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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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403<br />

grâce ? Je dis <strong>de</strong>s diamants : que sera-ce si sa parère<br />

est composée <strong>de</strong> pierres fausses et mal assorties,<br />

d'oripeau terne et <strong>de</strong> clinquant déjà passé ? c'est précisément<br />

ce que sont les ouvrages chargés <strong>de</strong> mauvaises<br />

figures f tels que ceux do père le Moine et<br />

tant d'autres, qu'on veut nous donner, comme fous<br />

le verrez tout à l'heure, pour <strong>de</strong>s trésors <strong>de</strong> poésie.<br />

Racine a quelquefois cinquante vers <strong>de</strong> suite sans<br />

qu'il y ait une seule figuré remarquable; et ils n'en<br />

sont pas moins beaui, parce qu'ils sont ce qu'ils<br />

doivent être, et qu'ils ont tous les autres mérites<br />

qu'ils doivent avoir. Il y a plus (et c'est là cette<br />

adresse merveilleuse, cette autre condition qu'exigent<br />

les meilleurs critiques, tels que Longin et<br />

QuintilieUfdaus l'emploi <strong>de</strong>s figures) : celles <strong>de</strong><br />

Racine sont toujours si bien p<strong>la</strong>cées, si .naturellemeetamenéesf-qu'onnelesaperçoitqueparréiexion.<br />

Il est hardi sans qu'on s'en doute, et c'est ainsi qu'il<br />

faut l'être. L'habileté consiste à pro<strong>du</strong>ire l'effet sans<br />

<strong>mont</strong>rer le ressort : il n'y a que les gens <strong>de</strong> l'art<br />

qui soient dans le secret. Quand il dit dans AtkaUe ,<br />

Faut-il t &bmt% faut-il mm rappeler le murs<br />

Des prodiges fameui accomplis m nos jours,<br />

Des tyrans d'Israël les célébrée disgrâces,<br />

Et Mets troof é Mêle «i toutes sa mamomj<br />

on sent bien que ce <strong>de</strong>rnier vers est beau; mais<br />

il faut y penser pour voir que c'est ordinairement<br />

dans ses promesses qu'on est trouvé fidèle $ et que<br />

fidèle dam ses menaces est d'un poète. Cependant<br />

personne n'est étonné <strong>de</strong> cette aMance <strong>de</strong> mots<br />

( car c 9 en est encore une ), parce que tout le mon<strong>de</strong><br />

supplée aisément l'ellipse f fidèk è accomplir ses<br />

menaces. On pourrait citer mille autres exemples :<br />

<strong>la</strong> lecture <strong>de</strong> Racine les amènera.<br />

Maïs parce que Yoltaire a moins <strong>de</strong> beautés <strong>de</strong><br />

ce caractère, est-il juste <strong>de</strong> le rabaisser? ffa-t-il<br />

pas d'autres qualités? Faut-il ne mettre dans <strong>la</strong><br />

ba<strong>la</strong>nce qu'un seul genre <strong>de</strong> mérite? N'y en a-t-il<br />

qu'un seul en poésie? Cette exclusion marque,<br />

ou <strong>la</strong> petitesse <strong>de</strong>s vues t ou <strong>la</strong> partialité <strong>du</strong> jugement.<br />

Quand un auteur a rempli les conditions<br />

essentielles qui font d'abord le grand écrivain , "il<br />

se distingue ensuite par un caractère qui lui est<br />

propre; et heureusement pour nous chacun a le<br />

sien. Voltaire ne ressemble pas à Racine : eh ! tant<br />

mieux. Nous avons <strong>de</strong>ux hommes au lieu d'un. L'un<br />

a plus <strong>de</strong> sagesse et d'art dans ses figures; l'autre<br />

a plus d'éc<strong>la</strong>t : l'un a souvent plus <strong>de</strong> correction;<br />

l'autre a quelquefois plus <strong>de</strong> charme : l'un met plus<br />

<strong>de</strong> logique dans son dialogue; l'autre plus <strong>de</strong> vivacité.<br />

Apprécions tous ces différents mérites, comparons<br />

, préférons selon notre manière <strong>de</strong> sentir;<br />

mais jouissons <strong>de</strong> tout et ne rabaissons rien.<br />

COURS DE LITTÉRATURE.<br />

11 me reste à faire voir jusqu'où cet amour aveugle<br />

pour les figures bien ou mal connues f et l'absur<strong>de</strong><br />

affectation d'y voir <strong>la</strong> véritable poésie, même<br />

quand elles y sont le plus opposées f égarent nos jugements.<br />

J'ai ren<strong>du</strong> justice aux rédacteurs <strong>de</strong>s Jm~<br />

naks poéêiques, à leurs recherches, à leur travail,<br />

aux notices en général judicieuses, où ils ont suivi<br />

les progrès <strong>de</strong> notre poésie dans ses premiers âges.<br />

Mais à mesure qu'ils approchent <strong>du</strong> nôtre, <strong>la</strong> contagion<br />

<strong>du</strong> mauvais goût dominant paraît trop les gagner;<br />

Ils prodiguent au père le Moine les louanges<br />

les plus exagérées, et ce qu'ils citent à l'appui <strong>de</strong><br />

leurs louanges ne <strong>de</strong>vrait le plus souvent être cité que<br />

pour faire voir combien v même dans ses meilleurs<br />

morceaux! il se trompe dans ce qu'il prend pour <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> poésie.<br />

« M sultan, disent-Os, prononce un dis<strong>cours</strong> où 1 y a<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> chaleur et <strong>de</strong>s expressions hardies, comme celle<br />

qui se trouve dans te second <strong>de</strong> ces vers :<br />

Déjà dans leur «prit l'Egypte est renversée;<br />

Wé§k dans notre sang îk trempent Umt pmtée »<br />

•Eh bien! vous ai-je trompés! Ne voi<strong>la</strong>-t-îl pas que<br />

l'on qualifie expressément <strong>de</strong> chakur et <strong>de</strong> lierdksse<br />

ce <strong>de</strong>rnier eicès <strong>de</strong> ridicule et d'extravagance ?<br />

Par quel moyen , sous quel rapport peut-on se représenter<br />

<strong>la</strong> pensée trempée dam le sangt et ce<br />

vers, qu'on ne peut entendre sans pouffer <strong>de</strong> riref<br />

est cité avec éloge !<br />

« L'expression <strong>du</strong> père te Moine est impurs hardie<br />

et poétigme. S'il veut peindre <strong>de</strong> grands arbres, voici<br />

comment il s'exprime :<br />

Et les plus lourdltaiK, dont <strong>la</strong> têtes litières t<br />

Jm lever dm ioteil, te trempaient les premières. »<br />

Comment ne s'est-on pas aperçu que <strong>de</strong>s pins qui<br />

se trouvent ks premiers au kver <strong>du</strong> soldi9 sont<br />

absolument <strong>du</strong> style burlesque? Une pareille idée<br />

serait digne <strong>de</strong> Scarron ; mais ce qui serait fort<br />

bien dans k Firgïk travesti, peut-il se trouver<br />

dans un poëme épique? Poursuivons le panégyrique<br />

et les citations.<br />

« Les vers <strong>du</strong> père le Moine se sont jamais composés<br />

d'hémistiches ressassés d'après autrui. Set défauts et ses<br />

beautés lui apparbennêiit..<br />

Cependant le soleil à mm §§te m rend;<br />

Le jour meurt, et Se brait avec le Jour mourant :<br />

Pmsr en p&rêer le <strong>de</strong>uil le* iénibret <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt ,<br />

Et d'une armée à faute en sUenee s'éten<strong>de</strong>nt. »<br />

Le second et le quatrième vers sont beaux; mais<br />

y a-t-il une idée plus fausse f plus insensée que ks<br />

ténèbres qui portent k <strong>de</strong>tte dmjourî 11 est diffielle<br />

en .effet <strong>de</strong> prendre à personne <strong>de</strong> pareilles<br />

choses : elles sont trop originales. Ce qui m'étonne,<br />

c'est qu'on ne cite pas missi connut Mm karmt

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