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constituaient les marges internes. Cette exigence de continuité territoriale impliqua la
mise en place de stratégies visant d’une part, à insérer les pouvoirs locaux dans des
réseaux de fidélités désormais globaux, et d’autre part, à accroître les formes
d’encadrement territorial. Or, c’est par l’affirmation de leur potestas regis sur les lieux
(aussi bien loca dominica que loca sancta) qui constituaient l’objet de la relation
féodale et l’enjeu véritable de la fidélité 25 , que les Plantagenêt sont ainsi parvenus à
créer un territoire en rhizome au profit du pouvoir central 26 . La topographie du pouvoir
des Plantagenêt témoigne donc de la transformation de l’échelle des territoires
politiques et la mise en place d’un ordre « impérial ». Au final on peut donc se
demander si l’essor de la monarchie anglaise au XII e siècle n’a pas été le produit de sa
transformation en un empire, qui imposait une maîtrise accrue des territoires dominés.
Ainsi, on a pu observer que la politisation et l’institutionnalisation des rapports
politiques ont été des phénomènes corollaires à la formation de l’empire des
Plantagenêt. S’ils restaient rois en Angleterre, duc en Normandie, en Aquitaine et en
Bretagne et comtes en Anjou, les Plantagenêt n’avaient pas pour autant des conceptions
radicalement différentes de la nature et de l’exercice de leur pouvoir dans chacun de
leurs territoires. Certes la suzeraineté des Capétiens n’a cessé de s’appesantir tout au
long de la période, par la ritualisation juridique croissante des hommages 27 , mais la
réalité de leur ancrage territorial est restée très contrastée. Ainsi ce qu’on a appelé la
« féodalisation » du pouvoir en Aquitaine, en Pays de Galles et en Ecosse 28 , traduit bien
la tentative de normalisation des rapports de pouvoir à l’intérieur et à l’extérieur des
frontières de l’empire. C’est à ce titre que l’expérience de la multi-territorialité
impériale apparaît comme un creuset d’innovations techniques en matière de
gouvernement comme de construction, et notamment en terme d’intégration des
fidélités, à la fois vassaliques et domestiques dans des réseaux de pouvoir à large
échelle. Les empires féodaux, des XII e et XIII e siècles, que ce soit l’empire Plantagenêt
ou Capétien, ont donc été des étapes essentielles dans la mise en place de nouveaux
25 ZIMMERMANN, M., « Et je t’empouvoirrai (potestasvitum te farei) : a propos des relations entre
fidélités et pouvoir en Catalogne au XI e siècle », Médiévales, 10 (1986), p. 17-36.
26 DELEUZE, G. et GUATTARI, F., Capitalisme et schizophrénie [I] L'anti-Oedipe, 1972, p. 13.
27 VAN EICKELS, K., « Homagium and Amicitia : Rituals of Peace and their Significance in the Anglo-
French Negotiations of the 12th Century », Francia, 24: 1 (1997), p. 133-140.
28 DEBORD, A., La société laïque dans les pays de la Charente : Xe-XIIe siècles, 1984; BOUTOULLE,
F., Le duc et la société : pouvoirs et groupes sociaux dans la Gascogne bordelaise au XIIe siècle, 2007 ;
DAVIES, R. R., Conquest, coexistence and change Wales 1063-1415, 1987; BARROW, G. W. S.,
Kingship and unity Scotland 1000-1306, 1993.
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