Catalogue Than Sok "Les Formes de l'Eau"

Nous sommes très heureux de présenter ce mois-ci une exposition consacrée à l'artiste Cambodgien Than Sok intitulée "Les Formes de l'Eau" à la Galerie Lee , et dont la commissaire est Erin Gleeson. C'est la première fois que cet artiste cambodgien majeur expose en France. Nous montrerons une série de compositions "all-over" à l'acrylique présentant des motifs répétés sur toute la toile qui suggèrent l'eau sous tous ses aspects. Le titre de la série fait référence au Kbach, l'art traditionnel khmer de l'ornementation décorative, transformé par Sok en une méditation sur la nature et sa possible destruction. - 3 - 26 février 2022 Nous sommes très heureux de présenter ce mois-ci une exposition consacrée à l'artiste Cambodgien Than Sok intitulée "Les Formes de l'Eau" à la Galerie Lee , et dont la commissaire est Erin Gleeson.
C'est la première fois que cet artiste cambodgien majeur expose en France. Nous montrerons une série de compositions "all-over" à l'acrylique présentant des motifs répétés sur toute la toile qui suggèrent l'eau sous tous ses aspects. Le titre de la série fait référence au Kbach, l'art traditionnel khmer de l'ornementation décorative, transformé par Sok en une méditation sur la nature et sa possible destruction.
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3 - 26 février 2022

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THAN SOKKbach Teuk / Les Formes de l’Eaupar Yves Zlotowski, Janvier 2022La Galerie Batia Sarem est très heureuse de présenter les peintures de l’artistecambodgien Than Sok. La série s’intitule la forme de l’eau (en cambodgienKbach Teuk) et se présente sous la forme de composition en « all over » 1 depeintures acryliques. Sur toute la toile, sont proposés des motifs répétés quiévoquent l’eau sous divers aspects, avec en fond des monochromes de bleu,de vert, de jaune ou d’ocre. Une couleur domine chacune des compositions.C’est peut-être une eau boueuse ou agitée, dominée par un dessin schématiséreprésentant les fleurs ou animaux habitant les rivières et la mer, comme lestitres donnés à chaque toile l’évoquent. L’eau, dans chacune des toiles, prendainsi la forme d’un escargot, d’une hyacinthe ou d’un reptile.Dans Kbach Teuk, Sok représente la faune et la fleur de l’eau comme si cellescise reproduisaient à l’infini et finissaient par se confondre avec l’eau-même.Il souligne ainsi le caractère paradoxal de la forme de l’eau. Elle n’a, en tantque telle, pas de forme définie puisqu’elle épouse celle de ses habitants.C’est donc une forme aux possibilités multiples à partir de laquelle Than Sokpropose des variations. Sur certaines toiles, le schéma indique la mobilité del’eau et la toile tente d’en capturer les mouvements. Sur d’autres, les motifsreprennent une vision synthétique d’un animal comme l’escargot, le têtard oula palourde.¹ « All-over « signifie que la composition n’a pas de centre, pas de début, pas de fin. Cela suggère qu’elle peut s’étendre à l’infiniau-delà des limites de la toile.4

L’art de Sok relève d’abord d’une attention à la société qui l’entoure.Indirectement, il rappelle que le fleuve principal, le Mékong, et les lacs duCambodge sont pollués. Ainsi cette eau précieuse est-elle menacée. Mais cecontexte est évoqué de manière subtile et indirecte. La dimension politiqueest d’ailleurs plutôt en arrière-plan dans cette série. Dans une toile plus frontaledatant de 2020 - qui n’est pas présentée ici et appartient à la collection de laGalerie Batia Sarem - Sok reprend ces motifs répétés de l’eau mais parsèmesa toile de déchets.Bien que connectée aux questions environnementales, la série présentée icis’apparente davantage à une méditation esthétique. Sok mène une quêtespirituelle, la répétition du motif en all-over et la variation des toiles, toutescomposées selon un principe identique, indiquent la volonté de saisir quelquechose qui s’échappe : est-ce le concept de l’eau que Sok veut dessiner ? Maisl’eau fuit l’artiste et le spectateur. Elle semble, insaisissable, se déplacer detoiles en toiles. Il n’est même pas sûr que ce soit bien elle qui se cache derrièreces motifs identiques. Paradoxalement, cette volonté de synthèse, cetterecherche presque conceptuelle rend l’eau méconnaissable, en la réduisant àun dessin géométrique qui est repris à l’infini.Le caractère fascinant des peintures de Than Sok vient d’abord de leursimplicité. Son art est celui du dépouillement, seule manière pour l’artisted’approcher l’essence de ce qu’il entend saisir. Car Sok est en quête de cequi peut être perdu. L’artiste doit préserver un élément perçu comme fragileen en capturant la forme la plus simple. Le dépouillement est donc unemanière de « sauver » le réel de sa destruction possible. Prenons deux deses installations parmi les plus saisissantes. Dans Tragedy (2009) Sok a alignédes petites « maisons des esprits » (maisons protectrices qu’on trouve devanttoutes les habitations cambodgiennes), fabriquées par l’artiste à l’aide debâtons d’encens, à demi-brulées et fixées sur un mur. Jour après jour, l’artisteen brulait une intégralement. Dans Srie Bun (2016), Sok avait accroché auxmurs diverses robes traditionnelles de moines, à moitié déchirées. Sok avaitété frappé par la fragilité de tous les éléments ici repris - les robes de moineet les maisons des esprits - et leur possible disparition l’a touché. Ainsi, lesmaisons sont-elles brulées et les robes déchirées. Sok souligne le caractèretransitoire des témoignages de la spiritualité dans la société. Les élémentsmatériels qui l’incarnent reposent sur des conventions et des croyances quisont fragiles. On peut d’abord interpréter l’œuvre de Sok comme mue par unenécessité d’alerter sur la nécessité de conserver les témoignages du spiritueldans une société de plus en plus matérialiste.5

THAN SOK

Kbach Teuk / Les Formes de l’Eau

par Yves Zlotowski, Janvier 2022

La Galerie Batia Sarem est très heureuse de présenter les peintures de l’artiste

cambodgien Than Sok. La série s’intitule la forme de l’eau (en cambodgien

Kbach Teuk) et se présente sous la forme de composition en « all over » 1 de

peintures acryliques. Sur toute la toile, sont proposés des motifs répétés qui

évoquent l’eau sous divers aspects, avec en fond des monochromes de bleu,

de vert, de jaune ou d’ocre. Une couleur domine chacune des compositions.

C’est peut-être une eau boueuse ou agitée, dominée par un dessin schématisé

représentant les fleurs ou animaux habitant les rivières et la mer, comme les

titres donnés à chaque toile l’évoquent. L’eau, dans chacune des toiles, prend

ainsi la forme d’un escargot, d’une hyacinthe ou d’un reptile.

Dans Kbach Teuk, Sok représente la faune et la fleur de l’eau comme si cellesci

se reproduisaient à l’infini et finissaient par se confondre avec l’eau-même.

Il souligne ainsi le caractère paradoxal de la forme de l’eau. Elle n’a, en tant

que telle, pas de forme définie puisqu’elle épouse celle de ses habitants.

C’est donc une forme aux possibilités multiples à partir de laquelle Than Sok

propose des variations. Sur certaines toiles, le schéma indique la mobilité de

l’eau et la toile tente d’en capturer les mouvements. Sur d’autres, les motifs

reprennent une vision synthétique d’un animal comme l’escargot, le têtard ou

la palourde.

¹ « All-over « signifie que la composition n’a pas de centre, pas de début, pas de fin. Cela suggère qu’elle peut s’étendre à l’infini

au-delà des limites de la toile.

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