OBJET D'ÉTUDE CONSACRÉ À LA POÉSIE - Lycée Pablo Neruda ...
OBJET D'ÉTUDE CONSACRÉ À LA POÉSIE - Lycée Pablo Neruda ...
OBJET D'ÉTUDE CONSACRÉ À LA POÉSIE - Lycée Pablo Neruda ...
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Première S-SI, descriptif des lectures et activités, année 2007-2008<br />
<strong>OBJET</strong> D’ÉTUDE <strong>CONSACRÉ</strong> <strong>À</strong> <strong>LA</strong> <strong>POÉSIE</strong> : LES AVATARS DU SONNET<br />
Approche d’une oeuvre intégrale : Joachim du Bellay, Les Regrets, Les Antiquités de<br />
Rome, 1558.<br />
Approche de l’Humanisme et de la Pléiade ; la satire et l’élégie.<br />
Réflexion sur les formes et les fonctions du texte poétique, par l’intermédiaire de<br />
l’évolution du sonnet, poème à forme fixe.<br />
Lectures proposées dans les deux recueils :<br />
“Heureux qui comme Ulysse (...)”, 31, Les Regrets, texte complémentaire.<br />
“Je n’écris point d’amour (...)”, 79, Les Regrets, lecture analytique.<br />
“Il fait bon voir, Magny (...)”, 133, Les Regrets, texte complémentaire.<br />
“Nouveau venu (...)”, 3, Les Antiquités de Rome, lecture analytique.<br />
“Comme on passe en été (...)”, 14, Les Antiquités de Rome, lecture analytique.<br />
Lectures proposées dans le cadre d’un groupement de textes :<br />
“Le Dormeur du val”, Arthur Rimbaud, Poésies, 1870, lecture analytique.<br />
“Le Crapaud”, Tristan Corbière, Les Amours jaunes, 1873, texte complémentaire.<br />
“Les Colchiques”, Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913, lecture analytique.<br />
“Allégeance”, René Char, Fureur et Mystère, 1947, texte complémentaire<br />
Documents audio-visuels :<br />
Poésies sonores de Raoul Hausmann et Bernard Heidsieck, auditions de poèmes sur les<br />
sites internet “Vive Voix” et “Archivox”, projection de créations poétiques audio-visuelles.<br />
<strong>Lycée</strong> <strong>Pablo</strong>-<strong>Neruda</strong>, Dieppe, M. Duhornay 1
Première S-SI, descriptif des lectures et activités, année 2007-2008<br />
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,<br />
Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,<br />
Et puis est retourné, plein d'usage et raison,<br />
Vivre entre ses parents le reste de son âge !<br />
Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village<br />
Fumer la cheminée, et en quelle saison<br />
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,<br />
Qui m'est une province, et beaucoup davantage ?<br />
Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux,<br />
Que des palais Romains le front audacieux,<br />
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine :<br />
Plus mon Loire gaulois, que le Tibre latin,<br />
Plus mon petit Liré, que le mont Palatin,<br />
Et plus que l'air marin la douceur angevine.<br />
Joachim du Bellay, Les Regrets, 31, 1558<br />
<strong>Lycée</strong> <strong>Pablo</strong>-<strong>Neruda</strong>, Dieppe, M. Duhornay 2
Première S-SI, descriptif des lectures et activités, année 2007-2008<br />
Je n'écris point d'amour, n'étant point amoureux,<br />
Je n'écris de beauté, n'ayant belle maîtresse,<br />
Je n'écris de douceur, n'éprouvant que rudesse,<br />
Je n'écris de plaisir, me trouvant douloureux :<br />
Je n'écris de bonheur, me trouvant malheureux,<br />
Je n'écris de faveur, ne voyant ma Princesse,<br />
Je n'écris de trésors, n'ayant point de richesse<br />
Je n'écris de santé, me sentant langoureux :<br />
Je n'écris de la Cour, étant loin de mon Prince,<br />
Je n'écris de la France, en étrange province,<br />
Je n'écris de l'honneur, n'en voyant point ici :<br />
Je n'écris d'amitié, ne trouvant que feintise,<br />
Je n'écris de vertu n'en trouvant point aussi,<br />
Je n'écris de savoir, entre les gens d'Eglise.<br />
Joachim du Bellay, Les Regrets, 79, 1558<br />
Il fait bon voir, Magny, ces couillons magnifiques,<br />
Leur superbe arsenal, leurs vaisseaux, leur abord,<br />
Leur Saint-Marc, leur Palais, leur Realte, leur port,<br />
Leurs changes, leurs profits, leur banque et leurs trafiques :<br />
Il fait bon voir le bec de leurs chapprons antiques,<br />
Leurs robes à grand manche et leurs bonnets sans bord,<br />
Leur parler tout grossier, leur gravité, leur port,<br />
Et leurs sages avis aux affaires publiques.<br />
<strong>Lycée</strong> <strong>Pablo</strong>-<strong>Neruda</strong>, Dieppe, M. Duhornay 3
Première S-SI, descriptif des lectures et activités, année 2007-2008<br />
Il fait bon voir de tout leur sénat ballotter,<br />
Il fait bon voir partout leurs gondoles flotter,<br />
Leurs femmes, leurs festins, leur vivre solitaire :<br />
Mais ce que l’on en doit le meilleur estimer,<br />
C’est quand ces vieux cocus vont épouser la mer,<br />
Dont ils sont les maris et le Turc l’adultère.<br />
Joachim du Bellay, Les Regrets, 133, 1558<br />
Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome<br />
Et rien de Rome en Rome n'aperçois,<br />
Ces vieux palais, ces vieux arcs que tu vois,<br />
Et ces vieux murs, c'est ce que Rome on nomme.<br />
Vois quel orgueil, quelle ruine : et comme<br />
Celle qui mit le monde sous ses lois,<br />
Pour dompter tout, se dompta quelquefois,<br />
Et devint proie au temps, qui tout consomme.<br />
Rome de Rome est le seul monument,<br />
Et Rome Rome a vaincu seulement.<br />
Le Tibre seul, qui vers la mer s'enfuit,<br />
Reste de Rome. O mondaine inconstance !<br />
Ce qui est ferme, est par le temps détruit,<br />
Et ce qui fuit, au temps fait résistance.<br />
Joachim du Bellay, Les Antiquités de Rome, 3, 1558<br />
Comme on passe en été le torrent sans danger,<br />
Qui soulait en hiver être roi de la plaine,<br />
Et ravir par les champs d'une fuite hautaine<br />
L'espoir du laboureur et l'espoir du berger :<br />
Comme on voit les couards animaux outrager<br />
Le courageux lion gisant dessus l'arène,<br />
Ensanglanter leurs dents, et d'une audace vaine<br />
Provoquer l'ennemi qui ne se peut venger :<br />
Et comme devant Troie on vit des Grecs encor<br />
Braver les moins vaillants autour du corps d'Hector :<br />
Ainsi ceux qui jadis soulaient, à tête basse,<br />
Du triomphe romain la gloire accompagner,<br />
Sur ces poudreux tombeaux exercent leur audace,<br />
Et osent les vaincus les vainqueurs dédaigner.<br />
Joachim du Bellay, Les Antiquités de Rome, 14, 1558<br />
<strong>Lycée</strong> <strong>Pablo</strong>-<strong>Neruda</strong>, Dieppe, M. Duhornay 4
Première S-SI, descriptif des lectures et activités, année 2007-2008<br />
LE DORMEUR DU VAL<br />
C'est un trou de verdure où chante une rivière<br />
Accrochant follement aux herbes des haillons<br />
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,<br />
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.<br />
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,<br />
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,<br />
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,<br />
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.<br />
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme<br />
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :<br />
Nature, berce-le chaudement : il a froid.<br />
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;<br />
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine<br />
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.<br />
LE CRAPAUD<br />
Un chant dans une nuit sans air…<br />
La lune plaque en métal clair<br />
Les découpures du vert sombre.<br />
…Un chant ; comme un écho, tout vif<br />
Enterré, là, sous le massif…<br />
- Ça se tait : Viens, c'est là, dans l'ombre…<br />
- Un crapaud ! - Pourquoi cette peur,<br />
Près de moi, ton soldat fidèle !<br />
Vois-le, poète tondu, sans aile,<br />
Rossignol de la boue… - Horreur ! -<br />
… Il chante. - Horreur !! - Horreur pourquoi ?<br />
Vois-tu pas son œil de lumière …<br />
Non : il s'en va, froid, sous sa pierre.<br />
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .<br />
Bonsoir - ce crapaud-là c'est moi.<br />
Octobre 1870.<br />
Arthur Rimbaud, Poésies.<br />
( Ce soir, 20 juillet.)<br />
Tristan Corbière, Les Amours jaunes, 1873.<br />
<strong>Lycée</strong> <strong>Pablo</strong>-<strong>Neruda</strong>, Dieppe, M. Duhornay 5
Première S-SI, descriptif des lectures et activités, année 2007-2008<br />
Les Colchiques<br />
Le pré est vénéneux mais joli en automne<br />
Les vaches y paissant<br />
Lentement s’empoisonnent<br />
Le colchique couleur de cerne et de lilas<br />
Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-là<br />
Violâtres comme leur cerne et comme cet automne<br />
Et ma vie pour tes yeux lentement s’empoisonne<br />
Les enfants de l’école viennent avec fracas<br />
Vêtus de hoquetons et jouant de l’harmonica<br />
Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères<br />
Filles de leurs filles et sont couleurs de tes paupières<br />
Qui battent comme les fleurs battent au vent dément<br />
Le gardien du troupeau chante tout doucement<br />
Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent<br />
Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l’automne<br />
Allégeance<br />
Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913 .<br />
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il<br />
n’est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l’aima ?<br />
Il cherche son pareil dans le vœu des regards. L’espace qu’il parcourt est ma fidélité. Il<br />
dessine l’espoir et léger l’éconduit. Il est prépondérant sans qu’il y prenne part.<br />
Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma solitude est son trésor.<br />
Dans le grand méridien où s’inscrit son essor, ma liberté le creuse.<br />
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il<br />
n’est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l’aima et<br />
l’éclaire de loin pour qu’il ne tombe pas ?<br />
René Char, Fureur et Mystère, 1947.<br />
<strong>Lycée</strong> <strong>Pablo</strong>-<strong>Neruda</strong>, Dieppe, M. Duhornay 6