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même nécessaire lorsqu’elle est l’œuvre d’un roi oint chargé de rétablir l’ordre,
autrement dit lorsque l’action du gouvernement trouve son principe en Dieu 136 . Dans la
pratique, on a pu constater que ce qui apparaît comme un usage plus arbitraire de la
potestas regis est en réalité le produit des profondes modifications du principe de la
reddibilité des châteaux depuis le début du XII e siècle. Bien plus qu’un simple contrôle
militaire permettant de s’assurer la loyauté de ses vassaux, ce droit et son application au
moyen de la force furent pour les Plantagenêt un véritable instrument d’affirmation d’un
pouvoir territorial qui rendait possible l’émergence d’une nouvelle forme de
souveraineté (imperium). La carte 2.7 illustrant l’ensemble des confiscations et des
destructions au cours des trois règnes montre en effet l’étendue spatiale de ces pratiques
et leur dimension territoriale. Si la cartographie des 425 lieux répertoriés qui furent
l’objet d’une intervention de la part des Plantagenêt fait ressortir d’une certaine manière
le faible nombre d’espaces fermement contrôlés par le pouvoir, d’un autre point de vue,
elle montre également que les Plantagenêt n’ont pratiquement négligé aucun espace où
ils pouvaient affirmer leur pouvoir. Leurs interventions ont en effet concerné aussi bien
des espaces de conquête (marches du Pays de Galles, Irlande, Écosse) que des espaces
hérités mais instables nécessitant incessamment la réactivation de la force militaire
manifestant donc l’incapacité du prince à instaurer durablement sa puissance publique
(Vexin, Berry, Limousin, Angoumois, Quercy). Dans ces espaces, où la conception du
pouvoir est indissociable de la force, « la fureur vindicative du prince fait partie
intégrante de l’exercice normal du pouvoir ; elle est très codifiée. Il ne s’agit ni de
violence aveugle, ni de haine mais simplement d’un instrument de l’autorité » 137 .
L’application et l’extension du principe de reddibilité relevaient donc de la construction
d’un imperium, fondé sur la normalisation et la « féodalisation » des rapports de
domination.
Contrairement à la conclusion de Richard Eales qui considérait que « la politique
castrale des Plantagenêt était trop arbitraire et opportuniste pour être considérée comme
une politique consistante ou capable d’établir des pouvoirs légaux généralement
acceptés qui posaient les bases à partir desquelles leurs successeurs auraient pu
Philosophers, 1990, IV, c.1, 1-3 : Est ergo tiranni et principis haec differentia sola uel maxima quod hic
legi obtemperat et eius arbitrio populum regit cuius se credit ministrum.
136 Ibid., IV, c.4.; sur la théorie de l’économie politique médiévale voir AGAMBEN, G., Homo Sacer II.2
Le règne et la gloire. Pour une généalogie théologique de l'économie et du gouvernement, 2008.
137 BILLORÉ, M., « Pouvoir et noblesse en Normandie (fin XIIe - début XIIIe siècles). De l'autocratie
Plantagenêt à la domination capétienne », Thèse de doctorat, sous la dir. de Martin Aurell, 2005, non
publiée p. 580.
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