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chapitre 3). Le contrôle des revenus épiscopaux et abbatiaux constituait donc un expédient extraordinaire mais non négligeable – ni négligé d’ailleurs – pour financer les constructions que ce soit des fortifications ou des fondations royales 189 . L’organisation et le contrôle des constructions sur le territoire s’appliquait en effet tout autant aux fondations monastiques qu’aux constructions militaires comme en témoigne l’attention particulière qu’Henri II accorda aux pratiques de refondations. 2.2- Les refondations comme pratique politique Les avantages que procurait la reconnaissance du statut de patron d’abbaye expliquent donc l’enjeu qu’il y avait à se faire reconnaître les droits de patronage y compris en refondant des abbayes aux origines contestées. De fait, les refondations de monastère devinrent une pratique courante au cours du XII e siècle, considérée comme une méthode adaptée à la nouvelle réalité monastique, marquée par la saturation du réseau et la rareté des terres qui rendaient toute fondation ex fundamentis de plus en plus difficile 190 . Henri I er et Étienne de Blois, par exemple, avaient réutilisé des sites existants pour y installer de nouvelles communautés : ainsi l’abbaye cistercienne de Mortemer, dans la forêt de Lyons, n’était autre chose que la réforme du prieuré bénédictin de Beaumont-le-Perreux, de même que l’abbaye de Reading (Berkshire), qui conserve la sépulture d’Henri I er fut avant tout le rassemblement de statuts et de terres des maisons de Cholsey et Leominster, alors en déclin 191 . À cette date, le concept de fundator ne distinguait pas les différents acteurs d’une fondation et désignait aussi bien celui qui finançait la construction d’un nouveau couvent que celui qui permettait l’installation d’une nouvelle communauté ou encore celui qui ne faisait que bénéficier des droits héréditaires que lui conférait le patronage de ses ancêtres, c'est-à-dire principalement de choisir les candidats à l’élection abbatiale et de jouir de ses revenus pendant la période de vacance. Les refondations permettaient ainsi d’accéder à un certain nombre de droits sur la communauté monastique à moindres frais. La refondation d’un monastère était réglementée par le droit canon et la simple confirmation et l’extension des dotations ne permettait pas de s’attribuer le titre de 189 C’est d’ailleurs pour contourner les éventuelles prédations royales, que se mit en place progressivement au cours du XIIIe siècle, la séparation des menses ecclésiastiques. HOWELL, M., « Abbatial vacancies and the divided mensa in medieval England », Journal of Ecclesiastical History, 33: 2 (1982), p. 173-192. 190 HALLAM, E. M., « Henry II as a founder of monasteries », Ibid., 28 (1977), p. 113-132. 191 Ibid. 170
fondateur 192 . Seule la reconstruction de fond en comble autorisait le changement de vocable et de patronage. Parce que cette pratique, répandue sous le règne des Plantagenêt, entrait fréquemment en concurrence avec droits des familles fondatrices, il n’est pas surprenant de voir que sa restriction faisait partie des revendications des barons en 1215 193 . En plaçant son fondateur au cœur d’un réseau de relations personnelles et locales, le patronage d’une maison monastique constituait donc un instrument d’influence sur la communauté honoriale et sur son territoire 194 . La communauté spirituelle était en effet liée au réseau des donateurs, généralement constitué par les liens de fidélités et d’amitiés qu’entretenait la famille du fondateur avec la société locale. Les refondations, au même titre que les confiscations, constituaient donc des instruments permettant d’affaiblir au profit du roi l’influence baronniale sur les territoires de son honneur. Toutefois, si cette pratique était courante en Angleterre, l’organisation de la féodalité sur le continent ne donnait pas au roi-duc les mêmes droits et les tentatives d’appropriations se heurtèrent à de fortes résistances. 2.2.1- Les refondations de Mathilde et Henri Selon Marjorie Chibnall, les pratiques d’affirmation des droits d’un seigneur sur la fondation de son vassal ne sont pas surprenantes dans le contexte d’instabilité politique des années 1135-1154 195 . L’historienne signale ainsi plusieurs chartes de Mathilde l’Empresse pour des maisons religieuses anglaises, confirmées par Henri II, qui avaient pour but de neutraliser les dons d’Étienne effectués sur les revenus de la Couronne en refusant de reconnaître leur légitimité. À plus d’une occasion, elle et son fils prirent l’initiative d’une nouvelle fondation favorisée par Étienne et la refondèrent sur un nouveau site. C’est le cas des ermites installés à Radmore qui constituèrent le noyau de l’abbaye cistercienne de Stoneleigh dans la forêt de Cannock 192 FOREVILLE, R., « Tradition et renouvellement du monachisme dans l'espace Plantagenêt au XIIe siècle », dans Y a-t-il une civilisation du monde Plantagenêt ?, 1986, p. 61-73. 193 HOLT, J. C., « Politics and property in early medieval England », Past & Present, 57 (1972), p. 3-52. 194 COWNIE, E., Religious patronage in Anglo-Norman England, 1066-1135, 1999 ; COWNIE, E., « Religious patronage and lordship: the debat on the nature of the honor », dans Family Trees and the Roots of Politics. The Prosopography of Britain and France from the Tenth to the Tweltfh Century, 1997, p. 133-146; pour la normandie voir: GAZEAU, V., « Les abbayes bénédictines de la Normandie ducale : lieux de pouvoir ou relais du pouvoir? », dans Les lieux de pouvoir au Moyen âge en Normandie et sur ses marges, 2006, p. 91-100. 195 CHIBNALL, M., « The Empress Mathilda and Church Reform », T.R.H.S., 38 (1988), p. 107-130. 171
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particulière qu’Henri II accorda aux pratiques de refondations.<br />
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Les avantages que procurait la reconnaissance du statut de patron d’abbaye<br />
expliquent donc l’enjeu qu’il y avait à se faire reconnaître les droits de patronage y<br />
compris en refondant des abbayes aux origines contestées. De fait, les refondations de<br />
monastère devinrent une pratique courante au cours du XII e siècle, considérée comme<br />
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difficile 190 . Henri I er et Étienne de Blois, par exemple, avaient réutilisé des sites<br />
existants pour y installer de nouvelles communautés : ainsi l’abbaye cistercienne de<br />
Mortemer, dans la forêt de Lyons, n’était autre chose que la réforme du prieuré<br />
bénédictin de Beaumont-le-Perreux, de même que l’abbaye de Reading (Berkshire), qui<br />
conserve la sépulture d’Henri I er fut avant tout le rassemblement de statuts et de terres<br />
des maisons de Cholsey et Leominster, alors en déclin 191 . À cette date, le concept de<br />
fundator ne distinguait pas les différents acteurs d’une fondation et désignait aussi bien<br />
celui qui finançait la construction d’un nouveau couvent que celui qui permettait<br />
l’installation d’une nouvelle communauté ou encore celui qui ne faisait que bénéficier<br />
des droits héréditaires que lui conférait le patronage de ses ancêtres, c'est-à-dire<br />
principalement de choisir les candidats à l’élection abbatiale et de jouir de ses revenus<br />
pendant la période de vacance. Les refondations permettaient ainsi d’accéder à un<br />
certain nombre de droits sur la communauté monastique à moindres frais.<br />
La refondation d’un monastère était réglementée par le droit canon et la simple<br />
confirmation et l’extension des dotations ne permettait pas de s’attribuer le titre de<br />
189 C’est d’ailleurs pour contourner les éventuelles prédations royales, que se mit en place<br />
progressivement au cours du XIIIe siècle, la séparation des menses ecclésiastiques. HOWELL, M.,<br />
« Abbatial vacancies and the divided mensa in medieval England », Journal <strong>of</strong> Ecclesiastical History, 33:<br />
2 (1982), p. 173-192.<br />
190 HALLAM, E. M., « Henry II as a founder <strong>of</strong> monasteries », Ibid., 28 (1977), p. 113-132.<br />
191 Ibid.<br />
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