Hegel-Logique-tome-1

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396 LOGIQUE. — PREMIÈRE PARTIE.même, dans l'histoire de la philosophie, les systèmes quisont venus les premiers sont les plus abstraits et, parsuite, les plus rudimenlaires. Mais le rapport des systèmesphilosophiques qui ont précédé avec ceux qui leur ont succédéest en général le même que celui qui existe entreles degrés de ridée logique qui précèdent et ceux quisuivent, savoir, les systèmes postérieurs enveloppent lesantérieurs comme des moments supprimés. C'est là la vraiesignification de cette réfutation qui a lieudans l'histoire dela philosophie d'un système par un autre, et plus précisémentd'un système antérieur par un postérieur,réfutationqu'on a souvent si mal comprise. Lorsqu'il est questionde la réfutation d'une doctrine philosophique, on n'entendordinairement cette réfutation que dans un sens abstrait etnégatif, c'est-à-dire en ce sens que la doctrine qu'on réfuten'a plus de valeur, et qu'on doit la mettre de côtécomme une doctrine vieillie et épuisée. S'il en était ainsi,l'étude de l'histoire de la philosophie serait une bien tristeoccupation, puisqu'elle nous apprendrait comment, dans lecours du temps, tous les systèmes philosophiques qui sesont succédés ont trouvé leur réfutation. Mais si, d'un côté,on accorde que toutes les philosophies ont été réfutées, ondoit, avec tout autant de raison, soutenir, de l'autre, qu'aucunephilosophie n'a été réfutée, et même qu'elle ne peutêtre réfutée. Ce qui est vrai pour deux raisons : d'abord,parce que toute philosophie qui mérite ce nom a pourcontenu l'idée en général, et ensuite, parce que chaquesystème philosophique représente un moment ou un degrépariculier dans le développement de l'idée. Par conséquent,réfuter une philosophie veut dire qu'on a franchi

DOCTRINE DE l'ÉTRE. QUALITÉ. 397ses limites, et que son principe déterminé a été en quelquesorte rabaissé au rôle d'un moment idéal. Ainsi l'histoirede la philosophie, pour ce qui concerne son contenu essentiel,ne roule pas sur le passé, mais sur l'éternel et l'absolumentprésent, et, en la considérant dans ses résultats,on ne doit pas se la représenter comme un tableau oùviennent se dérouler les erreurs de l'esprit humain , maisplutôt comme un Panthéon des formes divines. Ces formesdivines sont les différents degrés de l'idée, tels qu'ils apparaissentdans la succession de leur développement dialectique.C'est à l'histoire de la philosophie qu'il appartientde montrer d'une manière plus directe jusqu'à quel pointle développement de son contenu, d'un côté, coïncideavec l'idée logique pure, et, de l'autre côté, il s'en écarte. Icinous devons seulement rappeler que le commencement dela logique est le même que celui de l'histoire proprementdite de la philosophie. Ce commencement nous le trouvonsdans la philosophie éléalique, et plus spécialementdans celle du Parménide qui a conçu l'absolu comme être,car il dit : l'être est, et le non-être n'est pas. C'est pourcette raison qu'on doit considérer cette philosophie commeconstituant le vrai commencement de la philosophie, carla philosophie en général est la connaissance spéculative(1), et c'est ici que la pensée pure s'est pour la premièrefois fermement affirmée, et qu'elle s'est prise ellemêmepour objet.L'homme asans dou(e pensé dès l'origine, car ce n'est(1) Denkendes Erkennen : la connaissance pensante, la connaissance quis'est élevée à la pensée, et qui se meut dans la pensée. Voyez sur ce pointGrande logique, vol. I, p. 86. (Édition 1833.)

396 LOGIQUE. — PREMIÈRE PARTIE.

même, dans l'histoire de la philosophie, les systèmes qui

sont venus les premiers sont les plus abstraits et, par

suite, les plus rudimenlaires. Mais le rapport des systèmes

philosophiques qui ont précédé avec ceux qui leur ont succédé

est en général le même que celui qui existe entre

les degrés de ridée logique qui précèdent et ceux qui

suivent, savoir, les systèmes postérieurs enveloppent les

antérieurs comme des moments supprimés. C'est là la vraie

signification de cette réfutation qui a lieu

dans l'histoire de

la philosophie d'un système par un autre, et plus précisément

d'un système antérieur par un postérieur,

réfutation

qu'on a souvent si mal comprise. Lorsqu'il est question

de la réfutation d'une doctrine philosophique, on n'entend

ordinairement cette réfutation que dans un sens abstrait et

négatif, c'est-à-dire en ce sens que la doctrine qu'on réfute

n'a plus de valeur, et qu'on doit la mettre de côté

comme une doctrine vieillie et épuisée. S'il en était ainsi,

l'étude de l'histoire de la philosophie serait une bien triste

occupation, puisqu'elle nous apprendrait comment, dans le

cours du temps, tous les systèmes philosophiques qui se

sont succédés ont trouvé leur réfutation. Mais si, d'un côté,

on accorde que toutes les philosophies ont été réfutées, on

doit, avec tout autant de raison, soutenir, de l'autre, qu'aucune

philosophie n'a été réfutée, et même qu'elle ne peut

être réfutée. Ce qui est vrai pour deux raisons : d'abord,

parce que toute philosophie qui mérite ce nom a pour

contenu l'idée en général, et ensuite, parce que chaque

système philosophique représente un moment ou un degré

pariculier dans le développement de l'idée. Par conséquent,

réfuter une philosophie veut dire qu'on a franchi

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