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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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SIÈCLE DE LOUIS XIV. — POÉSIE.<br />

quelle énergie <strong>de</strong> diction! Je me suis souvent rap* Fat <strong>la</strong>ngui » fa! séché dans les fan t dans <strong>la</strong> <strong>la</strong>rmes :<br />

pelé qu'us jour, dans une conversation sur Racine Il suffit <strong>de</strong> tes yeux pour t'en persua<strong>de</strong>r,<br />

9 §1 tes yeux un moment posaient me regar<strong>de</strong>r.<br />

Voltaire 9 après avoir déc<strong>la</strong>mé ce morcêan avec Feuthoiisiasme<br />

que lui inspiraient les beaux fers, s'é­ Le <strong>de</strong>rnier vers est ne d@ ces traits profondément<br />

cria : Non, je ne mes Hem auprès <strong>de</strong> cet homme-là. sentis, qui sont si fréquents dans Racine ; et ce trait<br />

Ce n'est pas qu'il faille voir dans cette exc<strong>la</strong>mation est si naturellement p<strong>la</strong>cé, qu'il semble comme im­<br />

presque iavoloataire un aveu d'infériorité : c'était possible qu'il ne fût pas là; et ce trait, lorsqu'on y'<br />

l'hommage d'un grand génie, dont <strong>la</strong> sensibilité ' réfléchit, paraît si heereui, qu'on se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> com­<br />

était en proportion <strong>de</strong> «a force, et à qui l'admirament l'auteur Ta trou?é.<br />

tion faisait tout oublier, jusqu'au eentiinent <strong>de</strong> l'a- On raconte que Racine soutint un jour, chez<br />

mour-propre. Mous verrons dans <strong>la</strong> suite que Tau* madame <strong>de</strong> ia Fayette 9 qtfavee <strong>du</strong> talent os pou-<br />

teur <strong>de</strong> Zaïre, sans avoir rien qui soit <strong>de</strong> ce genre v fait , sur <strong>la</strong> scène Y faire eiciiser <strong>de</strong> grands crimes y<br />

ba<strong>la</strong>nce tant <strong>de</strong> perfection par d'autres avantages. ' et inspirer même, pour ceui qui les commettent,<br />

Mais quel homme que celui qui a pu seul arracher à plus'<strong>de</strong> compassion que d'horreur. On ajoute qu'il<br />

Voltaire le cri que ?ous Tenez d'entendre! cita Phèdre pour exemple; qu'il assura qu'on pou-<br />

11 prophétisaitt Despréaus, lorsqu'il disait à son fait faire p<strong>la</strong>indre Phèdre coupable plus qu'Hîp-<br />

ami, dans une épftrt digne <strong>de</strong> tous les <strong>de</strong>ux ; polyte innocent; et que cette tragédie fat <strong>la</strong> suite<br />

d'une espèce <strong>de</strong> déi qu'où lui porta. Soit que le<br />

Ei î qui, voyant fin jour <strong>la</strong> douleur vertueuse<br />

De Phèdre, malgré soi, perfi<strong>de</strong>, iMestueuse, fait se soit passé <strong>de</strong> cette manière, soit qu'il tra­<br />

Wmn û nofcle travaU Justemeat étonné,<br />

vaillât déjà à <strong>la</strong> pièce lorsqu'il établit cette opinion Y<br />

ne bénira d'abord Se siècle fortuné<br />

Qui, rends plus fameux par tea iUwtrai ?eflt« il est sûr que ce ne pouvait être que celle d'un<br />

t<br />

¥11 satire sous ta mais ses pompeuses merveUks? homme qui, après avoir réOécM sur le cœur bu*<br />

Voltaire a observ é quelque part que ces merveil­ main et sur <strong>la</strong> tragédie qui en est <strong>la</strong> peinture, avait<br />

les étaient plus touchantes que pompeuses. Il me conçu que le malheur d'usé passion coupable était<br />

semble qu'elles sont l'un et l'autre, et ce que je viens en raison <strong>de</strong> son énergie, et que par conséquent elle<br />

d'en citer le prouve assez. Mais en effet, ce qu'il y portait avec elle et sou eicuse et sa punition. Ce-<br />

a <strong>de</strong> touchant, ce qu'il y a d'unique dans le râle <strong>de</strong> tait on problème <strong>de</strong> morale à résoudre, et que sa<br />

Phèdre, c'est Phorreor qu'elle a pour elle-même. Phèdre déci<strong>de</strong>. Mais il fal<strong>la</strong>it, pour y réussir, tout<br />

Jamais <strong>la</strong> conscience n'a parlé si haut contre le crime, fart dont lui seul était capable; carf je le répéta,<br />

et jamais aussi une passion criminelle n'inspira une Euripi<strong>de</strong> et Sénèque n'avaient point considéré ce<br />

plus juste pitié. Ce contraste est marqué dans <strong>la</strong> sujet sous le même point <strong>de</strong> vue f et tous <strong>de</strong>ux ont<br />

Phèdre d'Euripi<strong>de</strong>; il l'est même aussi dans celle <strong>de</strong> ren<strong>du</strong> Phèdre aussi odieuse dans sa con<strong>du</strong>ite que<br />

Séoèque, malgré <strong>la</strong> déc<strong>la</strong>mation qui étouffe si soo- Racine Fa ren<strong>du</strong>e eicusable. A <strong>la</strong> Vérité; dans les<br />

? eut toute vérité : mais qu'il Test bien plus forte­ <strong>de</strong>ux poètes anciens! elle combat sa passion; mais<br />

ment dans Racine ! Il a su lui donner en même temps pourtant c'est élit qui accuse décidément Hippolyte,<br />

et plus <strong>de</strong> passion et plus <strong>de</strong> remords. Qu'on en dans Euripi<strong>de</strong>, par une lettre qu'elle écrit avant<br />

juge par ce morceau qui appartient tout entier à <strong>de</strong> mourir, ce qui est à peine concevable ; dans Sé­<br />

Fauteur français, parce qu'il est le seul qui ait supnèque, par <strong>la</strong> bouche d'OEnone dont elle ne contreposé<br />

que Phèdre avait fait d'abord exiler Hippolyte dit pas un instan^ le <strong>de</strong>ssein pervers, et enfin <strong>de</strong><br />

pour féloigner <strong>de</strong> sa YUC.<br />

sa propre bouche, en par<strong>la</strong>nt à Thésée, à qui même<br />

elle dit en propres termes qu'elle a été violée : Fim<br />

tamen corpus tulit. Voyons quelle-marche différente<br />

Racine a suivie; et l'examen <strong>de</strong>s ressorts qu'il<br />

emploie nous donnera lieu <strong>de</strong> considérer en même<br />

temps comment les autres personnages <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce<br />

ont été faits pour concourir à mm but.<br />

Rappelons-nous d'abord les vers qui terminent <strong>la</strong><br />

première scène <strong>de</strong> Phèdre avec OEnooa :<br />

Eh Mes ! «muais difue Phèdre et toute sa foreur.<br />

raine. Me pana pas qu'au moment que Je filme,<br />

Innocente à ma yeux, je m'appros ve moi-même ,<br />

Hl qoe un M amour qui trouble ma raison<br />

Ma lâche comp<strong>la</strong>isance ait nourri le peÉsoa<br />

Objet Infortuné <strong>de</strong>s vengeances célestes,<br />

le m'abhorre eoeor plus que tu ne me détestes.<br />

Les dieu m'en sont témoins, ce» dieux qui dans mon fane<br />

Ont allumé le feu fatal à tout mon saug ;<br />

Os dieux qui se tout fait une gloire cruelle<br />

De sé<strong>du</strong>ire le cœur d'une faible mortelle.<br />

Toi-même en too esprit rappelle te passé :<br />

Ceat peu <strong>de</strong> t'avoir fui, cruel, je l'ai chassé :<br />

Fat voulu te paraître odieuse, inhumaine;<br />

Pour mira* te résister, fit recherché ta haine.<br />

De quoi m'ont proSié mes lualllts soins?<br />

Tu me haïssais plus f je ne falmals pas moins :<br />

Tts malheurs te prêtaient eneor <strong>de</strong> nouveaux cliâf mes.<br />

* Fat œiiffi pm§r mon otoe use Juste teneur ;<br />

Tat pris St vf* en haine, et ma iamme m homor.<br />

le vou<strong>la</strong>is m mourant prendre soin <strong>de</strong> ma gloire,<br />

Et dérober an Jour une f<strong>la</strong>mme si nolra.<br />

le n'ai pu soutenir t» <strong>la</strong>rmes, tea combats;<br />

le fat tout avoué ; Je M mfm repens pu,<br />

Pourvu que, <strong>de</strong> ma mort respectant les approefaei,<br />

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