Hegel-Logique-tome-1

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154 PRÉFACE DE HEGEL.lui-même, cequi fait que cette science se trouve en oppositionavec la première opposition (1) et les efforts qu'onfait pour la dissimuler. On reproche à la philosophied'être en désaccord avec la connaissance expérimentale,avec la réalité rationnelle du droit, avec une religionsimple et une piété naïve. Mais ce n'est là qu'une préventionsans fondement, car la philosophie reconnaît ceschoses, et non-seulement elle les reconnaît, mais les justifie.La pensée, en pénétrant dans leur contenu, s'éclaireet se fortifie, comme elle s'éclaire et se fortifie dans lacontemplation de la nature, de l'histoire et de l'art. Car cecontenu concret est, en tant que pensé, l'idée spéculativeelle-même. Il n'y a conflit entre la philosophie spéculativeet ses choses, que lorsqu'on enlève à ces dernièresleur caractère véritable, et qu'on ramène leur contenu àdes catégories qu'on ne sait pas ensuite élever jusqu'à lawnotion, et achever dans l'idée ( 2).L'important résultat négatif auquel estarrivé l'entendementdans son éducation scientifique générale, savoir,qu'on ne peut s'élever à lavérité à l'aide de notions finies,amène ordinairement une conséquence opposée à celle qu'ilconfient immédiatement (3). Je veux dire que ce résultat,au lieu d'écarter ia connaissance des rapports finis, a fait(1) Car les doctrines auxquelles on fait ici allusion sont en réalité opposéesà la religion et à l'État.(2) Ce qui veut dire que les autres doctrines ne saisissent pas ces formes,et ces degrés de l'idée dans leur ensemble et dans leur enchaînement systématique,ou, ce qui revient au même, ne saisissent pas l'idée dans son unitésystématique, ce qui fait qu'elles n'entendent pas la philosophie, et commentla philosophie entend et embrasse ces formes.(3) Hegel fait surtout allusion à la doctrine de Jacobi. Voy. plus bas. sonIntroduction, § 61 et su iv.

PRÉFACE DE HEGEL. 155disparaître l'intérêt qui s'attache aux recherches sur lescatégories el sur leur application, etque, par suite, commecela arrive dans une situation désespérée, l'usage qu'on enfait en est d'autan! plus grossier, plus fortuitet plus irréfléchi.On n'entend pas que ce qui est inadéquat à la véritéet ce qui rend impossible la connaissance objective ce sontprécisément les catégories finies. Et en n'entendant pas cela,on en conclut que c'est au sentiment et à l'opinion subjectiveà prononcer et à trancher les questions, ce qui fait qu'au lieude démontrer on se borne à affirmer età énumérer les faitsde conscience, comme on les appelle, lesquels trahissentd'autant plus l'absence de toute critique, qu'on les saisit dansleur pureté (1). Ainsi on devrait expliquer et déterminerles besoins les plus profonds de l'esprit par une catégorieaussi maigre que celle de la connaissance immédiate, etsans chercher plus loin. On pourra croire qu'en écartantla philosophie, en l'écartant surtout des choses de lareligion,on bannit le mal, et l'on se préserve de toute illusionel de toute erreur. Puis, après avoir écarté la philosophie,on se livrera à la recherche de la vérité, ens'appuyant peut-être sur des suppositions et sur le raisonnement,c'est-à-dire, on aura recours, pour entendre la vérité,aux déterminations ordinaires de la pensée, telles queYessence et ses manifestations, Je principe et les conséquences,la cause et l'effet, etc., et à la façon ordinaire deraisonner d'après ces rapports et d'autres rapports finis.Ainsi, « on s'est débarrassé des méchants, mais le mal(I ) C'est-à-dire qu'où les isole, qu'on les prend au hasard, et qu'on s'interditpar là la faculté de les comprendre, d'en saisir la vraie nature, les rapportset l'unité.

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disparaître l'intérêt qui s'attache aux recherches sur les

catégories el sur leur application, et

que, par suite, comme

cela arrive dans une situation désespérée, l'usage qu'on en

fait en est d'autan! plus grossier, plus fortuit

et plus irréfléchi.

On n'entend pas que ce qui est inadéquat à la vérité

et ce qui rend impossible la connaissance objective ce sont

précisément les catégories finies. Et en n'entendant pas cela,

on en conclut que c'est au sentiment et à l'opinion subjective

à prononcer et à trancher les questions, ce qui fait qu'au lieu

de démontrer on se borne à affirmer et

à énumérer les faits

de conscience, comme on les appelle, lesquels trahissent

d'autant plus l'absence de toute critique, qu'on les saisit dans

leur pureté (1). Ainsi on devrait expliquer et déterminer

les besoins les plus profonds de l'esprit par une catégorie

aussi maigre que celle de la connaissance immédiate, et

sans chercher plus loin. On pourra croire qu'en écartant

la philosophie, en l'écartant surtout des choses de la

religion,

on bannit le mal, et l'on se préserve de toute illusion

el de toute erreur. Puis, après avoir écarté la philosophie,

on se livrera à la recherche de la vérité, en

s'appuyant peut-être sur des suppositions et sur le raisonnement,

c'est-à-dire, on aura recours, pour entendre la vérité,

aux déterminations ordinaires de la pensée, telles que

Yessence et ses manifestations, Je principe et les conséquences,

la cause et l'effet, etc., et à la façon ordinaire de

raisonner d'après ces rapports et d'autres rapports finis.

Ainsi, « on s'est débarrassé des méchants, mais le mal

(

I ) C'est-à-dire qu'où les isole, qu'on les prend au hasard, et qu'on s'interdit

par là la faculté de les comprendre, d'en saisir la vraie nature, les rapports

et l'unité.

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