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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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considérer rartdramatique. C'est à quoi peut sertir<br />

principalement l'analyse <strong>de</strong>s ouwages célèbres <strong>de</strong>puis<br />

longtemps appréciés. Concluons que dans te<br />

Cid le choix <strong>du</strong> sujet que fou a blâmé est un <strong>de</strong>s plus<br />

grands mérites <strong>du</strong> poète. C'est , à mou gré t le plus<br />

beau, le plus intéressant que Corneille ait traité.<br />

Qu'il Fait pris à Guillem <strong>de</strong> Castro, peu importe :<br />

on ne saurait trop répéter que prendre ainsi aux<br />

étrangers ou aux anciens pour enrichir sa nation 9<br />

sera toujours un sujet <strong>de</strong> gloire f et non pas <strong>de</strong> reproche.<br />

Mais ce mérite <strong>du</strong> sujet est-il le seul ? J'ai parlé<br />

<strong>de</strong> l'a beauté <strong>de</strong>s situations : il faut y joindre celle <strong>de</strong>s<br />

caractères. Le sentiment <strong>de</strong> l'honneur et l'héroïsme<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> chef aierie respirent dans le fieux don Diègue<br />

et dans son ils 9 et ont dans chacun d'eui le caractère<br />

déterminé par <strong>la</strong> différence d'âge. Le rôle <strong>de</strong><br />

Chimène, en général noble et pathétique, .tombe<br />

<strong>de</strong> temps en temps dans <strong>la</strong> déc<strong>la</strong>mation et le faux<br />

esprit, dont <strong>la</strong> contagion s'étendait encore jusqu'à<br />

Corneille, qui commençait le premier à en purger le<br />

théâtre; mais il offre les plus beaux traits <strong>de</strong> passion<br />

qu'ait fournis à l'auteur <strong>la</strong> peinture <strong>de</strong> l'amour,<br />

à <strong>la</strong>quelle il semble que son génie se pliait difficilement,<br />

lissent d'ailleurs trop connus pour les rappeler<br />

ici. Je ne m'arrêterai p<strong>la</strong>t non plus à discuter quelques<br />

autres observations <strong>de</strong> l'Académie, que je ne<br />

crois pas plus fondées que celle qu'on rient <strong>de</strong> ?oir»<br />

et qui parient <strong>du</strong> mène principe d'erreur. Celles qui<br />

portent sur <strong>la</strong> partie dont ce tribunal défait le mieux<br />

juger, <strong>la</strong> diction, ne sont pas non plus à l'abri <strong>de</strong><br />

tout reproche, et marquent une application trop<br />

rigoureuse <strong>de</strong> <strong>la</strong> grammaire à <strong>la</strong> poésie. Je me bornerai<br />

à <strong>de</strong>ux exemples :<br />

Mmmm.qm mon htm m put ptas tccfaelr,<br />

Je te raceti an tien pour venger et punir.<br />

Ces <strong>de</strong>ux fers sont admirables. En ?oid <strong>la</strong> critique<br />

:<br />

« Venger eipmir est trop Tape; car en ne sait qui<br />

ielf être vengé ou qei icft être puni. »<br />

J'ose croire cette'critique mal fondée, et je louerai<br />

ces <strong>de</strong>ux fers précisément par ce qu'on y censure.<br />

D'abord le sens est c<strong>la</strong>ir : qui peut se méprendre<br />

sur ce qu'on doit venger et sur ce qu'on doit punir I<br />

Mais ce qui me paraît digne <strong>de</strong> louange, c'est cette<br />

précision rapi<strong>de</strong> qui est arare <strong>de</strong>s mots, parce que<br />

<strong>la</strong> f engeance est avare <strong>du</strong> temps. Venger eipmir :<br />

meur§ m tue : voilà les mots qui se précipitent dans<br />

<strong>la</strong> bouche d'un homme furieux : il tendrait n'en pas<br />

dire d'autres.<br />

ïm moments sont trop chefs pour Ici perdra ce paroles,<br />

dit don Diègue en ce mime moment; et c'est pour<br />

ce<strong>la</strong> qu'il les ménage. *<br />

CMte ar<strong>de</strong>ur ipi daw les yeux Je port»,<br />

Sa§s-teiiQA€Mi@n§«ig?liMli4ii? •<br />

SIÈCLE DE LOUIS XIV. — POÉSŒ. 471<br />

« Une mêem m peut être appelée mmg par métapëior*<br />

ni iitrcnesL »<br />

J'en doute t Ton dirait fort bien : Cette ar<strong>de</strong>ur<br />

que j'ai dans les yeux, mon père me l'a transmise<br />

arec son sang; et, par une figure très-connue, en<br />

mettant <strong>la</strong> cause pour l'effet, je dirais : Cette ar<strong>de</strong>ur<br />

que mm me voyez, c'est le sang <strong>de</strong> mon père; et<br />

tout le mon<strong>de</strong> m'entendrait. Cette critique est trop<br />

vétilleuse.<br />

Au reste, rien ne fait plus d'honneur à l'Académie<br />

, et ne rachète mieux ses erreurs, alors très-parlonnables,<br />

que <strong>la</strong> manière dont elle s'exprime en<br />

<strong>la</strong>issant un Ira?ail dont elle ne s'était chargée qu'atec<br />

<strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> répugnance.<br />

« La fâiéneiim <strong>de</strong>s passions, <strong>la</strong> force et M délicatesse<br />

<strong>de</strong>s panées 9 et cet agrément inexplicable qui se mêle dans<br />

tous les défauts <strong>de</strong> €id, lui ont acquis ea rang ccasiêé*<br />

ntoSeentre les priâtes français <strong>de</strong> ce genre. Si si» auteur<br />

ne doit pas toute ta répétât»! à mm mérite, M ne h ici<br />

pas fente à sas bonheur; et <strong>la</strong> cetera M s été assez IIbérali<br />

peur excuser <strong>la</strong> fortune, si elle lui a été prodigue. *<br />

C'est beaucoup qu'un pareil témoignage, si l'on<br />

songe au cardinal <strong>de</strong> Richelieu; c'est trop peu, si<br />

l'on considère <strong>la</strong> disproportion immense entre Corneille<br />

et tout ce qu'on lui opposait. Mais quel est<br />

l'artiste à qui l'on donne d'abord le rang qui lui est<br />

dû! Non-seulement le caractère <strong>de</strong> l'esprit humain<br />

s'y oppose, on pourrait mime dire que cette justice<br />

tardif e est en quelque'sorte fondée en raison. Nos<br />

jugements sont si incertains, si sujets à l'erreur,<br />

qu'Os ont besoin <strong>de</strong> <strong>la</strong> sanction <strong>du</strong> temps ; et ce seul<br />

motif, sans parler <strong>de</strong> tous les autres, suffit pour rappeler<br />

sans cesse à l'homme d'un talent supérieur<br />

cette sentence <strong>de</strong> Yoltaire :<br />

« L'or et <strong>la</strong> boue suit confon<strong>du</strong>s pendant <strong>la</strong> fie <strong>de</strong>s artistes,<br />

et <strong>la</strong> mort les sépare. *<br />

Le sujet <strong>de</strong>s Homees, qu'entreprit Corneille après<br />

celui <strong>du</strong> Cid, était bien moins heureux et bien plus<br />

difficile à manier. 11 ne s'agit que d'un combat, d'un<br />

é?énemest très-simple, qu'à <strong>la</strong> f érité le nom <strong>de</strong><br />

Rome a ren<strong>du</strong> fameux, mais dont II semble impossible<br />

<strong>de</strong> tirer une fable dramatique. Cest aussi, <strong>de</strong><br />

tous les oufrages <strong>de</strong> Corneille, celui où il a dû le<br />

plus à son génie. Ni les anciens ni les mo<strong>de</strong>rnes ne<br />

lui ont rien fourni : tout est <strong>de</strong> création. Les trois<br />

premiers actes, pris séparément, sont peut-être,<br />

malgré les défauts qui s'y mêlent, ce qu'il a fait <strong>de</strong><br />

plus sublime, et en même temps c'est là qu'il a mis<br />

le plus d'art. Fontenelle, dans ses Réflexions MUT<br />

tJrê poétique, dont le principal objet est l'éloge<br />

<strong>de</strong> Corneille et <strong>la</strong> critique <strong>de</strong> Racine, a très-hiee<br />

dé?eloppé cet art employé par l'auteur <strong>de</strong>s Homem<br />

pour pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong> <strong>la</strong> variété et <strong>de</strong>§ pspsswns dans

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