Hegel-Logique-tome-1

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42 GHAPITBE VII.« l'homme eut un être doué de la faculté de pleurer. » Etsi dans les choses ordinaires et dans l'ordre des faitsla contradiction est admise malgré et contre le principede contradiction, nous ferons observer qu'il n'enest pas ainsi dans les questions spéculatives, ou quiroulent sur des matières bien plus importantes, maiséloignées de l'usage ordinaire et placées au-dessus de l'appréciationgénérale. Car ici trompés et égarés par ce principe,nous refusons d'admettre et nous admettons tour àtour sans règle et sans dicernement la contradiction, refusantde l'admettre pour tel ordre de faits ou d'êtres, et l'admettantpour tel autre, et, qui plus est, refusant d'admettreici, et sous une forme, la même contradiction que nousavons admise ailleurs, et sous une autre forme. Et il nefaut pas un grand effort pour voir que la plupart des opinionsou des théories erronées ont leur source dans l'exclusionde la contradiction. Car si tous leshommessont égaux,et qu'il n'y ait pas ft inégalité naturelle entre eux, il suit nécessairementque l'organisation actuelle de la société, oùl'inégalité est reconnue et sanctionnée, est contraire à lanature,et que, par conséquent, ceux qui proclament l'égalitédes droits et des biens, lenivellement du pouvoir, desclasses et de l'éducation, sont les organes légitimes de lanature et de la vérité. L'opinion suivant laquelle les formesabsolues de gouvernement — monarchique ou démocratique— seraient plus parfaites et plus ralionnelles que lesmixtes n'a pas d'autre fondement, toute forme absolueexcluant la contradiction. On trouvera des exemples semblablesdans les autres branches de la connaissance, dansla morale, dans la physique et dans la métaphysique. Ainsi.

LOGIQUE APPLIQUÉE. /|3ceux qui enseignent que l'homme est un être purementsensible, et que la sensibilité constitue le fond même dela nature humaine, s'ils sont conséquents, enseignerontdans la morale que la sensation et le plaisir sont le seulprincipe et la seule règle de l'action ; comme au contraireceux qui prétendent que c'est la raison — c'est du moinsainsi qu'ils l'appellent — qui constitue l'homme, enseignerontque le devoir et le bien sont le seul mobile légitimede nos actions. De même, ceux qui enseignent que l'hommeest absolument libre > et ceux qui enseignent que la nécessitéest la loi universelle des choses, fondent leur doctrinesur le principe de contradiction. En un mot, si l'on admetle principe de contradiction, il faut ou mutiler la réalité,supprimer, pour ainsi dire, la moitié de l'univers, et substituerdes notions étroites, arbitraires et artificielles à lanature concrète des choses, ou bien éluder la difficultépardes inconséquences, ou par des distinctionspurement verbales,en disant, par exemple, que la droite et la courbepeuvent être considérées comme identiques, leur différenceétantsipetitequ'onpeutn'enpastenircompte^uquel'ombreet le froid ne sont pas des réalités, mais des privations de lalumière et du chaud, comme si la privation dans un êtrepouvait exister sans un principe qui la produit, ou commesi elle n'était rien. Et puis ici l'un des termes de la contradiction— nous voulons dire l'ombre ou le froid —est considéré comme une simple privation, et ailleurs,dans la polarité, ou dans la contradiction de la libertéet de la nécessité, il devient un principe réel; car lepôle négatif, ainsi que la liberté, sont considérés commedes réalités vis-à-vis de leurs contraires. Et dans la

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ceux qui enseignent que l'homme est un être purement

sensible, et que la sensibilité constitue le fond même de

la nature humaine, s'ils sont conséquents, enseigneront

dans la morale que la sensation et le plaisir sont le seul

principe et la seule règle de l'action ; comme au contraire

ceux qui prétendent que c'est la raison — c'est du moins

ainsi qu'ils l'appellent — qui constitue l'homme, enseigneront

que le devoir et le bien sont le seul mobile légitime

de nos actions. De même, ceux qui enseignent que l'homme

est absolument libre > et ceux qui enseignent que la nécessité

est la loi universelle des choses, fondent leur doctrine

sur le principe de contradiction. En un mot, si l'on admet

le principe de contradiction, il faut ou mutiler la réalité,

supprimer, pour ainsi dire, la moitié de l'univers, et substituer

des notions étroites, arbitraires et artificielles à la

nature concrète des choses, ou bien éluder la difficulté

par

des inconséquences, ou par des distinctions

purement verbales,

en disant, par exemple, que la droite et la courbe

peuvent être considérées comme identiques, leur différence

étantsipetitequ'onpeutn'enpastenircompte^uquel'ombre

et le froid ne sont pas des réalités, mais des privations de la

lumière et du chaud, comme si la privation dans un être

pouvait exister sans un principe qui la produit, ou comme

si elle n'était rien. Et puis ici l'un des termes de la contradiction

— nous voulons dire l'ombre ou le froid —

est considéré comme une simple privation, et ailleurs,

dans la polarité, ou dans la contradiction de la liberté

et de la nécessité, il devient un principe réel; car le

pôle négatif, ainsi que la liberté, sont considérés comme

des réalités vis-à-vis de leurs contraires. Et dans la

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