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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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SIÈCLE DE LOUIS XIV. - POESIE.<br />

forcées? Telles sont en général les Épltres <strong>de</strong> Rousseau<br />

: si Ton était obligé <strong>de</strong> le preuferpar une lecture<br />

suivie et détaillée 9 <strong>la</strong> preufe irait jusqu'à l'éfi<strong>de</strong>nee ;<br />

mais l'évi<strong>de</strong>nce irait jusqu'à l'ennui. Je nie borne à<br />

use courte analyse et à un certain nombre <strong>de</strong> citations<br />

f où tous les défiais que j'aj indiqués dominent<br />

' au point qu'on pourra juger qu'ils tiennent au<br />

caractère <strong>de</strong> l'outrage et à <strong>la</strong> manière <strong>de</strong> Fauteur.<br />

L'abtifc <strong>du</strong> marotisme est un <strong>de</strong>s fiées qui les défigurent,<br />

le dis l'abus v car9 employé a?ec choix et<br />

sobriété dans les genres qui le comportent, tels que<br />

le conte, répigramme, ï'épître badine ; et tout ce<br />

qui tient au genre familier, il contribue à donner au<br />

style <strong>de</strong> <strong>la</strong> naïf été et <strong>de</strong> <strong>la</strong> précision. La Fontaine<br />

aa a fait usage mm succès dans ses contes, et Fa<br />

judicieusement exclu <strong>de</strong> ses failles, où <strong>la</strong> morale et<br />

<strong>la</strong> raison n'admettent point cette bigarrure, et où<br />

les animaui qu'il intro<strong>du</strong>it <strong>de</strong>vaient parler <strong>la</strong> même<br />

<strong>la</strong>ngue. Voltaire s'en est serf i <strong>de</strong> même, avec ce goût<br />

eiquis qui savait distinguer les nuances propres à<br />

chaque sujet. Le style marotique permet <strong>de</strong> retrancher<br />

les articles et les pronoms, comme on les retranchait<br />

an temps <strong>de</strong> Marot ; ce qui donne à <strong>la</strong> phrase<br />

un tour plus f if-11 permet une espèce d'infersion<br />

qui ne fa pas an style sérieuxy et quelques constructions<br />

anciennes que notre <strong>la</strong>ngue empruntait <strong>du</strong> <strong>la</strong>tin<br />

avant qu'elle eût une syntaxe régulière. Ces formes<br />

viettfies ont Fa?antage <strong>de</strong> nous rappeler le premier<br />

caractère <strong>de</strong> notre <strong>la</strong>ngue, qui était <strong>la</strong> naïveté, et<br />

d'ailleurs » tout ce qui est ancien prend à nos yeui un<br />

air <strong>de</strong> simplicité, prce que l'élégance est mo<strong>de</strong>rne.<br />

Il n'est personne qui n'ait remarqué, quand un<br />

étranger, homme d'esprit, parle notre <strong>la</strong>ngue, et<br />

y mâs iof olontairement <strong>de</strong>s tournures <strong>de</strong> <strong>la</strong> sienne 9<br />

que son expression en reçoit quelquefois une sorte<br />

d'agrément et <strong>de</strong> vérité qui nous p<strong>la</strong>tt : dans let<br />

femmes surtout, un accent étranger est bien sautent<br />

une grâce, et leurs phrases, moitié françaises,<br />

moitié étrangères, ont quelque chose qui leur sied<br />

fort bien, comme les enfants nous charment et nous<br />

persua<strong>de</strong>nt en balbutiant leurs pensées. C'est le<br />

principe <strong>du</strong> p<strong>la</strong>isir que peut nous faire le f ieui <strong>la</strong>ngage,<br />

quand on s'en sert à propos et avec ménagement,<br />

comme dans cette épigramme <strong>de</strong> Rousseau :<br />

Le bon fitU<strong>la</strong>rd qui brû<strong>la</strong> pour Bataylta t<br />

Par amour seul était ragail<strong>la</strong>rdi :<br />

•nul n'est-Il <strong>de</strong> cSaftur plus ssbtlte<br />

PûQF réchauffer un Yielliard eogoardl<br />

Pour moi, qui soie dans f ar<strong>de</strong>ur <strong>du</strong> midi t<br />

MenretSte n'est epe son f<strong>la</strong>mbeau me brâte.<br />

Mais quand <strong>du</strong> soir iriondra le crépuscule,<br />

Tempe où le eewr <strong>la</strong>nguit inanimé t<br />

Du moins, amour, fais-mot bailler ©a<strong>du</strong>le<br />

D'aimer eneor, même sans être aimé. f<br />

11 n'y a là <strong>de</strong> marotisme que ce fait en faut. Aussi<br />

6S5<br />

n'est-M <strong>de</strong> chaleur est une construction très-commo<strong>de</strong><br />

pourlresserrer dans <strong>la</strong> mesure <strong>du</strong> fers cette<br />

phrase qui en bon français serait plus longue, s'il<br />

fal<strong>la</strong>it dire9 comme dans le style soutenu, aussi<br />

m'eiMlpoMêeckalewrpImmêMk* Merveille n'est,<br />

au lieu <strong>de</strong> dire M m'est pas étmnanî, ou ce n'est pas<br />

meneMk9 est vif et rapi<strong>de</strong>. Fuis-moi baMter etafafe<br />

est une fieille locution', mais que tout le mon<strong>de</strong><br />

entend , et qui signifiant autrefois une obliption,<br />

un engagement, est ici cfaa choix très-heureux. Il<br />

n'en est pas <strong>de</strong> mime <strong>de</strong>s épîgrammes suivantes :<br />

Soucis misants, au psrUr <strong>de</strong> €aliâtev<br />

là oommenealent à me êmppiieier,<br />

Quand Os]iMont qui me Ylt pâle et triste,<br />

Me dit : Ami, ponrqsoi te mmeier?<br />

Lors m'envoya pour me mîmemrp<br />

Tout ion eortége cl estai <strong>de</strong> sa mère, «te.<br />

Ampartir ne faut paa mieux qu'an déport t et c'est<br />

parler mal sans y rien gagner. Supplicier est une<br />

expression désagréable, parce qu'elle ne slgalie<br />

plus aujourd'hui que mener au supplice Y et qu f elle<br />

rappelle l'idée d'une exécution. Te sm<strong>de</strong>r ne se dit<br />

plus dans le sens absolu pour prendre <strong>du</strong> souci ; et<br />

comme il se met encore mm un régime, te #©»ckr<br />

<strong>de</strong> quelque chose, *û fait un raauf ais effet pouf<br />

nous, qui sommes accoutumés à lui donner un<br />

sens très-facile, et qui safons qu'un amant fût<br />

beaucoup plus que m sm<strong>de</strong>r <strong>de</strong> fthaenee <strong>de</strong> sa<br />

maîtresse. Cest donc <strong>du</strong> marotisme très-dép<strong>la</strong>cé*f<br />

puisqu'il affaiblit le sens , au lieu d'y ajouter. Ja&«<br />

ekr est bien pis : c'est un mot <strong>du</strong>r et rebutant,<br />

autrefois emprunté <strong>du</strong> <strong>la</strong>tin, pour dire wnmkr,<br />

et qu'aujourd'hui on n'entend plus. 11 ne faut ressusciter<br />

les lieux mots que quand l'oreille les<br />

adopte. Les mêmes iéfaats sont encore plus chaguants<br />

dans cette autre épigramme, adressée à une<br />

femme qui chassait :<br />

Quand sur Bayard, par bols ou sur <strong>mont</strong>agne9<br />

• glboyer- TOUS prene* TO* ébats ,<br />

Dieux a» forêti d'abord sont en campagne,<br />

Et font en troupe admirer YOS appas.<br />

' Amis Syîvatas, ne TOUS y fies pas ;<br />

Car ses regards font son?est pmrm niche*<br />

Que feu ni fer; et émus an tell jattiivAat<br />

Risquent <strong>du</strong> moins alitant que cerfs et biches.<br />

Pires miches est affreux à l'oreille; et put-on<br />

comparer <strong>de</strong>s niches ma feu et au fert Pmtrehm<br />

est encore plus <strong>du</strong>r qu'il n'est vieux, et c'est ou<br />

dos défauts <strong>du</strong> marotisme <strong>de</strong> Rousseau dé choisir<br />

très-mal les fieux mots qu'il veut rajeunir : ceux<br />

que leur <strong>du</strong>reté a fait tomber en désuéto<strong>de</strong> ne peafent<br />

jamais renaître.<br />

J'ai pris ces exemples dans les épigrammes,<br />

parce qu'elles admettent le style marotique. L'épftre<br />

sérieuse et morale en est bien moins susceptible<br />

t et il gâte souvent celles <strong>de</strong> Rousseau.

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