Hegel-Logique-tome-1

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58 CHAPITRE X.dre et à accoupler les termes à l'aventure, sans bien déterminerleur sens, leur valeur et leur fonction réels, à lesplacer les uns à côté des autres, on ne sait comment nipourquoi, et àdonner comme évident ce qui ne l'est nullement,ou qui, s'il l'est, l'est par d'autres raisons que cellesauxquelles on attribue son évidence. C'est ainsi que la cause,la finalité, Yinfini, Yêtre, le tout, X effet, la limite, etc., sontcombinés pour former des principes qu'on nous présentecomme évidents et indémontrables. Nousavons vu ce quedevient, lorsqu'on l'examine de près, l'évidence de l'un deces principes, le principe de contradiction (§vi), et la logiquede Hegel est, pour ainsi dire, une démonstration continuede tout ce qu'il y a de faux et d'irrationnel dans cette manièred'envisager et de traiter les principes, Mais, pour compléterces considérations, nous examinerons ici un autre de cesprincipes prétendus évidents, le principe de causalité.Nous ferons d'abord remarquer, à ce sujet, qu'on se sertdelà notion de cause de deux manières. En la joignant àl'infini, ou à Dieu, ou à la substance on forme les propositions: L'Infini ou Dieu, ou la substance est cause ;en lajoignant à un autre terme, à V effet, on forme la proposition: Touteffet a une cause. En rapprochant ces deux propositions,on pourrait demander comment une seule et mêmenotion (1) peut se trouver unie à deux termes si différents,développe des rapports qu'on peut exprimer sous forme de proposition ou dedéfinition. Mais, comme on le verra dans la Logique, la proposition et ladéfinition n'expriment qu'imparfaitement ces rapports. — Gonf. sur ce pointle Théétète où Platon montre que le jugement ne constitue pas la science; etplus bas, ch. XII.(1) C'est, en effet, la même notion qu'on joint aux deux termes, bienqu'on ajoute le mot absolue dans la première proposition, et qu'on dise une

LA LOGIQUE EST LA SCIENCE DE LA FORME ABSOLUE. 69tels que Dieu et effet.Mais dans cet accouplement, ou. pourmieux dire, cet amalgame de termes on n'y regarde pasde si près.L'essentiel est qu'on puisse former une propositionqu'on présentera comme évidente et incontestable, ense fondant, non sur la valeur et les rapports absolus destermes, mais surl'opinion, ou sur des notions vagues, préconçueset admises sans examen. C'est ainsi, par exemple,qu'on en use avec Vinfini, et qu'on nous dit que Dieuest infini, que Vespace et le temps sont infinis, que le petitet le grand sont infinis, que le beau, le bien, le vrai sontinfinis, etc.,sans nous apprendre, ni ce que c'est que l'infini,ni comment ces choses si diverses peuvent être infinies,nisi elles sont toutes infinies dans le même sens. Mais,pour en revenir au premier exemple, voyons si le principede causalité, tel qu'on le formule et qu'on l'entend ordinairement,est aussi évident qu'on le prétend ; car il ne fautpas oublier que c'est là le seul point que nous avons à examinerici. Et d'abord, comment devons-nous entendre icice principe? Devons-nous le considérer comme un principepurement logique — en prenant ce mot dans le sens de lalogique formelle — c'est-à-dire comme une forme, ou unerègle subjective et relative de la pensée? En ce cas, nonseulementnous n'avons pas un principe évident, mais nouscause dans la seconde. Mais il est évident que la causalité absolue n'estautre chose que la noiion de cause entendue dans le sens le plus général, ou,pour mieux dire, que c'est la cause dans sa notion; et que, pour la secondeproposition, ce sont les imperfeclions et les habitudes du langage qui lui ontdonné celte forme particulière el limitée. Car la vraie expression n'est pasune cause, mais la cause. Et ainsi l'expression : l'effet appelle nécessairement,la cause, serait plus correcte, comme nous allons le montrer dans ce mêmechapitre.

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tels que Dieu et effet.

Mais dans cet accouplement, ou. pour

mieux dire, cet amalgame de termes on n'y regarde pas

de si près.

L'essentiel est qu'on puisse former une proposition

qu'on présentera comme évidente et incontestable, en

se fondant, non sur la valeur et les rapports absolus des

termes, mais surl'opinion, ou sur des notions vagues, préconçues

et admises sans examen. C'est ainsi, par exemple,

qu'on en use avec Vinfini, et qu'on nous dit que Dieu

est infini, que Vespace et le temps sont infinis, que le petit

et le grand sont infinis, que le beau, le bien, le vrai sont

infinis, etc.,

sans nous apprendre, ni ce que c'est que l'infini,

ni comment ces choses si diverses peuvent être infinies,

ni

si elles sont toutes infinies dans le même sens. Mais,

pour en revenir au premier exemple, voyons si le principe

de causalité, tel qu'on le formule et qu'on l'entend ordinairement,

est aussi évident qu'on le prétend ; car il ne faut

pas oublier que c'est là le seul point que nous avons à examiner

ici. Et d'abord, comment devons-nous entendre ici

ce principe? Devons-nous le considérer comme un principe

purement logique — en prenant ce mot dans le sens de la

logique formelle — c'est-à-dire comme une forme, ou une

règle subjective et relative de la pensée? En ce cas, nonseulement

nous n'avons pas un principe évident, mais nous

cause dans la seconde. Mais il est évident que la causalité absolue n'est

autre chose que la noiion de cause entendue dans le sens le plus général, ou,

pour mieux dire, que c'est la cause dans sa notion; et que, pour la seconde

proposition, ce sont les imperfeclions et les habitudes du langage qui lui ont

donné celte forme particulière el limitée. Car la vraie expression n'est pas

une cause, mais la cause. Et ainsi l'expression : l'effet appelle nécessairement,

la cause, serait plus correcte, comme nous allons le montrer dans ce même

chapitre.

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