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1160, montre également que le règlement de ce confit était avant tout une question de délimitation frontalière : Ce que le roi d’Angleterre avait de l’honneur de Toulouse et de Cahors et du cahorsin le jour où la paix fut faite, il le gardera et si le comte de Saint-Gilles ou ses hommes de l’honneur de Toulouse ou de Cahors transgressent la limite du roi d’Angleterre et qu’ils ne respectent pas les accords sur la limite dans les marches, le roi de France n’interviendra pas par la suite, et si le comte de Barcelone et de Trencavel et les autres hommes du roi d’Angleterre, sa patrie, ne veulent pas être dans la paix, et faire la guerre au comte de Saint- Gilles, le roi d’Angleterre ne les aidera pas en deçà de la limite sur laquelle est faite cette convention, et s’ils veulent être dans la trêve, qu’ils y soient. 295 Cette expédition marque le début de la « guerre de Quarante ans » (1156-1196), selon l’expression de Guillaume de Newburgh, une période au cours de laquelle la délimitation de cette frontière méridionale de l’empire restera largement indécise 296 . Selon Jane Martindale, le contraste entre le déploiement de la puissance militaire et la retraite anticipée d’Henri II suggère que la campagne de 1159 avait d’autres finalités que la prise de Toulouse 297 . En rassemblant presque tous les barons de l’empire, y compris le roi d’Écosse dont la présence ne manqua pas d’étonner les observateurs de l’époque, Henri II ne cherchait-il pas également faire pencher le rapport de force en sa faveur au sein de l’alliance avec les comte-rois catalano-aragonais, qui avait précédé la campagne ? Dès 1158, Henri II avait en effet rencontré à Blaye, en Gironde, Raymond Béranger IV, comte de Barcelone, à qui s’était également associé Raymond Trencavel, comte de Béziers, tous deux fortement impliqués dans les luttes pour le contrôle territorial de la région. L’influence des Plantagenêt sur l’Aragon constitue en effet un enjeu central de la politique frontalière aux marges méridionales de l’empire. Le rapprochement avec Raymond Béranger IV permet à Henri II d’exercer des 295 Acta Plantagenêt 3077H : quicquid rex Angl(ie) habebat de honore Tolose et de Cadurco et Cadurcino ea die qua pax facta fuit, eidem reg(i) Angl(ie) remanebit, et si com(es) Sancti Egidii infra hunc terminum reg(i) Angl(ie) vel suis hominibus de predicto honore Tolose vel Cadurci forisfecerit et ad marchia in termino conuenienti non emendauerit, rex Fr(ancie) inde ulterius se non intromittit, et si comes de Bargelum et Trencauel' et ceteri homines reg(is) Angl(ie) illius patrie noluerint in trewis istis esse, et guerram fecerint com(iti) Sancti Egidii, rex Anglie non iuuabit eos infra hunc terminum contra istam conuentionem, et si ipsi voluerint esse in trewis istis, sint. 296 BENJAMIN, R., « A forty years war: Toulouse and the Plantagenets, 1156-96 », Historical Research, 61 (1988), p. 270-285 cite GUILLAUME DE NEWBURGH, Chronicles of the reigns of Stephen, Henry II, and Richard I, 1884, II, p. 491. au total, les sources permettent de compter six campagnes en Toulousain (en 1157, 1162, 1164, 1172, 1181 (roi d’Aragon) et 1186-1188. 297 MARTINDALE, J., « 'An unifinished business': Angevin politics and the siege of Toulouse, 1159 », dans A.N.S., 2001, p. 115-154. 380

pressions sur le comte de Toulouse en 1166, lors du renversement des alliances provoqué par la mort du comte de Provence, Raymond Béranger III. Raymond V de Saint-Gilles qui convoite la Provence répudie Constance, la sœur de Louis VII, pour épouser Richilde « l’impératrice », la veuve du comte. Il doit alors se rapproche alors du roi d’Aragon et d’Henri II en 1167 298 . Mais les tensions perdurent puisque Henri II s’empare de Fumel dans le sud du Quercy en 1169 299 et lorsqu’il se rend à Rocamadour, pour prier la sainte Vierge, il choisit de s’entourer d’une multitude d’hommes armés, des cavaliers ainsi que des piétons, car il se trouvait « sur les terres de ses ennemis » 300 . Ces éléments suggèrent l’instabilité du Quercy, fortement marqué par l’obédience du comte de Toulouse. Le choix de Rocamadour comme lieu de pèlerinage ne peut donc être considéré en dehors des enjeux territoriaux de la région. En se rendant dans cette marge, sous le signe du pèlerinage, Henri II cherchait clairement à y manifester son pouvoir 301 . Les pèlerinages des rois d’Angleterre ne peuvent en effet être véritablement comparés à l’expérience que partageaient la plupart des pèlerins à cette date, à partir des concepts de communitas et d’expérience spirituelle, car les Plantagenêt étaient, en quelque sorte, par leur itinérance en pèlerinage perpétuel 302 (voir chapitre 5). La chronologie proposée par Richard Benjamin suggère que Raymond V ne recouvre réellement ses terres que lorsqu’il prête hommage à Henri II en 1173 à Montferrand, puis quelques semaines plus tard à Limoges en présence des fils du roi 303 . Cependant, les Plantagenêt gardent le contrôle de plusieurs places en Quercy comme l’atteste Geoffroy de Vigeois qui raconte qu’en février 1184, le futur Raymond VI de 298 BISSON, T. N., « L’époque des grands comtes-rois (1137-1276) », dans Histoire de la Catalogne, 1982, p. 273-314. En outre, Henri II exerça un certain contrôle sur la minorité d’Alphonse II entre 1162 et 1174. 299 GERVAIS DE CANTORBERY, The Historical Works, 1965 [1880], p. 203. ; HOVEDEN, I, 282: Eodem anno Henricus rex Angliae cepit per vim fortissimum castellum quod dicebatur Fumel et illud demolitus est. 300 TORIGNI, II, p. 24 : Henricus causa orationis veniens, quia approprinquabat terrae incimicorum suorum, congregata multitudine armatorum tam equitorum quam peditum… 301 BOZOKY, E., « Le culte des saints et des reliques dans la politique des premiers rois Plantagenêt », dans La cour Plantagenêt, 1154-1204, 2000, p. 227-291 cite MASON, E., « "Rocamadour in Quercy above all other churches" : the healing of Henry II », dans The Church and healing, 1982, p. 39-54. 302 VINCENT, N., « The pilgrimage of the Angevin kings of England 1154-1272 », dans Pilgrimage. The English experience from Becket to Bunyan, 2002, p. 12-45 fait reference aux analyses de TURNER, V. W., Image and pilgrimage in Christian culture : anthropological perspectives, 1978 et EADE, J. et SALLNOW, M. J. (eds.), Contesting the sacred : the anthropology of pilgrimage, 2000. 303 BENJAMIN, R., « A Forty Years War: Toulouse and the Plantagenets, 1156-96 », Historical Research, 61 (1988), p. 270-285 cite GEOFFROY DE VIGEOIS, Chronique précédée d’une étude sur la chronique de Geoffroy, 1864, p. 117 ; PETERBOROUGH, I, p. 36 : Et comes Sancto Aegidio devenit ibi homo regis et homo novi regis filii ipsius et homo Ricardi filii regis comitis Pictaviae, de Tholosa tenenda de eis in feudo et haedidtate… 381

pressions sur le comte de Toulouse en 1166, lors du renversement des alliances<br />

provoqué par la mort du comte de Provence, Raymond Béranger III. Raymond V de<br />

Saint-Gilles qui convoite la Provence répudie Constance, la sœur de Louis VII, pour<br />

épouser Richilde « l’impératrice », la veuve du comte. Il doit alors se rapproche alors du<br />

roi d’Aragon et d’Henri II en 1167 298 . Mais les tensions perdurent puisque Henri II<br />

s’empare de Fumel dans le sud du Quercy en 1169 299 et lorsqu’il se rend à Rocamadour,<br />

pour prier la sainte Vierge, il choisit de s’entourer d’une multitude d’hommes armés,<br />

des cavaliers ainsi que des piétons, car il se trouvait « sur les terres de ses ennemis » 300 .<br />

Ces éléments suggèrent l’instabilité du Quercy, fortement marqué par l’obédience du<br />

comte de Toulouse. Le choix de Rocamadour comme lieu de pèlerinage ne peut donc<br />

être considéré en dehors des enjeux territoriaux de la région. En se rendant dans cette<br />

marge, sous le signe du pèlerinage, Henri II cherchait clairement à y manifester son<br />

pouvoir 301 . Les pèlerinages des rois d’Angleterre ne peuvent en effet être véritablement<br />

comparés à l’expérience que partageaient la plupart des pèlerins à cette date, à partir des<br />

concepts de communitas et d’expérience spirituelle, car les Plantagenêt étaient, en<br />

quelque sorte, par leur itinérance en pèlerinage perpétuel 302 (voir chapitre 5).<br />

La chronologie proposée par Richard Benjamin suggère que Raymond V ne<br />

recouvre réellement ses terres que lorsqu’il prête hommage à Henri II en 1173 à<br />

Montferrand, puis quelques semaines plus tard à Limoges en présence des fils du roi 303 .<br />

Cependant, les Plantagenêt gardent le contrôle de plusieurs places en Quercy comme<br />

l’atteste Ge<strong>of</strong>froy de Vigeois qui raconte qu’en février 1184, le futur Raymond VI de<br />

298 BISSON, T. N., « L’époque des grands comtes-rois (1137-1276) », dans Histoire de la Catalogne,<br />

1982, p. 273-314. En outre, Henri II exerça un certain contrôle sur la minorité d’Alphonse II entre 1162 et<br />

1174.<br />

299 GERVAIS DE CANTORBERY, The Historical Works, 1965 [1880], p. 203. ; HOVEDEN, I, 282:<br />

Eodem anno Henricus rex Angliae cepit per vim fortissimum castellum quod dicebatur Fumel et illud<br />

demolitus est.<br />

300 TORIGNI, II, p. 24 : Henricus causa orationis veniens, quia approprinquabat terrae incimicorum<br />

suorum, congregata multitudine armatorum tam equitorum quam peditum…<br />

301 BOZOKY, E., « Le culte des saints et des reliques dans la politique des premiers rois Plantagenêt »,<br />

dans La cour Plantagenêt, 1154-1204, 2000, p. 227-291 cite MASON, E., « "Rocamadour in Quercy<br />

above all other churches" : the healing <strong>of</strong> Henry II », dans The Church and healing, 1982, p. 39-54.<br />

302 VINCENT, N., « The pilgrimage <strong>of</strong> the Angevin kings <strong>of</strong> England 1154-1272 », dans Pilgrimage. The<br />

English experience from Becket to Bunyan, 2002, p. 12-45 fait reference aux analyses de TURNER, V.<br />

W., Image and pilgrimage in Christian culture : anthropological perspectives, 1978 et EADE, J. et<br />

SALLNOW, M. J. (eds.), Contesting the sacred : the anthropology <strong>of</strong> pilgrimage, 2000.<br />

303 BENJAMIN, R., « A Forty Years War: Toulouse and the Plantagenets, 1156-96 », Historical<br />

Research, 61 (1988), p. 270-285 cite GEOFFROY DE VIGEOIS, Chronique précédée d’une étude sur la<br />

chronique de Ge<strong>of</strong>froy, 1864, p. 117 ; PETERBOROUGH, I, p. 36 : Et comes Sancto Aegidio devenit ibi<br />

homo regis et homo novi regis filii ipsius et homo Ricardi filii regis comitis Pictaviae, de Tholosa<br />

tenenda de eis in feudo et haedidtate…<br />

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