Hegel-Logique-tome-1

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5ft CHAPITRE VIII.principes aux causes secondaires, aux effets el aux chosesparticulières. L'investigation précédente prouve déjà combiencette opinion est peu fondée, puisqu'elle établit quenon-seulement la logique formelle et la métaphysique sontdeux sciences distinctes, mais qu'il ne saurait y avoir aucunrapport entre elles, et que, par conséquent, cette prétenduedéduction par laquelle on voudrait rattacher la logique à lamétaphysique est une pure assertion. Cependant, pourmettre ce point hors de discussion, accordons pour uninstant qu'il en est ainsi, et que nous avons ici deuxsciences dont l'une fournit les principes, et l'autretire desconséquences ;que l'une est le produit d'une faculté appeléeraison, et l'autre le produit d'une autre faculté appelée raisonnement.Si cette théorie a un sens, elle veut dire que dans unsyllogisme la raison fournit la majeure, et que le raisonnementde son côté fournit la mineure, ainsi que le rapportqui unit la mineure et la majeure, c'est-à-dire la conclusion.S'il en est ainsi, le raisonnement occupera un rangplus élevé que la raison, et il accomplira des opérationsbien plus importantes et bien plus complètes que cette dernière,ce qui est contre la supposition. Car nous supposonsou, pour mieux dire, nous devons admettre que la facultéqui nous révèle les principes derniers des choses est la facultésouveraine à laquelle toutes les autres facultés sontsubordonnées, comme le soldat est subordonné à son chefet le manœuvre à l'architecte. Mais cette distinction renverseles rôles, et fait de la raison une faculté subalterne.Et, en effet, lorsque nous disons que la raison fournit lesIprincipes, et que le raisonnement déduit les conséquences,

DE LA RAISON ET DU RAISONNEMENT. 55nous disons en réalité que la raison s'arrête aux principes,et qu'il lui est défendu de franchir cette limite, tandis quele raisonnement embrasse à la fois les principes et les con- 'séquences, Car pour déduire les conséquences des principes,il faut que le raisonnement les perçoive tous lesdeux à la fois, et qu'il perçoive les principes plus distinctementque les conséquences, et antérieurement aux conséquences,puisque c'est des principes que ces dernièresdoivent êlre déduites. Soit le syllogisme :« Toute vertu vient de Dieu,» La justice est une vertu,» Donc, etc. »Il est évident que dans ce syllogisme tous les ternies ettoutes les propositions, ainsi que leurs rapports doiventêtre perçus par une seule et même faculté. Car s'ils étaientperçus par deux facultés différentes, dont l'une s'arrêteraità la majeure, et l'autre prendrait l'opération à la mineurepour l'achever, sans percevoir le principe aussidistinctementque la première, et même, nous le répétons, plusdistinctement et plus complètement que la première, parlaraison qu'elle doit en tirer des conséquences, l'opérationne pourrait point s'accomplir. Et pour rendre cette impossibilitéplus visible, qu'on prenne les trois termes dont secompose le syllogisme, et qu'on les mette sous cetteforme ;ABCSoit A le petit, C le grand, et B le moyen terme. Si l'onexamine les rapports de ces termes, l'on verra d'abord queB, dont la fonction consiste à unir A et C, doit êlre perçu

5ft CHAPITRE VIII.

principes aux causes secondaires, aux effets el aux choses

particulières. L'investigation précédente prouve déjà combien

cette opinion est peu fondée, puisqu'elle établit que

non-seulement la logique formelle et la métaphysique sont

deux sciences distinctes, mais qu'il ne saurait y avoir aucun

rapport entre elles, et que, par conséquent, cette prétendue

déduction par laquelle on voudrait rattacher la logique à la

métaphysique est une pure assertion. Cependant, pour

mettre ce point hors de discussion, accordons pour un

instant qu'il en est ainsi, et que nous avons ici deux

sciences dont l'une fournit les principes, et l'autre

tire des

conséquences ;

que l'une est le produit d'une faculté appelée

raison, et l'autre le produit d'une autre faculté appelée raisonnement.

Si cette théorie a un sens, elle veut dire que dans un

syllogisme la raison fournit la majeure, et que le raisonnement

de son côté fournit la mineure, ainsi que le rapport

qui unit la mineure et la majeure, c'est-à-dire la conclusion.

S'il en est ainsi, le raisonnement occupera un rang

plus élevé que la raison, et il accomplira des opérations

bien plus importantes et bien plus complètes que cette dernière,

ce qui est contre la supposition. Car nous supposons

ou, pour mieux dire, nous devons admettre que la faculté

qui nous révèle les principes derniers des choses est la faculté

souveraine à laquelle toutes les autres facultés sont

subordonnées, comme le soldat est subordonné à son chef

et le manœuvre à l'architecte. Mais cette distinction renverse

les rôles, et fait de la raison une faculté subalterne.

Et, en effet, lorsque nous disons que la raison fournit les

I

principes, et que le raisonnement déduit les conséquences,

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