Les domestiques sénégalaises au Maroc : Un travail servile entre ...
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07_LANZA-2.qxd 27/04/2011 21:43 Page 19<br />
LES DOMESTIQUES SÉNÉGALAISES AU MAROC 19<br />
Quand la domestique « choisit » la fuite, c’est le consulat du Sénégal<br />
qui fait pression pour obtenir les passeports retenus. Devant la menace du<br />
recours à la police, les papiers sont rendus, s<strong>au</strong>f exception, on l’a vu.<br />
Après l’arrivée <strong>au</strong> <strong>Maroc</strong> et la rétention du passeport, ce sont les règles<br />
de la maison et l’organisation du <strong>travail</strong> qui constituent une nouvelle<br />
source de frustration pour les femmes à peine emb<strong>au</strong>chées. Horaires de<br />
<strong>travail</strong> démentiels, absence de jour de repos, confinement, sont la règle,<br />
malgré les promesses faites avant l’arrivée <strong>au</strong> <strong>Maroc</strong>. Chaque jour de<br />
<strong>travail</strong> commence à 7 heures et ne termine jamais avant 22 heures, selon<br />
les impératifs du service.<br />
« Ils m’avaient dit que le dimanche je ne <strong>travail</strong>lerais pas, que c’était mon jour<br />
de repos. Mais le dimanche je <strong>travail</strong>lais comme les <strong>au</strong>tres jours, jusqu’à la nuit. Ils<br />
m’avaient dit que je pouvais sortir, mais je <strong>travail</strong>lais toute la journée, jusqu’<strong>au</strong><br />
soir » (Coumba).<br />
« Tu te réveilles à 7 heures, tu vas te coucher à 11 heures. Même si tu termines<br />
ton <strong>travail</strong>, tu ne peux pas aller dormir. Et quand elle fait des invitations et tu vas<br />
dormir à 5 heures du matin, tu vas te réveiller toujours à 7 heures » (Umi).<br />
Même la maladie n’est pas une bonne raison pour se reposer, <strong>au</strong><br />
contraire elle peut être crainte et cachée :<br />
« Latiha ne soigne personne et même si tu es malade tu <strong>travail</strong>les, chaque jour.<br />
Moi j’ai fait là-bas deux ans et même quand j’étais malade, je me levais et je<br />
<strong>travail</strong>lais. Fatou a fuit parce qu’elle était malade. Elle est partie et après une<br />
semaine je suis arrivée » (Umi).<br />
Au-delà de l’impossibilité de sortir à c<strong>au</strong>se du <strong>travail</strong> et du manque de<br />
temps, il y a l’interdiction de partir de la maison, s<strong>au</strong>f si l’on est<br />
accompagnée par « madame » ou les gardiens. Ces restrictions sont<br />
justifiées par la protection de la femme « qui ne connaît pas », et sont<br />
toujours suivies par des recommandations de ne pas se faire approcher par<br />
des Noirs, présentés comme dangereux. Parfois « madame » ne prend<br />
même pas la peine de justifier l’interdiction de sortir ou la présence des<br />
gardiens qui empêchent tout contact avec d’<strong>au</strong>tres Sénégalais. Tout le<br />
monde sait que le but est de maintenir l’employée à distance de sa<br />
commun<strong>au</strong>té qui pourrait l’aider :<br />
« Je suis restée chez elle deux ans. Moi je ne voulais que venir, je suis venue<br />
sans réfléchir ni rien. Et je me suis retrouvée encastrée à la maison, je ne sortais<br />
pas, elle ne voulait pas » (Aminata).