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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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C'est précisément limage <strong>de</strong> Démosthènet quand<br />

il a en tête un adversaire; et malheur à qui se troufait<br />

sous <strong>la</strong>.main <strong>de</strong> ce ru<strong>de</strong> jouteur! C'est ches<br />

lui que je fais prendre d'abord <strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong><br />

moyens et <strong>de</strong> formes oratoires; j'en tirerai ensuite<br />

<strong>de</strong> Cieéros; et vous jugerez <strong>la</strong> différente manièce<br />

<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux grands hommes.<br />

Dans ce femeux procès pmtr <strong>la</strong> €m$rmm9 où<br />

Démosthènes avait toute raison, Eschine s'était<br />

rejeté sur <strong>la</strong> teneur <strong>du</strong> décret <strong>de</strong> couronnement et<br />

sur le texte <strong>de</strong>s lois, matière où <strong>la</strong> chicane <strong>de</strong>s mots<br />

trente toujours <strong>de</strong>s ressources faciles ; et l'accusateur,<br />

lïoraroe <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> talent, les avait fait<br />

valoir avec toute l'adresse possible. Une loi défendait<br />

<strong>de</strong> couronner un comptable : il prétend que<br />

Démosthènes l'est : d'où il conclut que le décret est<br />

illégal et nul. Il se fondait sur ce que Démosthènes<br />

était encore chargé <strong>de</strong> l'administration <strong>de</strong>s spectacles<br />

et l'avait été dès <strong>la</strong> réparation <strong>de</strong>s murs d'Athènes.<br />

La première comptabilité n'avait aucun<br />

rapport au décret qui ne couronnait Démosthènes<br />

que pour <strong>la</strong> gestion qui concernait <strong>la</strong> réparation<br />

<strong>de</strong>s mors. Il est vrai que pour cette <strong>de</strong>rnière il n'avait<br />

ren<strong>du</strong> aucun compte; mais il en avait une fort<br />

bonne raison; c'est qu'il avait presque tout fait à<br />

ses dépens ; et c'était précisément pour récompenser<br />

cette libéralité civique et reconnueque le sénat, bien<br />

loin <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s comptes, lui avait décerné<br />

une couronne d'or. Mais Eschine s'était retranché<br />

dans le teite littéral, et <strong>de</strong> plus, avait affecté <strong>de</strong> mêler<br />

et <strong>de</strong> confondre <strong>de</strong>ux comptabilités fort distinctes,<br />

celle <strong>de</strong>s spectacles et celle <strong>de</strong>s murs : c'était bien là<br />

une matière <strong>de</strong> pur raisonnement. Tous ailes voir<br />

comme Démosthènes sait <strong>la</strong> rendre oratoire, comme<br />

il <strong>la</strong> relève par <strong>la</strong> noblesse <strong>de</strong>s pensées et <strong>de</strong>s sentiments,<br />

en mène temps qu'il fait rayonner l'évi<strong>de</strong>nce<br />

<strong>de</strong>s principes et <strong>de</strong>s faits par une logique lumineuse.<br />

n SI Je passe seas siieaee îa plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> ce qse<br />

f ai <strong>la</strong>it pour le bien <strong>de</strong> <strong>la</strong> république dans les différentes<br />

fonctions qu'elle m'a confiées, c'est parce que ma conscience<br />

m'assure <strong>de</strong> <strong>la</strong> vôtre » et pour ee venir pins tôt ani<br />

lois que Ton prétend avoir été violées par le décret <strong>de</strong> Clé»<br />

siphon. Eschine a tellement embarrassé et obscurci tout ce<br />

qu'il a dit à ce sujet ; qu'en vérité je se crois pas que vous<br />

l'ayez compris mieux qui! s'a pu se comprendre lui-même.<br />

A ses longues déc<strong>la</strong>mations je répondrai ; moi 9 par une déc<strong>la</strong>ration<br />

nette et précise. Il a cent fois répété que je suis<br />

comptable. £fa bien ! je sois si loin <strong>de</strong> le nier f que pendant<br />

ma vie entière je me liens votre comptable t ô mes conci­<br />

toyens f <strong>de</strong> font ce qae j'aurai fait dans l'administration <strong>de</strong>s<br />

affiûres publiques. »<br />

Avant d'aller pins loin , arrêtons-nous un moment<br />

(car <strong>la</strong> chose en vaut <strong>la</strong> peine) pour remarquer ce<br />

ANCIENS. — ÉLOQUENCE. 243<br />

que c'est que <strong>la</strong> véritable éloquence, celle qui vient<br />

<strong>de</strong> fâme : Peetus est, qmd éîmrium farii. Cette<br />

expression simple et franche d'un grand et beau<br />

sentiment <strong>de</strong> citoyen n'a-t-elle pas déjà fait tomber<br />

tontes les ingénieuses arguties d f Eschine? Et en<br />

même temps, comme elle est vraiment oratoire et<br />

fondée sur <strong>la</strong> connaissance <strong>de</strong>s hommes ! Comme<br />

Démosthènes connaît bien ses auditeurs et ses juges l<br />

comme il est sûr d'en obtenir tout, en se mettant entre<br />

leurs mains, et même dans celles <strong>de</strong> son adversaire,<br />

et en offrant beaucoup plus qu'on ne peut toi<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r! Et qu'on ne dise pas qu'une pareille déc<strong>la</strong>ration<br />

est bien facile, que tout le mon<strong>de</strong> peut<br />

<strong>la</strong> faire. Oui, maïs il s 9 agit <strong>de</strong> f effet qu'elle doit pro<strong>du</strong>ire<br />

; et il ne faut pas s'y tromper, cet effet ne tient<br />

pas seulement au talent, mais à <strong>la</strong> personne et à<br />

sou caractère : pour s'exprimer ainsi avec succès,<br />

il faut être pur. Un homme dont <strong>la</strong> probité serait<br />

équivoque ne serait que ridicule en tenant ce <strong>la</strong>ngage,<br />

on sourirait <strong>de</strong> pitié; et un fripon reconnu serait<br />

sifflé. Aussi les anciens définissaient l'orateur vir<br />

bonus dîemdî per<strong>du</strong>s, un homme <strong>de</strong> bien instruit<br />

dans fart <strong>de</strong> <strong>la</strong> parole. Cette déc<strong>la</strong>ration ne serait<br />

donc plus oratoire, si elle s'était pas vraie. Nous<br />

aurons occasion, par ta suite, <strong>de</strong> relever cette singerie<br />

ma<strong>la</strong>droite, ce char<strong>la</strong>tanisme impu<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s<br />

hommes pervers qu'on a vus si souvent emprunter<br />

et défigurer ces eipressions <strong>du</strong> témoignage intime<br />

que peut se rendre <strong>la</strong> vertu, et qui ne ssjett dans<br />

leur bouche qu'un outrage <strong>de</strong> plus qu'ils osent lui<br />

faire. 11 est impuni, je l'avoue, quand il s'adresse<br />

à <strong>de</strong>s complices ou à <strong>de</strong>s esc<strong>la</strong>ves; mais, quand <strong>la</strong><br />

sclx publique est libre, elle fait justice sur-lechamp<br />

<strong>de</strong> cette insolente hypocrisie. Je n'en rapporterai<br />

qu'un exemple, antérieur même à <strong>la</strong> révolution.<br />

Un homme qui n'avait point mérité <strong>la</strong> mort qu'on<br />

lui a fait subir <strong>de</strong>puis, mais dont l'immoralité servile<br />

et vénale était connue, Linguet, s'avisa un jour <strong>de</strong><br />

s'appliquer es pleine audience ce vers d'Hippolyte<br />

dans <strong>la</strong> tragédie <strong>de</strong> Pkêdre (aet. iv, se. ïî) :<br />

Le Jour n'est pm plus par que le fond <strong>de</strong> mon eœar.<br />

A peine le plus honnête homme aurait-il pu 9 sans<br />

être taxé <strong>de</strong> quelque jactance, se donner à lui-même<br />

en public un pareil éloge, qui c'est permis qu'à<br />

<strong>la</strong> vertu calomniée. Linguet fut accueilli par une huée<br />

universelle; il se retourna vers l'assemblée avec <strong>de</strong>s<br />

regards menaçants, comme nous l'avons vu <strong>de</strong>puis<br />

<strong>mont</strong>rer le poing à l'Assemblée constituante. Mais<br />

ces moyens, qui, quoique très-communs aujour­<br />

d'hui, ne sont pas plus d'un orateur que d'un honnête<br />

homme, parce que <strong>la</strong> décence est inséparable <strong>de</strong><br />

l'honnêteté, ne servirent qu'à faire redoubler les<br />

huées. Ce<strong>la</strong> était juste , et il faut avouer que jamais<br />

îs.

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