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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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ANCIENS. — POÉSIE.<br />

leur poésie, les formes doivent être haMtiielleisieiit<br />

répétées et correspondantes , parée qu'ils ont cherché<br />

dans <strong>de</strong>s retours symétriques l'agrément qu'ils<br />

ne pouvaient trouver dans le nombre et là variété,<br />

comme nous-mêmes avons en re<strong>cours</strong> à <strong>la</strong> rime, au<br />

iéfaat d'une prosodie aussi accentuée que celle <strong>de</strong>s<br />

Gréa et <strong>de</strong>s Latins; et <strong>la</strong> rime n'est aussi qu'un genre<br />

<strong>de</strong> symétrie. De là encore, si <strong>la</strong> phrase <strong>de</strong>s Hébreu*<br />

est ©ose», leur style doit manquer souvent <strong>de</strong> précision,<br />

et les idées y sont repro<strong>de</strong>itesuvee <strong>de</strong>s différences<br />

légères, pour conserver le rapport <strong>de</strong>s formes.<br />

Mais il en arrive aussi que leur poésie est singulièrement<br />

animée et audacieuse, parce qu'ils substituent<br />

les mouvements aux liaisons qu'ils n'ont pas ; que leur<br />

«pression est très énergique, ne pouvant guère<br />

être nuancée; que chez eut <strong>la</strong> métaphore est plus<br />

bardieque partout ailleurs, parce que les figures<br />

sont un besoin dans une <strong>la</strong>ngue pauvre f au lieu<br />

qu'elles sont un ornement dans une <strong>la</strong>ngue riche.<br />

Ce que nous rendons par <strong>de</strong>s termes abstraits, ils<br />

répriment le plus souvent par <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions physiques<br />

; et c'est surtout ce défaut <strong>de</strong> mots abstraits<br />

qui Eût que, chez eui, presque tout est image, emblème,<br />

allégorie. Rien ne prouve mieux cette vérité,<br />

qui n'est bien enten<strong>du</strong>e que <strong>de</strong>s hommes très-instraits,<br />

que le génie <strong>du</strong> style et <strong>de</strong>s écrivains est naturellement<br />

modifié par celui <strong>de</strong>s <strong>la</strong>ngues, et que les<br />

différentes beautés <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>ctions <strong>de</strong>s différents<br />

peuples dépen<strong>de</strong>nt non-seulement <strong>de</strong> ce que leur<br />

donne leur idiome, mais mime <strong>de</strong> ce qu'il leur refuse.<br />

11 est dans le progrès <strong>de</strong>s choses que les <strong>la</strong>ngues<br />

qui se sont formées dans <strong>la</strong> succession <strong>de</strong>s temps,<br />

dm <strong>de</strong>s peuples favorisés par <strong>la</strong> nature et le climat,<br />

tels que les Grecs et les Latins, aient été beaucoup<br />

plus abondantes que celles <strong>de</strong>s premiers siècles, en<br />

tout ce qui appartient aux idées ml s tes f aux modiieatiôas<br />

<strong>du</strong> dis<strong>cours</strong>, au raffinement <strong>de</strong> <strong>la</strong> pensée,<br />

fin suit celui <strong>de</strong>s moeurs et <strong>de</strong>s usages. C'est <strong>de</strong> tout<br />

ce<strong>la</strong> que su forme le ini <strong>de</strong> <strong>la</strong> composition dans les<br />

détails; mais rien ne serait plus déraisonnable que<br />

<strong>de</strong> l'exiger <strong>de</strong>s ouvrages nés dans les âges antiques.<br />

11 ne fendrait pas même l'y désirer; car ce qu'ils ont<br />

et plus précieux est précisément cette beauté primitive<br />

et inculte qu'on aime à rencontrer dans les<br />

oeuvres <strong>de</strong> l'esprit humain, aux époques les plus<br />

lointaines, et qui se passe très-bien <strong>de</strong> l'élégance <strong>de</strong>s<br />

parures mo<strong>de</strong>rnes : celles! est un mérite, sans doute,<br />

mais pour nous seuls, et n'était pas us <strong>de</strong>voir il y<br />

a trois mille ans.<br />

Or, ce genre <strong>de</strong> beauté, d'autant plus remarquable<br />

qu'il est absolument le même à <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s distances,<br />

<strong>de</strong> Job à Moïse, <strong>de</strong> Moïse à David, et <strong>de</strong><br />

David à lsaïcs est encore si réel et si éminent, que<br />

181<br />

nos plus habiles tersîlcatemrs ont mis beaucoup<br />

«fart et <strong>de</strong> travail à_s'en rapprocher, et ne l'ont pas<br />

toujours égalé. Que d'essais n'a-t-on pas faits en m<br />

genre sur les Psaumes! Et le seul Rousseau peut<br />

soutenir habituellement <strong>la</strong> comparaison, et pas toujours.<br />

Je n'en voudrais pour preuve que le psaume<br />

CœM enarrant. Il est vrai que, dans <strong>la</strong> première*<br />

strophe, Rousseau s'est beaucoup trop <strong>la</strong>issé aller<br />

à <strong>la</strong> paraphrase; mais, fût-elle meilleure, elle vaudrait<br />

difficilement ce premier verset :<br />

« Les c«aa racontent <strong>la</strong> g<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> Interne! 9 et le firmament<br />

annonce l'ouvrage <strong>de</strong> tes mains, *<br />

Quelle majestueuse' simplicité! et combien en est<br />

loin ce commencement, malgré toute l'élégance <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux vers!<br />

Las c<strong>la</strong>ns Inslralsenl <strong>la</strong> terre<br />

À revérer km auteur.<br />

B'Alembert, qui là-<strong>de</strong>ssus n'était pas suspect <strong>de</strong><br />

prévention, regrette <strong>la</strong> touchante naïveté <strong>du</strong> cantique<br />

d'Éiéchias jusque dans cette immortelle imitation<br />

qu'en a faite Rousseau, dont cette o<strong>de</strong> est peutêtre<br />

<strong>la</strong> plus parfaite» Je crois que d f Alembert avait<br />

raison en un sens; mais peut-être ne sentait-tl pas<br />

assez l'harmonie enchanteresse <strong>du</strong> cantique français :<br />

elle est telle, qu'on peut <strong>la</strong> mettre en compensation<br />

pour tout le reste; et il faut tenir compte <strong>de</strong> ces<br />

sortes d'équivalents, quand il n'est pas possible <strong>de</strong><br />

trouver dans sa <strong>la</strong>ngue <strong>la</strong> même espèce <strong>de</strong> mérite que<br />

dans f original ; et je suis convaincu qu'on ne le peut<br />

pas.<br />

Racine ne s*esl élevé si haut, au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> tous les<br />

poètes français, dans Esther et dans AWmUe9 que<br />

parce qu'il y a fon<strong>du</strong> <strong>la</strong> substance et l'esprit <strong>de</strong>s livres<br />

saints, plutôt qu'il n'en a essayé <strong>la</strong> tra<strong>du</strong>ction.<br />

C'est vraiment un coup <strong>de</strong> maître; car il a su échapper<br />

ainsi au parallèle exact, et il est <strong>de</strong>venu pour<br />

nous original. C'est un prophète d'Israël qui écrit<br />

en français; aussi n'avons-nous rien <strong>de</strong> comparable<br />

au style û'Ettker et i'Jéka&e, Mais quand il tra<strong>du</strong>it<br />

expressément un passage distinct, alors Racine luimême<br />

, tout Racine qu'il est, reste quelquefois au*<br />

<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> David. En voici <strong>la</strong> preuve :<br />

Fa! YH l'Impie adoré sur Sa terre ;<br />

Pareil au eèdn, il cachait dans les fient<br />

Son front audacieux. *<br />

Il eemb<strong>la</strong>it à ion gré gtmvemm le tonnerre,<br />

Fou<strong>la</strong>it aux pieds tes ennemis vairens :<br />

le n'ai fait que passer, I n'était ié|à plus.<br />

Certes f le poëte a fait ici ce qu'il y avait <strong>de</strong> mieux à<br />

faire : il a eu re<strong>cours</strong> à <strong>la</strong> richesse et I Fédat <strong>de</strong><br />

ta plus magnifique paraphrase 9 dans l'impossibilité<br />

d'égaler <strong>la</strong> sublime concision <strong>de</strong> l'original. Maïs enf<strong>la</strong>,<br />

mettes ces beaux vers en comparaison avec le

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