Hegel-Logique-tome-1

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4 CHAPITRE I.fournit une méthode nouvelle et des procédés logiquesinconnus à Aristote et aux philosophes de l'antiquité,cetteillusion a été dissipée par la critique moderne et par uneconnaissance plus approfondieet plus exacte de la philosophieancienne (1).Le défaut commun de toutes les théories logiques, de lathéorie aristotélicienne comme des autres, mais plus decelles-ci que de la première, ainsi que je le montrerai parla suite,l'erreur qui a empêché les auteurs de ces théoriesd'établir la logique sur des bases vraiment rationnelles,etqui vicie, si l'on peut ainsi dire, l'édifice entier, il faut lachercher dans le principe même d'où ils sont partis, je veuxdire dans la manière dont ils ont conçu cette science. Car ilsont tous considéré lalogique comme une science purementformelle, c'est-à-dire comme une science dont l'objet consisteà analyser et à décrire les formes purement subjectivesde la pensée, formes qui auraient une signification et unevaleur pour ce qui concerne l'intelligence et ses opérations,mais qui ne seraient liées par aucun rapport objectif etconsubstantiel avec les choses que nous pensons et con-/ naissons avec leur concours, ou, comme on dit, avec l'êtredes choses.C'est là la notion que les philosophes se sont généralementformée de la logique, et en partant de ce point devue ils ont mutilé cette science, ils l'ont, pour ainsi dire,Jdépouillée de sa substance, et n'ont laissé qu'une pureforme, qui,par cela même qu'elle a été séparée de sa sub-(1) Voy. , sur ce point, un écrit que j'ai publié en anglais : Inquiry intospéculative and expérimental Science. Londres, 185$, Trûbncr; et dans mesMélanges philosophiques, l'article Bacion.

REMARQUES PRÉLIMINAIRES. 5sfance, et qu'elle a été considérée indépendamment deschoses réelles et concrètes, est loin d'être une forme vrai- vment rationnelle et un instrument de la vérité. Et, il fautbien le dire, depuis Aristote jusqu'à nos jours on croiraitque les logiciens au lieu d'agrandir et de compléter le champdes recherches marqué par le philosophe grec, ne se sontappliqués qu'à le rétrécir, à en retrancher quelques-unesde ses branches essentielles et à le réduire ainsi à son minimum.De là les distinctions arbitraires et superficiellesde la vérité métaphysique et de la vérité logique, de laraison et du raisonnement, de la logique comme science dessimples possibilités, et de la métaphysique comme sciencedes réalités éternelles et absolues, distinctions qui, d'unepart, brisent l'unité de l'intelligence, et avec l'unité del'intelligence l'unité des choses, et, de l'autre, ont faitde la logique une sorte de caput mortuum, où l'intelligencene saurait trouver un critérium réel ?un guide rationnelet assuré,Tel est, même en ce moment, l'étal de la logique, bienqu'il y ait aujourd'hui plus d'un demi-siècle que sa rénovaliona été accomplie par Hegel.Lorsque la logique de Hegel parut (1), elle fut reçue enAllemagne avec admiration, on peut même direavec enthousiasmepar le monde philosophique. L'on compritalors qu'elle était appelée à remplacer l'ancienne logique,et à inaugurer une ère nouvelle non-seulement pour lalogique,mais pour la philosophie et la science en général.Car, par là même que la logique est une science universelle,(1) Nuremberg, 1812.

4 CHAPITRE I.

fournit une méthode nouvelle et des procédés logiques

inconnus à Aristote et aux philosophes de l'antiquité,

cette

illusion a été dissipée par la critique moderne et par une

connaissance plus approfondie

et plus exacte de la philosophie

ancienne (1).

Le défaut commun de toutes les théories logiques, de la

théorie aristotélicienne comme des autres, mais plus de

celles-ci que de la première, ainsi que je le montrerai par

la suite,

l'erreur qui a empêché les auteurs de ces théories

d'établir la logique sur des bases vraiment rationnelles,

et

qui vicie, si l'on peut ainsi dire, l'édifice entier, il faut la

chercher dans le principe même d'où ils sont partis, je veux

dire dans la manière dont ils ont conçu cette science. Car ils

ont tous considéré la

logique comme une science purement

formelle, c'est-à-dire comme une science dont l'objet consiste

à analyser et à décrire les formes purement subjectives

de la pensée, formes qui auraient une signification et une

valeur pour ce qui concerne l'intelligence et ses opérations,

mais qui ne seraient liées par aucun rapport objectif et

consubstantiel avec les choses que nous pensons et con-

/ naissons avec leur concours, ou, comme on dit, avec l'être

des choses.

C'est là la notion que les philosophes se sont généralement

formée de la logique, et en partant de ce point de

vue ils ont mutilé cette science, ils l'ont, pour ainsi dire,

J

dépouillée de sa substance, et n'ont laissé qu'une pure

forme, qui,

par cela même qu'elle a été séparée de sa sub-

(1) Voy. , sur ce point, un écrit que j'ai publié en anglais : Inquiry into

spéculative and expérimental Science. Londres, 185$, Trûbncr; et dans mes

Mélanges philosophiques, l'article Bacion.

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