Catalogue Than Sok "Les Formes de l'Eau"
Nous sommes très heureux de présenter ce mois-ci une exposition consacrée à l'artiste Cambodgien Than Sok intitulée "Les Formes de l'Eau" à la Galerie Lee , et dont la commissaire est Erin Gleeson. C'est la première fois que cet artiste cambodgien majeur expose en France. Nous montrerons une série de compositions "all-over" à l'acrylique présentant des motifs répétés sur toute la toile qui suggèrent l'eau sous tous ses aspects. Le titre de la série fait référence au Kbach, l'art traditionnel khmer de l'ornementation décorative, transformé par Sok en une méditation sur la nature et sa possible destruction. - 3 - 26 février 2022
Nous sommes très heureux de présenter ce mois-ci une exposition consacrée à l'artiste Cambodgien Than Sok intitulée "Les Formes de l'Eau" à la Galerie Lee , et dont la commissaire est Erin Gleeson.
C'est la première fois que cet artiste cambodgien majeur expose en France. Nous montrerons une série de compositions "all-over" à l'acrylique présentant des motifs répétés sur toute la toile qui suggèrent l'eau sous tous ses aspects. Le titre de la série fait référence au Kbach, l'art traditionnel khmer de l'ornementation décorative, transformé par Sok en une méditation sur la nature et sa possible destruction.
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3 - 26 février 2022
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L’art de Sok relève d’abord d’une attention à la société qui l’entoure.
Indirectement, il rappelle que le fleuve principal, le Mékong, et les lacs du
Cambodge sont pollués. Ainsi cette eau précieuse est-elle menacée. Mais ce
contexte est évoqué de manière subtile et indirecte. La dimension politique
est d’ailleurs plutôt en arrière-plan dans cette série. Dans une toile plus frontale
datant de 2020 - qui n’est pas présentée ici et appartient à la collection de la
Galerie Batia Sarem - Sok reprend ces motifs répétés de l’eau mais parsème
sa toile de déchets.
Bien que connectée aux questions environnementales, la série présentée ici
s’apparente davantage à une méditation esthétique. Sok mène une quête
spirituelle, la répétition du motif en all-over et la variation des toiles, toutes
composées selon un principe identique, indiquent la volonté de saisir quelque
chose qui s’échappe : est-ce le concept de l’eau que Sok veut dessiner ? Mais
l’eau fuit l’artiste et le spectateur. Elle semble, insaisissable, se déplacer de
toiles en toiles. Il n’est même pas sûr que ce soit bien elle qui se cache derrière
ces motifs identiques. Paradoxalement, cette volonté de synthèse, cette
recherche presque conceptuelle rend l’eau méconnaissable, en la réduisant à
un dessin géométrique qui est repris à l’infini.
Le caractère fascinant des peintures de Than Sok vient d’abord de leur
simplicité. Son art est celui du dépouillement, seule manière pour l’artiste
d’approcher l’essence de ce qu’il entend saisir. Car Sok est en quête de ce
qui peut être perdu. L’artiste doit préserver un élément perçu comme fragile
en en capturant la forme la plus simple. Le dépouillement est donc une
manière de « sauver » le réel de sa destruction possible. Prenons deux de
ses installations parmi les plus saisissantes. Dans Tragedy (2009) Sok a aligné
des petites « maisons des esprits » (maisons protectrices qu’on trouve devant
toutes les habitations cambodgiennes), fabriquées par l’artiste à l’aide de
bâtons d’encens, à demi-brulées et fixées sur un mur. Jour après jour, l’artiste
en brulait une intégralement. Dans Srie Bun (2016), Sok avait accroché aux
murs diverses robes traditionnelles de moines, à moitié déchirées. Sok avait
été frappé par la fragilité de tous les éléments ici repris - les robes de moine
et les maisons des esprits - et leur possible disparition l’a touché. Ainsi, les
maisons sont-elles brulées et les robes déchirées. Sok souligne le caractère
transitoire des témoignages de la spiritualité dans la société. Les éléments
matériels qui l’incarnent reposent sur des conventions et des croyances qui
sont fragiles. On peut d’abord interpréter l’œuvre de Sok comme mue par une
nécessité d’alerter sur la nécessité de conserver les témoignages du spirituel
dans une société de plus en plus matérialiste.
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