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mundi en 1158, comment ont-ils concrètement pris possession de l’espace qu’ils
dominaient ?
Le contrôle de l’espace et des lieux devient en effet le nouvel enjeu de la
potestas regis dans un contexte de dépersonnalisation des rapports de pouvoir et de
spatialisation des rapports sociaux. Plus encore que le contrôle des lieux, qui caractérise
le pouvoir féodal, c’est le contrôle d’un territoire, délimité comme espace
d’appartenance d’une communauté, qui fait émerger, dans la pratique, la souveraineté
du pouvoir. Il s’agira ainsi d’analyser les processus de territorialisation à l’œuvre, en
montrant comment les Plantagenêt sont non seulement parvenus à contrôler les lieux en
renforçant leur domination féodale mais ont également accru leur maîtrise territoriale en
insérant les communautés « régnales » 32 dans le jeu des rapports de pouvoir. Cette
insertion a été notamment possible par le développement de l’administration anglo-
normande, véritable moteur de l’émergence d’une société politique, dont l’affirmation
constitue un facteur déterminant de la genèse de l’État moderne. Celui-ci n’apparaît
cependant qu’à partir des années 1250-1350, lorsque le roi cesse d’être principalement
un seigneur entouré de ses vassaux et qu’il devient le souverain d’une communauté
politique au sein d’un territoire délimité 33 . À l’orée de l’époque moderne, les États
monarchiques, la France et l’Angleterre, se définissent en effet avant tout par leur
territoire, en ce sens qu’il est une émanation de la communauté du royaume
territorialement délimité par des frontières 34 .
1.1.3- Présentation des chapitres
Dans cette étude, la problématique du renforcement du pouvoir territorial du roi
et de la formation d’un territoire politique a été abordée à partir de la politique de
construction des Plantagenêt. Nous entendons, par politique de construction, l’action
des Plantagenêt non seulement pour construire des édifices, mais aussi pour les
restaurer, les patronner, ainsi que les démolir. Nous montrerons que cette politique
accompagne la tentative de contrôler non seulement les lieux, mais aussi l’espace de
32 REYNOLDS, S., Kingdoms and Communities in Western Europe, 900-1300, 1986, p. 253-262 ; elle
utilise cet adjectif plus approprié que « national » qui n’a pas de sens au Moyen Âge, pour désigner les
solidarités communautaires au sein des regna.
33 GENET, J.-P., « La genèse de l’État moderne : les enjeux d’un programme de recherche », Actes de la
Recherche en Sciences sociales, 118 (1997), p. 3-18. L’État moderne est le produit « d’une fiscalité
publique acceptée par la société politique et ce dans une dimension territoriale supérieure à celle de la
cité, et dont tous les sujets sont concernés ».
34 GUENÉE, B., « Des limites féodales aux frontières politiques », dans Les lieux de mémoire. vol. 1 : La
Nation, 1997, p. 1103-1124.
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