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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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AUCUNS. — PHILOSOPHIE. 413<br />

d'amour a?ce Julie, sœur <strong>de</strong> Galigu<strong>la</strong>. Gê <strong>de</strong>rnier<br />

grief avait été le sujet ou le prétexte <strong>de</strong> l'exil <strong>de</strong> Sénèque<br />

sous C<strong>la</strong>u<strong>de</strong>, et <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière opinion est <strong>la</strong> plus<br />

vraisemb<strong>la</strong>ble. Aujsun historien ne parle <strong>de</strong> ce commerce<br />

a?ec Julie que comme d'un brait vague ou<br />

d'une accusation supposée. Bios même, qui ménage<br />

fort peu Sénèque, n ? eo parle pas autrement. Saint-<br />

Éfremond, qui ne doutait <strong>de</strong> rien , fait aussi <strong>de</strong> Sénèque<br />

famoft** ^Àgripplm, sans y être plus autorisé<br />

, et-'âppareraraent pour le p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> faire d f un<br />

stoïcien un débauché. 11 n'y a là que <strong>de</strong>s rumeurs<br />

popu<strong>la</strong>ires, dont les historiens font mention sans<br />

les appuyer ; et Tacite se confirme en rien les dis<strong>cours</strong><br />

<strong>de</strong> Suillius. Si Ton a préten<strong>du</strong> (comme on peut<br />

le présumer par le texte <strong>de</strong> Di<strong>de</strong>rot f qui se fait l'objection)<br />

que Suillius n'a pu, tans être fou, articuler<br />

défaut Héron <strong>de</strong>s faits dont il pou?ait savoir <strong>la</strong><br />

fausseté f on a mal raisonné ; et Di<strong>de</strong>rot ne répond<br />

pas mieux en disant que Suillius pouvait être fou,<br />

puisqu'il éêait méchant ; c'est une argumentation<br />

stoïcienne, qui n'est concluante qu'au Portique. Mais<br />

rien n'empêche qu'un homme ulcéré ne répète contre<br />

un ennemi <strong>de</strong>s accusations qui ont éc<strong>la</strong>té sans être<br />

vérifiées. Quant aux richesses <strong>de</strong> Sénèque, le scandale<br />

n'a pu venir <strong>de</strong> Suillius. Sénèque lui-même, dans<br />

les dis<strong>cours</strong> qu'il adresse à Héron , avoue que cette<br />

excessive opulence ne convient pas à Sénèque f et je<br />

crois qu'il avait raison. Cependant je n'en conclurai<br />

pasf comme bien d'autres, que ce fût, à cet égard,<br />

mm hypocrite. On ne peut nier, je l'avoue, qu'il n'ait<br />

été assez généralement taxé d'hypocrisie pour qu'un<br />

sévère moraliste <strong>du</strong> <strong>de</strong>rnier siècle, <strong>la</strong> Rochefoucauld<br />

*, ait mis à <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> ses Maximes <strong>la</strong> figure<br />

<strong>de</strong> ce philosophe sous l'emblème <strong>de</strong> l'hypocrisie avec<br />

son masque et le nom <strong>de</strong> Sénèque au bas. C'est bien<br />

une forte preuve que ce nom n'était pas f à beaucoup<br />

près? aussi vénéré que voudraient nous le faire croire<br />

ses apologistes , qui ont toujours l'air <strong>de</strong> nous prendre<br />

pour <strong>de</strong>s gens d'un autre mon<strong>de</strong>. Si l'auteur <strong>de</strong>s<br />

Maximes eût fait une semb<strong>la</strong>ble caricature d'Aristi<strong>de</strong>,<br />

ou <strong>de</strong> Sacrale, ou <strong>de</strong> P<strong>la</strong>ton , ou <strong>de</strong> quelqu'un<br />

<strong>de</strong> ces fameux anciens dont <strong>la</strong> réputation est Intacte},<br />

que n*eût-on pas dit? Et personne <strong>de</strong>puis cent ans<br />

1<br />

Cest tans dotite fiejare <strong>la</strong> plus réfléchie et <strong>la</strong> plus caractérisés<br />

qu'on ait faite à Séfiètpe; «t en oonséquence, <strong>la</strong><br />

Rochefoucauld aurait dû étro traité comme lis sacrUége par<br />

nos foogûeu apologistes. Cependant Tus d'eux s'est borné à<br />

Kffluqinr que eeMe mtmmpe m§ m tmamit que iam k§ imm<br />

&m qmire pfmmièreM éëitwns; d'où il coacSot que Vauteitr<br />

M'émit wéirmeêé. D'autres eu concluraient seulement que, <strong>la</strong><br />

p<strong>la</strong>nche étant usée, et l'ouvrage abandonné ans libraires,<br />

os n'avait paa pris <strong>la</strong> peine <strong>de</strong> faire les frais d'une nou¥elle<br />

p<strong>la</strong>nche; mais le fait est que <strong>la</strong> famille,là Rochefoucauld<br />

était alors puissante et respectée, et qui! n'y avait pas moyen<br />

<strong>de</strong> faflUer aui Smiiiim. Mes apologistes ne s'en sont-Us pas<br />

bïm tirés? et Q v n*a dit un seul mat, personne sa s'est formalisé en<br />

faveur <strong>de</strong> Sénèque. Mais ce n'est pas non fi<strong>la</strong>s une<br />

preuve qu'il ait été réellement hypocrite sur l'article<br />

<strong>de</strong>s richesses. I<br />

ont-ils pas su tout nonommodag?<br />

e Un sage peut être riche sans déroger<br />

à <strong>la</strong> sagesse : il peut user <strong>de</strong> l'opulence sans y<br />

tenir. Nous ne savons pas quel usage en faisait Sénèque<br />

; mais rien n'indiquant qu'il fût mauvais f nous<br />

pouvons présumer qu'il était fion. Dion, toujours<br />

suspect quand il parle seul, fait <strong>de</strong> Sénèque un avare ;<br />

mais Juvénai parle <strong>de</strong>s beaux présents qu'il envoyait<br />

à ses amis. T II n'était pas sans'danger <strong>de</strong> rejeter<br />

les libéralités <strong>de</strong> Néron : cette retenue pou?ait paraître<br />

une censure <strong>de</strong>s prodigalités indécemment répan<strong>du</strong>es<br />

sur <strong>de</strong>s affranchis. Il était encore plus périlleux<br />

<strong>de</strong> lui rendre tout quand Sénèque quitta <strong>la</strong> cour :<br />

c'eût été comme une déc<strong>la</strong>ration <strong>de</strong> guerre; et si<br />

rhomme <strong>de</strong> bien doit tarer le danger nécessaire v<br />

il ne cherche pas un danger gratuit. 8 e Si Sénèque<br />

p<strong>la</strong>çait son argent à gros intérêts, c'était <strong>de</strong>puis<br />

longtemps l'usage universel <strong>de</strong>s Romains, même <strong>de</strong>s<br />

plus honnêtes gens; et Caton le Censeur et Bratus K<br />

étaient <strong>de</strong>s plus forts usuriers <strong>de</strong> leur temps. Bans<br />

tout ce qui n'est pas criminel en soi, et ne le défient<br />

qu'à une mesure éventuelle dont <strong>la</strong> règle peut varier,<br />

les mœurs publiques sont une excuse pour les<br />

indivi<strong>du</strong>s ; et c'est ce qu'il ne faut jamais perdre <strong>de</strong><br />

vue dans tout ce qui regar<strong>de</strong> les anciens.<br />

Que Di<strong>de</strong>rot crie, comme à l'audience : Instruis<br />

sons kprocès <strong>de</strong>SuiUius, et qu'il l'instruise en effet<br />

dans un terrible p<strong>la</strong>idoyer qui envoie ce misérable<br />

au roc tarpékn; <strong>la</strong>issons-le faire, c'est qu'il a <strong>du</strong><br />

temps à perdre. Le procès <strong>de</strong> Sénèque, un peu plus<br />

important, n'a rien <strong>de</strong> commun avec celui <strong>de</strong> Suillius.<br />

Il s'agit pour nous <strong>de</strong> savoir, I e si Sénèque a<br />

été, dans son exil <strong>de</strong> Corse, le plus bas et le plus dégoûtant<br />

f<strong>la</strong>tteur <strong>de</strong> l'imbécile C<strong>la</strong>u<strong>de</strong>, et d'un affranchi<br />

nommé Polybe, auquel il adresse une Conso<strong>la</strong>tion<br />

qui a toujours fait partie <strong>de</strong> ses ouvrages ; 2 e s'il<br />

a été le vil comp<strong>la</strong>isant <strong>du</strong> crime, et l'infâme apologiste<br />

d'un parrici<strong>de</strong>, quand Héron fit périr sa mère.<br />

Yoità ce que reprochent à Sénèque tous ceux qui refusent<br />

<strong>de</strong> reconnaître dans ses actions <strong>la</strong> morale <strong>de</strong><br />

ses écrits. Dion et son abréviateur Xyphilin ne sont<br />

ici pour rien. Jamais Suillius n'a parlé ni pu même<br />

parler <strong>de</strong> ce qui va nous occuper. Nous tenons d'écarter<br />

sa querelle particulière'avec Sénèque, et d'annuler<br />

tous les reproches qu'il lui a faits. Fous allons<br />

donc juger Sénèque sur le récit, sur le seul récit <strong>de</strong><br />

Tacite, autorité irréfragable pour les apologistes<br />

comme pour nous. Songez à présent, je voua prie,<br />

1<br />

Voyei t dans les Lettm

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