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L’aire d’extraction de ce calcaire à grains fins, qui blanchit en durcissant au
contact de l’air s’étend de Caen aux environs d’Aubigny (voir carte 6. 15) 205 . Connue et
utilisée dès l’époque romaine, c’est surtout au Moyen Âge que se développe son
extraction. Au XII e siècle, celle-ci se fait essentiellement à ciel ouvert, dans des zones
où l’érosion est la plus active, c'est-à-dire sur les flancs des vallées. Depuis les travaux
de Laurent Dujardin, l’exploitation de la pierre de Caen au Moyen Âge est bien
connue 206 . Le succès de la diffusion de calcaire tendre et clair en Angleterre tout au long
du Moyen Âge a également fait l’objet de diverses explications.
Tout d’abord, ont été invoquées la qualité et le degré de développement des
techniques d’extraction du calcaire de Caen depuis la fin du XI e siècle. Celles-ci
auraient permis la production d’importantes quantités de pierres capables
d’approvisionner les vastes chantiers qui ont suivi la conquête de 1066, suppléant au
faible nombre de carrières et de carriers existant en Angleterre à cette date. En réalité, la
bonne connaissance des carrières de Caen et de leurs carriers qui explique plus
vraisemblablement pourquoi Lanfranc, abbé de Saint-Étienne qui devint archevêque de
Canterbury, « fait transporter par mer, avec de rapides navires » 207 de la pierre de
construction de Caen pour reconstruire la cathédrale anglaise après l’incendie de 1070.
Le manque des carrières en Angleterre à la fin du XI e siècle reflète, en réalité, la
situation de l’Occident, dont le paysage monumental se transforme en moins d’un
siècle, entraînant un développement général de l’exploitation des ressources naturelles.
L’architecture en pierre reste cependant peu développée avant le milieu du XI e siècle en
Angleterre comme le suggèrent les découvertes des archéologues britanniques qui n’ont
mis à jour qu’un petit nombre de sites maçonnés. Après la conquête, l’ouverture de
nouvelles carrières et le développement des carrières déjà exploitées à l’époque anglo-
saxonne sont en mesure d’approvisionner les multiples chantiers. Un passage de la
chronique de l’abbaye de Battle raconte ainsi comment les moines, après avoir reçu en
don du roi Guillaume le Conquérant une cargaison de pierre de Caen pour la
construction des bâtiments, découvrent peu après, grâce aux indications d’une femme
205
MUSSET, L., « La pierre de Caen: extraction et commerce (XIe-XVe siècles) », dans Pierre et Métal
dans le bâtiment au Moyen Âge, 2001, p. 220-231 (carte : fig 1, p. 221).
206
DUJARDIN, L., « L’aire de dispersion de la pierre de Caen », dans Carrières et constructions, 1992,
p. 431-444.
207
LEHMANN-BROCKHAUS, O., Lateinische Schriftquellen zur Kunst in England, Wales und
Schottland, vom Jahre 901 bis zum Jahre 1307, 1955-1960, I, p. 179, n° 664 : Vita beati Lanfranci par
Milon Crespin (cap.9 p. 46) : Et quia ante aliquot annos igne combusta fuerat [1067] a fundamentis illam
reaedificare studuit, grande opus et spatiosum. Officinas quoque usibus monachorum necessarias
aedificavit. Et quod mirum admodum sit, de Cadomo, ubi abbas exstitis, velivolis navibus per mare
transvehi faciebat quadros lapides ad aedificandum.
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