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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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SIÈCLE DE LOUIS XIV. — POÉSIE.<br />

peut-il être ptas poétiquement désigné que dans cet '<br />

endroit <strong>de</strong> <strong>la</strong> même fable ?<br />

Du bout <strong>de</strong> rhoriion aeeourt avec furie<br />

Le plus terrible <strong>de</strong>s enfants<br />

Que te Nord eut portés Jusque-là dm» te* Hases.<br />

Quelle tournure élégamment métaphorique dans<br />

ces <strong>de</strong>oi vers sur les illusions <strong>de</strong> l'astrologie! Celui<br />

qui a tout fait, dit le poëte,<br />

AnnltrU imprimé sur le front <strong>de</strong>s étoil»<br />

Ce que <strong>la</strong> suit <strong>de</strong>s temps enferme dans ses vota?<br />

aucun <strong>de</strong> nos poètes tfa marné plus impérieusement<br />

<strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue; aueun surtout n f a plié a?ee tant <strong>de</strong><br />

facilité le vers français à toutes les formes iragîûâsables.<br />

Cette monotonie qu'os reproche à notre<br />

versification, chez lui disparaît absolument : ce<br />

n'est qu'au p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> l'oreille, au charme d'une harmonie<br />

toujours d'aeconi avec le sentiment et <strong>la</strong> pensée,<br />

qu'on s'aperçoit qu'il écrit en vers. 11 dispose et<br />

entremêle si habilement ses rimes, que le retour <strong>de</strong>s<br />

sons paraît une grâce, et non pas une nécessité. Nul<br />

n'a mis dans le rhythme une variété si pittoresque ;<br />

nul n'a tiré autant d'effets <strong>de</strong> <strong>la</strong> césare et <strong>du</strong> mouve­<br />

ment <strong>de</strong>s vers : il les coupe, les suspend, les retourne<br />

comme il lui p<strong>la</strong>ît. L'enjambement, qui semble réservé<br />

aux vers grecs et <strong>la</strong>tins, est fort commun dans<br />

les siens, et ne serait pas un mérite s'il ne pro<strong>du</strong>isait<br />

<strong>de</strong>s beautés ; car s'il est vicieux dans le style soutenu,<br />

à moins qu'il n'ait un <strong>de</strong>ssein bien marqué et bien<br />

' rempli, il est permis dans le style familier, et tout<br />

dépend <strong>de</strong> <strong>la</strong> manière <strong>de</strong> s'en servir. J'avouerai aussi<br />

que les avantages que je viens <strong>de</strong> déailler dans <strong>la</strong> versification<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Fontaine tiennent originairement<br />

à <strong>la</strong> liberté d'écrire en vers <strong>de</strong> toute mesure, et aux<br />

privilèges d'un genre qui admet tous les tons : il<br />

ne 6erait pas juste d'exiger ce même usage <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue<br />

et <strong>du</strong> rhythme dans <strong>la</strong> -poésie héroïque et dans<br />

les sujets nobles. Maïs aussi tant d'autres ont écrit<br />

dans le mime genre que <strong>la</strong> Fontaine! pourquoi<br />

ont-ils si rarement approché <strong>de</strong> cette espèce <strong>de</strong><br />

poésie? C'est lui qui possè<strong>de</strong> éminemment cette harmonie<br />

imitativc <strong>de</strong>s anciens qu'il nous est si difficile<br />

d'atteindre : et l'on ne peut s'empêcher <strong>de</strong><br />

croire, en 1e lisant, que toute sa science es cette<br />

partie est plus d'instinct que <strong>de</strong> réflexion. Chez cet<br />

homme, si ami <strong>du</strong> vrai et si ennemi <strong>du</strong> faux, tous<br />

les sentiments, toutes les idées, tous les personnages,<br />

ont l'accent qui leur convient, et Ton sent<br />

qu'il n'était pas en lui <strong>de</strong> pouvoir s'y tromper. De<br />

lourds calcu<strong>la</strong>teurs aimeront mieux peut-être y<br />

voir <strong>de</strong>s sens combinés avec un prodigieux travail ;<br />

mais le grand poëte, l'enfant <strong>de</strong> <strong>la</strong> nature, <strong>la</strong> Fontaine,<br />

aura plus têt fait cent vern harmonieux que<br />

731 •<br />

<strong>de</strong>s critiques pédants n v anront calculé l'harmonie<br />

d'un vers.<br />

Faut-il s'étonner qu'un écrivain pour qui <strong>la</strong> poé*<br />

sie est si docile et si flexible soit un si grand peintre?<br />

C'est <strong>de</strong> lui surtout que l'on peut dire proprement<br />

qu'il peint avec <strong>la</strong> parole. Dans quel <strong>de</strong> nos auteurs<br />

trouvera-t-on us si grasd nombre <strong>de</strong> tableaux<br />

dont l'agrément est égal à <strong>la</strong> perfection? Lorsqu'il<br />

nous rend les spectateurs <strong>du</strong> combat <strong>du</strong> Mwschçrwi<br />

et éê Mm, mie manque-t-ii à cette peinture ?<br />

Le quadrupè<strong>de</strong> écume, et son ceb étincelle ;<br />

II rugit : on se cache, on tremble à l'cnviron.<br />

Et cette a<strong>la</strong>rme universelle<br />

Est l'ouvrage d'un moucheras.<br />

Us avorton <strong>de</strong> mouche es cent lieux, le harcelle;<br />

Tantôt pique l'échiné t et tantôt le museau ,<br />

Tantôt entre m fond <strong>du</strong> naseau.<br />

La rage alors se trouve à son faite <strong>mont</strong>ée.<br />

L'invisible ennemi triomphe f et rit <strong>de</strong> voir<br />

Qu'il n'est griffe ni <strong>de</strong>nt en <strong>la</strong> bête irritée<br />

Qui <strong>de</strong> <strong>la</strong> mettre en sang ne fasse son <strong>de</strong>voir.<br />

Le malheureux lion se déchire lui-même,<br />

PMI remiser sa queue à l'entour <strong>de</strong> ses ftascs,<br />

Bat l'air qui n'en peut mais ; et sa foreur eitrême<br />

Le fatigue, l'abat ; le voilà sur les <strong>de</strong>nts.<br />

De cette peinture énergique passons à une peinty re<br />

riante :<br />

Perrette, sur » tète ayant un pot au <strong>la</strong>it,<br />

Bien posé sur us coussinet,<br />

Prétendait arriver sans encombre à <strong>la</strong> vWe.<br />

Légère et court vêtue, eUe al<strong>la</strong>it à grands pas,<br />

ayant mis ce Jour-là, pour être plus agile ,<br />

OotlUon simple et souliers p<strong>la</strong>ts.<br />

Ici toutes les syl<strong>la</strong>bes sont cou<strong>la</strong>ntes et rapi<strong>de</strong>s-,<br />

tout à l'heure eMes étaient fermes et résonnantes :<br />

elles seront, quand il le faudra, lour<strong>de</strong>s et pénible».<br />

Nous avons vu <strong>la</strong> facilité; voyons l'effort :<br />

Dans un chemin <strong>mont</strong>ant, sablonneux, ma<strong>la</strong>isé,<br />

Et <strong>de</strong> tons les côtés au soleil eiposé,<br />

Six forts chevaux tiraient un coche.<br />

La phrase est disposée <strong>de</strong> manière que l'œil se porte<br />

d'abord sur <strong>la</strong> <strong>mont</strong>agne et sur tous les accessoires<br />

qui <strong>la</strong> ren<strong>de</strong>nt si ruiieà <strong>mont</strong>er» <strong>la</strong> rai<strong>de</strong>ur, le sable,<br />

le soleil à plomb : on voit ensuite arriver avec peine<br />

les dxforU càmmtx, et au bout le c&ekê qu'ils Mtwt,<br />

mais <strong>de</strong> manière que le coche parait se traîner<br />

avec le vers. Ce n'est pas tout ; le poëte achève<br />

le tableau en peignant les gens <strong>de</strong> <strong>la</strong> voiture :<br />

" Femmes, moines, vleU<strong>la</strong>rds, toutétait <strong>de</strong>scen<strong>du</strong>;<br />

L'équipafB tuait f souff<strong>la</strong>it, était ren<strong>du</strong>.<br />

* On ne peut prononcer ces mots smUf souff<strong>la</strong>it,<br />

sans être presque essoufflé : on n'imite pas mieux<br />

avec <strong>de</strong>s sons. Cet art n'est pas moins sensible dans<br />

<strong>la</strong> fable <strong>de</strong> Pkêbm et B&rée. Celui-ci<br />

Se gorge <strong>de</strong> vapeurs, s'enfle wmnm an bsJ§on,<br />

Fait un vacarme <strong>de</strong> démon t<br />

Siffle, souffle, tempête...

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