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lancer son armée en Limousin, où il trouva l’aide de son frère Henri. Selon John Gillingham, bien que cette union ait été très éphémère, les événements de l’été 1182 montrent que les Angevins savaient s’unir pour parvenir à maîtriser des vastes territoires de leur empire 378 . En 1194, alors qu’il est devenu roi d’Angleterre, Richard revint à nouveau en Angoumois pour soumettre les seigneurs révoltés. Il fait alors le bilan de ses reconquêtes dans une lettre qu’il adresse à son chancelier : Sachez que, par la grâce de Dieu, qui considère le droit de tous, nous avons prit Taillebourg, Marcillac et tous les châteaux et toute la terre de Geoffroy de Rancon et la cité d’Angoulême, Châteauneuf, Montignac, la Chèze et tous les autres châteaux et toutes les terres du comte d’Angoulême, dans son intégralité. Nous avons pris également la cité d’Angoulême et le bourg en une soirée, et nous avons pris ce qu’il avait en partie sur cette terre, ce qui fait bien jusqu’à 300 soldats et 40000 armes 379 . Si la répression contre les comtes d’Angoulême semble avoir été la principale préoccupation d’Henri II et surtout de Richard en Aquitaine, c’est que ceux-ci jouaient un rôle de catalyseur de la force de résistance des nobilissimi dans cette partie de l’Aquitaine 380 . Si l’on en croit les alliances formées au cours de ces multiples soulèvements, les comtes d’Angoulême exerçaient une influence politique qui s’étendait jusqu’en Périgord et en Limousin. Au début du XII e siècle, la documentation laisse en effet entrevoir le recul de l’autorité ducale vis-à-vis des maîtres des châteaux carolingiens de la Dordogne 381 . De Blaye à Castillon en passant par Fronsac, le duc avait perdu pied, faisant de la Dordogne une marge au sein même du duché d’Aquitaine qui entra rapidement sous l’influence des comtes d’Angoulême. Les tentatives pour reprendre pied en Périgord n’apparaissent qu’à partir de la dernière décennie du XII e siècle, lorsqu’en 1195 à la mort d’Ademar de Beynac, Richard donna à Mercadier, l’un des chefs de ses mercenaires, le château de Beynac, une place forte surveillant les bords de la Dordogne. Bien que Mercadier ait tenté de s’implanter dans le pays, après son 378 Ibid., p. 66. 379 HOVEDEN, III, p. 256-57 : Sciatis quod nos Dei gratia qui in omnibus rectum considerat, Tailburgum et Marciliacum et omnia castella et totam terram Gaufridi de Rancona cepimus et civitatem Engolismi et Castellum Novum et Muntiniacum et la Chese et omnia castella et totam terram comitis Engolismi cum omni integritate cepimus, civitatem autem Engolismi et Burgum in una vesperata cepimus, in terris vero, quas in partibus illis cepimus, bene usque ad trecentes milites et quadraginta millia armatorum cepimus. 380 DEBORD, A., La société laïque dans les pays de la Charente : Xe-XIIe siècles, 1984, p. 389. 381 BOUTOULLE, F., Le duc et la société : pouvoirs et groupes sociaux dans la Gascogne bordelaise au XIIe siècle, 2007, p. 306. 216

assassinat à Bordeaux, le château revint aux seigneurs originels 382 . C’est également sous l’influence des comtes d’Angoulême, que les comtes de Périgord, les seigneurs de Turenne, Bernard de Born, seigneur de Hautefort prêtent hommage au roi de France, en 1204, faisant perdre à Jean le contrôle de toute la partie médiane de son duché. Pourtant, en prenant pour épouse Isabelle d’Angoulême en 1200, Jean rompait avec la politique essentiellement répressive de ses prédécesseurs et tentaient d’intégrer le duché à son empire en l’insérant sous sa domination directe. Mais cette stratégie là n’eut pas plus de succès. 3.3.2- Le Limousin : un espace pivot mais incontrôlable En Limousin, les tentatives de féodalisation des pratiques comme la confiscations des terres et des héritages ou l’intervention du duc comme juge dans les querelles de ses vassaux pour affirmer la puissance ducale ont été menées dès les premières années du règne d’Henri II 383 . En 1156, ce dernier se saisit de l’occasion du décès du vicomte de Limoges, pour réclamer la tutelle du futur Aymar V, encore mineur, et confie la gestion de la vicomté à Geoffroy de Neubourg et Guillaume Pandulf, jusqu’à sa majorité 384 . En 1159, en échange de l’hommage vassalique, Henri II rend sa terre à Aymar qu’il a entre temps marié à Sara de Cornouailles, l’intégrant ainsi au sein de l’aristocratie « cosmopolite » de l’empire. À plusieurs reprises, Henri II et Richard interviennent également dans les querelles territoriales concernant l’attribution des châteaux. Ainsi, en 1166, alors qu’Aymar V et Bernard de Comborn se disputent au sujet du château d’Excideuil, Henri II intervient en faveur de Bernard de Comborn, qu’il fit chevalier 385 . En 1182, Excideuil est à nouveau l’objet d’une intervention de Richard, qui l’assiégea et s’empara du bourg. Il y installa une garnison et se dirigea vers Pierre- Buffière qu’il assiégea pendant douze jours avant d’encercler le Puy St Front 386 . Cette année là, Henri II fit d’importants dons à Saint-Yrieix, une abbatiale patronnée par les 382 HOVEDEN, IV, p. 114 : venit eam Marchadeus princeps Braibancernorum … in eadem civitate Burdegalensi intercetus est ; MAUBOURGUER, J. -. M., Le Périgord méridional des origines à l’an 1370. Étude d’histoire politique et religieuse, 1926, p. 96-97. 383 DEBORD, A., La société laïque dans les pays de la Charente : Xe-XIIe siècles, 1984, p. 381. 384 GEOFFROY DE VIGEOIS, Chronique précédée d’une étude sur la chronique de Geoffroy, 1864, p. 91. 385 GEOFFROY DE VIGEOIS dans RHF, XII, p. 441 : Bernard in Petragoricio ad hostibus capto tamdiu solutio ejus a nepote Ademaro impedita est, quousque redderet ei Exidolium castrum, quod in vita sua ex conventu dicebat habere debere… et Bernardo redditur castrum, cingulum militiae a Rege Anglorum percepit; GEOFFROY DE VIGEOIS, Chronique précédée d’une étude sur la chronique de Geoffroy, 1864, p. 111-112. 386 Ibid., p. 152-153. 217

lancer son armée en Limousin, où il trouva l’aide de son frère Henri. Selon John<br />

Gillingham, bien que cette union ait été très éphémère, les événements de l’été 1182<br />

montrent que les Angevins savaient s’unir pour parvenir à maîtriser des vastes<br />

territoires de leur empire 378 .<br />

En 1194, alors qu’il est devenu roi d’Angleterre, Richard revint à nouveau en<br />

Angoumois pour soumettre les seigneurs révoltés. Il fait alors le bilan de ses<br />

reconquêtes dans une lettre qu’il adresse à son chancelier :<br />

Sachez que, par la grâce de Dieu, qui considère le droit de tous, nous<br />

avons prit Taillebourg, Marcillac et tous les châteaux et toute la terre<br />

de Ge<strong>of</strong>froy de Rancon et la cité d’Angoulême, Châteauneuf,<br />

Montignac, la Chèze et tous les autres châteaux et toutes les terres du<br />

comte d’Angoulême, dans son intégralité. Nous avons pris également<br />

la cité d’Angoulême et le bourg en une soirée, et nous avons pris ce<br />

qu’il avait en partie sur cette terre, ce qui fait bien jusqu’à 300<br />

soldats et 40000 armes 379 .<br />

Si la répression contre les comtes d’Angoulême semble avoir été la principale<br />

préoccupation d’Henri II et surtout de Richard en Aquitaine, c’est que ceux-ci jouaient<br />

un rôle de catalyseur de la force de résistance des nobilissimi dans cette partie de<br />

l’Aquitaine 380 . Si l’on en croit les alliances formées au cours de ces multiples<br />

soulèvements, les comtes d’Angoulême exerçaient une influence politique qui s’étendait<br />

jusqu’en Périgord et en Limousin. Au début du XII e siècle, la documentation laisse en<br />

effet entrevoir le recul de l’autorité ducale vis-à-vis des maîtres des châteaux<br />

carolingiens de la Dordogne 381 . De Blaye à Castillon en passant par Fronsac, le duc<br />

avait perdu pied, faisant de la Dordogne une marge au sein même du duché d’Aquitaine<br />

qui entra rapidement sous l’influence des comtes d’Angoulême. Les tentatives pour<br />

reprendre pied en Périgord n’apparaissent qu’à partir de la dernière décennie du XII e<br />

siècle, lorsqu’en 1195 à la mort d’Ademar de Beynac, Richard donna à Mercadier, l’un<br />

des chefs de ses mercenaires, le château de Beynac, une place forte surveillant les bords<br />

de la Dordogne. Bien que Mercadier ait tenté de s’implanter dans le pays, après son<br />

378 Ibid., p. 66.<br />

379 HOVEDEN, III, p. 256-57 : Sciatis quod nos Dei gratia qui in omnibus rectum considerat,<br />

Tailburgum et Marciliacum et omnia castella et totam terram Gaufridi de Rancona cepimus et civitatem<br />

Engolismi et Castellum Novum et Muntiniacum et la Chese et omnia castella et totam terram comitis<br />

Engolismi cum omni integritate cepimus, civitatem autem Engolismi et Burgum in una vesperata cepimus,<br />

in terris vero, quas in partibus illis cepimus, bene usque ad trecentes milites et quadraginta millia<br />

armatorum cepimus.<br />

380 DEBORD, A., La société laïque dans les pays de la Charente : Xe-XIIe siècles, 1984, p. 389.<br />

381 BOUTOULLE, F., Le duc et la société : pouvoirs et groupes sociaux dans la Gascogne bordelaise au<br />

XIIe siècle, 2007, p. 306.<br />

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