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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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COUBS DE LITTÉRÂTUEE,<br />

602<br />

.serti par les idées <strong>de</strong> ses contemporains ! Ce fut<br />

Boileau qui le premier livra as ridicule ces extravagantes<br />

pro<strong>du</strong>ctions; ce fut lui qui enseigna dans<br />

son Art poéMque quel ton et quel caractère <strong>de</strong>vait<br />

avoir l'amour sur <strong>la</strong> scène tragique.<br />

{Ttllei pas d*aa Cyras nom faire en Ârtâmène.<br />

Qa*àclilile aima autrement qm Tymk et PhUèse.<br />

Mais il faut être juste : avant qu'il donnât le précepte,<br />

Racine avait donné le modèle, et quand il<br />

it Jndrom^que, il it voir un art nouveau que personne<br />

ne lui avait appris. C'est là, comme nous le<br />

verrons bientôt, un <strong>de</strong> ses grands titres <strong>de</strong> gloire.<br />

Corneille n'eut pas celle-là, si Ton excepte les scènes<br />

<strong>du</strong> CM imitées <strong>de</strong> Goillem <strong>de</strong> Castro, et celle<br />

<strong>de</strong> Pauline et <strong>de</strong> Sévère. D'ailleurs, il n'a jamais<br />

su traiter l'amour. Il est vrai que, dans ces <strong>de</strong>ux<br />

pièces, l'amour est touchant, noble » délicat; mais<br />

ce n'est pas a beaucoup près cette passion forcenée,<br />

traînant après elle le crime et le remords, enin si<br />

éminemment tragique, quan<strong>de</strong>lle est telle que Racine<br />

et Voltaire l'ont représentée. Le râle <strong>de</strong> Ladis<strong>la</strong>s<br />

aurait pu en donner quelque idée à Corneille; mais<br />

il crut apparemment qu'on ne pouvait donner un<br />

amour <strong>de</strong> cette nature qu'à un personnage peu<br />

connu et presque d'invention, et il le crut au-<strong>de</strong>ssous<br />

d'un caractère historique. Il énonce ses principes<br />

dans cette même lettre à Saint-Évremond, que j'ai<br />

déjà citée.<br />

« J'ai cm jusqu'ici que l'amour était une passion trop<br />

ces froi<strong>de</strong>s intrigues^ il n'y a d'amour que le nom ;<br />

<strong>de</strong> cette ga<strong>la</strong>nterie <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>, mêlée à <strong>de</strong>s dissertations<br />

politiques : c'est ce qui occasionna <strong>la</strong> peu<br />

<strong>de</strong> succès <strong>de</strong> toutes ses <strong>de</strong>rnières pièces; mais c'est<br />

aussi ce dont il ne parait pas s'être aperçu dans les<br />

eiamens qu'il en fait. Soit qu'il cherchât à se tromper<br />

lui-même 9 soit qu'en effet ses connaissances ne<br />

fussent pas plus éten<strong>du</strong>es, il ne touche jamais dans<br />

ses eiamens le véritable point <strong>de</strong> <strong>la</strong> question. Il attribue<br />

ses disgrâces, tantôt au refus d'un suffrage<br />

illustre, tantôt au changement <strong>de</strong> goût dans le public ;<br />

une autre fois à certaines opinions; il disserte longuement<br />

sur l'unité <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> lieu, <strong>de</strong>ux choses<br />

qui ne feront jamais le sort d'un ouvrage; et il ne<br />

chargée- <strong>de</strong> faiblesses pour être là dominante dans une pièce<br />

héroïque. 1 "faine qu'elle y serve d'ornement , et son pus <strong>de</strong><br />

esrpg. lue ieacereia et nés enjoués sont <strong>de</strong> contfwe avis,<br />

mmhwmêmmêéésrmèiïmm» »<br />

Citons à Fappuj <strong>de</strong> ce passage celui <strong>de</strong> Fontenelle,<br />

qui s'y rapporte entièrement.<br />

« Corneille fit le pût <strong>de</strong> son siècle se tourner entièrement<br />

<strong>du</strong> edté <strong>de</strong> l'amour te p<strong>la</strong>t passionné et le moins<br />

mai â w parle pas <strong>de</strong> <strong>la</strong> froi<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> l'ennui, les <strong>de</strong>ux vices<br />

mortels et irrémédiables dans <strong>la</strong> poésie dramatique.<br />

Il ne veut jamais voir que cette froi<strong>de</strong>ur et cet ennui<br />

tiennent principalement à ce-que l'amour, quoi qu'il<br />

en dise, faille nœud <strong>de</strong> toutes ses pièces, sans en<br />

excepter une seule, et que cet amour n'est presque<br />

jamais ce qu'il doit être dans <strong>la</strong> tragédie. II veut<br />

qu'il y serve d'ornement, et non pas <strong>de</strong> 'corps; et<br />

l'expérience nous a appris que l'amour ne peut pas<br />

être tin ornement <strong>de</strong> <strong>la</strong> machine théâtrale, mais qu'il<br />

en doit être un <strong>de</strong>s plus puissants ressorts ; que s'il<br />

n'est pas une passion intéressante par ses effets, et<br />

convenable au caractère <strong>du</strong> personnage, c'est un<br />

travers et un ridicule, et qu'il faut, par conséquent, "<br />

le renvoyer à <strong>la</strong> comédie ; que s'il n'est qu'un objet <strong>de</strong><br />

conversation etd'arrangeaient, il ne peut pas tourmenter<br />

beaucoup celui qui se donne pour amoureux,<br />

ni, par conséquent, les spectateurs, qui restent tout<br />

aussi tranquilles que lui. Corneille trouve cette passkm^opckargée<strong>de</strong>fi^kssepouréêrelm<br />

dominante<br />

dans une pièce héroïque; et l'expérience nous a<br />

appris que s'il y a quelque chose d'intéressant au<br />

théâtre, c'est d'y retrouver nos faiblesses, pourvu<br />

hérimwm ; mus il dédaigna fièrement d'avoir <strong>de</strong> <strong>la</strong> qu'elles fessent p<strong>la</strong>indre ceux qui les ressentent, et<br />

nc»plâsanee pour ce nouveau goût »<br />

qu'elle ne les fassent pas mépriser. Les passions alors<br />

Ces <strong>de</strong>ui passages peu?ent donner lieu à plus d'une<br />

ne trouvent leur excuse que dans leur excès, et c'est<br />

féfleiion. D'abord t on fuît bien c<strong>la</strong>irement en quoi<br />

dire assez que ces mêmes faiblesses doivent être<br />

consistait l'erreur <strong>de</strong> Corneille, et en qnoPcette<br />

dominantes dans une pièces même héroïque, oo ne<br />

erreur était excusable; car je suis persuadé qu'il<br />

pas s'y <strong>mont</strong>rer : j _ .<br />

était <strong>de</strong> bonne foL S'il persista dans son opinion,<br />

même après les succès <strong>de</strong> Racine, qui auraient pu<br />

le détromper, c'est qu'il avait été trente ans, nonseulement<br />

sans maître, mais sans rival. Les morceaux<br />

sublimes <strong>de</strong> ses premières tragédies en avaient<br />

couvert les fautes. Personne n'était en état <strong>de</strong> lui<br />

indiquer les plus essentielles, et nous avons vu l'Académie<br />

elle-même se méprendre entièrement sur le<br />

sujet <strong>du</strong> £W.. Quand son génie ne lui fournit plus<br />

les mêmes beautés, on sentit davantage le ?i<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Et cp© l'amour, souvent ée remeeéa @Qmt«tta 9<br />

Paraisse nae faiblesse, «t nnn nia lertn..<br />

Cest en rapprochant ainsi les erreurs d'un grand<br />

génie et les leçons d'un excellent esprit que l'on s'éc<strong>la</strong>ire<br />

sur <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong>s beaux-arts.<br />

Qu'une longue habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> gloire et <strong>de</strong> succès ait<br />

fait illusion à Corneille, qu'il ait regardé fart <strong>de</strong><br />

Racine comme une innovation passagère, parce qu'il<br />

ne Fataît pas connu, rien n'est plus pardonnable.<br />

Mais que dire <strong>de</strong> Fontenelle, qui f en 1743, après les

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