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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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SIÈCLE DE LOUIS XIV. — POÉSIE.<br />

Jours plus fîtes, et sortent an théâtre f que les affections<br />

générales; et c'est pour ce<strong>la</strong> particulièrement<br />

que, <strong>de</strong> toutes les conspirations qu'on a mises<br />

sur <strong>la</strong> scène, <strong>la</strong> plus intéressante et <strong>la</strong> plus théâtrale,<br />

<strong>de</strong> l'aveu <strong>de</strong> tous les connaisseurs, est celle <strong>de</strong> Manlius.<br />

« 1° Manies est d'abord le f renier personnage; ensuite<br />

Servi Mas le défient. »<br />

Non. Manlius est le/premier jusqu*auboat. Voyez,<br />

au quatrième acte, combien il est grand arec Servilité,<br />

et combien celui-ci est au-<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> lui,<br />

quoique Mao! îes soit découvert, et que Servîlius<br />

n'ait rien à craindre : c'est <strong>la</strong> scène <strong>la</strong> plus imposante<br />

<strong>de</strong>là pièce. Manlîus cesse-t-iljd'étre le premier, lorsqu'au<br />

cinquième acte, déjà condamné à <strong>la</strong> mort, il<br />

voit à ses pieds Servil ius lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r un pardon<br />

qu'il n'obtient qu'au pris que Manlius veut y mettre?<br />

Et quel prix! Sans doute on p<strong>la</strong>int da?antage<br />

Serfilius, comme on p<strong>la</strong>int <strong>la</strong> faiblesse et le repentir;<br />

maïs l'admiration est toujours pour Manlius,<br />

parce qu'elle est toujours pour le courage et <strong>la</strong> hauteur<br />

<strong>de</strong> Caractère. Ce reproche <strong>de</strong> Voltaire est sans<br />

aucun fon<strong>de</strong>ment et entièrement injuste.<br />

« 3 e Manliiis, qui défait être un homme d'une ambition<br />

respectable, propose à si nommé Mutile (qo'on ne commit<br />

pa§, et qui iiît l'entends sans aucun intérêt marqné à tout<br />

ce<strong>la</strong>) <strong>de</strong> recevoir Serrillus dans <strong>la</strong> troupe, comme os reçoit<br />

tm Tcleer clier <strong>de</strong>s Cerleectilcas. »<br />

Cest là une parodie, et non pas une critique.<br />

La lecture seule <strong>de</strong> l'ouvrage suffirait pour répondre<br />

à un exposé si faux et si gratuitement injurieux.<br />

Rutile est donné dans <strong>la</strong> pièce pour un <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> faction popu<strong>la</strong>ire, <strong>de</strong> tout temps opposée à l'aristocratie<br />

patricienne; et Ton sait que Manlius s'est<br />

mis à <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> cette faction, comme Camille est<br />

à <strong>la</strong> tête <strong>du</strong> sénat. Son ambition est suffisamment<br />

respecêaMe dans les mœurs dramatiques, puisqu'elle<br />

n'est que <strong>la</strong> jalousie <strong>du</strong> pouvoir et <strong>de</strong> l'autorité,<br />

qu'il dispute à Camille, et que ses services et<br />

ses exploits le mettent en droit <strong>de</strong> disputer. L'ambition<br />

est-elle plus respeetabk dans Catilina, scélérat<br />

qui n'a que <strong>de</strong> l'audace et ne respire que le pil<strong>la</strong>ge<br />

et le massacre? A quoi pensait Voltaire quand<br />

il a oublié cette différence?<br />

L'exécution <strong>de</strong> <strong>la</strong> scène où Servïlius est reçu<br />

parmi les conjurés est énergique; et terrible quand<br />

Rutile, pour justiier ses soupçons, dit à Manlius :<br />

. . . Sur mot, <strong>de</strong> ion sort ma grand peuple m fi®,<br />

on conçoit assez que ce n'est pas un personnage<br />

sans importance, et que c'est par son entremise<br />

que le parti poou<strong>la</strong>ire a consenti à servir les projets<br />

<strong>de</strong> Manlius, qui, en sa qualité <strong>de</strong> patricien,<br />

623<br />

doit être suspect au peuple. Tout est conforme aux<br />

mœurs, tout est vraisemb<strong>la</strong>ble, et rien ne manque<br />

à <strong>la</strong> dignité tragique.<br />

« BfaaJas^ ajouté Voltaire f doit être un chef impérieux<br />

et absolu. »<br />

Encore une fois, à quoi pense-t-il, lui qui* sait si<br />

bien qu'un chef <strong>de</strong> parti doit ménager tout le mon<strong>de</strong>,<br />

qu'un <strong>de</strong>s meilleurs traits <strong>du</strong> rêle <strong>de</strong> son Catilina<br />

est <strong>la</strong> souplesse et <strong>la</strong> déférence qu'il <strong>mont</strong>re à l'égard<br />

<strong>de</strong> Lentulus ?<br />

« 4® La femme <strong>de</strong> Servilias <strong>de</strong>vine 9 sans aucune ralsaa 9<br />

§11*01 veut assassiner son père, et Servilias f avoue par<br />

une f<strong>la</strong>iMesse qui n'est nuDement tragique. »<br />

Toutes ces censures sont pleinement démenties<br />

par <strong>la</strong> pièce même. Voyez, dans <strong>la</strong> scène où Valérie<br />

arrache le secret <strong>de</strong> son mari 9 si elle n'a pas vingt<br />

raisons pour une <strong>de</strong> soupçonner ce qui se trame.<br />

Songez à <strong>la</strong> situation où elle est, aux préparatifs secrets<br />

dont elle est témoin, à l'ascendant qu'elle a sur<br />

un homme qui l'adore; et juges si cette scène, que<br />

l'on prétend n'être nullement êrsgiqœ, n'est pas<br />

en effet con<strong>du</strong>ite avec art, et <strong>de</strong> manière à pro<strong>du</strong>ire<br />

l'effet qu'elle a toujours pro<strong>du</strong>it. Depuis quand dose<br />

un secret arraché par l'amour n'est-il plus digne <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> tragédie? Eh! ce sont là ks faiblesses qui sont<br />

théâtrales. Qui <strong>de</strong>vait le savoir mieux que Voltaire?<br />

La partialité l'aveugle au point qu'il se contredit<br />

d'une ligne à l'autre. 11 dit ici :<br />

« CmtfsiblmeédSerfmmMïUnîêh^mAéclipm<br />

absolument Maaiias, »<br />

Et un moment après :<br />

« Cet êmèécUe <strong>de</strong> mari ne <strong>la</strong>it plus qu'un personnage<br />

aussi insipèdk que MaaMaa» » -<br />

Ce ne sont pas là <strong>de</strong>s raisons ; ce sont <strong>de</strong>s injures<br />

et <strong>de</strong>s contradictions également grossières. Coin*<br />

ment un TÙtoimbécikeilnsIpi<strong>de</strong>JaèWtouie<strong>la</strong>plèce,<br />

quand <strong>la</strong> pièce réussit <strong>de</strong>puis si longtemps, quand<br />

il y a, <strong>de</strong> l'aveu <strong>du</strong> censeur, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s bemtêsî<br />

Comment ce qui est injgtàfe écUpse^M un personnage<br />

tel que Manlius? Une <strong>de</strong> ces gmmém bmmMë<br />

est précisément <strong>la</strong> différence très-heureuse <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

rêles principaux f dont l'un intéresse par lesJWMetses<br />

d'un «sur tendre et sensible, et dont rentre<br />

nous attache par <strong>la</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>sseins et Fisflexibilité<br />

<strong>de</strong> son caractère. Et c'est Voltaire qui méconnaît<br />

à ce point un genre <strong>de</strong> mérite si dramatique!...<br />

Finissons cette discussion, qui est affligeante;<br />

et concluons qu'il faut être bien sûr <strong>de</strong> soi-même<br />

pour se faire juge dans sa propre causa Tout s'explique<br />

par le résultat que Voltsjro prononce en sa<br />

faveur :<br />

« Xose croire qm <strong>la</strong> pièce <strong>de</strong> Borne sauvée a beaucoup

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