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P
P O L A R e t l i t t é r a t u r e s d e L ’ I M A G I N A I R E
FUTU.RE
Dmitry Glukhovsky (trad. Denis E, Savine)
Atalante, 736 p., 49,95$
Dmitry Glukhovsky a mis de côté ses
stations de métro moscovites pour
explorer d’autres horizons. Si une
sensation de claustrophobie nous
accompagnait dans Métro 2033, avec
Futu.Re, le sentiment d’oppression
prend une tout autre forme dans un
futur où non pas des milliards, mais
des trillions de personnes s’entassent
sur la Terre. Une vision pas très jolie de l’avenir dans
le cas où l’on pourrait modifier notre ADN afin de ne
plus avoir à mourir. Avec un héros pas trop aimable,
à qui on aimerait secouer les puces de temps en temps,
ce long roman est vraiment prenant et riche, avec une
conclusion saisissante. C’est un livre qui m’a fait voir un
portrait différent des romans postapocalyptiques que
je lis habituellement.
Shannon Desbiens Les Bouquinistes (Chicoutimi)
INTÉRIEUR NUIT
Marisha Pessl, Gallimard, 718 p., 39,95$
Le titre Intérieur nuit reflète bien
l’ambiance du livre. C’est sombre et
presque « claustrophobique ». Mais
c’est bon et on en redemande. La jeune
Ashley Cordova s’est enlevé la vie,
tandis que son père, Stanislas, cinéaste
d’horreur génial, mais reclus depuis
plus de trente ans, reste inaccessible.
Un journaliste ayant déjà enquêté sur
M. Cordova cherche à comprendre les raisons de ce
suicide. C’est le point de départ de ce polar qui défie les
normes du genre. Ici, pas de meurtrier sanguinaire, de
tueur en série, de flic alcoolique désabusé, ni même de
crime. Seulement l’histoire familiale des Cordova, qui se
présente de manière de plus en plus obscure jusqu’à la
toute fin, où Marisha Pessl y fait entrer la lumière grâce à
un élément-clé : la vérité.
Daniel Madore De Verdun (Montréal)
CRIMES À LA BIBLIOTHÈQUE
Richard Migneault (dir.), Druide, 384 p., 24,95$
Après la publication du recueil
de nouvelles Crimes à la librairie,
Richard Migneault nous revient cette
année avec un nouveau collectif
d’auteurs québécois sous le titre
Crimes à la bibliothèque. Cette foisci,
les auteurs nous transportent dans
l’univers habituellement calme des
bibliothèques, un thème qui a su les
inspirer, chacun arrivant à nous surprendre par l’originalité
de son récit. De plus, les textes sont suivis d’une
biographie de l’auteur nous permettant d’approfondir
son œuvre. Bravo à l’instigateur de ce projet, une idée
formidable qui nous offre l’occasion de découvrir de
talentueux auteurs d’ici ou de les redécouvrir dans un
style littéraire différent.
Renée Richard A à Z (Baie Comeau)
L’AFFAIRE CÉLINE
Jean Louis Fleury, Alire, 336 p., 27,95$
Qu’est-ce qui a pu conduire au meurtre
d’un universitaire français dans la région
de l’Outaouais, spécialiste reconnu de
l’auteur Louis-Ferdinand Céline, retrouvé
calciné dans le coffre d’une voiture deux
jours après son passage à l’émission
Tout le monde en parle? Aglaé Boisjoli,
capitaine de la Sûreté du Québec,
experte psychologue, enquête. Y a-t-il
un lien avec ce truand français immigré
au Québec, croisé par l’écrivain durant sa jeunesse,
ou avec cette richissime famille, possible descendante
de la « magnifique rouquine » dont le même Céline est
tombé amoureux fou lors de son voyage à Montréal en
1938? De surprise en surprise, découvrant de troublantes
ramifications politiques cachées derrière cet assassinat,
l’indignation de l’enquêtrice sera grandissante, avec,
sur fond d’écran, le singulier fantôme du géant Céline. Un
thriller rafraîchissant qui saura intriguer tous les fanatiques
de l’écrivain maudit.
Christian Vachon Pantoute (Québec)
LES CHOIX DE LA RÉDACTION
LE DOUTE
S.K. Tremayne, Presses de la Cité
384 p., 29,95$
Pour surmonter le deuil de la mort de
l’une de leurs jumelles, un couple et
l’enfant survivante partent sur une île
en Écosse, île sombre qu’ils seront seuls à habiter. Les
frissons commenceront alors que la fillette prétendra être
celle qui est décédée. Si la trame semble écrite d’avance,
détrompez-vous : ce thriller psychologique, aux effluves
d’Hitchcock, tient le cap et vous rendra dubitatif.
LE PLAN
Catherine D’Anjou, La Mèche
200 p., 23,95$
La juste saccade des phrases nous
plonge dans l’univers d’un homme
reclus : enivré par les listes, convoitant
la folie à force de tout prévoir, il calcule
tout à l’extrême, de l’éventualité d’une guerre mondiale
ou bactériologique à ses repas au micro-ondes et à la
construction d’un bunker. Un premier roman réussi qui
explore le mal-être social et l’anxiété contemporaine.
LE SECRET DE
MARIE JULIA FRANÇOIS
Lucien Morin, Fides, 376 p., 27,95$
Voici une enquête qui puise ses indices
dans deux cahiers qui se répondent,
datant de 1943, dont un journal intime.
En 2013, un jeune homme trouve lesdits cahiers et
réalise qu’il possède entre les mains les pièces du
casse-tête pour restituer deux meurtres qui ont eu lieu
chez les Augustines, sous l’occupation nazie de Paris.
La diariste serait sa grand-mère…
JE VOYAGE SEULE
Samuel BjØrk (trad. Jean-Baptiste
Coursaud), JC Lattès, 512 p., 32,95$
46 • LES LIBRAIRES • DÉCEMBRE 2015 - JANVIER 2016
Pierre-Alexandre Bonin
UN CHOIX DE de la librairie Monet (Montréal)
LE JEU DU DÉMIURGE
Philippe-Aubert Côté, Alire, 714 p., 34,95$
Pour sa première incursion dans la science-fiction, Philippe-Aubert Côté frappe fort,
avec un diptyque puissant et envoûtant. Le jeu du Démiurge est un space opera magistral,
dont la triple intrigue, dont l’une a lieu plus d’un siècle avant les autres, se
déroule dans un univers riche et foisonnant. La plume de Côté est tout en finesse, et
il parvient sans mal à nous faire voir le monde étrange dans lequel évoluent ses personnages.
Ils sont nombreux, mais bien campés et dotés d’une personnalité unique,
ce qui permet au lecteur de s’y identifier. Philippe-Aubert Côté montre une maîtrise
impressionnante de ses intrigues, entre lesquelles il alterne, sans jamais perdre le lecteur.
Il a également la faculté de synthétiser et de vulgariser des notions complexes,
que ce soit le transhumanisme, la propulsion par antimatière, ou encore l’évolution
humaine et l’exploration spatiale. Il s’amuse à disséminer les indices tout au long
de son récit, afin que le lecteur puisse tenter de reconstituer le fil des événements
et peut-être déterminer leurs conséquences. Mais une fois la poussière retombée et les dernières pages
tournées, on réalise qu’on était, nous aussi, un pion dans Le jeu du Démiurge et que c’est l’auteur qui tirait
les ficelles depuis le début. Mentionnons en terminant qu’il s’agit ici du premier roman de Philippe-Aubert
Côté. Au vu de la qualité de celui-ci, nous ne pouvons qu’espérer qu’il ne tardera pas avant de nous plonger
dans de nouvelles aventures, quelles qu’elles soient!
S’articulant autour d’assassinats de
fillettes de 6 ans, l’enquête commence
alors que l’on retrouve une jeune
victime pendue, portant une étiquette « Je voyage
seule » accrochée au cou. Avec son commissaire obèse
et son acolyte efficace, mais alcoolique, cette histoire
venue de Norvège possède beaucoup de dialogues et
propose moult pistes, alors que la montre continue de
tourner…
LES CORPS DE VERRE :
MÉLANCOLIE NOIRE
Erik Axl Sund (trad. Rémi Cassaigne)
Actes Sud, 432 p., 39,95$
Une cassette créée par un obscur
musicien et dont la durée correspond
à une date d’anniversaire est retrouvée sur chacun
des lieux d’une vague de suicides d’adolescents, en
Suède. Axl Sund, qui revient avec une narration qui a la
particularité de changer de narrateur à chaque chapitre,
joue toujours dans les cordes du thriller sombre, alors
que la souffrance et la vengeance sont au rendez-vous.