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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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30<br />

COU1S DE LITTÉMTOiP.<br />

Mais âfâsîcîe le mwmiam le eours <strong>de</strong> son ou?ragef '<br />

il convient <strong>de</strong> dire un mot <strong>de</strong> fauteur.<br />

Longin était se à Athènes , et Hérissait fers <strong>la</strong> fis<br />

<strong>du</strong> troisième siècle <strong>de</strong> notre ère. C'était l'homme le<br />

plus célèbre <strong>de</strong> son temps pour le goût et l'éloquence,<br />

et <strong>la</strong> lecture <strong>du</strong> seul Traité qui nous reste<br />

<strong>de</strong> lui suffit pour justifier cette reptation* Il y règne<br />

a a jugement sain, un style animé, et un ton<br />

d'éloquence convenable au sujet. La fameuse Zénobie,<br />

reine <strong>de</strong> Palmyre, qui lutta si malheureusement<br />

contre <strong>la</strong> fortune d'Aurélien, avait fait venir<br />

Longin à sa cour9 pour prendre <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>s leçons<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong>ngue grecque et <strong>de</strong> philosophie. Découvrant<br />

dans 6on maître <strong>de</strong>s talents supérieurs, elle en avait<br />

avait fait son principal ministre. Lorsque, après <strong>la</strong><br />

perte d'une gran<strong>de</strong> bataille qu'elle livra aui Romains,<br />

elle fut obligée <strong>de</strong> se renfermer dans sa capitale,<br />

et reçut d'Aurélien une lettre qui l'invitait à<br />

se rendre, ce fut Longïn qui l'encouragea à se défendre<br />

jusqu'à l'eitrémité , et qui lui dicta <strong>la</strong> réponse<br />

noble et fière que l'historien Yopiscus nous a<br />

conservée. Cette réponse coûta <strong>la</strong> fie à Longin. Auré-<br />

ISen, vainqueur, maître <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Palmyre et <strong>de</strong><br />

Zénobie, réserva cette reine pour son triomphe, et<br />

envoya Longin au supplice. Il y pria le même cou- <<br />

rage qu'il avait su inspirer à sa reine, et sa mort it<br />

autant d'hooneur à sa philosophie que <strong>de</strong> honte à<br />

<strong>la</strong> cruauté d'Aurélien. Il avait fait quantité d'ouvrages<br />

dont nous n'avons plus que les titres. Ils<br />

rou<strong>la</strong>ient tous sar <strong>de</strong>s objets <strong>de</strong> critique et <strong>de</strong>-goût.<br />

La tra<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> son TmUé êm Sublime par Boiîeaa<br />

n'est pas digne <strong>de</strong> cet illustre auteur : elle manque<br />

d'exactitu<strong>de</strong>, <strong>de</strong> précision et d'élégance, et je<br />

n'ai pu en faire que peu d'usage. Ce n'est pas qu'il<br />

ne sût bien le grec; mais s'étant mépris sur le but<br />

principal <strong>de</strong> l'ouvrage, il est obligé souvent <strong>de</strong> faire<br />

violence au texte <strong>de</strong> fauteur pour le ramener à son<br />

sens : on sait d'ailleurs que sa prose est es général<br />

fort an-<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> ses vers; elle est lâche, négligée<br />

et incorrecte, quoique dans plusieurs préfaces, et<br />

dans les reflétions qui suivent sa tra<strong>du</strong>ction, il y<br />

ait encore <strong>de</strong>s endroits où l'on retrouve le sel <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

satire, et ce sens droit qui le caractérisait partout.<br />

Ce que nous avons vu <strong>de</strong> l'exor<strong>de</strong> <strong>de</strong> Longin, fait<br />

apercevoir déjà qu'il ne^s'agit point <strong>de</strong> ce sublime<br />

proprement dit, dont j'ai parlé jusqu'ici. Comment<br />

pourrait-il dire, en ce sens, qu'il y a un art <strong>du</strong> sublime?<br />

Ce<strong>la</strong> se saurait se supposer d'un homme<br />

aussi judicieux qu'il le paraît dans tout le reste. On<br />

peut, avec <strong>du</strong> talent, apprendre à bien écrire; mais<br />

certes, on n'apprend point à être sublime. Le titre<br />

littéral <strong>de</strong> son ouvrage est, <strong>de</strong> M Stêimîîê ; ce qui<br />

doit s'entendre naturellement <strong>de</strong> <strong>la</strong> perfection <strong>du</strong><br />

genre sublime. ¥oki les cinq choses principales qui,<br />

selon lui f peuvent y con<strong>du</strong>ire : une audace heureuse<br />

dans les pensées, l'enthousiasme <strong>de</strong> <strong>la</strong> passion,<br />

l'usage <strong>de</strong>s figures, le choii <strong>de</strong>s mots ou l'-étoeution,<br />

et ce que les anciens appe<strong>la</strong>ient k composition,<br />

c'est-àndire l'arrangement <strong>de</strong>s paroles, re<strong>la</strong>tivement<br />

au nombre et à l'harmonie. Qui ne voit que<br />

ce sont là les cinq choses qui forment <strong>la</strong> perfection<br />

d'un ouvrage, mais,qu'elles peuveat s'y réunir<br />

toutes sans qu'il y ait un trait <strong>de</strong> ce sublime qui<br />

transporte tous les hommes avec un seul mot, tandis<br />

qu'au contraire ce seul mot peut se trouver dans un<br />

ouvrage qui n'aura d'ailleurs aucun mérite? citons<br />

<strong>de</strong>s exemples. BrMamdcws est assuré ment un <strong>de</strong>s<br />

plus heaui monuments <strong>de</strong> notre <strong>la</strong>ngue. 11-y a <strong>de</strong>s<br />

morceaux d'un style sublime, entre autres, le dis<strong>cours</strong><br />

<strong>de</strong> Burrhus à Néron. Il n'y a rien cependant<br />

qui pro<strong>du</strong>ise le même effet d'admiration que cet endroit<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Médée <strong>de</strong> Corneille ( pièce très-mauvaise<br />

<strong>de</strong> tout point), que Ton a toujours cité parmi les<br />

traits sublimes <strong>de</strong> ce grand homme :<br />

POUF voir m quel état le tort votn a teMatte !<br />

Votre pays vous hall, ¥©tre époux est tans foi.<br />

Bans en il grand re?ers, que TOOJ reste-UÎ Moi<br />

Mol fdls-Jet et ffeft assez.<br />

Des gens difficiles ont préten<strong>du</strong> que ce <strong>de</strong>rnier<br />

hémistiche affaiblissait 1a beauté <strong>du</strong> wmL Cest se<br />

tromper étrangement : bien loin <strong>de</strong> diminuer le sublime<br />

, il l'achève; car le premier mtâ pouvait n'être<br />

qu'un é<strong>la</strong>n d'audace désespérée, mais le second est<br />

<strong>de</strong> réflexion; elle y a pensé, et elle insiste ; ateaf,<br />

éi$-je, et c'est m$e%« Le premier étonne, le second<br />

fait trembler quand on songe que c'est Médée qui le<br />

prononce.<br />

Et dans Nieomé<strong>de</strong>, tragédie d'ailleurs si défectueuse<br />

et si souvent au-<strong>de</strong>ssous<strong>du</strong> tragique *, quand<br />

le timi<strong>de</strong> Prasias dit à son fils,<br />

Je veui mettre d'aeoord rameur et <strong>la</strong> nature,<br />

Être père et mari dans cette eoijoacta»,<br />

Micomè<strong>de</strong> lui répond,<br />

Seigneur, voulea-Tous Mes vont m 1er à mol?<br />

le §eyei Vm ml Feutre,<br />

PBDSIAS.<br />

Et que âeis-Je être?<br />

mCOHÉBS.<br />

Roi.<br />

Ce mot mmlie roi, dans <strong>la</strong> situation, dit tout ce<br />

qu'il est possible <strong>de</strong> dire. On ne peut rien concevoir<br />

au <strong>de</strong>là : c'est le sublime <strong>de</strong> <strong>la</strong> pensée. Celui<br />

<strong>de</strong> l'expression s'offre encore dans une <strong>de</strong> ces pro~<br />

• II y aurait beaucoup à dire sur le fJérJafn <strong>de</strong> <strong>la</strong> Harpe et<br />

<strong>de</strong> Voltaire pour un ouvrage que <strong>de</strong>s beautés d'us ordre supérieur<br />

ont maintenu eu possession <strong>de</strong> <strong>la</strong> scène, et qui n'y<br />

manque Jamais aon effet Voyez le Méperimrg <strong>de</strong> <strong>la</strong> MMémfure<br />

ee<strong>de</strong>eee ei mo<strong>de</strong>rne, XII, p. lia.)

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