneurs qui le reven<strong>de</strong>nt à prix d’or à <strong>de</strong>s clients qui ne construisent qu’en ciment et<br />

sable <strong>de</strong> mer. <strong>Le</strong> pillage a également porté sur le bois <strong>de</strong> filao (une espèce importée <strong>de</strong> l’In<strong>de</strong><br />

et qui s’est remarquablement adaptée au climat soudano sahélien), bois utilisé comme source<br />

alternative d’énergie ou pour les échafaudages <strong>de</strong> bungalows, etc.<br />

Carte # 13 : image par satellite <strong>de</strong> la<br />

Zone H <strong>de</strong> Malika<br />

La fréquence <strong>de</strong> violation du Dpm (3,556 hectares) n’a pas encore atteint la côte d’alerte en<br />

ces endroits compte tenu <strong>de</strong> la faible <strong>de</strong>nsité humaine jusque récemment. Mais cette donne<br />

commence à s’inverser avec l’urbanisation ultra rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> Malika et <strong>de</strong>s petites cités<br />

environnantes ainsi que la décharge d’ordures <strong>de</strong> Mbëbëss qui fait vivre toute une catégorie <strong>de</strong><br />

franges extrêmement vulnérables <strong>de</strong> la population vivant <strong>de</strong> la commercialisation d’objets<br />

récupérés et recyclés par les petites industries artisanales <strong>de</strong> la presqu’île.<br />

Comme l’indique le diagramme # 1 ci-<strong>de</strong>ssous les zones F (Yaraax : 602 hectares !), C (Cap<br />

Manuel : 83 hectares) et E (Corniche Est : 71 hectares) sont <strong>de</strong> loin celles qui connaissent le<br />

plus grave niveau <strong>de</strong> violation <strong>de</strong> l’espace protégé du Dpm avec la complicité active <strong>de</strong> l’Etat.<br />

10


Cette tendance semble s’accélérer et appelle un sursaut à la fois étatique et citoyen pour<br />

arrêter les violations incriminées qui représentent <strong>de</strong>s valeurs pécuniaires et fiscales<br />

considérables, malheureusement perdues pour la collectivité nationale par le laxisme avec<br />

lequel ce bien <strong>public</strong> quintessentiel qu’est le Dpm est géré par la prise <strong>de</strong> décision nationale.<br />

Graphique # 1<br />

Evolution par ordre d'importance <strong>de</strong>s superficies<br />

violées du Dpm<br />

602 917<br />

3 556<br />

918<br />

23 652 71 240<br />

83 245<br />

10 614<br />

39 284<br />

La position géographique <strong>de</strong> l’épicentre <strong>de</strong>s violations du Dpm indique qu’il y a eu une<br />

superposition <strong>de</strong> violations sur une longue pério<strong>de</strong> qui remonte, pour les populations Lébu<br />

autochtones, à <strong>de</strong>s siècles voire <strong>de</strong>s millénaires, et, pour les populations françaises <strong>de</strong> la<br />

pério<strong>de</strong> coloniale, à partir <strong>de</strong>s années 1850, à l’intérieur <strong>de</strong> toute la zone pionnière du<br />

« Plateau » <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> dès sa création selon le concept <strong>de</strong> la séparation raciale (les Blancs<br />

habitant le centre <strong>de</strong> la ville, du port et <strong>de</strong> la zone industrielle naissante et les « indigènes, la<br />

« médina », vocable transposé <strong>de</strong>s conquêtes militaires <strong>de</strong> Faidherbe, du temps où il était en<br />

poste dans l’Algérie colonisée). <strong>Le</strong>s troisième et quatrième vagues d’occupants illégaux du<br />

Dpm qu’ils soient autochtones ou allogènes se sont installées en fonction <strong>de</strong>s différents plans<br />

d’aménagement <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, notamment à partir <strong>de</strong> 1945.<br />

L’analyse <strong>de</strong> ces tendances lour<strong>de</strong>s indique, par conséquent, que le phénomène d’occupation<br />

du littoral remonte à <strong>de</strong>s époques antérieures qui ont probablement précédé la création <strong>de</strong><br />

<strong>Dakar</strong> en tant que port d’escale puis métropole d’affaires et enfin capitale <strong>de</strong> l’ensemble<br />

« sénégalais ». Selon les témoignages <strong>de</strong>s explorateurs Portugais, Anglais et Français qui ont<br />

visité la presqu’île du Cap Vert durant la pério<strong>de</strong> précoloniale, le littoral atlantique a surtout<br />

été utilisé par les Lébus <strong>de</strong> façon épisodique à travers la construction <strong>de</strong> huttes sommaires qui<br />

servaient d’abris aux pécheurs <strong>de</strong> cette communauté soit pour se reposer avant d’entreprendre<br />

<strong>de</strong> longues distances entre Ndar et Ndakaaru en passant par les ports d’escale clairsemés sur<br />

tout le littoral atlantique sénégalais, soit pour réarmer leurs embarcations et s’approvisionner<br />

en eau douce dans les séyaan (marigots, en wolof) environnants.<br />

Durant la pério<strong>de</strong> coloniale, la désertion <strong>de</strong> l’Ile <strong>de</strong> Gorée après la gran<strong>de</strong> peste qui a décimé<br />

la population française au début du 19 e siècle suivie par l’occupation <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, malgré<br />

l’existence d’une République Lébu, sous l’impulsion <strong>de</strong> Dial Diop notamment, a conduit les<br />

11<br />

A<br />

B<br />

C<br />

D<br />

E<br />

F<br />

G<br />

H


colons Français a concevoir <strong>Dakar</strong> comme un port d’escale <strong>de</strong>stiné à servir <strong>de</strong> point d’appui<br />

aux activités commerciales et <strong>de</strong> pillage ainsi qu’à l’activisme militaire à travers lequel se<br />

manifestait la conquête, dans le sang, <strong>de</strong> l’hinterland sénégalais. <strong>Le</strong>s côtes sont d’abord<br />

protégées militairement à travers <strong>de</strong>s fortifications renforcées et la construction <strong>de</strong> visières<br />

plus ou moins appropriées pour tailler en pièces les bâtiments ennemis qui s’approcheraient<br />

<strong>de</strong> la zone côtière. A partir du début du 20 e siècle, la sécurisation <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> comme l’une <strong>de</strong>s<br />

communes les plus importantes <strong>de</strong> la colonie après Saint-Louis s’affirme à travers les<br />

constructions nouvelles entre le Port <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> et le Plateau. La zone <strong>de</strong> la Baie <strong>de</strong>s<br />

Ma<strong>de</strong>leines très prisée pour la douceur <strong>de</strong> son climat a droit à ses premières bâtisses mo<strong>de</strong>stes<br />

agrémentées <strong>de</strong> tuiles roses importées <strong>de</strong> la métropole et le renforcement <strong>de</strong>s quartiers<br />

militaires. A partir <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> moitié du 19 e siècle, le <strong>de</strong>stin <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> <strong>de</strong>vient<br />

irrémédiablement lié à celui du Soudan voisin ainsi qu’aux territoires ouest africains<br />

« pacifiés » grâce à <strong>de</strong>s tueries d’un niveau génocidaire. L’affirmation <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> comme la<br />

capitale <strong>de</strong> l’ « Afrique occi<strong>de</strong>ntale française » rend possible la construction <strong>de</strong> nouvelles<br />

maisons sur le bord du littoral, l’occupation progressive <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong>s marigots <strong>de</strong>vant la baie<br />

<strong>de</strong> Yaraax et la construction d’unités industrielles liées aux besoins d’expansion <strong>de</strong>s maisons<br />

<strong>de</strong> commerce côtières <strong>de</strong> la France impériale.<br />

<strong>Le</strong>s différents « plans d’aménagement » <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, notamment celui élaboré par Pinet<br />

Lapra<strong>de</strong>, répon<strong>de</strong>nt avant tout aux préoccupations d’une administration politique et militaire<br />

<strong>de</strong> colonisation soucieuse d’accommo<strong>de</strong>r les besoins <strong>de</strong> confort et d’approvisionnement <strong>de</strong>s<br />

colons Français installés sur place.<br />

La configuration présente <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> et l’occupation accélérée <strong>de</strong> son littoral marin sont le legs<br />

<strong>de</strong> la colonisation. <strong>Le</strong>s administrateurs Sénégalais <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> postcoloniale, <strong>de</strong> Senghor à<br />

Diouf et Wa<strong>de</strong>, n’ont fait que surfer sur <strong>de</strong>s plans déjà préétablis durant la pério<strong>de</strong> coloniale et<br />

n’ont pas réussi à modifier singulièrement la configuration coloniale <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> avec son<br />

« plateau » habité par les colons maintenant remplacés par <strong>de</strong>s Libanais et une minorité<br />

autochtone, sa « médina » indigène à présent surpeuplée, ses zones intermédiaires d’abord<br />

habitées par les « fonctionnaires » et différentes catégories <strong>de</strong> la petite-bourgeoisie<br />

autochtone, et son énorme banlieue où s’est progressivement édifiée une ville dortoir peuplée<br />

d’ouvriers, <strong>de</strong> paysans reconvertis dans l’informel et le commerce <strong>de</strong> détail et les différentes<br />

vagues <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong> la politique <strong>de</strong> « déguerpissement » accélérée par les prési<strong>de</strong>nts<br />

Senghor et Diouf puis reprise plus récemment par Wa<strong>de</strong>.<br />

<strong>Dakar</strong> étouffe sous un poids démographique galopant, une baie atlantique mal aménagée<br />

accaparée par les classes hégémoniques obsédées par le clinquant <strong>de</strong>s villas hauts <strong>de</strong> gamme.<br />

Cette métropole présente maintenant le visage d’un mégalopole primaire doté<br />

d’infrastructures <strong>de</strong> mobilité urbaine, d’assainissement et d’habitat social en déconfiture et en<br />

déphasage par rapport aux options que pourrait s’approprier une ville africaine du XXIe siècle<br />

sur le plan architectural et <strong>de</strong> réaménagement <strong>de</strong>s fonctionnalités <strong>de</strong> l’habitat social en tenant<br />

compte d’une dominante démographique très jeune largement majoritaire.<br />

L’occupation illégale du Dpm a été rendue possible par le laxisme et la corruption qui ont<br />

caractérisés les politiques successives d’aménagement du territoire et <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>. <strong>Le</strong><br />

diagramme ci-<strong>de</strong>ssous rend compte <strong>de</strong> la progression du mal <strong>de</strong>puis son épicentre du<br />

« plateau » à la baie <strong>de</strong> Yaraax et la corniche ouest prise d’assaut par les cadres et les milieux<br />

d’affaires dans le désordre architectural le plus achevé.<br />

Evaluation statistique <strong>de</strong>s violations du Dpm<br />

12


<strong>Le</strong> diagramme # 2 ci-<strong>de</strong>ssous rend compte du phénomène <strong>de</strong> libanisation progressive mais<br />

non moins significative <strong>de</strong>s parties violées du Dpm qui figurent sans doute parmi les plus<br />

prisées <strong>de</strong> cet espace <strong>de</strong> rêve. Libanais (9 %) et Français (12 %) représentent près du quart <strong>de</strong>s<br />

propriétaires <strong>de</strong>s bâtiments délinquants du Dpm, constructions abritant <strong>de</strong>s centres d’affaires,<br />

d’hôtellerie ou d’industries <strong>de</strong> plaisance plus généralement. Ces <strong>de</strong>ux catégories d’origine<br />

étrangère <strong>de</strong> la population dakaroise appartiennent à <strong>de</strong>s milieux d’affaires qui se protègent<br />

souvent sous la forme d’oligopoles dans les <strong>domaine</strong>s du bâtiment et <strong>de</strong>s travaux <strong>public</strong>s, <strong>de</strong><br />

l’électroménager, du tourisme, <strong>de</strong> la vente d’outils et <strong>de</strong> quincaillerie, <strong>de</strong> la restauration,<br />

l’hôtellerie, la pâtisserie, la boulangerie, la photographie et <strong>de</strong> façon plus générale le secteur<br />

<strong>de</strong>s services.<br />

<strong>Le</strong>s classes hégémoniques sénégalaises préfèrent généralement occuper le Dpm pour y habiter<br />

dans <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> luxe que l’on aurait du mal à trouver dans <strong>de</strong>s pays développés. Cette<br />

tendance vers l’habitat <strong>de</strong> luxe crée au sein <strong>de</strong>s couches moyennes et pauvres <strong>de</strong>s frustrations<br />

aggravées par le phénomène dévastateur <strong>de</strong> la pauvreté qui paralyse les efforts <strong>de</strong> survie <strong>de</strong><br />

près <strong>de</strong> 63 % <strong>de</strong> la population générale. Ces tendances lour<strong>de</strong>s côté sénégalais sont confortées<br />

par le nombre <strong>de</strong> cas <strong>de</strong> violations (184 cas, soit 63 % <strong>de</strong> l’ensemble) recensés par l’enquête<br />

<strong>de</strong> terrain (voir le tableau 2 ci-<strong>de</strong>ssous).<br />

Graphique # 2 : nombre et ventilation <strong>de</strong> la nationalité <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong><br />

constructions délinquantes sur le Dpm<br />

Tableau # 2 : ventilation par nationalité <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> violation du Dpm<br />

Nationalité Française 34 Effectifs 11,8% %<br />

Sénégalaise Libanaise 184 26 63,7% 9,0%<br />

13


Autres 45 15,6%<br />

Total 289 100,0%<br />

<strong>Le</strong> tableau 3 indique le caractère irrémédiablement masculin <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> violations du Dpm qui<br />

sont en phase avec le contrôle <strong>de</strong>s richesses produites à l’échelle nationale. Sur un total <strong>de</strong><br />

289 cas <strong>de</strong> violations recensés sur l’ensemble <strong>de</strong> la presqu’île du Cap-Vert, 206 (soit 72 %)<br />

sont le fait <strong>de</strong>s hommes et 36 (12 %) le fait <strong>de</strong>s femmes dont certaines d’ailleurs ne sont<br />

parfois que <strong>de</strong>s prête-noms pour <strong>de</strong>s hommes décidés à gar<strong>de</strong>r l’anonymat pour <strong>de</strong>s raisons à<br />

la fois sociales, financières ou fiscales et politiques. La catégorie « autres » du diagramme 3<br />

relève <strong>de</strong> cas où le sexe <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong> terrains sur le Dpm n’a pu être vérifié avec<br />

certitu<strong>de</strong>.<br />

Tableau 3 : distribution par sexe <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong> constructions délinquantes sur le<br />

Dpm<br />

Sexe<br />

Effectifs %<br />

<strong>Le</strong> tableau 4 relatif à la ventilation <strong>de</strong> l’occupation socioprofessionnelle <strong>de</strong>s occupants du<br />

Dpm montre que près du tiers <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers appartiennent aux milieux d’affaires, cependant<br />

qu’environ un quart sont <strong>de</strong>s cadres, suivis par les commerçants (13 %). Il convient <strong>de</strong> noter<br />

l’absence <strong>de</strong> rigidité <strong>de</strong>s catégories sociales ainsi décrites puisque certains hommes d’affaires<br />

proviennent parfois <strong>de</strong>s milieux gouvernementaux, comme l’indique le cas typique du Maire<br />

<strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> et Prési<strong>de</strong>nt du Sénat issu <strong>de</strong>s milieux d’affaires et politicien<br />

professionnel niche dans les plus hautes sphères <strong>de</strong> l’Etat.<br />

Masculin 206 71,3%<br />

Féminin 36 12,5%<br />

Autres 47 16,3%<br />

Total 289 100,0%<br />

14


Tableau 4 : ventilation <strong>de</strong> l’occupation socioprofessionnelle <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong><br />

constructions sur le Dpm<br />

Occupations socioprofessionnelles<br />

Effectifs %<br />

Cadres 71 24,6%<br />

Commerçants 38 13,1%<br />

Hommes/Femmes affaires 86 29,8%<br />

Pêcheurs /Mareyeurs 15 5,2%<br />

Membres gouvernement 12 4,2%<br />

Hôteliers/Restaurateurs 4 1,4%<br />

Autres 63 21,8%<br />

Total 289 100,0%<br />

<strong>Le</strong>s pêcheurs/mareyeurs Lébus représentent une infime minorité <strong>de</strong>s tenants du Dpm (5 %) et<br />

sont donc les grands perdants <strong>de</strong> cette ruée vers le Dpm qu’ils ont contribué bien souvent à<br />

commercialiser par <strong>de</strong>s voies décrites plus haut 7 . La catégorie « autres » participe <strong>de</strong> maisons<br />

ou <strong>de</strong> terrains dont les propriétaires n’ont pu être i<strong>de</strong>ntifiés avec certitu<strong>de</strong> et selon les<br />

recoupements <strong>de</strong> sources d’information fiables. Il est hautement probable que la plupart <strong>de</strong><br />

ces terrains appartiennent à <strong>de</strong>s Sénégalais hommes d’affaires et/ou membres du<br />

gouvernement, ce qui ramènerait le ratio <strong>de</strong> propriété <strong>de</strong> ces 2 catégories à plus du tiers <strong>de</strong><br />

l’ensemble <strong>de</strong>s <strong>domaine</strong>s recensés.<br />

<strong>Le</strong> tableau 5 renseigne sur le type d’habitats illégalement construits sur le Dpm. En effet, près<br />

<strong>de</strong> 2/3 sont <strong>de</strong>s villas d’apparat appartenant aux classes hégémoniques et qui coûtent<br />

généralement entre 200 et 400 millions <strong>de</strong> francs Cfa voire 600 à 700 millions <strong>de</strong> francs Cfa<br />

et plus, dans certains cas. D’un point <strong>de</strong> vue économique, la construction <strong>de</strong> ces villas <strong>de</strong> luxe<br />

enrichit surtout les entreprises du BTP et ne contribue que très marginalement à la création<br />

d’emplois à revenus stables capables <strong>de</strong> booster la consommation <strong>de</strong>s ménages et par voie <strong>de</strong><br />

7 La <strong>de</strong>rnière affaire en date qui a opposé l’ancien Maire <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, et, présentement Maire <strong>de</strong> la<br />

Commune d’arrondissement <strong>de</strong> Yoof, jeté en prison dans <strong>de</strong>s conditions dégradantes autour d’une nébuleuse<br />

affaire <strong>de</strong> terrains supposément vendus à partir d’actes municipaux frauduleusement établis par <strong>de</strong> tierces parties,<br />

représente une étape importante <strong>de</strong> la lutte que mène une partie du lea<strong>de</strong>rship politique Lébu pour contrôler les<br />

terres <strong>de</strong> la « ban<strong>de</strong> verte » qui entoure l’aéroport <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>. Ces terres désherbées et occupées <strong>de</strong>puis 6 siècles<br />

par les communautés Lébus <strong>de</strong>vraient faire l’objet <strong>de</strong> négociations menées <strong>de</strong> façon participative et démocratique<br />

avec l’ensemble <strong>de</strong>s populations dakaroises. Au lieu d’occuper ces terres et <strong>de</strong> les livrer à la spéculation foncière,<br />

l’Etat gagnerait à gar<strong>de</strong>r les ultimes réserves foncières <strong>de</strong> la capitale du Sénégal pour les générations futures et<br />

aussi pour faire respirer un peu <strong>Dakar</strong> qui est littéralement étouffé par une urbanisation sauvage sans plan<br />

directeur soucieux du développement durable. Il n’y a plus un seul pouce <strong>de</strong> terrain pour les loisirs et<br />

l’assainissement écologique <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong>, ce qui à terme va pousser les jeunes à exiger, au besoin par la<br />

violence, <strong>de</strong>s espaces <strong>de</strong> détente et <strong>de</strong> sports qui leur font singulièrement défaut.<br />

15


conséquence l’économie dans son ensemble. Dans tous les cas, il y a une contradiction<br />

flagrante entre le taux <strong>de</strong> croissance plus que mo<strong>de</strong>ste (environ 3,5 %) <strong>de</strong> l’économie<br />

sénégalaise plongée dans une crise qui a frappé <strong>de</strong> plein fouet ses locomotives telles la Sar, la<br />

Sonacos, les Ics et la Senelec pour ne citer que les plus en vue, et le bourgeonnement <strong>de</strong> villas<br />

<strong>de</strong> luxe travers l’ensemble <strong>de</strong> la presqu’ile du Cap-Vert. Des investigations plus poussées<br />

menées par un Etat volontariste décidé à en découdre avec les auteurs d’enrichissement illicite<br />

pourrait sans doute, en peu <strong>de</strong> temps, soumettre les cas d’enrichissement subit et/ou suspect<br />

<strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s juridictions compétentes mais assainies et réellement indépendantes du pouvoir<br />

exécutif central. En croisant les coûts <strong>de</strong>s villas i<strong>de</strong>ntifiées avec les revenus réels <strong>de</strong>s<br />

propriétaires <strong>de</strong> ces villas, on pourrait sans doute lever un coin du voile sur ce mystère épais<br />

<strong>de</strong> la prospérité subite que respire <strong>Dakar</strong> avec ses villas et ses boli<strong>de</strong>s roulants hauts <strong>de</strong><br />

gamme.<br />

Tableau 5 : types d’habitats illégaux construits sur le Dpm<br />

Typologie <strong>de</strong>s constructions<br />

Effectifs %<br />

Villas 169 58,5%<br />

Hôtels/Bars/Restaurants 47 16,3%<br />

Informel 19 6,6%<br />

Industries 11 3,8%<br />

Services 17 5,9%<br />

Autres 26 9,0%<br />

Total 289 100,0%<br />

<strong>Le</strong> tableau 6 montre que près <strong>de</strong> 2/3 <strong>de</strong>s villas construites sur le Dpm sont achevées (souvent<br />

en un temps record) malgré la gravité <strong>de</strong> la crise économique qui frappe le Sénégal et l’a<br />

installé <strong>de</strong>puis quelques années dans une phase récessive très prononcée. Cette donnée<br />

tendrait à confirmer la thèse selon laquelle le blanchiment d’argent sale a trouvé dans la<br />

construction <strong>de</strong> certaines <strong>de</strong> ces villas <strong>de</strong> luxe un terrain <strong>de</strong> prédilection privilégié sur lequel il<br />

convient <strong>de</strong> s’interroger, surtout lorsque certains <strong>de</strong>s propriétaires touchent <strong>de</strong>s salaires<br />

généralement très moyens selon les standards internationaux ou ne disposent pas d’une<br />

assiette <strong>de</strong> revenus licites connus émanant <strong>de</strong> leurs activités professionnelles. C’est sans doute<br />

ce paradoxe qui a amené plusieurs observateurs à poser la thèse <strong>de</strong> <strong>Dakar</strong> comme nouvelle<br />

plaque tournante du blanchiment d’argent sale, <strong>de</strong> carrefour et <strong>de</strong> port d’escale <strong>de</strong> l’industrie<br />

narcotique mondiale à mi-chemin entre les <strong>de</strong>stinations sud-américaines et asiatiques. Cette<br />

hypothèse <strong>de</strong> travail a récemment été confortée par une <strong>public</strong>ation <strong>de</strong> l’Observatoire onusien<br />

<strong>de</strong> trafic <strong>de</strong> la drogue et <strong>de</strong> blanchiment d’argent sale.<br />

Il convient, par ailleurs, <strong>de</strong> noter que la pression foncière qui s’est brusquement accélérée<br />

dans la presqu’ile du Cap Vert au cours <strong>de</strong>s récentes années, a été aggravée par la floraison <strong>de</strong><br />

nouveaux chantiers entrepris par le chef <strong>de</strong> l’Exécutif sénégalais. <strong>Le</strong> cas <strong>de</strong> la réserve foncière<br />

16


<strong>de</strong> l’aéroport bradée à une tierce partie privée sénégalaise est une opération hasar<strong>de</strong>use 8 qui<br />

ne trouve pas <strong>de</strong> précé<strong>de</strong>nt dans l’histoire <strong>de</strong> l’aménagement territorial <strong>de</strong> la presqu’ile.<br />

Tableau 6 : évolution <strong>de</strong>s constructions entreprises sur le Dpm<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> construction<br />

Effectifs %<br />

Achevé 198 68,5%<br />

Inachevé 81 28,0%<br />

Autres 10 3,5%<br />

Total 289 100,0%<br />

<strong>Le</strong> lieu <strong>de</strong> prédilection <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong>s villas les plus luxueuses installées dans le Dpm<br />

est sans conteste la zone comprise entre Yoof Waraar et la Mosquée <strong>de</strong> la Divinité (voir le<br />

tableau 6). Cette tendance a été récemment accélérée par les travaux <strong>de</strong> l’Anoci et la chaine<br />

d’hôtels <strong>de</strong> luxe en construction dans l’emprise directe du Dpm <strong>de</strong> la corniche ouest.<br />

Dans le même temps, comme le montre la carte ci-<strong>de</strong>ssous, le remembrement <strong>de</strong>s Almadies,<br />

quartier rési<strong>de</strong>ntiel haut <strong>de</strong> gamme, a eu lieu au détriment <strong>de</strong>s couches les plus pauvres <strong>de</strong> la<br />

population tenues à l’écart <strong>de</strong>puis l’époque senghorienne dans les bas-fonds les plus<br />

insalubres <strong>de</strong> la presqu’ile du Cap Vert. Cette opération d’exclusion s’est également déroulée<br />

au détriment <strong>de</strong>s Lébus qui ont d’ailleurs introduit <strong>de</strong>s plaintes pour récupérer certaines <strong>de</strong><br />

leurs terres confisquées par la boulimie foncière <strong>de</strong>s classes hégémoniques. Au moment ou<br />

8 Dans sa livraison du 23 Juin 2008, « <strong>Le</strong> Quotidien » relatait l’affaire en ces termes, sans avoir été démenti par<br />

la suite : « C’est ainsi que 30 ha à distraire du titre foncier 4 407 ont été cédés à 4410 francs Cfa le m2.<br />

L’acquéreur <strong>de</strong> cette «aubaine» se trouve être la Sci Promobilière, dont le gérant n’est autre que M. Hamadoul<br />

Mbackiou Faye. Ainsi après morcellement, Mbackiou Faye se retrouve propriétaire <strong>de</strong>s titres fonciers n° 14 842,<br />

14 843, 14 909 et 14 910. A charge pour lui <strong>de</strong> les exploiter et d’en obtenir une bonne rentabilité financière. Car<br />

il a pour mission <strong>de</strong> rémunérer la société Mansudae Overseas Project Group, l’entreprise nord coréenne qui doit<br />

ériger sur une surface <strong>de</strong> 7 ha du titre foncier n° 10 940 dans une zone communément appelée ex-champ <strong>de</strong> tirs,<br />

le Monument <strong>de</strong> la Renaissance L’Etat du Sénégal a pris la «souveraine» décision <strong>de</strong> se faire substituer dans ce<br />

dossier à une entreprise privée. Convention en date du 11 avril 2008 à l’appui. Dans cette convention, il a été<br />

clairement établi que c’est la Sci Promobilière <strong>de</strong> Mbackiou Faye qui va se substituer à l’Etat pour payer la<br />

facture <strong>de</strong> l’entreprise coréenne Mansudae Overseas Project Group. En contrepartie, il a été cédé à Mbackiou<br />

Faye tous ces hectares pour exploitation. Et ont apposé leur signature à la fin du document, le responsable <strong>de</strong><br />

Mansudae Overseas Project Group, le gérant <strong>de</strong> la Promobilière, Mbackiou Faye, le ministre d’Etat, ministre <strong>de</strong><br />

l’Urbanisme, <strong>de</strong> l’Habitat, <strong>de</strong> l’Hydraulique urbaine, <strong>de</strong> l’Hygiène publique et <strong>de</strong> l’Assainissement, M. Oumar<br />

Sarr et le ministre délégué auprès du ministre <strong>de</strong> l’Economie et <strong>de</strong>s Finances chargé du Budget, M. Ibrahima Sar.<br />

Tout ce beau mon<strong>de</strong> est donc tombé d’accord sur le modus operandi, à savoir qu’en échange <strong>de</strong>s terres, la<br />

Promobilière va se charger <strong>de</strong> payer la facture <strong>de</strong> construction du Monument <strong>de</strong> la Renaissance africaine ».<br />

<strong>Le</strong> quotidien sénégalais conclut dans la même livraison : « Ainsi donc, en donnant à exploiter près <strong>de</strong> 30 ha à<br />

une société privée, l’Etat choisit <strong>de</strong> manière délibérée d’enrichir une entreprise sans édicter les bases concrètes<br />

<strong>de</strong> ce choix. Sans pour autant épiloguer sur la légalité ou l’illégalité <strong>de</strong> l’acte posé. Dans cette zone, le m2<br />

s’échange aujourd’hui à 250 000 francs Cfa, en sachant que 30 ha font 300 000 m2, la société Promobilière peut<br />

s’attendre à <strong>de</strong>s recettes minimales <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 75 milliards <strong>de</strong> francs Cfa. Et ce chiffre n’est qu’estimatif, car il<br />

se dit qu’un autre protagoniste <strong>de</strong> l’affaire, un célèbre industriel, qui s’est dévoyé dans <strong>de</strong>s affaires foncières, a<br />

pu vendre 21 ha sur les mêmes terres, à 500 000 francs Cfa le mètre carré. Quand on sait que la construction du<br />

monument est estimé à 11 milliards…, bonjour le pactole ».<br />

17


nous menions l’enquête, près <strong>de</strong> 140 dossiers contentieux étaient dans la corbeille d’urgences<br />

<strong>de</strong>s autorités municipales <strong>de</strong> Ngoor rien que dans la zone <strong>de</strong>s Almadies (voir carte # 14 ci<strong>de</strong>ssous).<br />

Carte # 14 : <strong>Le</strong>s Almadies : 140 cas contentieux sur les terrains remembrés atten<strong>de</strong>nt<br />

d’être jugés.<br />

<strong>Le</strong> tableau # 7 ci-<strong>de</strong>ssous rend compte du phénomène <strong>de</strong> libanisation et <strong>de</strong> francisation<br />

progressives mais non moins significative <strong>de</strong>s parties violées du Dpm qui figurent sans doute<br />

parmi les plus prisées du littoral dakarois. Pris ensemble, Libanais (8,99 %) et Français<br />

(11,76%) représentent 20,75 % <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s constructions entreprises dans le périmètre<br />

du Dpm <strong>de</strong> la presqu’ile du Cap-Vert. Ce pourcentage paraît très élevé en raison <strong>de</strong> la valeur<br />

que l’on <strong>de</strong>vrait attribuer aux constructions entreprises par ces <strong>de</strong>ux communautés allogènes<br />

davantage intéressées généralement par le contrôle d’industries légères <strong>de</strong> transformation et<br />

les unités <strong>de</strong> services (restauration, parcs attractifs, casinos, hôtels, cliniques, etc). Il y a donc<br />

une nette différence en termes <strong>de</strong> valeur ajoutée entre les villas tape-à-l’œil que les Sénégalais<br />

préfèrent généralement construire et les centres d’affaires à haut ren<strong>de</strong>ment construits par<br />

Français et Libanais. Bien que créatrices d’emplois, ces petites et moyennes industries<br />

contrôlées par les étrangers participent malheureusement à la fuite <strong>de</strong>s capitaux non seulement<br />

au Sénégal mais à travers tout le continent africain.<br />

18


Tableau # 7: part prépondérante du capital étranger dans l’appropriation <strong>de</strong>s terrains<br />

construits sur le Dpm<br />

Nationalité<br />

Sénégalaise Française Libanaise Autres<br />

Total<br />

I. Grille DPM YOFF Effectifs 102 27 9 20 158<br />

WARAR % 55,4% 79,4% 34,6% 44,4% 54,7%<br />

II. Grille DPM Effectifs 37 1 9 7 54<br />

Mosquée<br />

Divinité/ATI % 20,1% 2,9% 34,6% 15,6% 18,7%<br />

III. Grille DPM Effectifs 45 6 8 18 77<br />

ATI/Hann Yarakh % 24,5% 17,6% 30,8% 40,0% 26,6%<br />

Effectifs 184 34 26 45 289<br />

Total % 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0%<br />

Estimation financière <strong>de</strong>s terrains du Dpm illégalement occupés<br />

Nous avons déjà observé le phénomène <strong>de</strong> libanisation et <strong>de</strong> francisation progressive mais<br />

non moins significative <strong>de</strong>s parties violées du Dpm (cf. diagramme # 2) que ce soit pour y<br />

construire <strong>de</strong>s villas <strong>de</strong> luxe ou <strong>de</strong>s industries <strong>de</strong> services et <strong>de</strong> substitution d’importation. Il y<br />

a comme une sorte <strong>de</strong> division inégale du travail par laquelle les élites autochtones se<br />

confinent dans la consommation d’habitations hauts <strong>de</strong> gamme cependant qu’une petite<br />

minorité <strong>de</strong> Libanais et <strong>de</strong> Français appartenant aux réseaux d’affaires souvent établis <strong>de</strong>puis<br />

la pério<strong>de</strong> coloniale se taillent la part du lion en termes <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong>s services et <strong>de</strong>s<br />

industries installées sur le Dpm.<br />

Cette tendance prend place au détriment <strong>de</strong> la collectivité nationale et du trésor <strong>public</strong> qui<br />

per<strong>de</strong>nt en valeur absolue l’équivalent <strong>de</strong> centaines <strong>de</strong> milliards <strong>de</strong> francs Cfa lorsque que l’on<br />

rapporte la superficie <strong>de</strong>s surfaces violées du Dpm à leur valeur réelle, selon les termes du<br />

marché.<br />

Sur la base <strong>de</strong>s moyennes obtenues à partir <strong>de</strong>s prix au mètre carré du Dpm par zone et selon<br />

les tendances du marché (voir tableau # 8) appliquées aux surfaces incriminées du Dpm,<br />

surfaces calculées a partir <strong>de</strong>s données géo référencées <strong>de</strong>s cartes satellitaires les plus récentes<br />

disponibles (voir les cartes plus haut ainsi que la carte # 14 ci-<strong>de</strong>ssous), Ai<strong>de</strong> <strong>Transparence</strong> a<br />

pu établir les moyennes <strong>de</strong> valeurs indiquées dans le tableau # 7.<br />

<strong>Le</strong> tableau 8 ci-<strong>de</strong>ssous résume les tendances du marché en matière <strong>de</strong> vente <strong>de</strong>s terrains sur<br />

le Dpm dans les zones considérées.<br />

19


Tableau # 8 : moyennes <strong>de</strong>s prix du marché <strong>de</strong>s terrains du Dpm<br />

Terrains Face Mer Prix au m2 (en Cfa) Zonage DPM<br />

Yoff Plage BCEAO<br />

Yoff Warar / Mosquee Divinite /<br />

260 000 A<br />

Almadies<br />

Cap Manuel-Corniche Anse<br />

365 000<br />

B<br />

Bernard 1 000 000<br />

Corniche Est 650 000 D et E<br />

Hann Plage 250 000 F<br />

Guédiawaye 140 000 G<br />

Malika – Kër Massar 17 000 H<br />

Sources : Agence Immobilière ; Camara ; Agence Immobilière SAIM Kébé ; Immobilière Africaine ; Sénégalaise<br />

<strong>de</strong> l’Immobilier et Petites Annonces « Immobilier » ; Immolux ; Espace Immobilier.<br />

La carte # 15 permet <strong>de</strong> déconstruire le phénomène <strong>de</strong> privatisation du Dpm, et, plus<br />

particulièrement, d’en évaluer les inci<strong>de</strong>nces financières. Il convient d’ores-et-déjà <strong>de</strong> noter le<br />

caractère très conservateur <strong>de</strong>s estimations proposées ici, puisqu’elles ne ren<strong>de</strong>nt pas<br />

entièrement compte <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong>s prix en fonction du marché régional voire global.<br />

La valeur totale <strong>de</strong>s terrains irrégulièrement occupés du Dpm s’élève à la ron<strong>de</strong>lette somme<br />

<strong>de</strong> près <strong>de</strong> 300 milliards <strong>de</strong> francs Cfa soit l’équivalent <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte intérieure du Sénégal au<br />

mois <strong>de</strong> novembre 2008 ! (voir carte # 15). A cette somme déjà colossale, il convient<br />

d’ajouter l’estimation grossière mais néanmoins suffisamment indicative récemment donnée<br />

par le Syndicat <strong>de</strong>s architectes qui estime que la valeur <strong>de</strong>s terrains situées sur le Dpm et<br />

cédés par l’Anoci aux entreprises étrangères équivaudrait à 300 milliards <strong>de</strong> francs Cfa. La<br />

somme totale qui pourrait paraître la plus proche <strong>de</strong> la réalité s’élève ainsi à plus <strong>de</strong> 600<br />

milliards <strong>de</strong> francs Cfa soit presque l’equivalent <strong>de</strong> la moitie du budget annuel national.<br />

20<br />

C


Conclusion<br />

Cette étu<strong>de</strong> a montré que la violation récurrente du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong> a <strong>de</strong> sérieuses<br />

conséquences sur la gestion du patrimoine domanial <strong>public</strong> dans son ensemble. <strong>Le</strong>s textes <strong>de</strong><br />

loi qui existent sont parfois incomplets et exigent <strong>de</strong>s révisions en profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la loi sur le<br />

<strong>domaine</strong> national ainsi que <strong>de</strong>s différents co<strong>de</strong>s supposés préserver les équilibres relatifs à<br />

l’aménagement du territoire et l’intégrité <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong> l’environnement. L’expérience<br />

montre que ce sont les classes hégémoniques, politiciens et hommes d’affaires en tête, et les<br />

minorités étrangères qui violent la loi et empêchent toute la collectivité nationale présente et<br />

future d’accé<strong>de</strong>r aux plages <strong>de</strong> la presqu’île du Cap Vert et à ses ressources. Du point <strong>de</strong> vue<br />

<strong>de</strong>s équilibres environnementaux, il y a <strong>de</strong>s risques certains qui auront un effet d’entrainement<br />

sur la communauté Lébu mais aussi sur les populations majoritairement jeunes <strong>de</strong> la<br />

presqu’ile qui n’ont plus accès à <strong>de</strong>s espaces vitaux <strong>de</strong> jeux, <strong>de</strong> loisirs et d’épanouissement<br />

socio culturel.<br />

Un débat national est rendu nécessaire par les dérives répétées et graves <strong>de</strong>s gouvernements<br />

successifs dans la gestion du <strong>domaine</strong> <strong>public</strong> <strong>maritime</strong>. <strong>Le</strong>s populations <strong>de</strong> base, les<br />

organisations <strong>de</strong> la société civile, les partis politiques et les confréries religieuses sont<br />

interpellés au premier chef par cette nécessité imparable. Si l’inertie l’emportait pour une<br />

raison ou une autre face aux urgences signalées dans cette étu<strong>de</strong>, c’est toute l’économie<br />

nationale qui en souffrirait et, au-<strong>de</strong>là, les populations vulnérables privées <strong>de</strong> terres et laissées<br />

à la merci <strong>de</strong> spéculateurs <strong>de</strong> tous crins, avi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> gains faciles et illicites.<br />

Il est donc temps d’agir et <strong>de</strong> s’organiser en conséquence avec un niveau d’efficacité qui<br />

transcen<strong>de</strong> les querelles byzantines auxquelles nous ont habituées les classes hégémoniques<br />

sénégalaises toutes tendances confondues.<br />

21


Carte # 15 : estimation <strong>de</strong>s valeurs financières <strong>de</strong>s parties violées du Dpm<br />

22


Textes <strong>de</strong> base<br />

Bibliographie<br />

1. Loi n° 64 – 46 du 17 juin 1964 relative au <strong>domaine</strong> national<br />

2. décret n° 64 – 573 du 30 juillet 1964 fixant les conditions d’application <strong>de</strong> la loi sur le<br />

<strong>domaine</strong> national.<br />

3. loi n° 76 – 66 du 2 juillet 1976 portant Co<strong>de</strong> du Domaine <strong>de</strong> l’Etat.<br />

4. loi n° 81 – 13 du 04 mars 1981 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Eau.<br />

5. loi n° 83 – 71 du 05 juillet 1983 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Hygiène<br />

6. loi n° 88 – 05 du 20 juin 1988 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Urbanisme<br />

7. loi n° 87 – 11 du 24 février 1987 portant vente <strong>de</strong>s terrains domaniaux en zones<br />

urbaines.<br />

8. décret n° 88 – 826 du 14 juin 1988 autorisant la vente <strong>de</strong>s terrains domaniaux.<br />

9. loi n° 96 – 07 du 22 mars 1996 portant transfert <strong>de</strong> compétence aux régions,<br />

communes et communautés rurales.<br />

10. décret n°96 – 1130 du 27 décembre 1996 portant application <strong>de</strong> la loi n°96-07 du 22<br />

mars 1996 portant transfert <strong>de</strong> compétences aux régions, aux communes et aux<br />

communautés rurales.<br />

11. décret n° 96 – 1134 du 27 décembre 1996 portant application <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> la loi<br />

n° 96 – 07 relatives à la Protection <strong>de</strong> la Nature.<br />

12. décret n° 96 – 1138 du 27 décembre 1996 portant application <strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong> la<br />

loi n° 96 – 07 relatives à l’Urbanisme et à l’Habitat.<br />

13. loi n° 2001 – 01 du 15 janvier 2001 portant Co<strong>de</strong> l’Environnement.<br />

14. décret n° 2001 – 282 du 12 avril 2001 portant application du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

l’environnement.<br />

15. Parmi les autres textes législatifs et réglementaires nationaux en vigueur en rapport<br />

avec la<br />

16. gestion <strong>de</strong> la zone côtière, on peut citer :<br />

17.<br />

18. • la loi n° 65-32 du 19 mai 1965 relative à la police <strong>de</strong>s ports <strong>maritime</strong>s ;<br />

19. • la loi n° 81-13 du 4 mars 1981 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’eau ;<br />

20. • la loi n° 83-05 du 28 janvier 1983 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Environnement ;<br />

21. • la loi n° 85-14 du 25 février 1985 portant délimitation <strong>de</strong> la mer territoriale, <strong>de</strong> la<br />

zone<br />

22. contiguë et du plateau continental ;<br />

23. • la loi n° 88-05 du 20 juin 1988 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Urbanisme ;<br />

24. • la loi n° 98-03 du 8 janvier 1998 portant Co<strong>de</strong> Forestier ;<br />

25. • la loi n° 98-05 du 8 janvier 1998 portant Co<strong>de</strong> pétrolier ;<br />

26. • la loi n° 98-32 du 14 avril 1998 portant Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Pêche <strong>maritime</strong><br />

27.<br />

23


Documents<br />

1. Séminaire <strong>de</strong> la commission nationale d’aménagement du territoire : élaboration et mise en<br />

œuvre du PNAT (Rapport <strong>de</strong> synthèse, <strong>Dakar</strong> 13 janvier 1992 : document n° 13 – 93 p).<br />

2. IAGU : Profil environnemental <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong> Hann (Rapport <strong>de</strong> sythèse ; <strong>Dakar</strong> 1994 – 73<br />

p).<br />

3. Séminaire <strong>de</strong>s 27, 28, et 29 août 1995 sur la Baie <strong>de</strong> Hann organisé par le CRDI, la Banque<br />

Internationale pour la Reconstruction et le Développement, le PGU sous la maîtrise d’œuvre<br />

<strong>de</strong> l’UAGU (Rapport <strong>de</strong> synthèse, <strong>Dakar</strong> ; août 1995, 38 p).<br />

4. Sud Quotidien, quotidien paraissant à <strong>Dakar</strong> : livraison du 22 mars 1995, p 5.<br />

5. La lettre <strong>de</strong> l’Environnement. Bulletin d’information, <strong>de</strong> liaison et d’échanges du Ministère<br />

<strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong> la Protection <strong>de</strong> la Nature, n° 02 Novembre – Décembre 1994.<br />

6. Sud Quotidien, livraison du 13 février 1998, pp. 1 et 4.<br />

7. Sud Quotidien, livraison du 20 janvier 1999, pp. 8 et 9.<br />

Ouvrages<br />

1. AUBY (J - M) et BON (P). Droit administratif <strong>de</strong>s biens, Ed. Dalloz, Paris 1991.<br />

2. AUBY et DUCOS ADER. Droit administratif. Dalloz ; 1983.<br />

3. CAVERIVIERE (M) et DEBENE (M). <strong>Le</strong> droit foncier sénégalais, Ed. Berger-<strong>Le</strong>vrault ;<br />

Coll. Mon<strong>de</strong> en <strong>de</strong>venir, Paris 1988.<br />

4. CHAPUS (R). Droit administratif général, T.2, Ed. Montchrestien, Paris 1992.<br />

24


ANNEXE :<br />

Données relatives à l’occupation illégale du Dpm


Lots<br />

#<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6<br />

7<br />

8<br />

Annexe # 1<br />

I. Grille analytique du Dpm <strong>de</strong> Yooff Waraar à la<br />

mosquée <strong>de</strong> la Divinité 1<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Yoff<br />

Ranrhar 2<br />

Libanais M Laborantin Villa <strong>de</strong><br />

Luxe<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Industriel Industrie<br />

Pêche<br />

Sénégalais M Mé<strong>de</strong>cin<br />

Clinique privée<br />

Villa <strong>de</strong><br />

Luxe<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

En cours<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Sénégalais M Villa Achevé<br />

Sénégalaise F Prof retraité Villa Achevé<br />

Libanaise F NR Villa Achevé<br />

Sénégalais M Ancien Ministre Villa Inachevé<br />

Libanais M Industriel Hôtel<br />

restau<br />

Achevé<br />

1<br />

<strong>Le</strong>s grilles <strong>de</strong> recueil <strong>de</strong> données ne comprennent pas les relevés <strong>de</strong> noms et d’adresses exactes pour ne pas<br />

violer le caractère confi<strong>de</strong>ntiel <strong>de</strong> telles informations qui relèvent, par ailleurs, <strong>de</strong> la sécurité <strong>de</strong>s biens et <strong>de</strong>s<br />

personnes ainsi que le droit à la vie privée <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong>s maisons et industries concernés. La seule<br />

exception à cette règle est celle concernant l’une <strong>de</strong>s propriétés foncières du chef <strong>de</strong> l’Etat (6 hectares) qui<br />

empiète largement sur le Dpm <strong>de</strong> Yooff près du Casino du Cap Vert. En raison <strong>de</strong> l’institution qu’il incarne,<br />

nous avons cru qu’il était important d’attirer l’attention publique sur l’attitu<strong>de</strong> personnelle du premier magistrat<br />

<strong>de</strong> la nation face en ce qui concerne la gestion démocratique du Dpm que ce soit à Yooff, sur les berges <strong>de</strong> la<br />

Somonne ou ailleurs. Autre fait notable, celui du Prési<strong>de</strong>nt du Sénat qui serait propriétaire d’un vaste complexe<br />

immobilier d’une valeur <strong>de</strong> plusieurs milliards <strong>de</strong> francs Cfa construit dans le Dpm au pied <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s collines<br />

<strong>de</strong>s Mamelles au large <strong>de</strong> Wakaam. La liste <strong>de</strong> telles violations est très longue et les personnes incriminées<br />

parfaitement connues (y compris celles dont les fonctions qu’ils occupent auraient du les dissua<strong>de</strong>r, pour <strong>de</strong>s<br />

raisons <strong>de</strong> conflits évi<strong>de</strong>nts d’intérêts, <strong>de</strong> se tailler une part respectable dans le Dpm). Mais nous avons préféré<br />

citer les exemples les plus frappants et mettre l’accent sur les faits et les processus relatifs aux incursions<br />

illégales dans le Dpm..<br />

2<br />

L’orthographie <strong>de</strong>s localités décrites comme Ranrhar, transcription coloniale <strong>de</strong> Waraar n’a pas été rectifiée<br />

dans les grilles <strong>de</strong> recueil <strong>de</strong> données.


Lots<br />

#<br />

9<br />

10<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalaise M NR Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

11 Yoff<br />

Ranrhar<br />

12<br />

13<br />

14<br />

15<br />

16<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Lots<br />

#<br />

17<br />

18<br />

19<br />

20<br />

21<br />

22<br />

23<br />

24<br />

Sénégalaise M Cinéaste Villa Achevé<br />

Sénégalaise F Pharmacienne Villa Achevé<br />

Suisse M Homme d’affaires Villa Achevé<br />

Sénégalaise M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalaise M Ancien<br />

Gouverneur<br />

Villa Achevé<br />

Sénégalaise F NR Villa Inachevé<br />

Sénégalaise M Industriel Usine <strong>de</strong><br />

Pêche<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalaise M<br />

?<br />

Achevé<br />

Villa Achevé<br />

Sénégalaise F Femme d’affaires Villa Achevé<br />

Sénégalaise M Officier en<br />

retraite<br />

Sénégalaise M<br />

Sénégalaise M Expert comptable<br />

décédé<br />

Sénégalaise M Ancien Ministre Villa <strong>de</strong><br />

Luxe<br />

Sénégalais M Ancien PDG<br />

Décédé<br />

?<br />

Villa Achevé<br />

Villa Achevé<br />

Villa Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

achevé<br />

Villa Achevé


Lots<br />

#<br />

25<br />

26<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

27 Yoff<br />

Ranrhar<br />

28<br />

29<br />

30<br />

31<br />

32<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Française M/F Industriel Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Française M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Achevé<br />

Sénégalais M Homme<br />

d’Affaires<br />

Libanais M Homme<br />

d’Affaires<br />

Villa achevé<br />

Villa Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction


Lots<br />

#<br />

33<br />

34<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Libanais M Commerçant Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

35 Yoff<br />

Ranrhar<br />

36<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

37 Yoff<br />

Ranrhar<br />

38<br />

39<br />

40<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Français M Cadre Villa Achevé<br />

Terrain litigieux non attribué<br />

Sénégalais M Homme d’affaires Villa Inachevé<br />

Sénégalais M Homme d’affaires Villa Achevé<br />

Français M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais M Ministre Villa Achevé


Lots<br />

#<br />

41<br />

42<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Professeur Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

43 Yoff<br />

Ranrhar<br />

44 Yoff<br />

Ranrhar<br />

45<br />

46<br />

47<br />

48<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Français M Industriel Usine Achevé<br />

Français M Industriel Villa Achevé<br />

Français M Industriel Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Inachevé<br />

Villa Inachevé<br />

Sénégalais M Homme d’affaires Villa Achevé


Lots<br />

#<br />

49<br />

50<br />

Lots<br />

#<br />

57<br />

58<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Français M Cadre Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Homme d’affaires Villa Inachevé<br />

59 Yoff<br />

Ranrhar<br />

60 Yoff<br />

Ranrhar<br />

61<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

62 Yoff<br />

Ranrhar<br />

63<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Pétrolier Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

51 Yoff<br />

Ranrhar<br />

52 Yoff<br />

Ranrhar<br />

53<br />

54<br />

55<br />

56<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Homme<br />

d’Affaires<br />

Sénégalais M Homme<br />

d’Affaires<br />

Terrain nu Terrain nu<br />

Français M Cadre Villa Achevé<br />

Français M Homme d’affaires Villa Achevé<br />

Français M<br />

Sénégalais M<br />

?<br />

?<br />

Villa Inachevé<br />

Portugais M Hors du pays Villa Achevé<br />

Sénégalais M PDG Walfadjiri Villa Inachevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais M Marabout Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Libanais M Entrepreneur Villa Achevé<br />

-<br />

Terrain nu<br />

Villa Inachevé


64<br />

Lots<br />

#<br />

65<br />

66<br />

Lots<br />

#<br />

73<br />

74<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Inachevé<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Ranrhar<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Virage<br />

67 Yoff<br />

Virage<br />

68 Yoff<br />

Virage<br />

69<br />

70<br />

71<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Yoff<br />

Virage<br />

72 Yoff<br />

Virage<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Français M Cadre Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Virage<br />

75 Yoff<br />

Virage<br />

76 Yoff<br />

Virage<br />

Libanais M Commerçant Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais M Journaliste Villa Achevé<br />

Alleman<strong>de</strong> M<br />

Terrain nu<br />

Sénégalais F Commerçante Commerce Achevé<br />

Français M Hôtelier Hôtel Cap<br />

Ouest<br />

?<br />

Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Nationalité<br />

Américaine<br />

M Homme d’affaires Villa Achevé<br />

Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Mi-Achevé


77<br />

78<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Yoff<br />

Virage<br />

79 Yoff<br />

Virage<br />

80<br />

Lots<br />

#<br />

81<br />

82<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Français M Homme d’affaires Villa Achevé<br />

Sénégalais M Mécanicien Garage Inachevé<br />

Libanais M Homme d’affaires Hôtel le<br />

Virage<br />

Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Cabanon Achevé<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Sénégalais M Commerçant Cabanon Achevé<br />

Yoff<br />

Virage<br />

83 Yoff<br />

Virage<br />

84 Yoff<br />

Virage<br />

85<br />

86<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Yoff<br />

Virage<br />

87 Yoff<br />

Virage<br />

88<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Sénégalais M Commerçant Cabanon Achevé<br />

Sénégalaise F Commerçante Restaurant Inachevé<br />

Sénégalais M Commerçant Buvette Mi-Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Buvette Mi-Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Buvette Inachevé<br />

Sénégalaise F Restauratrice Restaurant Mi-Achevé<br />

Sénégalais M Pharmacien Villa Achevé


Lots<br />

#<br />

89<br />

90<br />

Lots<br />

#<br />

97<br />

98<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Ngor Français M Hôtelier Hôtel<br />

SUNUGAL<br />

Ngor<br />

99 Ngor<br />

100 Ngor<br />

101<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Sénégalais M Chef Religieux Villa Achevé<br />

Yoff<br />

Virage<br />

91 Yoff<br />

Virage<br />

92 Yoff<br />

Virage<br />

93<br />

94<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Yoff<br />

Virage<br />

95 Yoff<br />

Virage<br />

96<br />

Yoff<br />

Virage<br />

Ngor<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Achevé<br />

Sénégalaise F Ex-Ministre du<br />

Tourisme<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Achevé<br />

Sénégalaise F Femme d’affaires Villa Inachevé en<br />

Chantier<br />

Français M Cadre Villa Inachevé en<br />

Chantier<br />

Sénégalais M Homme<br />

d’affaires<br />

Villa Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Villa à<br />

Usage <strong>de</strong><br />

Bureaux<br />

Villa<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Sénégalais M Homme d’affaires Villa Inachevé<br />

Villa Inachevé en<br />

Chantier<br />

Terrain vague mûré <strong>de</strong> plusieurs hectares appartenant (jusque récemment)<br />

à M. Abdoulaye Wa<strong>de</strong>, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République du Sénégal. Nous<br />

n’avons pu trouver une pièce justificative montrant que le Chef <strong>de</strong> l’Etat a<br />

renoncé formellement à ce titre <strong>de</strong> propriété comme publiquement annoncé


Ngor<br />

102<br />

103 Ngor<br />

104<br />

Lots<br />

#<br />

105<br />

106<br />

Ngor<br />

Français M Cadre Nestlé Villa Achevé<br />

Sénégalais M _ Terrain nu Terrain nu<br />

Sénégalais M _ Terrain nu Terrain nu<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Ngor Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Ngor<br />

107 Ngor<br />

108 Ngor<br />

Ngor<br />

109<br />

110 Ngor<br />

111<br />

112<br />

Ngor<br />

Ngor<br />

Sénégalais M Commerçant Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé<br />

Libanais M Industriel Hôtel<br />

Calao<br />

Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Restaurant Achevé<br />

Française F Cadre Hôtel la<br />

Madrague<br />

Achevé<br />

Français M Industriel Restaurant Achevé<br />

Française F Commerçante Restaurant Achevé


Lots<br />

#<br />

113<br />

114<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

d’habitat construction<br />

Ngor Français M Commerçant Restaurant Achevé<br />

Ngor<br />

115 Ngor<br />

116 Ngor<br />

Ngor<br />

117<br />

118 Ngor<br />

119<br />

120<br />

Ngor<br />

Almadies<br />

Sénégalais M Pêcheur Débarcadère Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Restaurant Achevé<br />

M Commerçant Bar Achevé<br />

?<br />

Sénégalais M Commerçant Centre <strong>de</strong><br />

Pêche<br />

Achevé<br />

Petit<br />

Bâtiment<br />

Achevé<br />

Français M Industriel Hôtel<br />

Abaka<br />

Française F Industrielle Hôtel<br />

Crêperie<br />

Bretonne<br />

Achevé<br />

Achevé


Lots Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

#<br />

d’habitat<br />

121 Almadies Vietnamienne F Hôtelière Hôtel <strong>Le</strong><br />

Recif <strong>de</strong>s<br />

Almadies<br />

122<br />

Sénégalaise Industielle Bassin Fruits<br />

Almadies<br />

<strong>de</strong> Mer<br />

123<br />

124<br />

125<br />

Almadies<br />

Almadies<br />

Almadies<br />

126 Almadies<br />

127 Almadies<br />

128 Almadies<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Français M Hôtelière Hôtel <strong>de</strong>s<br />

Almadies Ex-<br />

Club Med<br />

Achevé<br />

Sénégalais<br />

M Commerçant Buvette Inachevé<br />

Sénégalaise F Commerçante Buvette Achevé<br />

Sénégalais M Commerçant Buvette Achevé<br />

?<br />

?<br />

?<br />

?<br />

?<br />

?<br />

Villa en<br />

Chantier<br />

Villa en<br />

Chantier<br />

Inachevé<br />

Inachevé


Lots Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

#<br />

d’habitat<br />

129 Almadies<br />

M<br />

Villa en<br />

?<br />

? Chantier<br />

130<br />

131<br />

132<br />

Lots<br />

#<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

137 Almadies<br />

138<br />

139<br />

139<br />

bis<br />

140<br />

Almadies<br />

Almadies<br />

Almadies<br />

133 Almadies<br />

134 Almadies<br />

135 Almadies<br />

136 Almadies<br />

Almadies<br />

Almadies<br />

Sénégalais M Chef Religieux<br />

Sénégalais<br />

M Chef Religieux<br />

Sénégalais Religieux Lieu <strong>de</strong><br />

Prières<br />

Almadies Sénégalais M<br />

Almadies<br />

141 Almadies<br />

142 Almadies<br />

?<br />

M<br />

Sénégalais M Homme<br />

d’Affaires<br />

Sénégalais<br />

?<br />

M Homme<br />

d’Afffaires<br />

?<br />

Villa en<br />

Chantier<br />

Etat <strong>de</strong>s<br />

travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Villa Achevé<br />

Mosquée Inachevé<br />

Villa en<br />

Chantier<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Inachevé<br />

Inachevé<br />

Buvette Inachevé<br />

Restaurant Inachevé<br />

Sénégalaise F Commerçante Restaurant Inachevé<br />

Français M Industrielle Usine Pêche Achevé<br />

Sénégalais<br />

Africains<br />

M<br />

M<br />

Cadre<br />

Cadres<br />

Villa en<br />

Chantier<br />

Inachevé<br />

Villa Achevé<br />

Inachevé<br />

Inachevé<br />

Française F Cadre Villa Achevé<br />

Sénégalais F Commerçante Villa Achevé<br />

Sénégalais M Cadre Villa Achevé


143<br />

Mamelles<br />

144 Mamelles<br />

Lots<br />

#<br />

Espagnol<br />

Sénégalais<br />

M<br />

M<br />

Homme d’Affaires<br />

Prési<strong>de</strong>nt du Sénat<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

145 Mosquée<br />

Divinité<br />

146<br />

Mosquée<br />

Divinité<br />

147 Mosquée<br />

Divinité<br />

148 Mosquée<br />

Divinité<br />

149<br />

Mosquée<br />

Divinité<br />

150 Mosquée<br />

Divinité<br />

151 Mosquée<br />

Divinité<br />

152 Mosquée<br />

Divinité<br />

Lots<br />

#<br />

Hôtel Achevé<br />

Baobab les<br />

Mamelles<br />

Hôtel Nety’s Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Sénégalaise F Mareyeuse Cabanon Inachevé<br />

Sénégalais<br />

M Pêcheur Cabanon Inachevé<br />

Sénégalais M Pêcheur Cabanon Inachevé<br />

Sénégalais M Pêcheur<br />

Cabanon Inachevé<br />

Sénégalais M Pêcheur Cabanon Inachevé<br />

Sénégalaise F Mareyeuse Cabanon Inachevé<br />

Sénégalaise F Mareyeuse Cabanon Inachevé<br />

Sénégalais M Pêcheur Cabanon Inachevé<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

153 Mosquée<br />

Divinité<br />

154<br />

Mosquée<br />

Divinité<br />

155 Mosquée<br />

Divinité<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Sénégalaise F Mareyeuse Cabanon Inachevé<br />

Sénégalaise<br />

F Mareyeuse Cabanon Inachevé<br />

Sénégalaise F Mareyeuse Cabanon Inachevé


156 Mosquée<br />

Divinité<br />

157<br />

Mosquée<br />

Divinité<br />

Sénégalais M Pêcheur<br />

Cabanon Inachevé<br />

Français M Industriel Usine Pêche Achevé


Lots<br />

#<br />

ANNEXE # 2<br />

II. GRILLE ANALYTIQUE DU DOMAINE PUBLIC MARITIME DE LA MOSQUEE<br />

DE LA DIVI NITE A ATI<br />

1 Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

2<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Mer 2 e porte<br />

Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

Mer 2 e porte<br />

3 Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

Mer 2 e porte<br />

4 Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

Mer 2 e porte<br />

5 Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

Mer 2 e porte<br />

6 Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

7<br />

8<br />

Mer 2 e porte<br />

Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

Mer 2 e porte<br />

Fenêtre<br />

Mermoz sur<br />

Mer 2 e porte<br />

Sénéglocapverdienne<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

F<br />

M<br />

M<br />

F<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Entrepreneur<br />

Cadre<br />

Ancien<br />

ministre<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Cadre<br />

Cadre<br />

Cadre<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Inachevé<br />

Terrain nu<br />

Achevé<br />

Terrassements<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé


Lots<br />

#<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

9 Cité <strong>de</strong>s<br />

Enseignants<br />

10<br />

Cité <strong>de</strong>s<br />

Enseignants<br />

11 Cité <strong>de</strong>s<br />

Enseignants<br />

12 Cité <strong>de</strong>s<br />

Enseignants<br />

13 Cité <strong>de</strong>s<br />

Enseignants<br />

14 Cité <strong>de</strong>s<br />

Enseignants<br />

15<br />

16<br />

Lots<br />

#<br />

17<br />

18<br />

19<br />

Fann<br />

Fann<br />

Alleman<strong>de</strong><br />

Sénégalaise<br />

européen<br />

Française<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Américaine<br />

Libanaise<br />

F<br />

M<br />

M<br />

F<br />

M<br />

---<br />

Tous<br />

Confondus<br />

M<br />

Enseignant<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Cadre<br />

Cadres<br />

---<br />

Cadres<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Villa<br />

De luxe<br />

Hôtel<br />

Waterfront<br />

Villa<br />

De luxe<br />

Villa<br />

Riviera<br />

Immobilier<br />

Villa<br />

AMORC<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Fann<br />

Fann<br />

Fann<br />

Libanaise<br />

Libanaise<br />

Saoudien<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Souverain<br />

décédé<br />

Villa<br />

Villa<br />

Rési<strong>de</strong>nce<br />

Al Salam<br />

Vaste<br />

Rési<strong>de</strong>nce<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Achevé<br />

En chantier<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Clôturé


20 Fann<br />

21 Fann<br />

22<br />

23<br />

24<br />

Lots<br />

#<br />

25<br />

26<br />

27<br />

Fann<br />

Fann<br />

Fann<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Prési<strong>de</strong>nt du<br />

Sénat<br />

Ministre <strong>de</strong>s<br />

Finances<br />

Cadre<br />

Cadre<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Fann<br />

Fann<br />

Fann<br />

28 Fann<br />

29<br />

30<br />

31<br />

32<br />

Fann<br />

Fann<br />

Fann<br />

Fann<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Libanaise<br />

Libanaise<br />

Libanaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

---<br />

M<br />

F<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Société<br />

immobilière<br />

Cadre<br />

Femme<br />

d’affaires<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Terrain <strong>de</strong><br />

tennis<br />

Villa<br />

Villa<br />

Vaste<br />

rési<strong>de</strong>nce<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

En chantier<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé


Lots<br />

#<br />

33<br />

34<br />

35<br />

36<br />

37<br />

38<br />

39<br />

40<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Sénégalaise<br />

espagnol<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Libanais<br />

?<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

-<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

?<br />

M<br />

M<br />

Fabrication<br />

objet d’art<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Spécialiste en<br />

ingénierie<br />

financière<br />

Spécialiste en<br />

ingénierie<br />

financière<br />

Mé<strong>de</strong>cin<br />

?<br />

Etat Sénégal<br />

Etat Sénégal<br />

Village<br />

artisanal<br />

Très vaste<br />

lot hôtel ???<br />

Villa<br />

Terrain nu<br />

Clinique pas<br />

encore<br />

fonctionnelle<br />

Complexe<br />

hôtelier<br />

Place du<br />

souvenir<br />

bateau le<br />

Joola<br />

Deux<br />

monuments<br />

Pierre <strong>de</strong><br />

sable<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Inachevé<br />

Terrassement<br />

En chantier<br />

Terrain nu<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé


Lots<br />

#<br />

41<br />

42<br />

43<br />

44<br />

45<br />

46<br />

47<br />

48<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Libanais<br />

Sénégalaise<br />

Libanais<br />

Sénégalaise<br />

F<br />

-<br />

M<br />

-<br />

M<br />

M<br />

M<br />

-<br />

Femme<br />

d’affaires<br />

-<br />

Commerçant<br />

-<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Juriste<br />

Ensemble<br />

démontable<br />

<strong>de</strong> jeux<br />

Kay bondé<br />

Station<br />

d’épuration<br />

Parcours<br />

Sportif<br />

Chantier<br />

Hôtel<br />

Terrou-Bi<br />

Restaurant<br />

Relais<br />

Sportif<br />

Magic Land<br />

Villa<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé


Lots<br />

#<br />

49<br />

50<br />

54<br />

51<br />

52<br />

53<br />

Adresse I<strong>de</strong>ntification Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Corniche<br />

Ouest<br />

Poste <strong>de</strong><br />

comman<strong>de</strong>ment<br />

briga<strong>de</strong> Iles<br />

Ma<strong>de</strong>leine<br />

Marché aux<br />

poissons<br />

Soumbédioune<br />

Sénégalaise<br />

Village artisanal<br />

Soumbédioune<br />

Ecole primaire<br />

Soumbédioune<br />

Cimetière<br />

Abbatoirs<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

-<br />

-<br />

Porte du<br />

Millénair<br />

e<br />

-<br />

-<br />

-<br />

Surveillance<br />

Ile<br />

Ma<strong>de</strong>leine<br />

Achat et<br />

vente <strong>de</strong><br />

poissons<br />

Monument<br />

Vente objet<br />

d’art<br />

-<br />

-<br />

Gran<strong>de</strong><br />

Bâtisse<br />

Marché<br />

Village<br />

artisanal<br />

Ecole<br />

Primaire<br />

Cimetière<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Inachevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé


Lots<br />

#<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6<br />

7<br />

8<br />

Lots<br />

#<br />

9<br />

10<br />

ANNEXE # 3<br />

III. GRILLE ANALYTIQUE DU DOMAINE PUBLIC MARITIME DE ATI AU<br />

MARCHE AUX POISSSONS DE HANN YARAAX<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Sénégalaise<br />

?<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Libanaise<br />

?<br />

Libanaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

?<br />

M<br />

M<br />

M<br />

?<br />

F<br />

M<br />

Import-export<br />

riz<br />

?<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

émigré<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

?<br />

Femme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Hôtel<br />

Sokhamon<br />

Villa<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Libanaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

---<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

---<br />

Villa<br />

Sporting<br />

Club<br />

Villa<br />

Bureaux<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Achevé<br />

Achevé


11<br />

12<br />

13<br />

14<br />

15<br />

16<br />

Lots<br />

#<br />

17<br />

18<br />

19<br />

20<br />

21<br />

22<br />

23<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Boulevard<br />

Roosevelt<br />

Avenue <strong>de</strong>s<br />

Diambars<br />

Rue Pasteur<br />

---<br />

Libanaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

---<br />

M<br />

M<br />

M<br />

---<br />

---<br />

---<br />

Commerçant<br />

Cadre<br />

Cadre<br />

---<br />

---<br />

---<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Camp<br />

Militaire<br />

Hôpital<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Rue Pasteur<br />

Rue Pasteur<br />

Rue Pasteur<br />

Rue Pasteur<br />

Rue Pasteur<br />

Rue Pasteur<br />

Rue Pasteur<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Libanaise<br />

Libanaise ?<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

-<br />

---<br />

M<br />

?<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Institut <strong>de</strong><br />

recherche<br />

medical<br />

---<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

?<br />

Cadres<br />

Cadres<br />

Cadres<br />

Vaste<br />

complexe<br />

Hôtel Cap<br />

Manuel<br />

Clinique du<br />

Cap<br />

Clinique la<br />

Vision<br />

Camp<br />

militaire<br />

cap manuel<br />

Villas<br />

Villas<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Terrassements<br />

Achevé<br />

Terrassements<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé


24<br />

Lots<br />

#<br />

25<br />

26<br />

27<br />

28<br />

29<br />

30<br />

31<br />

32<br />

Rue Pasteur<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

Cadre ?<br />

Parcours<br />

Sportif du<br />

Cap<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Européenne<br />

Marocaine<br />

Ivoirienne<br />

Français<br />

Libanais<br />

Libanais<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Cadre<br />

Roi du Maroc<br />

Cadre<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Ancien<br />

Ministre<br />

Pêcheurs<br />

Villa <strong>de</strong><br />

luxe<br />

Hôtel<br />

Gorée<br />

Villa <strong>de</strong><br />

luxe<br />

Hôtel<br />

Savana<br />

Terrain <strong>de</strong><br />

jeux<br />

Caesar<br />

Villa <strong>de</strong><br />

luxe<br />

Villa<br />

Patrimoine<br />

Bâti <strong>de</strong><br />

l’Etat ( ?)<br />

Huttes<br />

précaires<br />

Inachevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Achevé<br />

en chantier<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Inachevé


Lots<br />

#<br />

33<br />

34<br />

35<br />

36<br />

37<br />

38<br />

39<br />

40<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Sénégalo<br />

Libanaise<br />

Sénégalaise<br />

Française<br />

Française<br />

Française<br />

-<br />

-<br />

-<br />

M<br />

F<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

Ecologiste<br />

Ménagère<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

Hôtel<br />

Oceanium<br />

Mo<strong>de</strong>ste<br />

Habitation<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

A moitié en ruines<br />

Achevé


49<br />

Lots<br />

#<br />

41<br />

42<br />

43<br />

44<br />

45<br />

46<br />

47<br />

48<br />

Lots<br />

#<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

Route<br />

Corniche Est<br />

-<br />

-<br />

-<br />

Sénégalais et<br />

Etrangers<br />

Italien<br />

Italien<br />

Sénégalaise<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

M<br />

M<br />

M<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Commerçant<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Hôtel<br />

Teranga<br />

Hôtel<br />

Lagon I<br />

Hôtel<br />

Lagon II<br />

Echoppe<br />

objets d’art<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Sénégalais<br />

-<br />

M<br />

-<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

-<br />

Hôtel<br />

Monaco<br />

Plage<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Inachevé<br />

-<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux<br />

<strong>de</strong> construction<br />

Achevé


50<br />

Lots<br />

#<br />

57<br />

58<br />

59<br />

60<br />

61<br />

62<br />

63<br />

64<br />

Lots<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

#<br />

65<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

66<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

67 Plage <strong>de</strong><br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalais<br />

M<br />

F<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Cadre<br />

?<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Cadre<br />

Maire<br />

Commerçant<br />

Cadre<br />

Cadre<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Délégué <strong>de</strong><br />

quartier<br />

Hôtel Voile<br />

d’Or<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Villa<br />

Villa<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Achevé<br />

Achevé


Yarakh Sénégalaise M Officier en<br />

retraite<br />

68 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh Sénégalaise M Avocat<br />

69 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Sénégalaise M Transitaire<br />

70 Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Sénégalaise M Cadre<br />

71 Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Sénégalaise M Cadre<br />

72 Yarakh Française M Homme<br />

d’affaires<br />

Lots<br />

#<br />

73<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

74<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

75 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

76 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

77 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

78 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

79 Yarakh<br />

80<br />

Villa Achevé<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Club <strong>de</strong><br />

détente<br />

CVD<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Européenne<br />

Sénégalaise<br />

Française<br />

Sénégalaise<br />

M<br />

M<br />

M<br />

M<br />

F<br />

M<br />

M<br />

M<br />

Cadre<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Cadre<br />

Cadre<br />

Femme<br />

d’affaires<br />

?<br />

Homme<br />

d’affaires<br />

Ven<strong>de</strong>ur<br />

pièces<br />

détachées<br />

auto<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Villa<br />

Club <strong>de</strong><br />

détente<br />

ADP<br />

Villa<br />

Usine <strong>de</strong><br />

pêche<br />

Royal<br />

Pêche<br />

Villa à<br />

moitié<br />

détruite<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

Achevé<br />

A moitié détruit


Lots<br />

#<br />

81<br />

82<br />

Adresse Nationalité Sexe Occupation Type<br />

d’habitat<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

83 Plage <strong>de</strong><br />

Yarakh<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

Sénégalaise<br />

F<br />

F<br />

--<br />

mareyeuses<br />

Femme<br />

d’affaires<br />

Vente <strong>de</strong><br />

poissons<br />

Cabanon<br />

Usine <strong>de</strong><br />

pêche<br />

Hann<br />

Fishing<br />

Halles<br />

Etat <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />

construction<br />

Inachevé<br />

Achevé<br />

Presque Achevé


Réf.<br />

Réalisations<br />

envisagées<br />

Marchés <strong>de</strong> l’Anoci<br />

Type <strong>de</strong><br />

marché<br />

Mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

passation<br />

Date<br />

Date prévue<br />

prévue <strong>de</strong><br />

d'attribution<br />

lancement<br />

Agence Nationale <strong>de</strong> l'Oci<br />

controle et<br />

surveillance <strong>de</strong>s<br />

travaux <strong>de</strong> la route Prestations<br />

C_ANOCI_001<br />

Avenant<br />

place bienvenu- Intellectuelles<br />

mosquée <strong>de</strong> la<br />

divinité-mamelles<br />

Travaux<br />

complémentaire<br />

01/01/2008 01/02/2008<br />

relatifs a la finition<br />

Marché par<br />

T_ANOCI_002 <strong>de</strong> l'aménagement Travaux Entente 01/01/2008 01/02/2008<br />

et <strong>de</strong> l'extension <strong>de</strong><br />

la voie <strong>de</strong><br />

dégagement nord<br />

Travaux<br />

complémentaires<br />

Directe<br />

relatifs au projet<br />

Marché par<br />

T_ANOCI_011 d'élargissement, Travaux Entente 01/01/2008 01/02/2008<br />

d'aménagement et<br />

d'embellissment <strong>de</strong><br />

la corniche ouest<br />

Directe<br />

Décoration <strong>de</strong> la<br />

Marché par<br />

S_ANOCI_010 trémie <strong>de</strong> Services Entente 01/01/2008 01/02/2008<br />

bienvenue<br />

Travaux<br />

complémentaires<br />

relatifs à la finition<br />

<strong>de</strong> l'aménagement<br />

<strong>de</strong> la corniche<br />

Directe<br />

ouest à dakar:<br />

Marché par<br />

T_ANOCI_003 section entre la Travaux Entente 01/01/2008 01/02/2008<br />

place bienvenue et<br />

la pharmacie <strong>de</strong>s<br />

mamelles en<br />

passant par la<br />

mosquée <strong>de</strong> la<br />

divinité<br />

Directe<br />

Elargissement et<br />

T_ANOCI_004 aménagement <strong>de</strong> la Travaux<br />

route <strong>de</strong> ouakam<br />

Appel d'Offre<br />

15/04/2008 30/04/2008<br />

Internationale<br />

Controle et<br />

C_ANOCI_005 supervision <strong>de</strong>s<br />

travaux<br />

Prestations Appel d'Offre<br />

31/03/2009 01/05/2009<br />

Intellectuelles Internationale


d'élargissement et<br />

d'aménagement <strong>de</strong><br />

la route <strong>de</strong> ouakam<br />

Controle et<br />

supervision <strong>de</strong>s<br />

travaux <strong>de</strong> la route<br />

Place millénaire-<br />

C_ANOCI_007 croisement seven<br />

up y compris la<br />

construction <strong>de</strong><br />

cinq trémies et<br />

tunnel<br />

élargissement et<br />

Appel <strong>public</strong> à<br />

Prestations<br />

manifestion 08/09/2008 08/11/2008<br />

Intellectuelles<br />

d'interêt<br />

aménagement <strong>de</strong> la<br />

route place<br />

millénaire-<br />

T_ANOCI_007 croisement seven<br />

up y compris la<br />

construction <strong>de</strong><br />

cinq trémies et<br />

tunnel<br />

Elargissement et<br />

Travaux<br />

Appel d'Offre<br />

15/10/2008 08/12/2008<br />

Internationale<br />

aménagement <strong>de</strong> la<br />

route méridien<br />

T_ANOCI_008<br />

Travaux<br />

prési<strong>de</strong>nt-aéroport<br />

y compris le virage<br />

océan<br />

Controle et<br />

surveillance <strong>de</strong>s<br />

Appel d'Offre<br />

15/04/2008 08/07/2008<br />

Internationale<br />

travaux <strong>de</strong> la route Prestations Appel d'Offre<br />

C_ANOCI_009<br />

15/03/2008 01/05/2008<br />

méridien prési<strong>de</strong>nt Intellectuelles Internationale<br />

aéroport y compris<br />

virage océan<br />

Elargissement et<br />

aménagement <strong>de</strong> la<br />

route <strong>de</strong>s<br />

mamelles-<br />

T_ANOCI_006<br />

Travaux<br />

Méridien prési<strong>de</strong>nt<br />

y compris la<br />

corniche <strong>de</strong>s<br />

almadies<br />

Contrôle et<br />

supervision <strong>de</strong> la<br />

route <strong>de</strong>s<br />

Appel d'Offre<br />

07/10/2008 01/12/2008<br />

Internationale<br />

mamelles- Prestations<br />

C_ANOCI_011<br />

SQBC<br />

Méridien prési<strong>de</strong>nt Intellectuelles<br />

y compris la<br />

corniche <strong>de</strong>s<br />

almadies<br />

18/09/2008 05/11/2008


Audit <strong>de</strong>s comptes<br />

C_ANOCI_012 <strong>de</strong> la Voie <strong>de</strong><br />

Dégagement Nord<br />

Prestations<br />

SQBC 17/09/2008 03/11/2008<br />

Intellectuelles


<strong>Le</strong><br />

littoral<br />

marin :<br />

un enjeu<br />

<strong>de</strong><br />

pouvoir


Cas typiques <strong>de</strong> privatisation du Dpm

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