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corps de Guillaume le Conquérant en 1087 66 . Cet épisode rappelle qu’à la fin du XII e<br />

siècle, la sacralité du corps du roi, que mettent en scène les funérailles, n’est pas encore<br />

un acquis des royautés occidentales.<br />

L’apparition au XII e siècle d’un transfert de sacralité sur le corps défunt s’opère<br />

sur le mode de la transformation du cadavre en un vivier de reliques appelant à sa<br />

dissection. La dispersion des restes royaux dans les différents territoires de l’empire<br />

devient à partir de Richard comme un moyen d’unification autour une même sacralité<br />

royale. Cette idée est clairement formulée par Richard lorsqu’il édicte, avant de mourir,<br />

ses dernières volontés à ses familiers, et dont Mathieu <strong>Paris</strong> rapporte la substance ainsi<br />

que le texte de son épitaphe :<br />

Et la terre de Chalus a enseveli le duc des Poitevins<br />

Son corps repose sous le marbre de Fontevraud<br />

Normandie, tu recouvres le cœur de l’inexpugnable roi<br />

Tels sont les trois lieux où sont réparties tant de ruines,<br />

Alors qu’il a suffit d’un seul lieu pour que tu trouves la mort. 67 .<br />

Par la dispersion de son corps en divers points de son empire, Richard ne tentait-<br />

il pas de concilier deux volontés contradictoires : être enseveli dans le tombeau familial,<br />

« dans le sépulcre de son père » 68 , à Fontevraud, tout en refusant d’ancrer la mémoire<br />

dynastique dans un seul territoire ? Elle traduit ainsi le pr<strong>of</strong>ond cosmopolitisme de<br />

Richard, incapable de limiter son identité à un seul des territoires de son empire. Cette<br />

pratique ritualisant les funérailles des membres séparés du roi n’est cependant pas une<br />

nouveauté ; elle avait déjà cours en Allemagne au XI e siècle, en particulier la séparation<br />

66 HALLAM, E. M., « Royal burial and the cult <strong>of</strong> kingship in France and England, 1060-1330 », J.M.H.,<br />

8 (1982), p. 359-380 ; ORDERIC VITAL, The Ecclesiastical History, 1986, IV, p. 102-109 : Verum<br />

fraters eius et cognate iam ab eo recesserunt, et omnes ministri eius eum ut barbarum nequiter<br />

deseruerunt. (Ses frères et ses parents étaient partis et l’avaient abandonné comme s’il avait été un<br />

barbare).<br />

67 MATHIEU PARIS, Chronica majora, 1964, II, p. 452; ORDERIC VITAL, The Ecclesiastical History,<br />

VI, 1986, p. 452 (bk. XIII): Quare igitur de corpore suo talem fieri distributionem decreverit, quibusdam<br />

familiaribus suis sub sigillo secreti revelavit. Patri enim corpus suum ratione praedicta assignavit;<br />

Rothomagensibus propter incomparabilem fidelitatem, quam in eis expertus fuerat, cor suum pro exennio<br />

transmisit. Pictavensibus quoque propter notam proditionis sterncora sua reliquit, quos non alia sui<br />

corporis portione dignos judiavit. (Il décréta comment son corps devrait être dispersé et confia ces<br />

disposition sous le sceau du secret à ses familiers : Il donna son corps à son père ; aux Rouennais, pour<br />

leur incomparable fidélité, dont il avait fait l’expérience, il leur envoya son cœur en remerciement; quant<br />

aux poitevins, et à leur réputation de traites, il ne leur laissa que ses viscères, car il ne les jugeait pas<br />

dignes d’une autre partie de son corps). Épitaphe : Pictavis extra ducis sepelit tellusque Chalucis, /<br />

Corpus dat claudi sub marmore Fontis Ebraudi,/ Neustria tuque tegis cor inexpugnabile regis ;/ Sic loca<br />

pter trina se sparsit tanta ruina,/ Nec fuit hoc funus cui sufficeret locus unus.<br />

68 LAUWERS, M., La mémoire des ancêtres, le souci des morts. Morts, rites et société au Moyen Âge,<br />

diocèse de Liège, XIe-XIIIe siècles, 1997, p. 74.<br />

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