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qu’elle ne soit entièrement reconstruite au XVIII e siècle, l’auteur des Annales signale également que le cloître possédait une fontaine dont la vasque de plomb était alimentée depuis une source éloignée du monastère par des canalisation également en plomb 450 . Malheureusement, aucun vestige de ces canalisations n’a été conservé. L’impact de ce don résonne encore plusieurs siècles après dans diverses sources de l’ordre. En témoigne un ancien poème qui distingue Henri II parmi les plus généreux donateurs de l’ordre, comme le seul à avoir fait « couvrir les toits en plomb » 451 . Il témoigne ainsi du succès de son patronage et comment il parvient à contrebalancer, dans la mémoire de ces ordres monastiques, l’image du roi meurtrier et lui substituer celle du généreux donateur et patron inégalé. Si le lien entre les donations de plomb et la politique de contrition d’Henri II apparaît nettement dans les sources, comment se fait-il que ce plomb donné provienne seulement d’Angleterre ? Pourquoi Henri II n’a-t-il pas choisi d’acquérir du plomb dans des mines continentales plus proches des monastères de Clairvaux et Grandmont ? L’étude des conditions de la production de plomb au XII e siècle en Angleterre permet d’apporter quelques éléments de réponse. 2.3.3- Le rôle de la monarchie dans la production de plomb en Angleterre durant la seconde moitié du XII e siècle Faire parvenir du plomb depuis les régions les plus septentrionales de l’Angleterre jusqu’aux monts du Limousin impliquait une logistique de transport extrêmement coûteuse. Les ressources des mines continentales pour mener à bien ces donations étaient alors indisponibles ? Rien n’est moins sûr, car si les mines de Melle en Poitou ne sont plus en activité à cette date, les mines de Mozac en Auvergne ou de Largentière en Ardèche pouvaient constituer les lieux d’approvisionnement 452 . De même, il existait des mines de plomb argentifère en Vendée, dans un lieu dit l’Essart à proximité de la Salle-le-Roi, la aula que Richard Cœur-de-Lion avait construite sur les Une page de l'histoire du clergé français au XVIIIe siècle : destruction de l'ordre et de l'abbaye de Grandmont, 1877, p. 728. 450 LEVESQUE, J. (éd.), Annales ordinis Grandimontis. Nunc primùm editi & in hanc epitomen redacti, 1662, p. 96 : Claustrum valde oblongum concameratum remansit, cum Capitulo, cuius nuper subsellia de novo fabricata fuere, in ipso Claustro fons in cratere plumbeo a remota scaturigine aquam per plumbeos canales adductam haurit, etc. 451 Ibid., p. 141 : Henricus, nulli regum pietate secundus plumbea tecta locans, ius dedit atque solum. 452 FILLON, B. M., « Un atelier monétaire de Richard Cœur de Lion », dans Poitou et Vendée: études historiques et artistiques, 1887, p. 16-18 ; TEREYGEOL, F., « Les mines d’argent carolingiennes de Melle », doctorat non publiée, Paris 1, 2001 ; BAILLY-MAÎTRE, M., L'argent. Du minerai au pouvoir dans la France médiévale, 2002 ; TEREYGEOL, F., « Aux sources des matériaux: les mines de plomb », dans L'homme et la matière: l'emploi du plomb et du fer dans l'architecture gothique, 2009, p. 83-92. 622

étangs de l’abbaye d’Orbestier (voir chapitre 2) 453 . En réalité, on ne peut comprendre ces donations que si on les replace dans le contexte des réformes monétaires d’Henri II et de la réorganisation de la production de plomb dans les domaines de la Couronne anglaise dans le dernier quart du XII e siècle. Le système d’exploitation des mines d’argent anglaises Au Moyen Âge, la production de plomb, comme celle du cuivre, était étroitement liée à la production d’argent. En Angleterre, au XII e siècle, ces métaux étaient extraits principalement de la galène argentifère, dont l’exploitation était étroitement contrôlée par le pouvoir royal en vertu de droits hérités de la monarchie anglo-saxonne 454 . L’existence de mines de plomb argentifère en Angleterre était connue depuis l’antiquité et semble n’avoir jamais cessé dans certaines régions. Ainsi dans le Swaldale, toujours exploitée au moment où Bède le Vénérable relate l’histoire (vers 672) de marchands de passage à Catterick pour acheter du plomb aux mineurs 455 . Le droit régalien de monopole sur les minerais du royaume était alors distinct de la possession de la terre et du droit de travailler les minerais qui était généralement détenu par des communautés de mineurs. Ce droit de régale, issu du monopole de la frappe de monnaie, comporte des similarités avec le droit minier carolingien qui connaît un nouvel essor à partir du XI e siècle, en relation avec la croissance des mines dans l’Empire Romain Germanique, et la résurgence du droit romain 456 . L’affaiblissement des pouvoirs centraux n’avait cependant pu empêcher la dissémination de ce droit en multiples concessions, comme c’est le cas, par exemple, des minaria de Weredala que le roi Étienne de Blois donne à Hugues du Puiset, évêque de Durham en 1135, et qu’Henri II lui confirme à son avènement 457 . L’exploitation de ces mines n’était donc que rarement prise en charge directement par la monarchie qui préférait affermer le 453 Exploitée par les romains, ces mines étaient vraisemblablement la principale ressource des seigneurs de Talmont, dont le château fut confisqué par Richard en 1182, avant de retrourner aux mains de Savary de Mauléon en 1200. 454 CLAUGHTON, P., « Mining law in England and Wales: understanding boundaries in the landscape », dans Sfruttamento tutela e valorizzazione del territorio dal diritto romano alla regolamentazione europea e internazionale, 2007, p. 303-317, p. 303-17. 455 FAWCETT, E. R., Lead Mining in Swaledale, 1985.p. 4-5. (épisode daté de 672) 456 NEF, J. U., « Mining and metallurgy in medieval civilisation », dans Cambridge Economic History of Europe III, Trade and Industry in the Middle Age, 1987, p. 706-717, p. 706-707, 717. Droit présent dans le code Justinien et le décret de Gratien ; V.C.H. Gloucestershire 1907, II, p.220 Le contenu des volumes est en ligne sur le site : www.victoriacountyhistory.ac.uk. 457 BLANCHARD, I. W., Mining, Metallurgy and Minting in the Middle Ages. Vol. 2: Afro-European Supremacy, 1125-1225, 2001, p. 583; V.C.H., Durham, II, p. 348, les sites d’extraction se trouvaient à Bookhope et Stanhope. 623

étangs de l’abbaye d’Orbestier (voir chapitre 2) 453 . En réalité, on ne peut comprendre<br />

ces donations que si on les replace dans le contexte des réformes monétaires d’Henri II<br />

et de la réorganisation de la production de plomb dans les domaines de la Couronne<br />

anglaise dans le dernier quart du XII e siècle.<br />

Le système d’exploitation des mines d’argent anglaises<br />

Au Moyen Âge, la production de plomb, comme celle du cuivre, était<br />

étroitement liée à la production d’argent. En Angleterre, au XII e siècle, ces métaux<br />

étaient extraits principalement de la galène argentifère, dont l’exploitation était<br />

étroitement contrôlée par le pouvoir royal en vertu de droits hérités de la monarchie<br />

anglo-saxonne 454 . L’existence de mines de plomb argentifère en Angleterre était connue<br />

depuis l’antiquité et semble n’avoir jamais cessé dans certaines régions. Ainsi dans le<br />

Swaldale, toujours exploitée au moment où Bède le Vénérable relate l’histoire (vers<br />

672) de marchands de passage à Catterick pour acheter du plomb aux mineurs 455 .<br />

Le droit régalien de monopole sur les minerais du royaume était alors distinct de<br />

la possession de la terre et du droit de travailler les minerais qui était généralement<br />

détenu par des communautés de mineurs. Ce droit de régale, issu du monopole de la<br />

frappe de monnaie, comporte des similarités avec le droit minier carolingien qui connaît<br />

un nouvel essor à partir du XI e siècle, en relation avec la croissance des mines dans<br />

l’Empire Romain Germanique, et la résurgence du droit romain 456 . L’affaiblissement<br />

des pouvoirs centraux n’avait cependant pu empêcher la dissémination de ce droit en<br />

multiples concessions, comme c’est le cas, par exemple, des minaria de Weredala que<br />

le roi Étienne de Blois donne à Hugues du Puiset, évêque de Durham en 1135, et<br />

qu’Henri II lui confirme à son avènement 457 . L’exploitation de ces mines n’était donc<br />

que rarement prise en charge directement par la monarchie qui préférait affermer le<br />

453 Exploitée par les romains, ces mines étaient vraisemblablement la principale ressource des seigneurs<br />

de Talmont, dont le château fut confisqué par Richard en 1182, avant de retrourner aux mains de Savary<br />

de Mauléon en 1200.<br />

454 CLAUGHTON, P., « Mining law in England and Wales: understanding boundaries in the landscape »,<br />

dans Sfruttamento tutela e valorizzazione del territorio dal diritto romano alla regolamentazione europea<br />

e internazionale, 2007, p. 303-317, p. 303-17.<br />

455 FAWCETT, E. R., Lead Mining in Swaledale, 1985.p. 4-5. (épisode daté de 672)<br />

456 NEF, J. U., « Mining and metallurgy in medieval civilisation », dans Cambridge Economic History <strong>of</strong><br />

Europe III, Trade and Industry in the Middle Age, 1987, p. 706-717, p. 706-707, 717. Droit présent dans<br />

le code Justinien et le décret de Gratien ; V.C.H. Gloucestershire 1907, II, p.220 Le contenu des volumes<br />

est en ligne sur le site : www.victoriacountyhistory.ac.uk.<br />

457 BLANCHARD, I. W., Mining, Metallurgy and Minting in the Middle Ages. Vol. 2: Afro-European<br />

Supremacy, 1125-1225, 2001, p. 583; V.C.H., Durham, II, p. 348, les sites d’extraction se trouvaient à<br />

Bookhope et Stanhope.<br />

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