Hegel-Logique-tome-1

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96 CHAPITRE XII.Puis donc que l'idée est la vérité absolue, l'idée a uncontenu, et un contenu également absolu, car ce qui est,parla même qu'il est, a un contenu, et un contenu adéquatà sa nature. C'est ce qu'on entend dire lorsqu'ondit que l'être des choses sensibles n'est pas l'être deschoses suprasensibles; ce qui ne veut point dire qu'iln'y a point de rapport entre l'être des choses suprasensibleset l'être des choses sensibles, mais seulement quel'idée n'est pas en elle-même, et dans son existenceabsolue, ce qu'elle est hors d'elle-même, dans ses manifestationsextérieures et dans la nature. Sous un certain rapport,on peut dire que l'idée et les choses sensibles ontmôme forme et même contenu, en ce que l'on retrouvedans les choses sensibles les traces de l'idée, et qu'en suivantces traces on peut remonter jusqu'à leur source. C'estainsi que le physicien s'efforce par ses expériences, ou, enappliquant à ses expériences l'absolu mathématique, de dégageret de saisir au milieu des phénomènes la loi, laquellen'est au fond autre chose que l'idée (I). Mais l'idée diffèredes choses sensibles en ce que sa forme et son contenusont fixes, immuables et infinis, tandis que îa forme et les contenu des choses sensibles sont mobiles, variables et finis.Elle en diffère aussi en ce que dans la région des idées,même lumière, ne l'éclairé pas de la même manière, mais elle s'adapte auxconditions du temps et de l'espace, aux exigences locales, et même à l'individu.Et si on la considère dans les limites du christianisme, on verra quecette lumière intérieure et éternelle se trouve extérieurement brisée et partagéeen sectes et en croyances diverses, qui sont comme des aspects diversd'uu seul et même principe.(1) Voy. sur ce point, notre Introd. à la Philos, de Hégcl, eh. V^ § n, etch. VI, § m, et notre Introd, à sa Philos, de la Nature.

LA LOGIQUE A UN CONTENU ABSOLU. 97tout est uni et rationnellement ordonné, tout se tient ets'enchaîne suivant la nature même des idées, tandis quedans l'être sensible tout est a l'état fragmentaire, ou bientout est mêlé et confondu. C'est de là que naît la difficultéqu'éprouve lapensée à retrouver l'idée sous la variélé et lamobilité des phénomènes, à unir ce qui doit être uni, à séparerce qui doit être séparé, et à saisir à la fois la différenceet l'unité des choses (1).Ainsi donc, l'idée a un contenu et un contenu conformeà sa nature, c'est-à-dire un contenu absolu, purement idéalet intelligible (2). S'il en est ainsi, l'idée logique aura aussi(1) La nature, telle qu'elle nous est donnée par la perception sensible, neuous offre que des individus isolés, ou des parties juxtaposées et extérieuresles unes aux autres, dans lesquelles les idées apparaissent comme brisées, età l'état de dispersion et d'indifférence. C'est aiusi qu'une seule cause devientplusieurs causes, qu'une seule et même substance devient plusieurs substances,comme une seule et même lumière, et une seule et même voix se dispersentdans les phénomènes lumineux et vocaux.(2) Nous nous sommes ici borné à montrer d'une manière générale queles idées ont un contenu, sans déterminer quel est ce contenu, parce quenotre objet n'est ici que d'aider le lecteur à s'orienter, et à se placer aupoint de vue le plus convenable pour saisir la pensée hégélienne, en luifournissant les données générales les plus indispensables. Nous devons faireaussi remarquer, — et c'est là un point important qu'il ne faudrait jamaisperdre de vue, — qu'une idée priseisolément et séparée du tout cesse d'êtrece qu'elle est. C'est l'œil qui, séparé du corps, n'est plus l'œil vivant, l'œilqui était lié à l'organisme entier, et que la vie anime, mais l'œil mort etpétrifié qui n'a plus de l'œil que le nom. Pour être bien comprise, une idéedoit être vue à sa place, en elle-même et dans l'euscmble de ses rapports.Lorsqu'on la sépare du tout, et qu'on la prend au hasard on pourra bienretrouver par l'analyse quelques uns de ses caractères, comme l'anatomisteen disséquant l'œil en retrouve les éléments; mais ou n'aura pas l'idéevivante, qui est liée au tout, et dont on saisit la filiation, le rôle et les rapports.Par exemple, on pourra prendre l'idée de la religion, et retrouver parl'analyse les éléments essentiels qui la composeut, c'est-à-dire l'esprit infini,l'esprit fini et leur rapport. Mais si l'on n'est pas arrivé à ce degré del' existence et de la pensée systématiquement, et après avoir traversé lesdegrés inférieurs de la nature et de l'esprit qui se trouvent comme enveloppésVÉRA. — Logique de Hegel. I. — 7

96 CHAPITRE XII.

Puis donc que l'idée est la vérité absolue, l'idée a un

contenu, et un contenu également absolu, car ce qui est,

parla même qu'il est, a un contenu, et un contenu adéquat

à sa nature. C'est ce qu'on entend dire lorsqu'on

dit que l'être des choses sensibles n'est pas l'être des

choses suprasensibles; ce qui ne veut point dire qu'il

n'y a point de rapport entre l'être des choses suprasensibles

et l'être des choses sensibles, mais seulement que

l'idée n'est pas en elle-même, et dans son existence

absolue, ce qu'elle est hors d'elle-même, dans ses manifestations

extérieures et dans la nature. Sous un certain rapport,

on peut dire que l'idée et les choses sensibles ont

môme forme et même contenu, en ce que l'on retrouve

dans les choses sensibles les traces de l'idée, et qu'en suivant

ces traces on peut remonter jusqu'à leur source. C'est

ainsi que le physicien s'efforce par ses expériences, ou, en

appliquant à ses expériences l'absolu mathématique, de dégager

et de saisir au milieu des phénomènes la loi, laquelle

n'est au fond autre chose que l'idée (I). Mais l'idée diffère

des choses sensibles en ce que sa forme et son contenu

sont fixes, immuables et infinis, tandis que îa forme et le

s contenu des choses sensibles sont mobiles, variables et finis.

Elle en diffère aussi en ce que dans la région des idées,

même lumière, ne l'éclairé pas de la même manière, mais elle s'adapte aux

conditions du temps et de l'espace, aux exigences locales, et même à l'individu.

Et si on la considère dans les limites du christianisme, on verra que

cette lumière intérieure et éternelle se trouve extérieurement brisée et partagée

en sectes et en croyances diverses, qui sont comme des aspects divers

d'uu seul et même principe.

(1) Voy. sur ce point, notre Introd. à la Philos, de Hégcl, eh. V^ § n, et

ch. VI, § m, et notre Introd, à sa Philos, de la Nature.

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