Hegel-Logique-tome-1

14.02.2021 Views

326 LOGIQUE. — PREMIÈRE PARTIE.façon générale; en d'autres termes, elle y est conçuecomme volonté pensante (1). Elle doit dicter les lois impérativeset objectives de la liberté, c'est-à-dire elle doitprescrire ce qu'il faut faire. Le droit de considérer ici lapensée comme une activité qui détermine objectivement(c'est-à-dire en réalité comme une raison), Kant le fondesur ce que la liberté pratique peut être démontrée parl'expérience, c'est-à-dire peut se constater dans la viephénoménale de la conscience. Contre cette expériencevient se ranger tout ce que le Déterminisme a lui aussi tiréde l'expérience, et surtout l'induction sceptique, celle deHume y comprise, fondée sur la diversité infinie de ce queles hommes considèrent comme droit et comme devoir,c'est-à-dire des lois qui doivent être les lois objectives dela liberté.§ LIV.Ici aussi ce que la pensée pratique se pose à elle-mêmecomme loi, comme critérium de sa propre détermination,c'est cette même identité abstraite de l'entendement suivantlaquelle il ne doit pas y avoir de contradiction dansla détermination (2). Ainsi la raison pratique ne s'élèvepas elle aussi au-dessus de ce formalisme qui devait cependants'arrêter aux limites de la raison théorétique. Mais laraison pratique pose la détermination universelle, le bien,et elle le pose non-seulement comme bien en soi, mais(1) Denkende Wille. L'expression volonté pensante est plus exacte que volontéréfléchie, car elle montre combien la pensée proprement dite entre profondémentdans cette volonté qui veut l'universel. Voyez sur ce point Philosophiede VEsprit,(2) In dem Bestimmen : dans le déterminer;

SECOND RAPPORT DE LA PENSÉE AVEC L'OBJET. 327comme bien quiexiste dans le monde, comme bien qui aune existence objective extérieure (1), car c'est là cequ'elle exige comme raison pratique proprement dite, etelle n'est telle qu'à cette condition. Cela revient à dire quela pensée n'a pas seulement une valeur subjective, maisune valeur objective aussi. Nous examinerons plus loin cepostulat de la raison pratique.Zusatz. Ce que Kant refuse à la raison théorétique, lalibre détermination d'elle-même (2), il le revendiqueexpressément pour la raison pratique. C'est surtout par cecôté que la philosophie de Kant a éveillé, et avec raison,un vif intérêt. Pour apprécier le service que Kant a rendusous ce rapport, il faut se rappeler quelle était la philosophiemorale qui dominait à cette époque. C'était Yeudémonismeque Kant trouva devant lui, doctrine qui, à laquestion sur la destinée de l'homme, répondait que la fin dela vie humaine est la félicité, et que c'est là ce que l'hommedoit rechercher. Comme par félicité on entend lasatisfactionde ses inclinations, de ses désirs, de ses besoins, etc.,c'est le contingent et le particulier que l'eudémonisme avaitérigé en principe de la volonté et de son activité. Kant vintopposer à cette doctrine qui n'a pas de point ûxe, et quiouvre la grande voie à l'arbitraire et au caprice, la raisonpratique, et ilproclama la nécessité rationnelle d'une déterminationde la volonté universelle et obligatoire pour tous.Ainsi, comme nous l'avons fait observer dans les deuxpara-(1) Àusserliche Objectivitiit : Objectivité extérieure.(2) Die freie Selbstbestimmung. Eu effet, par là que, suivant Kant, laraison reçoit son objet, son contenu du dehors, elle ne se détermine paslibrement elle-même.

SECOND RAPPORT DE LA PENSÉE AVEC L'OBJET. 327

comme bien qui

existe dans le monde, comme bien qui a

une existence objective extérieure (1), car c'est là ce

qu'elle exige comme raison pratique proprement dite, et

elle n'est telle qu'à cette condition. Cela revient à dire que

la pensée n'a pas seulement une valeur subjective, mais

une valeur objective aussi. Nous examinerons plus loin ce

postulat de la raison pratique.

Zusatz. Ce que Kant refuse à la raison théorétique, la

libre détermination d'elle-même (2), il le revendique

expressément pour la raison pratique. C'est surtout par ce

côté que la philosophie de Kant a éveillé, et avec raison,

un vif intérêt. Pour apprécier le service que Kant a rendu

sous ce rapport, il faut se rappeler quelle était la philosophie

morale qui dominait à cette époque. C'était Yeudémonisme

que Kant trouva devant lui, doctrine qui, à la

question sur la destinée de l'homme, répondait que la fin de

la vie humaine est la félicité, et que c'est là ce que l'homme

doit rechercher. Comme par félicité on entend la

satisfaction

de ses inclinations, de ses désirs, de ses besoins, etc.,

c'est le contingent et le particulier que l'eudémonisme avait

érigé en principe de la volonté et de son activité. Kant vint

opposer à cette doctrine qui n'a pas de point ûxe, et qui

ouvre la grande voie à l'arbitraire et au caprice, la raison

pratique, et il

proclama la nécessité rationnelle d'une détermination

de la volonté universelle et obligatoire pour tous.

Ainsi, comme nous l'avons fait observer dans les deuxpara-

(1) Àusserliche Objectivitiit : Objectivité extérieure.

(2) Die freie Selbstbestimmung. Eu effet, par là que, suivant Kant, la

raison reçoit son objet, son contenu du dehors, elle ne se détermine pas

librement elle-même.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!