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Les domestiques sénégalaises au Maroc : Un travail servile entre ...

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07_LANZA-2.qxd 27/04/2011 21:43 Page 3<br />

LES DOMESTIQUES SÉNÉGALAISES AU MAROC 3<br />

Le mot « frère » apparaît par ailleurs dans presque toutes les conversations<br />

qui concernent le Sénégal et le <strong>Maroc</strong>, même avec les nouve<strong>au</strong>x arrivés,<br />

donnant parfois l’impression qu’il s’agit d’une incantation plus que d’un<br />

sentiment réellement partagé. Dans la vieille génération des Sénégalo-<br />

<strong>Maroc</strong>ains, il est évident que le mot « fraternité » reflète un mode<br />

d’implication personnelle, de la passion et même du romantisme. Dans les<br />

nouvelles générations migrantes, par contre, surtout chez les étudiants et les<br />

jeunes commerçants, le mot ne traduit pas la réalité des attitudes. Après la<br />

phrase de routine sur la fraternité, on constate que la vie sociale des personnes<br />

interrogées se limite souvent <strong>au</strong>x cercles de copains marocains. Ce<br />

détachement peut être motivé par des différences culturelles, de pratiques<br />

religieuses comme en témoigne un jeune commerçant :<br />

« Ça fait dix ans que je suis ici mais, <strong>au</strong>-delà des apparences, je ne me sens pas<br />

intégré. Je ne veux pas que mes enfants grandissent ici parce que ce n’est pas un<br />

vrai pays musulman. Je ne peux pas accepter que ma fille aille en boîte et ici c’est<br />

impossible de l’empêcher, car il y a trop de libertés. En plus tout le monde boit,<br />

fume… ce n’est pas qu’<strong>au</strong> <strong>Maroc</strong> qu’on ne boit pas, mais <strong>au</strong> moins ce n’est pas<br />

considéré <strong>au</strong>tant normal ».<br />

Cette attitude de la « nouvelle génération » 5 engendre un sentiment de<br />

regret chez les anciens, qui la considèrent comme une opportunité<br />

manquée dans la construction de ces liens pour lesquels ils se sont tant<br />

investis. Ils soulignent le désintérêt d’une jeunesse qui pourrait servir de<br />

relais à toutes ces initiatives, une fois rentrée <strong>au</strong> <strong>Maroc</strong>, à l’instar des<br />

étudiants de la faculté de médecine, qui restent <strong>au</strong> Sénégal pour un temps<br />

assez long. <strong>Un</strong>e jeune étudiante en médecine en est l’exemple, avouant :<br />

« Je vis à Dakar depuis trois ans, mais je n’ai jamais eu des amies <strong>sénégalaises</strong>.<br />

Je préfère rester avec les <strong>Maroc</strong>ains parce que, avec eux, c’est plus facile, nous<br />

avons les mêmes habitudes ».<br />

Ces nouvelles générations de <strong>Maroc</strong>ains <strong>au</strong> Sénégal contribuent d’une<br />

manière différente à rapprocher et à rendre poreuses les frontières, à<br />

travers les allers et retours réguliers <strong>entre</strong> les deux pays, pour les vacances,<br />

l’éducation des enfants laissés chez les grands-parents, des mariages et<br />

<strong>au</strong>tres fêtes de famille, etc.<br />

<strong>Les</strong> accords de coopération maroco-sénégalais mis en œuvre par<br />

l’Agence marocaine de coopération internationale occupent en la matière<br />

une place prééminente, car ils mobilisent un grand nombre d’étudiants<br />

dans les deux sens. <strong>Un</strong> nombre non négligeable d’<strong>entre</strong> eux finit pour<br />

5. C’est-à-dire qui sont arrivés <strong>au</strong> Sénégal après les années 1950.

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