Hegel-Logique-tome-1
180 INTRODUCTION DE HEGEL.viennent se joindre à lui, ce qui fait que tel objet particulierparaît suivant chacune de ces formes, et que le contenuqui en soi est le même, peut paraître comme différencié.REMARQUE.Les sentiments, les intuitions, les désirs, les volitions,etc., lorsqu'ils ne dépassent point les limites dela conscience (1), pouvant être nommés représentations,on peut dire, en général, que la philosophie a pour objetde mettre à la place des représentations,des pensées, des(1) C'est-à-dire qu'il ne suffit pas d'avoir la conscience d'une chose pourtn saisir la notion, parce qu'en ce cas l'on a sa représentation, l'on n'a pas sanotion. On pense, on ne se représente pas la notion, et l'acte par lequel onsaisit la notion d'une chose est placé au-dessus de la sphère de la conscience,puisqu'il l'identifie avec la chose même, tandis que, dans la conscience, lecatégories, et surtout des notions. Les représentationspeuvent être considérées, en général, comme des métaphores(2) des pensées et des notions. Avoir des représentationsn'est point connaître ce que ces représentations signifientpour la pensée, ce n'est point entendre leur penséeet leur notion. Mais c'est aussi autre chose de posséderdes pensées et des notions, et autre chose de savoir quelssont les représentations, les intuitions et les sentimentsqui leur correspondent.C'est à cela qu'il faut attribuer l'un des côtés de ce qu'onappelle inintelligibilité de la philosophie. La difficulté réside,d'une part, dans l'inaptitude, qui, au fond, n'est qu'unmanque d'habitude, à penser d'une manière abstraite, c'est-sujet et l'objet, la pensée et la notion sont séparées. Voy. sur ce point : Philosophiede V Esprit, et Philosophie de la Religion.(2) Metaphern : des images, et comme des enveloppes extérieures de lachose.
INTRODUCTION DE HEGEL. 181a-dire de saisir fortement les pensées pures, et de s'y mouvoir.Dans la conscience vulgaire, la pensée pure est altéréeet troublée par les éléments ordinaires, soit sensibles, soitspirituels, et dans la réflexion et le raisonnement, par unmélange de pensées, de sentiments, d'intuitions et de représentations.Ainsi, dans toute proposition ayant un contenusensible, comme, par exemple, « cette feuille estverte » , se trouvent mêlées des catégories, telles que lescatégories de Y être, de l'individualité, etc. Mais c'est toutautre chose que de prendre pour objet les pensées ellesmêmessans mélange.L'autre côté de cette inintelligibilité vient de laprétentionde vouloir retrouver dans la conscience, sous forme dereprésentation, ce qui y est comme pensée et notion.l'expression :De làqu'on ne sait ce qu'on doit faire d'une notionlorsqu'on l'a saisie, car on ne saurait penser dans une notionrien autre chose que la notion elle-même. Le sens decette expresssion est qu'on veut retrouver dans une notionune représentation connue et ordinaire. Il semble que,lorsqu'elle est privée d'une représentation, la consciencesente lui manquer son propre terrain, le terrain sur lequelellese croit solidement assise. Lorsqu'elle se trouve transportéedans la région pure des notions, elle ne sait plusdans quel monde elle est placée.A ce titre, l'on trouvera bien plus clairs et bien plus intelligiblesles écrivains, les prédicateurs et les discoureurs,qui débitent des connaissances vulgaires, que tout le mondesait par cœur, et qu'on comprend sans effort.
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viennent se joindre à lui, ce qui fait que tel objet particulier
paraît suivant chacune de ces formes, et que le contenu
qui en soi est le même, peut paraître comme différencié.
REMARQUE.
Les sentiments, les intuitions, les désirs, les volitions,
etc., lorsqu'ils ne dépassent point les limites de
la conscience (1), pouvant être nommés représentations,
on peut dire, en général, que la philosophie a pour objet
de mettre à la place des représentations,
des pensées, des
(1) C'est-à-dire qu'il ne suffit pas d'avoir la conscience d'une chose pour
tn saisir la notion, parce qu'en ce cas l'on a sa représentation, l'on n'a pas sa
notion. On pense, on ne se représente pas la notion, et l'acte par lequel on
saisit la notion d'une chose est placé au-dessus de la sphère de la conscience,
puisqu'il l'identifie avec la chose même, tandis que, dans la conscience, le
catégories, et surtout des notions. Les représentations
peuvent être considérées, en général, comme des métaphores
(2) des pensées et des notions. Avoir des représentations
n'est point connaître ce que ces représentations signifient
pour la pensée, ce n'est point entendre leur pensée
et leur notion. Mais c'est aussi autre chose de posséder
des pensées et des notions, et autre chose de savoir quels
sont les représentations, les intuitions et les sentiments
qui leur correspondent.
C'est à cela qu'il faut attribuer l'un des côtés de ce qu'on
appelle inintelligibilité de la philosophie. La difficulté réside,
d'une part, dans l'inaptitude, qui, au fond, n'est qu'un
manque d'habitude, à penser d'une manière abstraite, c'est-
sujet et l'objet, la pensée et la notion sont séparées. Voy. sur ce point : Philosophie
de V Esprit, et Philosophie de la Religion.
(2) Metaphern : des images, et comme des enveloppes extérieures de la
chose.