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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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est fort mauTaisef et <strong>la</strong> diction souvent <strong>du</strong>re, quoiqu'il<br />

ne manque point <strong>de</strong> force poétique.<br />

P. 5. C'est à l'article <strong>de</strong> l'épopée que j'aurais dû<br />

faire mention d'Apollonius <strong>de</strong> Rho<strong>de</strong>s , auteur d'un<br />

poème en quatre chants, sur l'ExpédMon-<strong>de</strong>s Argonautes<br />

; et cette omission doit être réprée ici f<br />

parce que cet ouvrage ne mérite pas d'être oublié.<br />

Ce n'est pas que <strong>la</strong> conception en soit bonne et<br />

vraiment épique : il y a peu d'art dans le p<strong>la</strong>n , qui<br />

est à <strong>la</strong> fois trop historique dans Tordre <strong>de</strong>s faits,<br />

et trop chargé d'épiso<strong>de</strong>s sans effet et sans choii;<br />

mais Feiécutîon n'est pas sans mérite eu quelques<br />

parties. L'amour <strong>de</strong> Médée pour Jason est peint avec<br />

une vérité qui <strong>la</strong>isse souvent désirer plus <strong>de</strong> force,<br />

mais qui ne parait pas avoir été inutile à Virgile.<br />

On voit que le chantre <strong>de</strong> Bidon n'a pas dédaigné<br />

d'emprunter quelques idées d'Apollonius; mais il<br />

faut avouer aussi qu'il leur prête une force d'expression<br />

passionnée dont le poëte grec est bien loin :<br />

les emprunts sont peu <strong>de</strong> chose, et <strong>la</strong> supériorité<br />

est immense.<br />

Apollonius vivait sons Ptolémée Phi<strong>la</strong>dèfphe.<br />

Valérsus F<strong>la</strong>ccus, poëte romain <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> Yespasien,<br />

traita le même sujet dé <strong>la</strong> Conquête <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> Toison'd'ors m huit livres, qui ne sont pas les<br />

chants d'un poème; car il n'y a <strong>de</strong> poésie d'aucune<br />

espèce : il est aussi loin d'Apollonius, que celui-ci<br />

<strong>de</strong> Virgile.<br />

CHAPITRE V. — ne <strong>la</strong> tragédie ancienne.<br />

«CMOS rasmÈEB. —Idées générales sur te théâtre<br />

Rien n'est si commun en tout genre que les avis<br />

extrêmes, et c'est par cette raison que rien n'est si<br />

rare que <strong>la</strong> vérité; car elle est, comme <strong>la</strong> vertu,<br />

p<strong>la</strong>cée entre <strong>de</strong>ux excès. On trouve encore bien <strong>de</strong>s<br />

personnes instruites qui croient le théâtre grec fort<br />

supérieur au nôtre, et qui soutiennent qu'Eschyle,<br />

Sophocle et Euripi<strong>de</strong> n'ont pas été surpassés, ni<br />

même égalés. 11 y aura toujours parmi les érudits<br />

une c<strong>la</strong>sse d'hommes qui n'admirent que les anciens,<br />

parce qu'ils chérissent exclusif ement l'objet <strong>de</strong> leurs<br />

étu<strong>de</strong>s, et qu'ils ne peuvent ni tra<strong>du</strong>ire ni commenter<br />

les mo<strong>de</strong>rnes. D'un autre côté, <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> beaucoup<br />

d'esprit, mais qui ont peu étudié l'antiquité,<br />

ou qui ne peuvent s'accoutumer à <strong>de</strong>s moeurs trop<br />

différentes <strong>de</strong>s nôtres, regar<strong>de</strong>nt <strong>la</strong> tragédie grecque<br />

comme une déc<strong>la</strong>mation dramatique, et s'y<br />

voient que l'enfance d'un art que nous avons porté à<br />

sa perfection, le crois ces <strong>de</strong>ux opinions également<br />

injustes. Brumoy, littérateur asseï instruit, mais<br />

COU1S DE LITTÉRATURE.<br />

qui avait plus <strong>de</strong> connaissances que <strong>de</strong> goût, tout en<br />

condamnant ces <strong>de</strong>ux avis entrerais, ne se <strong>mont</strong>re<br />

pas lui-même exempt <strong>de</strong> toute prévention, et, en<br />

avouant que nous avons perfectionné le théâtre, il<br />

justifie beaucoup <strong>de</strong> fautes <strong>de</strong>s anciens, et veut trop<br />

souvent excuser, par <strong>la</strong> différence <strong>de</strong>s temps, ce qui<br />

partout est mauvais en soi. 11 proscrit les pièces d'invention,<br />

et croit trouver dans <strong>la</strong> nature <strong>de</strong> bonnes<br />

raisons pour qu'on ne puisse s'intéresser à ces sortes<br />

<strong>de</strong> pièces. Zaïre, Alzire, et plu sieurs autres ouvrages<br />

d'un grand effet, l'ont suffisamment réfuté. Mais<br />

Brumoy s'entendait-il bien lui-même, lorsqu'au recherchant<br />

le principe et l'objet <strong>de</strong> <strong>la</strong> tragédie, il<br />

s'exprime ainsi :<br />

« <strong>la</strong> crainte st <strong>la</strong> pitié sont tes passions les plus iaagareuses,<br />

comme elles sont les plus «mmmiss ; car si Fuse,<br />

et par conséquent l'autre, à casse <strong>de</strong> leur Maison, §iace<br />

éierneilemenê les hommes, il n'y a plus lien à <strong>la</strong> fermeté<br />

d'âme nécessaire pour supporter les malheurs inévitables<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> vie ; et pour serf ivre à leur Impression trop souvent<br />

réitérée. La tragédie corrige <strong>la</strong> crainte par <strong>la</strong> crainte , et <strong>la</strong><br />

pitié par <strong>la</strong> pitié ; chose d'autant plus agréable que le cœur<br />

humais aime ses sentiments et ses faiblesses : i s'imagine<br />

donc qu'on veut le f<strong>la</strong>tter» et il se trouve InfMffîMaMitt<br />

guéri par le p<strong>la</strong>isir même qu'il a pris à se sé<strong>du</strong>ire. »<br />

J'avoue que je n'ai jamais rien vu <strong>de</strong> lotit ce<strong>la</strong><br />

dans <strong>la</strong> tragédie. Les paroles <strong>de</strong> Brumoy ne sont<br />

qu'un commentaire subtil et erroné <strong>du</strong> passage d'Aristote<br />

où il est dit que <strong>la</strong> tragédie, par ta terreur<br />

et <strong>la</strong> pitié, sait eortiger tes'<strong>de</strong>ux qffictiom <strong>de</strong><br />

rame; ce qui signifie simplement que l'illusion dramatique,<br />

en nous les faisant ressentir, leur été ce<br />

qu'elles ont <strong>de</strong> pénible et d'amer. Cette explication<br />

est aussi c<strong>la</strong>ire que p<strong>la</strong>usible. Mais ce qui peut excuser<br />

ceux qui ont adopté celle <strong>de</strong> Brumoy, c'est<br />

cette fatalité invincible qui, accab<strong>la</strong>nt les humains<br />

<strong>de</strong>s 4 malheurs inévitables , faisait le fond <strong>de</strong> <strong>la</strong> tragédie<br />

chez les Grecs, comme elle faisait h base <strong>de</strong><br />

leur système religieux. D'après ce principe Y le spectacle<br />

<strong>de</strong>s malheurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> condition humaine , étalé<br />

sur <strong>la</strong> scène, a pu paraître une leçon qui avertissait<br />

<strong>de</strong> s'armer <strong>de</strong> courage et <strong>de</strong> patience , et-<strong>de</strong> repousser<br />

également et <strong>la</strong> crainte qui g<strong>la</strong>ce f âme et cette faiblesse<br />

p<strong>la</strong>intive qui l'amollit. Mais, quoique en effet<br />

toutes les pièces grecques puissent donner cette leçon<br />

, on ne voit point qu'âristote en fasse nulle part<br />

l'objet principal <strong>de</strong> <strong>la</strong> tragédie et le premier but <strong>de</strong><br />

Fart dramatique. Les mo<strong>de</strong>rnes se sont égarés en<br />

donnant une trop gran<strong>de</strong> extension au passage <strong>du</strong><br />

maître; et Brumoy, en particulier, s'efforce <strong>de</strong><br />

prouver fort au long que, si Eschyle et Sophocle<br />

n'ont pas eu précisément cette idée, ils ont dû concevoir<br />

quelque chose d'approchant, el qu'if est fin-

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