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continentale 19 . Cette normalisation constitue l’aboutissement d’un long processus de
transformation des logiques à la fois sociales et spatiales de la société médiévale
occidentale.
1.1.2- Spatialisation et féodalisation
Au haut Moyen Âge, les rois Francs ont cherché à contrôler leurs espaces par la
concession de diplômes d’immunité qui détachaient les vassi regales de leurs sujétions
territoriales, afin de mieux les lier directement au roi 20 . Une telle organisation du
pouvoir reposait ainsi sur un réseau de fidélités locales qui ne pouvaient que
difficilement recouper l’espace régalien théoriquement délimité par des frontières
territoriales. Le caractère très personnel de la définition des espaces politiques et la
dissociation entre pagus et comitatus, qui renvoyait désormais à l’espace des fidélités
personnelles du comte, s’accélère au cours du X e siècle. La personnalisation des espaces
politiques et le déclin des cadres territoriaux du pouvoir débouchent aux alentours de
l’an mil sur une organisation de l’espace occidental très éclatée et polarisée par des
lieux centraux. La première moitié du XI e siècle constitue cependant une césure
importante. L’apparition de la « blanche robe d’église » et du brun manteau de mottes
constitue la marque spatiale d’une réorganisation profonde des structures sociales 21 .
Si l’espace féodal reste alors fondamentalement l’espace d’un pouvoir, le
dominium associe désormais la domination des hommes et de la terre de manière de
plus en plus indissociable 22 . On assiste ainsi au passage d’un mode de structuration
sociale parentèlaire à un mode de structuration sociale spatialisée. Selon Michel
Lauwers et Laurent Ripart, l’organisation socio-spatiale féodale est avant tout polarisée
autour des lieux, les loca dominica et les loca sancta 23 . Parce que l’église avait
désormais vocation à personnifier l’Église par sa monumentalisation 24 et parce que la
motte s’imposait comme l’identifiant du seigneur, au moment où l’aristocratie
19 REYNOLDS, S., Fiefs and Vassals. The Medieval Evidence Reinterpreted, 1994, p. 353.
20 ROSENWEIN, B. H., Negotiating Space. Power, Restraint and Privileges of Immunity in Early
Medieval Europe, 1999; LAUWERS, M. et RIPART, L., « Représentation et gestion de l’espace dans
l’Occident médiéval », dans Rome et la genèse de l’État moderne : une comparaison typologique, 2007,
p. 115-171.
21 RAOUL GLABER, Les cinq livres de ses histoires (900-1044), PROU, M. (éd.), 1886, p. 42 ;
MORSEL, J., L'aristocratie médiévale : la domination sociale en Occident, Ve-XVe siècle, 2004, p. 96.
22 GENET, J.-P., « La typologie de l’État moderne, le droit, l’espace », dans L’État moderne : le droit,
l’espace et les formes de l’État, 1990, p. 7-17, GUERREAU, A., L'avenir d'un passé incertain, 2001.
23 LAUWERS, M. et RIPART, L., « Représentation et gestion de l’espace dans l’Occident médiéval »,
dans Rome et la genèse de l’État moderne : une comparaison typologique, 2007, p. 115-171.
24 IOGNA-PRAT, D., La maison Dieu, 2006.
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