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2- Les choix résidentiels et la représentation monumentale du pouvoir Dans le chapitre 1, les analyses factorielles effectuées indiquaient que l’investissement dans les domus par les Plantagenêt concernait surtout les espaces globalement les plus faiblement militarisés (ACM 1 facteurs 2 et 3). En cartographiant ces données et en distinguant sur la carte des lieux fréquentés les différents types de résidences (carte 5.31), on peut observer que le royaume d’Angleterre était pourvu de nombreuses domus, contrairement aux territoires continentaux, à l’exception de la Normandie. S’il s’agit d’une image produite par l’inégalité documentaire, une telle dichotomie ne peut-elle être considérée que comme purement factice ? Dans quelle mesure l’effet de sources n’est-il pas également le produit de perceptions et d’organisations différentiées de l’espace ? Pour tenter de saisir les pratiques résidentielles de l’espace des Plantagenêt, nous avons cherché à les mettre en relation avec leur capacité à dominer l’espace, à le contrôler, c'est-à-dire d’une certaine manière à le gouverner. Ainsi, la manière dont les Plantagenêt ont séjourné, habité les espaces de leur empire est-elle un bon révélateur de la manière dont ils le maîtrisaient ? Dans un premier temps, il s’agira de comprendre comment s’est manifestée la domestication des constructions royales et comment celle-ci s’est articulée avec l’essor de la machine gouvernementale et avec sa curialisation. Puis dans un second temps, nous avons cherché à comparer l’espace parcouru et l’espace construit par les Plantagenêt pour saisir le rapport entre les pratiques résidentielles et la politique au sein de l’empire. La construction ne sert pas seulement en effet à abriter les séjours du roi et de la cour, la dimension architecturale des constructions sert également de langage pour exprimer la puissance princière 179 . Si ces deux aspects pratiques et symboliques ne peuvent totalement se dissocier, nous verrons toutefois que les espaces de villégiature ne coïncident pas systématiquement avec les sites où les Plantagenêt ont mis en scène une architecture monumentale et démonstrative de leur puissance. 179 RENOUX, A., « Les fondements architecturaux du pouvoir princier en France (fin IXe - début XIIIe siècle) », dans Les Princes et le Pouvoir au Moyen Âge. Actes du XXIIIe congrès de la SHMESP, 1993, p. 167-194. 464

2.1- Les résidences royales : habiter, séjourner, gouverner Alors que la question des résidences princières a été depuis quelques années un domaine de recherche dynamique, sous l’influence de la Residenzforschung allemande, l’étude des résidences royales en Angleterre commence seulement depuis peu à produire des résultats, comparables à ceux obtenus pour les Capétiens ou les ducs de Normandie 180 . Les travaux d’Annie Renoux s’inspirant de ces méthodes et de ces problématiques associant histoire des résidences et de la résidence, ont été pionniers en France, ouvrant ce champ de recherche à la fois en amont et en aval de la charnière XI e – XII e siècle 181 . Cependant, la plupart des études, en France comme en Angleterre, sont des monographies associant données archéologiques et fonds documentaires, lorsqu’il y en a 182 . Selon Annie Renoux, il ressort de ces travaux qu’il n’y a pas de concept de résidence princière clairement et durablement défini à cette date, même si une normalisation et une standardisation sont perceptibles à partir du XII e siècle. Après les années 1110, la raréfaction du terme palatium – et sa substitution progressive par le terme de domus – impliquait de comprendre le sens que ces glissements sémantiques avaient dans la pratique des princes du XII e siècle. Selon Olivier Guyotjeannin, cette disparition dans le vocabulaire du pouvoir et son apparition pour désigner les résidences seigneuriales est la conséquence de la transformation en « palais » royal de toute résidence où le roi pouvait séjourner, selon le droit de gîte ; une transformation qui avait été précédée d’une période d’usage indifférencié, comme si tout séjour du roi était alors, 180 Voir notamment : ZOTZ, T., « Palais royaux, cours, résidences. L'étude des palais royaux en Allemagne », dans Les tendances actuelles de l'histoire du Moyen Âge en France et en Allemagne, 2003, p. 307-326; PARAVICINI, W., « Les cours et les résidences du Moyen Âge tardif. Un quart de siècle de recherches allemandes », dans Ibid., p. 327-350; ZOTZ, T., « Présentation et bilan de l'historiographie allemande de l'espace », dans Construction de l'espace au Moyen Âge: pratiques et représentations, 2007, p. 57-71 ; voir notamment les récentes contributions de Alexandra Sanmark, Stuart Brookes et Ryan Lavelle au colloque de l’International Medieval Society de Leeds, 2009 pour l’Angleterre. Sur les Capétien voir infra ainsi que les travaux de Elisabeth Lalou et Jean Chapelot sur Vincennes. 181 RENOUX, A., « Palais, cours et résidences », dans Les tendances actuelles de l'histoire du Moyen Âge en France et en Allemagne, 2003, p. 351-356; RENOUX, A. (éd.), Aux marches du palais : qu'est-cequ'un palais médiéval ? : données historiques et archéologiques : actes du VIIe Congrès international d'archéologie médiévale, Le Mans-Mayenne, 9-11 septembre 1999, 2001; RENOUX, A. (éd.), Palais royaux et princiers au Moyen âge : actes du colloque international tenu au Mans les 6-7 et 8 octobre 1994, 1996 ; RENOUX, A., « Les fondements architecturaux du pouvoir princier en France (fin IXe - début XIIIe siècle) », dans Les Princes et le Pouvoir au Moyen Âge. Actes du XXIIIe congrès de la SHMESP, 1993, p. 167-194. 182 GUYOTJEANNIN, O., « Résidences et palais des premiers Capétiens en Ile-de-France », dans Vincennes aux origines de l'état moderne, 1996, p. 123-136, RENOUX, A., « Espaces et lieux de pouvoirs royaux et princiers en France (fin XIe-début XIIIe siècle): changement et continuité », dans Palais royaux et princiers au Moyen Âge, 1996, p. 17-42. 465

2.1- Les résidences royales : habiter, séjourner, gouverner<br />

Alors que la question des résidences princières a été depuis quelques années un<br />

domaine de recherche dynamique, sous l’influence de la Residenzforschung allemande,<br />

l’étude des résidences royales en Angleterre commence seulement depuis peu à produire<br />

des résultats, comparables à ceux obtenus pour les Capétiens ou les ducs de<br />

Normandie 180 . Les travaux d’Annie Renoux s’inspirant de ces méthodes et de ces<br />

problématiques associant histoire des résidences et de la résidence, ont été pionniers en<br />

France, ouvrant ce champ de recherche à la fois en amont et en aval de la charnière XI e<br />

– XII e siècle 181 . Cependant, la plupart des études, en France comme en Angleterre, sont<br />

des monographies associant données archéologiques et fonds documentaires, lorsqu’il y<br />

en a 182 . Selon Annie Renoux, il ressort de ces travaux qu’il n’y a pas de concept de<br />

résidence princière clairement et durablement défini à cette date, même si une<br />

normalisation et une standardisation sont perceptibles à partir du XII e siècle. Après les<br />

années 1110, la raréfaction du terme palatium – et sa substitution progressive par le<br />

terme de domus – impliquait de comprendre le sens que ces glissements sémantiques<br />

avaient dans la pratique des princes du XII e siècle. Selon Olivier Guyotjeannin, cette<br />

disparition dans le vocabulaire du pouvoir et son apparition pour désigner les résidences<br />

seigneuriales est la conséquence de la transformation en « palais » royal de toute<br />

résidence où le roi pouvait séjourner, selon le droit de gîte ; une transformation qui avait<br />

été précédée d’une période d’usage indifférencié, comme si tout séjour du roi était alors,<br />

180 Voir notamment : ZOTZ, T., « Palais royaux, cours, résidences. L'étude des palais royaux en<br />

Allemagne », dans Les tendances actuelles de l'histoire du Moyen Âge en France et en Allemagne, 2003,<br />

p. 307-326; PARAVICINI, W., « Les cours et les résidences du Moyen Âge tardif. Un quart de siècle de<br />

recherches allemandes », dans Ibid., p. 327-350; ZOTZ, T., « Présentation et bilan de l'historiographie<br />

allemande de l'espace », dans Construction de l'espace au Moyen Âge: pratiques et représentations, 2007,<br />

p. 57-71 ; voir notamment les récentes contributions de Alexandra Sanmark, Stuart Brookes et Ryan<br />

Lavelle au colloque de l’International Medieval Society de Leeds, 2009 pour l’Angleterre. Sur les<br />

Capétien voir infra ainsi que les travaux de Elisabeth Lalou et Jean Chapelot sur Vincennes.<br />

181 RENOUX, A., « Palais, cours et résidences », dans Les tendances actuelles de l'histoire du Moyen Âge<br />

en France et en Allemagne, 2003, p. 351-356; RENOUX, A. (éd.), Aux marches du palais : qu'est-cequ'un<br />

palais médiéval ? : données historiques et archéologiques : actes du VIIe Congrès international<br />

d'archéologie médiévale, Le Mans-Mayenne, 9-11 septembre 1999, 2001; RENOUX, A. (éd.), Palais<br />

royaux et princiers au Moyen âge : actes du colloque international tenu au Mans les 6-7 et 8 octobre<br />

1994, 1996 ; RENOUX, A., « Les fondements architecturaux du pouvoir princier en France (fin IXe -<br />

début XIIIe siècle) », dans Les Princes et le Pouvoir au Moyen Âge. Actes du XXIIIe congrès de la<br />

SHMESP, 1993, p. 167-194.<br />

182 GUYOTJEANNIN, O., « Résidences et palais des premiers Capétiens en Ile-de-France », dans<br />

Vincennes aux origines de l'état moderne, 1996, p. 123-136, RENOUX, A., « Espaces et lieux de<br />

pouvoirs royaux et princiers en France (fin XIe-début XIIIe siècle): changement et continuité », dans<br />

Palais royaux et princiers au Moyen Âge, 1996, p. 17-42.<br />

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