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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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un homme qui joignit au génie dramatique qu'allient<br />

possédé Corneille et Molière une purelé $ une<br />

élégance, une harmonie, une sûreté <strong>de</strong> goût que<br />

ni rua ni l'autre n'avaient connues; et il est permis<br />

<strong>de</strong> croire que, lié avec Despréaux à l'époque <strong>de</strong><br />

son Alexandre, dont <strong>la</strong> Yersiication <strong>la</strong>isse encore<br />

tant à désirer, il apprit à être bien plus précis,<br />

plus élégant, plus châtié, plus sévère dans Jndromaque,<br />

et bientôt après à s'élever jusqu'à <strong>la</strong> perfection<br />

<strong>de</strong> Britànnieus tlé f Jtho!w, au <strong>de</strong>là <strong>de</strong>squels<br />

il n'y a rien.<br />

Je crois avoir positivement spécilé <strong>la</strong> première<br />

obligation que nous a?ons à Boileau et à ses satires,<br />

et les raisons <strong>du</strong> grand éc<strong>la</strong>t qu'elles eurent<br />

en paraissant. Si j'avais besoin d'ajouter <strong>de</strong>s autorités<br />

à Févi<strong>de</strong>ace, j'en citerais une qui ne peut pas<br />

être suspecte s et qui prouve combien les meilleurs<br />

esprits <strong>du</strong> temps avaient senti le mérite particulier<br />

que je fais observer dans ces satires, aujourd'hui<br />

trop rabaissées. Molière <strong>de</strong>vait lire une tra<strong>du</strong>ction<br />

en vers <strong>de</strong> quelques chants <strong>de</strong> Lucrèce dans une<br />

société où se trouva Despréaux, On pria celui-ci <strong>de</strong><br />

lire d'abord <strong>la</strong> satire adressée à Molière sur <strong>la</strong> Rime,<br />

pièce qui s'était pas encore imprimée, non plus<br />

qu'aucune <strong>de</strong>s autres <strong>du</strong> même auteur. Mais quand<br />

Molière féal enten<strong>du</strong>e, il ne voulut plus lire sa tra<strong>du</strong>ction<br />

, disant qu'on ne <strong>de</strong>vaitpas s'attendre à <strong>de</strong>s<br />

vers aussi parfaits et aussi achevés que ceux <strong>de</strong><br />

SIECLE DE LOUIS XIV. — POESIE. 69S<br />

tant <strong>de</strong> peur à Molière, nous paratt-elie assez peu'<br />

<strong>de</strong> chose? C $ est que <strong>la</strong> difficulté <strong>de</strong> rimer est us<br />

mince sujet, dont le style ne peut plus racheter à<br />

nos yeux <strong>la</strong> petitesse; c'est que, notre versification<br />

s'étant perfectionnée dans le <strong>de</strong>rnier siècle, nous<br />

voulons dans celui-ci que ce mérite se soit jamais<br />

seul, que l'on dise d'excellentes choses en bons vers.<br />

Biais avant d'en venir là, il a fallu apprendre à en<br />

faire, et celui qui nous l'apprit le premier, c'est Boileau.<br />

Grâces à lui et à ceux qui l'ont suivi, ce n'est<br />

pas assez que k bœuf fasse bien son sillon, il faut<br />

encore qu'il <strong>la</strong>boure une terre fertile.<br />

Maintenant, si j'osais énoncer un jugement sur<br />

<strong>la</strong> valeur réelle <strong>de</strong> ses satires J'avouerais d'abord,<br />

qtitj! qu'il pût m'en arriver, que je tes lis toutes<br />

avec p<strong>la</strong>isir, excepté les trois <strong>de</strong>rnières. Celle sur ê<br />

tÉqutvoque, qui est <strong>la</strong> douzième, est généralement<br />

condamnée ; c'est un fruit dégénéré, une faible pro<strong>du</strong>ction<br />

d'un sol épuisé. On ne reconnaît point 1e bon<br />

esprit <strong>de</strong> Fauteur dans cette longue et vague déc<strong>la</strong>mation<br />

qui roule tout entière sur un abus <strong>de</strong> mots,<br />

et où fon attribue à l'équivoque tous les malheurs<br />

et les crimes <strong>de</strong> l'univers, à dater <strong>du</strong> péché originel<br />

et <strong>de</strong> <strong>la</strong> chute d'Adam, jusqu'à <strong>la</strong> morale d*Eseobar<br />

et <strong>de</strong> Sanchez. Le satirique, vieilli, redit en assez<br />

J#. Despréaux , et qu'il M faudrait un temps infini<br />

g g mauvais vers ce qu'avait dit Pascal en très-bonne<br />

prose, et ce n'est plus, à quelques endroits près, le<br />

style <strong>de</strong> Boileau. On le retrouve un peu plus dans<br />

<strong>la</strong> satire-mr k faux Honneur', dont les soixante<br />

U mutaU travaiÙer ses ouvrages comme M Ce premiers vers' sont encore dignes <strong>de</strong> lui ; mais le reste<br />

propos est à <strong>la</strong> fois l'excuse <strong>de</strong> Molière, à qui le est un sermon froid et <strong>la</strong>nguissant, chargé <strong>de</strong> redi­<br />

temps manquait, et l'éloge <strong>de</strong> Boileau, qui employait tes. L'auteur est presque toujours hors <strong>du</strong> sujet,<br />

le sien. L'un était obligé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> théâ­ et les tournures monotones et le prosaïsme avertre<br />

qui <strong>de</strong>vaient être prêtes au jour marqué ; l'autre, tissent <strong>de</strong> <strong>la</strong> faiblesse <strong>de</strong> l'âge. La satire contre tes<br />

qui n'avait que <strong>de</strong>s vers à faire, pouvait les tra­ Femmes, quoique plus travaillée, quoiqu'elle offre<br />

vailler à loisir, et le caractère <strong>de</strong> son esprit le por­ <strong>de</strong>s portraits bien frappés, entre autres celui <strong>du</strong><br />

tait à les travailler jusqu'à ce qu'ils fussent aussi directeur; quoique les transitions y soient mena- .<br />

bons qu'il était possible. Ainsi <strong>la</strong> nature et les cir­ gées avec un art dont le poète avait raison <strong>de</strong> s'apconstances<br />

se réunissaient pour faire <strong>de</strong> lui &e meilp<strong>la</strong>udir, n'est pourtant qu'un lieu commun, qui releur<br />

versificateur qui eût encore eiisté parmi nous. bute par <strong>la</strong> longueur, et révolte par l'injustice.<br />

L'un <strong>de</strong> ses amis, Chapelle, qui, dans <strong>la</strong> familiarité Tout y est appuyé sur l'hyperbole ; et Boileau f qui<br />

d'un commerce intime, se moquait <strong>de</strong> sa patience en a reproché l'excès à Juvénal, n'aurait pas dû l'i­<br />

<strong>la</strong>borieuse, p<strong>la</strong>isantait sar sa cruche à fhuUe, et miter dans ce défaut. Je ne dissimule point ses<br />

lui disait si gaiement, Tu es m bœuf qui fait Mm fautes, ce me semble ; elles sont en partie celles <strong>de</strong><br />

son sitton; Chapelle, si éloigné en tout <strong>de</strong> <strong>la</strong> moin­ <strong>la</strong> vieillesse 9 et l'on peut aussi tes attribuer à cette<br />

dre conformité avec lui, reconnaissait <strong>la</strong> supériorité mo<strong>de</strong>, assez générale <strong>de</strong> son temps, <strong>de</strong> faire entrer<br />

<strong>de</strong> ses vers.<br />

<strong>la</strong> religion dans <strong>de</strong>s sujets où elle était étrangère.<br />

Tout bon pâfttieiii en Mtraii t<br />

C'est là ce qui lui fait conclure, dans <strong>la</strong> satire sur<br />

Fait <strong>de</strong>s mm qui nceoûteat guère.<br />

POUF mol, c'est alssl qm j'en fais ;<br />

l'Honneur,<br />

Et il je les foutais miens faire,<br />

le les ferais Mm plus mauvais.<br />

Qu'en Dieu seul est l'honneur véritable,<br />

Mais quant à monsieur Despiéaux,<br />

11 en compose <strong>de</strong> fort beaux.<br />

quoique ces <strong>de</strong>ux idées n'eussent pas dû se rencon­<br />

Pourquoi cette même satire sur ta Mme, qui fit trer enstoble. C'est là ce qui lui dicta celle <strong>de</strong> ses

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