Tennis Info n°443 - Juillet-Août 2012 - Fédération Française de Tennis

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Entretien Alizé Cornet “J’ai retrouvé cette flamme !” En remportant le second titre de sa carrière le 17 juin dernier à Bad Gastein, Alizé Cornet, 22 ans, a mis fin à une période de disette de près de quatre ans. La Niçoise revient sur ce parcours fait de hauts et de bas. Elle explique comment, avec Georges Goven et Pierre Cherret, elle a retrouvé ses sensations et son instinct de combattante. 36 n TENNIS INFO N°443 n Juillet 2012 Il y a eu beaucoup d’émotions lorsque vous avez remporté le tournoi de Bad Gastein. Quelle a été votre première pensée ? Il y a eu plusieurs choses. Déjà, la joie d’avoir gagné : ça ne m’était plus arrivé depuis quatre ans. Tous les moments difficiles vécus pendant cette période me sont revenus à l’esprit. Je me suis souvenue que j’avais beaucoup travaillé, je me suis dit que ça payait enfin. Tout est remonté à la surface à ce moment-là, c’était vraiment très émouvant. Justement, quel regard portez-vous sur ces quatre dernières années ? Début 2009, j’ai atteint le meilleur classement de ma carrière. Mais je me suis blessée à l’épaule, ce qui a un peu coupé mon élan. Après ça, j’ai eu du mal à retrouver la motivation. J’étais déjà arrivée tellement haut que je n’ai pas su me relancer pour aller plus haut encore. Quand on n’a pas de motivation au quotidien, dans le tennis, on chute vite. C’est ce qui m’est arrivé. J’ai gagné peu de matchs à partir de mi-2009. Et ça a duré, avec des hauts et des bas, bien sûr. Je me suis tout de même maintenue dans le Top 100. Puis, il y a quatre mois, j’ai commencé à rega-
“J’espère revenir dans le Top 50 le plus vite possible.” gner beaucoup de matchs. Le travail accompli avec Georges Goven et Pierre Cherret a commencé à porter ses fruits. Depuis, j’enchaîne beaucoup plus de victoires. Bien plus en tout cas que ces dernières années (sourire). Vous avez connu des moments difficiles pendant cette période… Oui. J’étais montée très haut très jeune. Du coup, on m’attendait un peu au tournant alors que je suis toujours restée dans le Top 100. Les gens pensaient que j’étais tombée au fond du trou. Mais je continuais à m’accrocher, à travailler, même si tout le monde ne le voyait pas. C’est pour ça que j’étais aussi émue en gagnant ce tournoi. J’ai été tenace, je n’ai jamais lâché, même si j’ai eu plusieurs fois envie d’arrêter le tennis. J’ai fait des sacrifices en quittant Nice et le Sud pour m’entraîner à Roland-Garros. Je devais quand même croire un petit peu en moi. Quand je vois la joie que j’ai ressentie à Bad Gastein, ça valait le coup. Pourquoi considérez-vous que Bad Gastein est votre tournoi préféré ? C’est un tournoi vraiment très, très différent des autres. Il y a les montagnes autour, c’est très relaxant. Il n’y a pas de pression médiatique. Les gens sont adorables. L’ambiance est très familiale, bon enfant, décontractée. Je trouve aussi que les Autrichiens sont très gentils. Je me sens comme à la maison. En cinq ans, je suis un peu devenue la mascotte. Les gens de l’organisation, la directrice du tournoi, tout le monde a des super relations avec moi. Quand j’ai gagné, c’était un bonheur, parce que je savais que tous étaient contents. Vous avez parfaitement maîtrisé votre tournoi en ne perdant aucun set. Comment vous êtes-vous sentie ? Paradoxalement, je n’ai pas très bien commencé le tournoi. Lors de mon premier tour, gagné 7/5, 7/5 contre Elina Gallovits- Hall, je ne me trouvais pas très bien dans mon tennis. J’avais du mal à m’adapter aux conditions, à l’altitude… Comme il a beaucoup plu au début, je n’ai pas pu m’entraîner beaucoup. Je n’ai donc pas abordé le tournoi avec un état d’esprit super positif. Une fois passé ce premier tour, je me suis posée les bonnes questions : « Est-ce que tu veux gagner ce tournoi ? Est-ce que tu veux aller loin ? Ou bien veux-tu arrêter et aller te préparer pour Wimbledon ? » Je me suis dit que ça valait le coup, qu’il fallait s’accrocher, que mon jeu pouvait s’adapter à ces conditions. Après, j’étais dans un meilleur état d’esprit, j’ai beaucoup mieux joué et j’ai enchaîné quatre très belles victoires. Je suis fière d’avoir réagi comme ça. Votre jeu est très efficace sur terre battue puisque c’était votre cinquième finale sur cette surface. Qu’est-ce que cela vous inspire ? C’était ma cinquième finale et la seconde victoire. Je la voulais vraiment celle-là. J’ai réussi à bien gérer mes émotions. Aborder une finale, ce n’est jamais évident. Je suis très contente d’y être parvenue, c’est de bon augure pour la suite. C’est aussi votre premier titre avec Georges Goven comme entraîneur. Que vous apporte-t-il ? Il m’entraîne depuis septembre dernier. Ce qui est vraiment génial avec Georges, c’est qu’en termes professionnels, il m’apporte énormément par sa connaissance du tennis féminin. C’est un bon tacticien. On communique beaucoup. Ce qui est vraiment important, c’est qu’il m’accepte comme je suis. Il part du principe que je suis une teigne sur le court, que je peux dire n’importe quoi, évacuer la pression en parlant. Il n’a jamais essayé de me changer, il a compris que c’était ma manière d’être, que ma manière de gagner, c’était d’être colérique sur le court. C’est pourquoi je me sens complètement naturelle avec lui. C’est très, très important, c’est comme ça que je suis devenue 11 e mondiale. J’ai la rage de vaincre. Il est là pour me soutenir, pas pour me juger, et c’est vraiment très agréable. Vous pensez que vous avez trop cherché à vous canaliser ? Oui, oui. Ça n’est pas toujours venu de moi. À un moment, dans ma carrière, mes entraîneurs m’ont demandé d’essayer de me calmer. On cherchait des solutions pour me remettre en selle. Mais la solution n’était pas là. Sur le court, je suis une nerveuse, une colérique. Il faut que ça sorte. Crier, parler, déblatérer, peu importe ! En essayant de me canaliser, on a un peu éteint la flamme qui faisait que je jouais bien au tennis. En retrouvant mon tempérament de feu, j’ai retrouvé cette flamme, aussi (rires). Les choses négatives que j’exprime, je les évacue très, très vite. J’ai 22 ans et je me connais, je sais ce qui est bon pour moi. Et les gens qui travaillent avec moi le savent aussi. Avez-vous travaillé certains points techniques aussi ? Oui, avec Georges et Pierre Cherret. Pierre s’est occupé de moi l’été dernier pour la tournée américaine. On avait commencé un gros boulot technique. Je partais vraiment de très loin, car j’avais plein de mauvaises habitudes. Pierre m’a reprise en main, il m’a fait travailler mon coup droit, mon revers. Point par point. Puis Georges a pris part à cet important chantier. Désormais, qu’il s’agisse de service, coup droit ou revers, j’ai vraiment une technique propre sur laquelle je peux m’appuyer. On a travaillé dans la bonne direction. Car j’ai toujours énormément bossé, mais pas toujours dans la bonne direction. Comment voyez-vous la suite ? Quels sont vos objectifs, vos envies ? Mon envie, c’est de gagner des matchs sur gazon. J’ai dû annuler le tournoi de préparation à ‘s-Hertogenbosch où je devais disputer les qualifications. J’espère qu’à Wimbledon je vais pouvoir gagner quelques matchs. Le gazon, ce n’est pas trop ma surface, mais j’ai progressé, techniquement et physiquement. Mon jeu peut convenir au gazon, mais il faut que je sois prête dans ma tête. À plus long terme, j’espère revenir dans le top 50 le plus vite possible. C’est un objectif après lequel je cours depuis un bon moment déjà. Là, je ne me suis jamais sentie aussi proche de l’atteindre. Propos recueillis par Benjamin Waldbaum le lundi 18 juin 2012. Repères n Née le 22 janvier 1990 à Nice n 1,73 m • 60 kg n Droitière, revers à deux mains n Entraîneurs : Georges Goven et Pierre Cherret n Classement WTA (au 18 juin) : 58 e n Meilleur classement : 11 e (le 16 février 2009) n Palmarès : Deux titres WTA : Budapest 2008, Bad Gastein 2012 ; Trois finales WTA : Acapulco et Rome 2008, Strasbourg 2012 ; Grand Chelem : huitième de finaliste à l’Open d’Australie 2009, seizième de finaliste à Roland-Garros 2008, l’US Open 2007 et 2008 et l’Open d’Australie 2011. Juillet 2012 n TENNIS INFO N°443 n 37
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