CONTRE LA LOI D

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LE THEATRE P<br />

<strong>CONTRE</strong> <strong>LA</strong> <strong>LOI</strong> D<br />

CINÉMA DOCUMENl<br />

LES CAMERAS DE <strong>LA</strong> R


Action Réseau Consommateur (ARC)<br />

et la Fédération des ACEF fusionnent<br />

pour former un nouveau regroupement de défense<br />

des droits des consommateurs au Québec<br />

l'union<br />

L'ACEF Abltibi-Témiscamingue ACEF du Grand-Portage ACEF du Nord de Montréal<br />

34. rue Gamble est, bureau 202 553, rue Lafontame 7500 rue Chateaubriand<br />

Rouyn-Noranda(Québec) J9X 3B7 Riviére-du-Loup (Québec) G5R 3C5 Montréal (Québec) H2R 2M1<br />

Tel (819)764-3302 Tél.:(418) 867-8545 Tél.:(514) 277-7959<br />

acef-at@sympatico ca acefgp@globetrotter nel acetnor@cam.org<br />

ACEF de l'Estrie ACEF de l'Ile-Jésus ACEF Rive-Sud de Québec<br />

187. rue Laurier, bureau 202 1686, boul des Laurentides, bur 103 33, rue Carrier<br />

Sherbrooke (Québec) J1H 4Z4 Laval (Québec) H7M 2P4 Lévis (Québec) G6V 5N5<br />

Tél. : (819) 563-8144 Tél. (450)662-9428 Tel (418)835-6633<br />

acef.estrle@qc.aira.com acellav@cam org acef-nve-sud@videotron net<br />

ACEF Granby ACEF Lanaudlère Regroupement<br />

500. rue Guy 200, rue de Salaberry, bureau 124 des consommateurs<br />

Granby (Québec) J2G 7J8 Joliette (Québec) J6E 4G1 d'assurance<br />

Tel (450)375-1443 Tél.:(450) 756-1333 1215 rue de la Visitation, bur 103<br />

acetgranby@qc aira corn aceflanaudiere@bellnet ca Montréal (Québec) H2L 3B5<br />

1215, rue de la Visitation, bureau 103, Montréal (Québec) H2L3B5 :: téléphone:(514) 521-6820 :: sans frais:1888 521-6820<br />

télécopieur: (514) 521-0736 :: site internet : www.consommateur.qc.ca/union :: courriel : union@consommateur.qc.ca


NO<br />

JUILLET/AOÛT 2002<br />

Ci-contre >» La cinéaste documentaire<br />

Eve Lamont [Méchante job) termine présentement<br />

un film sur le squat d'Overdale-<br />

Préfontaine, tenu a Montréal durant la crise<br />

du logement de l'été 2001<br />

Photo Martine Dovon pour Recto Verso<br />

24 Les grandes rencontres<br />

Folklore : Gilles Garand, Miche! Faubert,<br />

Yvon Légende transmettent à la |eunesse<br />

québécoise un patrimoine vivant.<br />

PAR ANNE-MARIE TREMB<strong>LA</strong>Y<br />

Black-out Le spectacle<br />

des opprimés Le Burkina Faso,<br />

159 e pays sur \bl selon l'Indice de développement<br />

humain (IDH), accueillait<br />

le 8' Festival international du théâtre<br />

pour le développement. Notre collaborateur<br />

y était PAR JEAN-GUY GIRARD<br />

32 Rio+10 i Affronter terre<br />

et mer Surpêche, coupe à blanc,<br />

exode, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie<br />

sont en péril. Des résistants reprennent<br />

en main leur développement.<br />

PAR DENISE PRODLX<br />

Editorial<br />

Tout court<br />

Mots de société<br />

PAR DANIELLE SHELTON<br />

1 3 L'économie sociale en mouvement<br />

La culture:moteur de développement<br />

20 Les caméras de la résistance Sophie Bisonnette, Magnus<br />

Isacsson, Eve Lamont et Carole Poliquin. Ces cinéastes, chroniqueurs des<br />

luttes sociales, sont des éveilleurs de consciences.<br />

PAR ANNE-MARIE TREMB<strong>LA</strong>Y<br />

ARTISTES DE COMBAT<br />

18 Jerry Snell & Nadine Thouin | Le théâtre<br />

physique Snell-Thouin Project (STP) lie musique,<br />

danse, théâtre et cinéma. Jerry Snell et Nadine<br />

Thouin parcourent la planète, tissent des liens avec<br />

des artistes de partout et dénoncent les ravages<br />

de l'argent, le pouvoir des médias. L'acte créateur<br />

est un engagement, PAR MICHELINE DAH<strong>LA</strong>NDER<br />

En<br />

couverture<br />

Jerry Snell<br />

Photo Benoit<br />

Aquin pour<br />

Recto Verso<br />

1 1 CSN i L'organisation de rêve «Moi, je rêve d'une CSN<br />

qui va plus loin, qui a toujours une lecture juste des enjeux qui se posent<br />

,i ce moment-ci de l'histoire.» - Chiudcttc CarboiauoM, présidoUt de là CSN<br />

PAR JACINTHE GOUIN ET RICHARD AMIOT<br />

JUILLET/AOUT 2002 MCTO VIUSO


xmn<br />

EAU-SECOURS! DEMANDE DES CORRECTIFS<br />

E<br />

n page 34 (Recto Verso, n° 296,<br />

NDLR), votre lournaliste affirme<br />

qu« Eau-Secours ! croit que la<br />

meilleure garantie réside dans la<br />

création d'une société d'économie<br />

mixte qui devrait obtenir.<br />

.. », etc. Ni Eau Secours!, ni<br />

son représentant dans ce cas<br />

n'ont proféré une telle énormité.<br />

Il ne s'agit pas ici d'une erreur<br />

de subtilité mais d'un<br />

contresens ou d'une interversion<br />

des intervenants dans le<br />

dossier. Ceci a pu être dit par le<br />

comité de fonctionnaires de la<br />

ville qui a pondu un document<br />

recommandant la création<br />

d'une régie para-municipale ou<br />

d'une société d'économie mixte.<br />

Il est impossible que le cofondateur<br />

de la coalition, c'està-dire<br />

le soussigné, ait pu se<br />

tromper sur un suiet aussi fondamental.<br />

Ayant personnellement<br />

combattu la création des<br />

sociétés d'économie mixte, je<br />

me souviens avoir dit qu'à la fin<br />

de la commission parlementaire<br />

le ministre a assuré les participants<br />

que jamais il ne pourrait y<br />

avoir de société d'économie<br />

mixte sans l'approbation du ministre.<br />

Ce qui s'est traduit dans<br />

la loi qui a créé les Sociétés<br />

d'économie Mixte.<br />

Eau Secours ! a des lettres<br />

pour prouver qu'elle s'est opposée<br />

à la création des dites<br />

sociétés. La Coalition a répété<br />

dans son mémoire au BAPE<br />

son opposition à toute forme<br />

de privatisation fût-elle une<br />

délégation de pouvoir à un<br />

autre palier de gouvernement.<br />

Encore le 16 avril 2002, devant<br />

200 participants au Sommet<br />

de Montréal sur l'Environnement,<br />

le soussigné a<br />

soutenu que pour gérer les<br />

eaux de Montréal, seul un service<br />

de la ville serait acceptable<br />

aux yeux de la coalition.<br />

Il m'est impossible de<br />

comprendre d'où vient la citation<br />

de M me Proulx. Pourtant<br />

son sens de l'éthique et la<br />

compréhension qu'elle démontrait<br />

durant l'entrevue ne<br />

pouvaient me laisser croire à<br />

une telle erreur. S'agit-il d'une<br />

coupure de texte ou d'un réaménagement<br />

? Enfin !<br />

En mon nom et au nom<br />

d'Eau Secours!, |e répète que<br />

-nous sommes contre toute<br />

gestion de l'eau qui ne relève<br />

pas d'un service municipal,<br />

étant entendu qu'il s'agit ici<br />

de la gestion, l'opération et<br />

l'entretien des installations reliés<br />

à l'eau (production, distribution,<br />

collecte et épuration.»<br />

Je vous saurai gré de voir à<br />

ce qu'un correctif soit apporté<br />

lors de la prochaine parution de<br />

Recto Verso. Merci de l'attention<br />

que vous porterez à la présente,<br />

car il y va de notre réputation et<br />

de l'image contradictoire véhiculée<br />

non seulement dans la population<br />

en général mais chez<br />

les membres d'Eau Secours!<br />

- ANDRÉ BOUTHILUER<br />

Co-fondateur dEau Secours!<br />

Réponse<br />

M. André Bouthillier nous a<br />

exposé trois options pour la<br />

gestion de l'eau potable à<br />

Montréal : une société para-municipale,<br />

un service municipal<br />

supervisant la gestion de l'eau<br />

potable par le secteur privé ou<br />

une société d'économie mixte.<br />

Face à la possibilité que Montréal<br />

choisisse la formule d'une<br />

société d'économie mixte, M.<br />

Bouthillier nous a déclaré que,<br />

dans les discussions avec le<br />

maire Gérald Tremblay et le<br />

ministre de l'Environnement<br />

André Boisclair,


sP^tê, j&j Wr^m 1« « i « S *<br />

n la connaît<br />

<strong>LA</strong> TENTATION DU VIDE<br />

Au moment d'écrire ces lignes, les élections partielles dans quatre circonscriptions<br />

du Québec n'ont pas encore eu lieu. Le score de l'Action<br />

démocratique de Mano Dumont nous est donc inconnu. N'empêche,<br />

il règne aujourd'hui sur les sondages. Que l'équipe de Recto Verso soit en profond<br />

désaccord avec les positions développées dans le programme de l'ADQ<br />

ne surprendra personne. Un Québec «trop social démocrate" (tel que défini<br />

lors du congrès adéquiste de juin) est bien loin du Québec que nous habitons.<br />

Nous reviendrons plus tard sur les propositions de l'ADQ Disons tout de<br />

même qu'elles nous semblent gouvernées par un populisme primaire et<br />

consternant: anti-syndicalisme à coups de slogans vides, instauration d'un taux<br />

d'imposition uniforme et réductions des charges pour les entrepnses, dégel des<br />

frais de scolarité, arrivée massive du privé dans les hôpitaux et les écoles, moratoire<br />

confortable (mais irréalisable dans les laits) sur la question nationale.<br />

Notez bien, nous ne voulons pas ici «démoniser» le programme de l'ADQ<br />

Il n'en a pas besoin. Il suffit de le lire : l'ADQpropose une rupture maieure du<br />

contrat social actuel, sur les responsabilités de l'Etat du Québec et sur les droits<br />

collectifs des citoyens. Cela ne semble pas inquiéter les nouveaux supporters de<br />

l'ADQ «Je ne vote pas pour le programme. Je vote pour le changement-, clament-ils<br />

en chœur. Une illusion, une naïveté ou encore un cynisme qui annonce<br />

des lendemains douloureux. Parlez-en aux camarades français qui ont du voter<br />

pour la droite — une première (amère) dans leur vie<br />

pour plusieurs - aux dernières présidentielles.<br />

Et les éditorialistes et autres commentateurs d'y<br />

aller de considérations des plus lyriques : « un vent<br />

de fraîcheur", -une victoire citoyenne devant l'immobilisme<br />

des vieux partis •• ou encore » le résistant<br />

de Cacouna •• à la Une du magazine Uactttalité. Nous<br />

sommes bien loin de partager cet enthousiasme de<br />

journalistes qui salivent devant un nouveau « suiet ».<br />

Mais nous disons aussi que la vague sur laquelle surfe<br />

actuellement l'ADQcomporte ses bons côtés. À<br />

quelque chose, malheur est bon, selon le dicton.<br />

Le chef du Parti libéral du Québec, Jean Charest,<br />

s'est récemment transformé en grand défenseur<br />

d'un système de santé public universel et gratuit.<br />

Il fallait le voir expliquer que voter pour<br />

l'ADQ^c'est troquer la carte-soleil pour la carte de<br />

crédit. De toute beauté. Il faudra s'en rappeler.<br />

Actuellement au plus mal. le Parti québécois annonce<br />

de grandes manoeuvres. On ressort de sous<br />

la pile les conseils de Jacques Panzeau au printemps<br />

: réinventer le programme, sortir du carcan<br />

du discours convenu, des compromis « histonques »<br />

au sein du parti. L'histoire témoignera des suites.<br />

Qu'on ne se trompe pas : nous sommes résolument<br />

de ceux et celles qui veulent des changements<br />

au Québec. Nous applaudirions un vent<br />

nouveau qui balayerait les vieilles divisions, provoqueraient<br />

de nouveaux débats, proposeraient des<br />

innovations solidaires. Rien de cela ne se trouve<br />

dans les propositions de l'équipe Dumont. Cette<br />

quête devra s'incarner autrement, rigoureusement<br />

et en travaillant pour un Québec qui garantit une<br />

place à chacun.<br />

La soit de changement de la population québécoise<br />

doit être satisfaite. Elle interpelle directement<br />

les féministes, les écologistes, les syndicalistes<br />

et les milliers d'hommes et de femmes qui travaillent<br />

quotidiennement dans les groupes communautaires.<br />

Ce sont d'eux et d'elles que naîtront<br />

une véritable alternative et son principal défi, n<br />

J<br />

VOUS NE VOULEZ PAS PRENDRE<br />

1 LE RISQUE DE RATER UN NUMÉRO? ABONNEZ-VOUS !<br />

VOUS NE PAYEREZ QUE LES FRAIS DE POSTE<br />

ET DE MANUTENTION (toutes taxes incluses)<br />

D Groupe populaire<br />

D Individu<br />

D Institutionnel<br />

D Soutien<br />

D Etudiant ou sans emploi<br />

A l'étranger D individu<br />

25$/an<br />

20$/an<br />

25$/an<br />

32$/an<br />

15$/an<br />

30$/an<br />

D institutionnel 40$/an<br />

NOM<br />

ADRESSE<br />

CODE POSTAL<br />

TÉLÉPHONE ( 1 PAIEMENT INCLUS D<br />

Faire parvenir votre chèque ou mandat poste à :<br />

Revue Vie Ouvrière inc, 1215, rue Visitation, bureau 101, Montréal (Québec) H2L 3B5<br />

JUILLET/AOÛT 200? IECT0 TEISO | 5


» TOUT COURT » TOUT COURT » TOUT COURT » TOUT COURT<br />

Très courtes<br />

LE DEVOIR<br />

Un témoin<br />

incontournable<br />

Recevez Le Devoir du<br />

lundi au samedi<br />

durant 13 semaines<br />

et bénéficiez d'un rabais<br />

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Le journal indépendant<br />

www.ledcvoir.com<br />

Abonnements : (514) 985-3355<br />

» RESISTANCES AU G8<br />

Le G8, les huit plus influents<br />

pays du monde, se réunissent<br />

à Kananaskis, en Alberta, les<br />

26 et 27 juin prochains. Y sera<br />

discuté le Nouveau partenariat<br />

pour le développement<br />

de l'Afrique (NPDA). L'accord,<br />

supposé briser les chaînes du<br />

continent, tait le rôle des programmes<br />

d'ajustements<br />

structurels dans les difficultés<br />

de l'Afrique et mise sur la séduction<br />

des investisseurs.<br />

• La convergence pour l'avenir<br />

des peuples du monde<br />

(CAP-Monde), le Conseil Central-CSN<br />

de Montréal et la<br />

Table régionale des organismes<br />

d'éducation populaire<br />

de Montréal (TROVEP) invitent<br />

à manifester contre la<br />

stratégie du G8, le 26 juin<br />

à Montréal. Au Parc Lafontaine,<br />

de 16h00à 22h30.<br />

«TROVEP, 5U-527-1112<br />

• À Québec, une action<br />

solidaire a lieu le même jour.<br />

» REPAC, 418-523-4158<br />

• À Ottawa, une coalition<br />

ad hoc, À l'assaut du capital,<br />

prenons la capitale!, invite à<br />

des actions « respectant la diversité<br />

des tactiques», les 26<br />

et 27 juin. Une consulta (sic)<br />

sur les stratégies d'opposition<br />

débutera le 25 juin, avec<br />

la participation de la Convergence<br />

des luttes anti-capitalistes<br />

(C<strong>LA</strong>C). Des transports<br />

par autobus pour Ottawa<br />

M<br />

sont organisés.<br />

» Prenons la capitale:<br />

www.takethecapital.net<br />

» C<strong>LA</strong>C: www.tao.ca/~clac<br />

• Pour connaître l'ensemble<br />

des actions anti-G8:<br />

» CMAQ: www.cmaq.net<br />

» STAGIAIRES AU BRÉSIL<br />

Imprime-Emploi, une entreprise<br />

de réinsertion sociale<br />

oeuvrant dans le domaine<br />

de l'imprimerie, envoie sept<br />

jeunes réaliser un stage au<br />

Brésil. L'Office Québec-<br />

Amériques pour la jeunesse<br />

(OQAJ) a signé une entente<br />

avec le Secrétariat du Travail,<br />

de la Citoyenneté et de<br />

l'Assistance sociale du Brésil<br />

pour jumeler Imprime-<br />

Emploi à l'imprimeur officiel<br />

de l'État de Rio Grande<br />

do Sul, la Companhia Rio-<br />

Grandense de Artes Graficas<br />

(CORAG) afin de réaliser<br />

ce stage. En août, sept<br />

jeunes brésiliens vivront<br />

une expérience de travail<br />

équivalente à Montréal.<br />

» STOP FORTIS<br />

Après la publication de Belize,<br />

dommages et intérêts canadiens<br />

{Recto Verso, n s 296),<br />

nos lecteurs veulent savoir<br />

comment s'impliquer dans<br />

cette cause. Voici le site Internet<br />

de la Coalition Stop Fortis:<br />

» www.stopfortis.org<br />

-J. G.<br />

Technopôle<br />

ANGUS<br />

Carrefour de l'innovation de Montréal<br />

.eaux à louer dans le futur<br />

Centre de développement<br />

en économie sociale Angus<br />

Ouverture hiver 2003<br />

(514)528-5230<br />

mopoleangus.com<br />

6 I RECTO VEHSO JUILLET/AOÛT 2002


\ \<br />

» TOUT COURT » TOUT COURTE<br />

Locataires<br />

EN MODE SQUAT<br />

PAR ISABELLE PORTER<br />

ET JACINTHE GOUIN<br />

L<br />

e<br />

squat d'un édifice abandonné<br />

du quartier Saint-Jean-<br />

Baptiste à Québec a permis de<br />

pousser plus loin une résistance<br />

de 30 ans pour assurer sa vocation<br />

résidentielle et populaire à<br />

ce quartier. Cette prise de possession<br />

d'un bâtiment s'inscrivait<br />

dans une vaste campagne d'occupations<br />

de terrains et de bâtiments<br />

vacants coordonnée par<br />

le Front d'action populaire en<br />

réaménagement urbain (FRA-<br />

PRU) depuis le 12 mai dernier.<br />

Mille trois cents personnes de<br />

Montréal, Saguenay, Québec,<br />

Sherbrooke et Gatineau manifestaient<br />

de la sorte pour des solutions<br />

rapides et durables à la<br />

cnse du logement. Au Québec,<br />

275000 ménages dépensent plus<br />

de 50% de leurs revenus pour se<br />

loger et font race à une grave pénurie<br />

de logements. Le FRA-<br />

PRU réclame la construction de<br />

8000 nouveaux logements sociaux<br />

par année au Québec.<br />

La plupart des 12 squats coordonnés<br />

au Québec par le<br />

FRAPRU se voulaient symboliques.<br />

Le FRAPRU a aussi manifesté<br />

avec une coalition de<br />

groupes communautaires et syndicaux,<br />

le 5 juin, au Sommet de<br />

Montréal, pour obtenir la<br />

construction de 3 500 logements<br />

sociaux par année à Montréal et<br />

pour que l'on accorde la prionté<br />

à la lutte contre la pauvreté.<br />

Début juin, â Québec, le<br />

squat dans le quartier Samt-Jean-<br />

Baptiste dure toujours. Nicolas<br />

Lefèbvre-Legault, du Comité populaire<br />

du quartier, parle «d'une<br />

des plus grosses actions menées<br />

ici ces dernières années». Le comité<br />

a choisi un édifice de l'îlot<br />

Berthelot, une zone depuis toujours<br />

convoitée par les promoteurs<br />

immobiliers. La construction<br />

des hôtels Radisson et<br />

Hilton, dans les années 1970, le<br />

réaménagement du boulevard<br />

René-Lévesque puis l'érection<br />

du Centre des congrès, dans les<br />

années 1990, avaient donné lieu<br />

à des affrontements entre la Ville<br />

et les irréductibles du quartier.<br />

Non aux condos !<br />

Les squatters ont invoqué la<br />

crise du logement pour récupérer<br />

ces terrains convoités pour la<br />

construction de condominiums.<br />

Ils ont obtenu des mesures d'urgence,<br />

en prévision du 1" juillet,<br />

et des engagements pour la création<br />

de logements sociaux dans<br />

le quartier. La Ville se détend d'a-<br />

Le 15 mai 2002, des squatters de Saint-Henri à Montréal<br />

occupent un garage désaffecté jusqu'à leur éviction par<br />

les policiers le lendemain.<br />

voir agi sous l'influence des protestataires.<br />

Claude Larose, le<br />

conseiller municipal responsable<br />

de l'habitation, parle de mesures<br />

similaires à celles de l'an dernier.<br />

Dans le cas de l'îlot Berthelot,<br />

M. Larose veut laisser de la place<br />

aux condominiums dans la<br />

zone. «Nous sommes allés en<br />

appel d'offres et nous sommes<br />

en négociations avec deux<br />

groupes pour un proiet conjoint<br />

de coopérative d'habitation et<br />

d'édifice à condominiums».<br />

Les squatters revendiquent<br />

un moratoire sur la transformation<br />

d'édifices à logements en<br />

condominiums tant que le marché<br />

locatif n'aura pas retrouvé un<br />

taux de vacance normal de 3 %.<br />

À Québec, il est de 0,8%. Ils tiennent<br />

à donner l'image d'un groupe<br />

sérieux, discipliné. Le squat a<br />

ses règles et les décisions se prennent<br />

en assemblée. Les squatters<br />

aménagent une salle de jeux<br />

pour les enfants et font évaluer<br />

l'état de l'édifice par des amis<br />

architectes ou menuisiers. On<br />

sent un certain enthousiasme<br />

quand Sylvain, de Montréal,<br />

lance : «Juste au niveau de l'expérience<br />

humaine, le squat, c'est<br />

vraiment intéressant».<br />

Les policiers se font discrets :<br />

â part une visite de prévention<br />

des pompiers, nen du tout Tout<br />

laisse croire que les fameux<br />

condos ne seront pas construits<br />

sur le heu de l'occupation. Selon<br />

Claude Larose, la Ville a<br />

l'intention de céder le terrain et<br />

la maison au projet de coopérative<br />

d'habitation. D<br />

() Desjardins<br />

Conjuguer avoirs et êtres<br />

Cet été, dans toutes les régions du Québec,<br />

les caisses Desjardins seront partenaires<br />

de nombreux événements, spectacles et festivals.<br />

Bon été !<br />

JUILLET/AOÛT 200? 1ECT0 VEIS0 I 7


MA<br />

Les protest songs de Jerry Snell et la danse de Nadine<br />

Thouin dénoncent les ravages de l'argent.<br />

Qu'est-ce que la mondialisation pour les artistes?<br />

PAR MICHELINE DAH<strong>LA</strong>NDER | PHOTOS BENOÎT AQUIN ET CARL VALIQUET<br />

Quelle est la vitesse de la stupidité, te pas ce qui se passe », raconte Jerry, qui s'est voulaient comprendre ce qui se passait<br />

demande Jerry Snell? Les arts de exile a Montréal en 1980 pour fuir un mode dans le monde, côtoyer d'autres cultures, se<br />

la scène ont-ils perdu tout pouvoir de vie malsain et peu créateur. • On essayait frotter à différentes formes de pensée. Ils<br />

ou l'envie de transformer, d'édu- tout, le mouvement punk culminait, plusieurs s'envolent en 1993 pour le Vietnam,<br />

quer, de provoquer un public à la dénve sur contestataires expénrnentaient les drogues Leur penple les met sur la piste de Thich<br />

un océan de sensations préfabriquées?» dures, certains de mes amis en sont morts. Quang Duc, un prêtre bouddhiste qui •<br />

Os-fondateur avec Nadine Thouin de la C'est devenu un peu trop No future, ie devais<br />

troupe de théâtre physique Snell-Thouin- partir, sinon l'y serais passé moi aussi.»<br />

Project (STP) en 199b, ancien pilier de<br />

Carbone 14, qu'on a vu dans Un zoo la nuit. Carbone 14<br />

de Jean-Claude Lauzon, et 15 février 1839, À Montréal, Gilles Maheu, de Carbone<br />

de Pierre Falardeau, Jerry Snell refuse l'éti- 14, remarque ses performances de clown, rue<br />

quctte d'artiste engagé, même si pour lui Pnnce-Arthur. La troupe d'avant-garde bousl'acte<br />

créateur est un engagement, une ré- cule l'esthétique théâtrale dans les années<br />

volte, une voix dissonante dans le débat pu- 1980. • On a développe un langage. Li danblic.<br />

«Sinon, c'est du divertissement.» se, le mime, la musique fusionnaient pour<br />

Originaire de Vancouver, Jerry Snell devenir un canal, une tonne de communis'est<br />

abreuvé dès l'enfance aux slogans de cation totale qu'on a expérimentée à travers<br />

la contestation contre le nucléaire et la le monde pendant quinze ans. Ensuite, deguerre<br />

du Vietnam, dans les années 1970. Sa plore lerry Snell, Gilles Maheu s'est essoutdécouverte<br />

du mime Marcel Marceau à la fié. Il voulait s'établir, fonder l'L'sine C. Il se<br />

télévision est déterminante dans sa vie. «Il plagiait lui-même, taisait du Carbone 14. •<br />

m'a semble fascinant de voir qu'on pouvait, La chorégraphe et danseuse Nadine<br />

comme ça, inventer tout un monde avec Thouin, qu'il a connue à Carbone 14, aérien<br />

que son corps.»<br />

quiesce. «J'ai fait Le Dortoir et Le Qife ia<br />

Il commence adolescent à taire des spec- ,iveu$lei, deux spectacles qui ont bien martacles<br />

de pantomime dans les parcs de Van- ché, mais que je trouvais redondant artiscouver,<br />

dans la rue avec ses amis, pour tiquement, mis à part la musique de Jerry. »<br />

s'amuser d'abord, mais surtout «pour mettre Tous deux ont quitte la prestigieuse<br />

le pied dans la porte et dire non, je n'accep- troupe par urgence de se ressourcer. Us<br />

JUILLET/AOÛT 200; RECTO VERSO I 9


L'ACTE CREATEUR E 5T UN ENGAGEMENT.<br />

UNE REVOLTE. UNE VI NX DISSONANTE<br />

s'est immolé par le feu en 1963 pour protester<br />

contre la répression du gouvernement<br />

de Saigon pendant la guerre.<br />

L'image du bonze en flammes revêtait<br />

une haute signification pour Jerry Snell.<br />

Symbole de résistance, la photographie figurait,<br />

dès 1992, sur la pochette de son premier<br />

album, Life in tbe suicide nols, à l'ongine<br />

du spectacle Le Café des aveugles à Carbone<br />

14. «À l'époque, j'ignorais qui il était. J'ai<br />

vu des photos, j'ai voulu en savoir plus.<br />

Nous sommes allés à la pagode Linh Mau<br />

où il vivait. Nous y avons rencontré un bonze<br />

qui le connaissait. Il nous a remis des docapitale<br />

impériale du Vietnam. Plusieurs<br />

bonzes, prêchant la paix et la non-violence,<br />

s'étaient immolés. Le gouvernement<br />

vietnamien a filmé ce rassemblement de<br />

manière à laisser croire à une manifestation<br />

violente et sauvage des moines.<br />

"Le gouvernement s'en servait comme<br />

propagande contre les prêtres bouddhistes»,<br />

proteste Nadine. «Nous avons remonté<br />

cette vidéo selon ce que nous avions vu en<br />

fréquentant l'ami de Thich Quan Duc». Les<br />

deux artistes ont ajouté les témoignages récoltés<br />

sur place afin de renverser, devant les<br />

membres des Nations Unies, le discours du<br />

CASH en Asie<br />

«Nous sommes des créateurs aux méthodes<br />

de travail à l'opposé l'une de l'autre»,<br />

précise Nadine. «Je peux passer des heures<br />

à observer comment les gens bougent, s'expriment.<br />

Je me détache des faits, pour voir<br />

l'effet de la guerre sur les corps, ce qui anime<br />

ceux qui ont vécu la torture ou l'endoctrinement<br />

américain qui uniformise la<br />

pensée, les personnalités et les postures.<br />

Jerry, au contraire, va lire des bnques, Noam<br />

Chomsky, John Pilger et autres critiques de<br />

l'information, des journaux de partout. Il<br />

collige les faits, connaît les dates.»<br />

! \<br />

«On nous<br />

a reproché<br />

de ne pas<br />

faire de l'art<br />

mais de la<br />

politique.»<br />

f **; a* *-* mm<br />

wP»<br />

cuments à transmettre au Comité Vietnam<br />

pour les droits humains a Paris, où nous vivions<br />

à l'époque.» Des documents cachés<br />

qui ont valu des années de camps de détention<br />

à leurs auteurs. Pendant leur séjour,<br />

racontent Snell et Thouin, ils ont été traqués<br />

par la police, ont déjoué de faux<br />

bonzes peuplant de faux temples. Bref, ils<br />

ont joué le rôle de véritables agents secrets,<br />

Devant les Nations Unies<br />

En mai 1993, 40 000 moines bouddhistes<br />

avaient manifesté pour la liberté de<br />

leur culte dans les rues de Hue, l'ancienne<br />

gouvernement vietnamien.<br />

De retour à Montréal, impatients de raconter<br />

leurs aventures et de diffuser leur film<br />

anti-propagande, Nadine et Jerry ne rencontrent<br />

qu'indifférence, incompréhension<br />

et même l'indignation d'artistes qui les entourent,<br />

racontent-ils avec amertume. "On<br />

nous a même accusés de faire partie d'une<br />

secte», s'indigne Nadine. «Nous voulions témoigner<br />

de la forte répression des bonzes.<br />

On nous a reproché de ne pas faire de l'art,<br />

mais de la politique. » Depuis, les fondateurs<br />

de STP poussent encore plus loin leur exploration<br />

de l'action sociale par l'art.<br />

Ce printemps (2002), ils parcourent<br />

l'Asie pour clore leur triptyque CASH, un<br />

pamphlet anti-mondialisation formé d'un<br />

disque, du spectacle présenté depuis deux<br />

ans, en Corée, en Chine, en Malaisie et en<br />

Thaïlande, et d'un film. «On va dans une<br />

dizaine de pays, de Beijing à Las Vegas, filmer<br />

des artistes, voir comment ils créent,<br />

comment les impératifs de la rentabilité affectent<br />

leur liberté d'expression.» Le cinéaste<br />

montréalais Daniel Cross, salue<br />

l'hiver dernier pour son percutant documentaire<br />

SPIT, sur le quotidien de jeunes<br />

squeegees, filmera leur périple asiatique. •<br />

10 I RECTO VERSO JUILLET/AOÛT 2002


SNELL THOUIN<br />

Dans CASH, autour d'un gros<br />

sac rempli d'argent, Jerry chante<br />

et Nadine expnme en dansant<br />

la dérive de personnages manipulés<br />

par le billet vert. Présenté<br />

trois soirs seulement au Québec,<br />

le spectacle de facture artisanale<br />

n'a pas suscité le même engouement<br />

qu'en Asie. CASH a<br />

été ignoré de la presse anglophone<br />

montréalaise. "Cette dénonciation<br />

du pouvoir de l'argent<br />

n'est pas assez kascher ••,<br />

s'est fait répondre le duo par 77v<br />

Gazelle, rapporte Nadine. Chez<br />

les francophones, les médias ont<br />

décnt le spectacle en se gardant<br />

de cntiquer sa valeur artistique.<br />

CASH a été enregistré le<br />

11 septembre 2001, une date fatalement<br />

historique qui légitime<br />

en ce moment même des politiques<br />

guerrières. Il parle de la<br />

••guerre sainte américaine, des<br />

dommages collatéraux camouflés<br />

par CNN, des conflits armés<br />

servant à gonfler les coffres des<br />

multinationales, de l'Occident<br />

qui affame le tiers-monde».<br />

Mongolia 2002<br />

En juillet, le duo Snell-Thouin<br />

dingera la plus imposante manifestation<br />

artistique jamais organisée<br />

à Oulan-Bator, la capitale de<br />

la Mongolie. Pendant 24 heures,<br />

ils occuperont la ville en danse,<br />

chant et théâtre avec 50 artistes<br />

mongols. « Les Mongols peuvent<br />

désormais interpréter leurs danses<br />

et leurs chants de même que pratiquer<br />

leur religion. Ils ont été<br />

réprimés pendant 70 ans sous le<br />

régime communiste. •> Cette performance<br />

à caractère historique,<br />

présentée à l'invitation du festival<br />

Mongolia 2002, célèbre le 12 e anniversaire<br />

de la libération du |oug<br />

soviétique. Une performance inédite<br />

pour ces artistes mongols<br />

qui n'avaient jamais travaillé avec<br />

des créateurs occidentaux. • Gràce<br />

i Internet, la Mongolie vit<br />

une véritable révolution artistique,<br />

poursuit Nadine. La mondialisation<br />

du savoir permet<br />

d'échanger plus facilement sur<br />

nos pratiques artistiques. ••<br />

En Chine aussi les troupes<br />

d'avant-garde sont très actives.<br />

Les artistes dissidents foisonnent<br />

à Beijing. Les spectacles critiques<br />

montrant des acteurs sautillant<br />

sur des manteaux de<br />

l'armée rouge ou évoquant le<br />

malaise de la place Tienanmen<br />

ne sont plus rares. Certains se<br />

produisent toutefois de manière<br />

clandestine. Leur spectacle est<br />

annoncé la veille ou le jour<br />

même. La censure chinoise,<br />

bien que très présente, affecte<br />

moins la production d'oeuvres<br />

critiques que leur exportation.<br />

Après neuf ans de périple<br />

dans une vingtaine de pays, surtout<br />

en Asie, le couple Snell-<br />

Thouin s'arrêtera fin 2002 pour<br />

installer quelques-uns de ses<br />

spectacles au Québec. Une reprise<br />

de CASH est prévue ainsi<br />

qu'une coproduction avec la<br />

Chine, Bones ofthe chamans.<br />

Bones ofthe chamans s'inspire<br />

des catastrophes naturelles, comme<br />

les inondations, les ouragans.<br />

"Ça traite des chamans,<br />

du religieux. Les gens, en général,<br />

ont peur lorsqu'on parle de religion,<br />

mais je n'ai pas le choix,<br />

mon travail s'onente naturellement<br />

vers ça», dit Nadine. Ce<br />

spectacle avancera au rythme des<br />

partenaires qui s'y grefferont, car<br />

le duo Snell-Thouin produit ses<br />

spectacles grâce aux alliances<br />

qu'il noue avec les directeurs de<br />

festival, les diffuseurs de spectacles<br />

et les troupes de danse<br />

rencontrés au fil des tournées.<br />

"Si nous voulons créer des<br />

performances physiques qui<br />

transcendent les stéréotypes et<br />

parviennent à accroître les prises<br />

de conscience du spectateur au<br />

lieu de bloquer son évolution, il<br />

faut comprendre comment le<br />

public perçoit les images, comment<br />

elles passent de l'oeil au cerveau<br />

et comment, aujourd'hui,<br />

on s'efforce d'empêcher ce passage<br />

de sorte que l'image parvenue<br />

à l'œil n'est plus transmise<br />

au cerveau, mais plutôt détournée<br />

vers les zones de plaisir», sert<br />

Sncll en guise d'avertissement. D<br />

12 I RECTO VERSO 1UIILE 1/AOÛT 2002


L'ECONOMIE SOCIAL! s<br />

EN MOUVEMENT<br />

CULTURE ET ÉCONOMIE SOCIALE<br />

POUR JOINDRE LE SOCIAL<br />

CAHIER<br />

D'INFORMATION<br />

produit par<br />

\r 5<br />

RÉSEAU DTNVEmSSEMEKT<br />

SOCIAL DU QU£B£C<br />

CHANTIER<br />

DE LÉCONOMIE SOCIALE<br />

.» f » ~ : •> . :<br />

'JÎEJ<br />

L'été est là et plusieurs profiteront des nombreux<br />

festivals, spectacles, expositions et pièces de théâtre<br />

partout à travers le Québec La plupart de ces activités<br />

culturelles sont produites par des organismes sans but<br />

lucratif qui appliquent les principes des entreprises<br />

d'économie sociale depuis toujours : un fonctionnement<br />

démocratique, la poursuite d'une mission sociale, une<br />

implication et un enracinement dans leur communauté.<br />

/<br />

les entreprises du secteur culturel en économie<br />

sociale sont multiples. Des théâtres<br />

aux festivals et fêtes de quartiers ou de<br />

villages, des écomusées aux maisons<br />

d'éditions, du développement des arts du<br />

cirque au développement des cultures<br />

émergentes, elles animent et rendent<br />

attrayants les milieux de vie, créent une<br />

relève artistique, contribuent à nourrir et<br />

faire rayonner la culture québécoise et<br />

sont un apport économique et social<br />

important partout au Québec.<br />

<strong>LA</strong> CULTURE COMME MOTEUR DE DEVELOPPEMENT<br />

La i nbxprisa d*ô onamie sociale<br />

du secteur culturel exercent un<br />

rôle de sur le développement local.<br />

Plusieurs manifestation) i uluirelles<br />

snni a l'origine de dvtumiques de<br />

revitalisation et d'un développement<br />

touristique qui ont donne un<br />

d souffle à plusieurs répons.<br />

("est le cas notamment du Festival<br />

de la chanson de Petite Y.tllei, en<br />

Gaspésie. Evénement artistique<br />

d'envergure nationale présentant<br />

de jeunes talents de la l hanson<br />

francophone, le Festival facilite la<br />

rencontre de générations, la confrontation<br />

d'idées et la transmission<br />

de savoir] autour d'un<br />

concours de la relève en chanson.<br />

Le Festival a littéralement fouetté<br />

le dynamisme la .il et gl iierc une<br />

énergie qu'on dit unique dans la<br />

francophonie.<br />


L'KOKOMIt SOCIAL s<br />

CAHIER<br />

D'INFORMATION<br />

EN MOUVEMENT<br />

• DÉMOC<br />

En terme de démocratie<br />

et de culture, deax courants<br />

se côtoient : démocratisation<br />

culturelle<br />

• et démocratie culturelle.<br />

Tantôt en opposition,<br />

souvent en complémentarité,<br />

le premier concept<br />

tient son origine<br />

des années 1950 et est<br />

bien illustré par les maisons de la culture. Il<br />

implique une sélection de différents spectacles,<br />

présentés par la suite de manière très accessible à<br />

la population. Le second, réfère à une inclusion<br />

du public à la démarche de création et de<br />

production.<br />

La démocratie culturelle privilégie la participation<br />

de tous et amène une interaction avec<br />

les artistes. C'est l'approche qu'à choisi de<br />

développer Faites de la musique en se fondant sur<br />

l'hypothèse voulant que l'objectif ne soit pas<br />

uniquement de donner « un spectacle, mais aussi<br />

de susciter un débat social entourant la culture<br />

pour viser une culture pour tous » comme<br />

l'explique Luc-Michel Belley.<br />

Pour arriver à cet objectif, Faites de la musique a<br />

mis sur pied différentes initiatives dont une série<br />

de spectacles, organisée à même les usines pour<br />

rejoindre les ouvriers ou encore un projet d'école<br />

de musique pour les enfants du quartier<br />

Hochelaga-Maisonneuvc de Montréal. Les cours<br />

sont offerts à prix très abordables, prévoyant<br />

même des versements minimes et étalés sur plusieurs<br />

mois pour convenir aux prestataires de<br />

aide sociale. La dynamique<br />

des cours prévoit<br />

entre autre que les enfants<br />

apprennent à diriger<br />

leur orchestre ei<br />

peuvent ainsi se guider<br />

eux-mêmes.<br />

Au niveau du loisir,<br />

les pratiques amateures<br />

comme relies des chorales et des harmonies font<br />

aussi partie de l'économie sociale et sont une<br />

forme d'expression culturelle. Ces organismes<br />

regroupent des milliers de citoyens passionnes<br />

par des activités de loisir culturel dont un lies<br />

grand nombre ont choisi de consacrer<br />

bénévolement leur temps libre aux loisirs des<br />

autres. Ils ont choisi d'être acteurs et non<br />

seulement spectateurs de la culture. Ils comptent<br />

dans leurs rangs des experts qui partagent<br />

généreusement leurs compétences; des i-lites qui<br />

développent des talents; des espoirs pour la<br />

culture professionnelle. On y développe une culture<br />

accessible et engagée, une culture démocratique<br />

couvrant tout le territoire québécois.<br />

TTTTfRF.I.I.F.<br />

rejoignant les communautés non par la fort e des<br />

médias, mais plus important, par l'insertion dans<br />

le quotidien de dizaines de milliers d'individus.<br />

La culture en l'économie sociale se nourrit aussi<br />

lie.un oup .1 l'underg nd ( el univers s, ,1ml<br />

allmenti ii stimuli 1< • ,H leurs qui vivent dansi es<br />

eaux de production et qui ramènent sans cesse le<br />

débat de la culture avec un grand « C ».<br />

D'ailleurs, certains en ont fait leur cheval de<br />

bataille, comme Luc-Michel Bellev « Ce qui est<br />

reconnu, voue industrialisé, devient vite unilorme...<br />

et ce n'est pas ce qui décrit un peuple,<br />

Les artistes en marge, avec des choses qui<br />

dérangent, c'est là qu'est le bouillonnement<br />

i ii H il Et c'est notre rôle à nous, de montrer<br />

qu'il v ,i nue autre porte de sortie... autre que la<br />

culture officielle ».<br />

l'uni li s entreprises d'économie ni iale, le choix<br />

de la démocratie culturelle ne doit pas être mis en<br />

opposition aux actions pour la démocratisation,<br />

m.us il don être vu comme une tentative de<br />

poussa plus avant l'ai i es universel à la i ukure.<br />

Les entreprises culturelles en économie sociale s'inscrivent résolument dans le mouvement de<br />

démocratie culturelle qui privilégie « une plus large participation à la vie culturelle, non seulement<br />

dans la fréquentation des œuvres, mais dans la production de la culture, dans l'engagement au sein<br />

d'associations volontaires et dans la prise en charge des pouvoirs culturels. » Comme le souligne<br />

ainsi Lise Santerre. le modèle de la démocratie culturelle « reconnaît la portée sociale de la culture,<br />

qui peut contribuer à la revitalisation du lien social au renforcement de l'identité culturelle, à<br />

l'intégration de groupes minoritaires ou des exclus... La démocratie culturelle privilégie la<br />

participation active à la vie culturelle, notamment via les pratiques en amateur. »<br />

•<br />

ÉDITIONS REMUE-MÉNAGES<br />

Publier pour penser féministe<br />

\i es d'un désir de rendre accessible et disponible en librairie des<br />

travaux vulgarisés de recherches spécialisées et d'œuvres littéraires<br />

d'auteures, les Éditions du remue-ménage diffusent sous la bannière<br />

féministe. Parmi les 138 titres qui figurent dans le catalogue des édii<br />

H ii is, mentionnons « Maternité lesbienne » qui a d'ailleurs gagné le<br />

prix de TIRES, « Plus que parfaite » qui présente une perspective<br />

socio-historique de l'aide domestique à partir de 1850, l'Agenda des<br />

femmes et deux livres en i réole sur la conservation de la nourriture<br />

et les jardins familiaux el communautaires. Leur dernière parution,<br />

« Femmes en marche », nous fait découvrir les actions mises en<br />

œuvre par les femmes de la planète qui ont participé à la Marche<br />

mondiale des femmes en '2000.<br />

LOCAL


FINANCEMENT<br />

ET RÉSEAUTAGE<br />

Le financement des entreprises culturelles d'économie sociale se conjugue<br />

m i fini onfortable réalité d'être assis entre une mission culturelle et une<br />

mission communautaire. Cette position entre deux chaises a valu au<br />

secteur d'être ballotté entre deux bailleurs de fonds ministériels. Le<br />

secteur IJI in lit ie maintenant d'un interlocuteur de plus. «Ce n'est qui- tout<br />

récemment que les entreprises culturelles sont financées par les fonds<br />

locaux d'économie sociale, même si les organismes de ce milieu supporte<br />

la philosophie depuis des années », estime Luc-Michel Belley.<br />

La venue de ce financement nouveau a été plus que salutaire. Cet<br />

Evénement n'a pas réglé tous les problèmes. Le secteur manque encore de<br />

vison a long terme. Mais pour Ginette Péloquin. le 25e anniversaire des<br />

Editions Remue-ménage, elle le doit en bonne partie à l'économie sociale.<br />

« L'opportunité de développement en économie sociale, c'est ce qui nous<br />

a sauvé », confie la co-dim (net<br />

L'ECONOMIE SOCIAL - CAHIER<br />

D'INFORMATION<br />

EN MOUVEMENT<br />

Cala dit, il reste encore certaines étapes à franchir pour atteindre une<br />

certaine vitesse de croisière, notamment au niveau du réseautage. Ginette<br />

Péloquin réclame un réseau des entreprises culturelles. «Le problème<br />

que la culture, selon ses formes, a son organisation et ses problématiques<br />

. . propres à l'édition, à la<br />

a autan musiquc ou à i a scène »<br />

ttlt du financement ptM autres continue Ginette Pélo-<br />

'"''"/"<br />

. quin. « Ce qu'il faudrait.<br />

y qw bénéficient déjà de c' Kt p i u! , quun r^seau<br />

dc mise cn<br />

fîmdi ùubU<br />

ment<br />

commun, en<br />

tait, c'est plutôt au<br />

niveau stratégique et politique qu'il faut se regrouper et faire des<br />

représentations » poursuit-elle. Mais pour ce faire, il faut encore trouver<br />

l'énergie et le financement A Montréal, c'est au bas mol 150 entreprises<br />

qu'il faut solliciter!<br />

L'émergence fait surface<br />

i i toc entreprise d'ét onamie sociale de distribution<br />

'olleclrée de disques compacts se voue à la libre<br />

circulation des autoprodm dons « i projets musicaux<br />

de producteurs alternatifs. Entamant sa deuxième<br />

année d'existence, son catalogue cxilusil affiche<br />

ptuj de ~


L'ECONOMIE SOCIAL!<br />

CAHIER<br />

S D'INFORMATION<br />

EN MOUVEMENT<br />

ASSURER UNE MÉDIATION<br />

ENTRE L'ART ET LE CITOYEN<br />

Tenues chaque année le dernier week-end de septembre,<br />

les Journées de la Culture allient la eultute iota<br />

toutes ses formes à un volet éducatif, d'échanges et<br />

d'expérimentations. « Le but est d'établir un contact<br />

direct entre lea artistes, les travailleurs culturels et les<br />

citoyens dans un contexte chaleureux, a l'intérieur<br />

même des ateliers ou des salles de répétition »<br />

annonce la directrice de l'événement,<br />

Louise Sicuro.<br />

A l'Anse-à-Valleau en Gaspésie,<br />

site de la première station de<br />

radio amateure de l'Amérique du<br />

Nord, le comité organisateur a profité des Journées de la<br />

Culture pour faire du site un Centre d'interprétation de<br />

la radio amateure, petit musée ouvert tout au long de<br />

l'été!<br />

Mettre en valeur les initiatives locales, c'est le but que<br />

s'étaient fixées les Journées de la Culture au moment de leur création il y a bientôt six<br />

ans. « On assiste aujourd'hui à une nette appropriation locale de févénemenl Dans son<br />

déploiement, les Journées jouent ainsi un rôle de campagne-parapluie par rapport à la<br />

diffusion des événements locaux », confie Louise Sicuro.<br />

Derrière les Journées, il y a un véritable « mouvemeni de [m ni qui est le droit pour tous<br />

à la culture et une mise en valeur de l'importance culturelle dans le développement<br />

individuel et collectif », poursuit Louise Sicuro. Pour ce qui est du volet du<br />

développement local, elle ajoutera : « il y a tout un travail de terrain qui va plus en<br />

profondeur et qui amène les gens à découvrir les richesses de leur région ».<br />

Ce cahier d'information de quatre pages traitant du développement de l'économie sociale au Qutbo<br />

est édité conjointement sous l'entière et seule responsabilité des trois organisations suivantes:<br />

Le Chantier de l'économie sociale est une<br />

organisation autonome et permanente ve.ini l.i<br />

promoùon et le développement de l'économie<br />

sociale. Le Chantier est une corporation É l'ut<br />

non luieiul rCgrOupUM les grandi mouvements<br />

soei.iux. les acteurs du développement loc.il • t l< l<br />

promoteurs d'eiureprhci (féoonomîi m talc.<br />

i)<br />

: - o - j | -.l.it l|l<br />

mOH CO"WU"U.tfr»J«<br />

Le Comité sectoriel<br />

de main-d'œuvre de<br />

l'économie sociale et<br />

de l'action communautaire (CSMO-ESAC),<br />

iHL'.im-sfnr .i (ml mm lin rai il \ i-.< .i i laiton r ri j mettre<br />

i n iiuvH -s bureaux de ces trois organisations uni naiea •• Montréal<br />

On i>''ui les contactes aux numéroi dt télépl i<br />

suivants<br />

( li.ihlirf<br />

I 5MI ' I s\(<br />

KISM<br />

(514)899-9916<br />

(514)259-7714<br />

(514)281-2355<br />

Ligne -..m- h .u p. immunc pour i. •• i i -inismej<br />

I-«88-25 1 1255<br />

Production de ce cahier: CarineGuidneUi, LouJac<br />

I.ili.riiiiM<br />

I m MiH'il. . i j.'.in RMI>II,IIÎI«<br />

( »r.iphiMii. Composition Fleur de Lyaêc<br />

Photos t '..iwil


PARCE QUE<br />

SAVOIR<br />

C'EST<br />

POUVOIR.<br />

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HDUIllILLiUUO. Comment se transforme le monde ? Qui décide ? Qui écope ?<br />

Oui propose de faire autrement ? Tous les deux mois, nous vous présentons des points<br />

de vue et des acteurs qui innovent, bousculent et agissent.<br />

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50 exemplaires de chaque parution à mettre à la disposition des gens qui fréquentent<br />

votre organisation, POUR PLUS D'INFORMATION : FAITES LE 514.523.5998, POSTE 27.


gouvernement: le 31 décembre 2002, pour<br />

une entente sur l'application de l'équité salanale<br />

dans le secteur public, et le 30 juin<br />

2003, pour le renouvellement des conventions<br />

collectives des employés de l'Etat.<br />

M me Carbonneau admet que les sondages<br />

et les élections partielles expnment les<br />

sautes d'humeur de l'electorat. Elle n'est cependant<br />

pas prête a croire à un bouleversement<br />

durable du consensus québécois<br />

sur le service public et le rôle de l'Etat. Face<br />

aux partis, elle s'en tient la position réitérée<br />

par le 60' congrès de la CSN, qui se tenait<br />

a Québec du 26 au 31 mai, une sorte de<br />

non-ingérence dans la politique des parus.<br />

1970. La Centrale des syndicats démocratiques<br />

(CSD) est née d'une de ces scissions.<br />

La CSN avait invité le président actuel de<br />

la CSD, M Claude Faucher, à s'adresser à<br />

son congrès. Une page est ainsi tournée sur<br />

cet épisode douloureux. Cela laisse un<br />

page vierge a une présidente dont l'arrivée<br />

à tête de la CSN établit la parité hommesfemmes<br />

à la tète des quatre centrales syndicales<br />

québécoises.<br />

Féministe, Claudette Carbonneau?<br />

« Oui, tout à tait ! » Au cours des 25 années<br />

passées dans des poste de responsabilité syndicale,<br />

elle a supervise les dossiers de la<br />

condition féminine, de l'équité salariale, des<br />

A la tête de la CSN,<br />

Claudette Carbonneau<br />

gardera l'œil rivé<br />

sur ses échéances :<br />

31 décembre 2002<br />

pour l'équité salariale<br />

et juin 2003 pour les<br />

conventions collectives<br />

dans le secteur public.<br />

PAR RICHARD AMIOT<br />

ET JACINTHE GOUIN<br />

M<br />

oi, je rêve d'une CSN qui va plus<br />

« loin, dit Claudette Carbonneau,<br />

d'une CSN qui a toujours une<br />

lecture juste des enjeux tels qu'ils se posent<br />

à ce moment-ci de son histoire. J'avais le<br />

sentiment qu'on avait perdu cette lecture<br />

pertinente des enieux de l'heure. Ce n'était<br />

pas la CSN que je souhaitais pour la société<br />

québécoise et ce n'était pas non plus la<br />

CSN que je souhaitais pour les membres.»<br />

Ainsi s'explique Claudette Carbonneau,<br />

qui a emporté par une courte majorité de<br />

55 voix (805 voix contre 750) l'élection à la<br />

tête de la CSN contre le président sortant<br />

Marc Laviolette. Sa candidature avait surpris<br />

tout le monde ou presque en février<br />

2002. C'était la première fois depuis un<br />

demi-siècle qu'un membre de l'exécutif<br />

(M mc Carbonneau était vice-présidente de<br />

la centrale depuis 11 ans) contestait le président<br />

en poste. Pourquoi?<br />

«Je considère qu'on est dans une société<br />

en grand changement», expose Claudette<br />

Carbonneau. "Je souhaite qu'on se saisisse<br />

des enjeux et qu'on aille plus loin que<br />

simplement dénoncer. Dénoncer est important,<br />

il faut être en mesure de dire non.<br />

Cela dit, comment on les solutionne, nos<br />

problèmes? Moi, je me mets dans la perspective<br />

d'élaborer des solutions et d'animer<br />

ces débats à l'intérieur de nos rangs et ensuite<br />

(dans) la société. •<br />

Claudette Carbonneau prend acte des<br />

sondages favorables à l'ADQ de Mario<br />

Dumont, mais elle ne croit pas à un<br />

bouleversement durable du consensus<br />

québécois sur la place de l'État.<br />

L'élection de Claudette Carbonneau à<br />

la présidence de la Confédération des syndicats<br />

nationaux (CSN) survient pendant<br />

que le paysage politique québécois se recompose,<br />

si l'on en croit les sondages portant<br />

Mario Dumont et l'ADQ en tète des<br />

intentions de vote des Québécois. Un virage<br />

majeur de l'electorat, portant au pouvoir<br />

un parti qui promet de combattre l'influence<br />

des syndicats et de privatiser des<br />

services publics, ne peut laisser indifférente<br />

la présidente nouvellement élue de la<br />

deuxième centrale syndicale québécoise<br />

(270000 membres), la première dans le<br />

secteur public (140000 membres). Claudette<br />

Carbonneau fait preuve d'une prudence<br />

de serpent, quand on aborde le sujet<br />

avec elle: "Je demande à voir.-<br />

Trois jours après son élection, avant<br />

même d'occuper ses nouveaux bureaux, elle<br />

devait rencontrer le ministre du Travail Jean<br />

Rochon pour exposer la position de sa centrale<br />

sur la rétonne de la Loi des normes du<br />

travail. Et puisque c'étaient ses dossiers à la<br />

vice-présidence, elle ne connaît que trop les<br />

proches échéances des négociations avec le<br />

La CSN veut une réforme électorale,<br />

avec comme première balise l'instauration<br />

d'un mode de scrutin proportionnel.<br />

mais de non-indifférence a l'égard des choix<br />

de société qu'ils proposent. Mme Carbonneau<br />

rappelle la tentative malheureuse des<br />

centrales syndicales, en 1973, de taire battre<br />

le gouvernement Bourassa. élu finalement<br />

avec une maionte historique de 102 sièges.<br />

La présidente Carbonneau ne recherche<br />

donc pas la collision frontale avec l'Action<br />

démocratique de Mano Dumont ou le Parti<br />

libéral du Québec de Jean Charest. mais<br />

elle dénonce avec force les orientations<br />

conservatrices proposées à l'electorat. Elle<br />

n'a tait nulle mention du Parti québécois et<br />

du premier ministre Bernard Landry pendant<br />

l'entrevue accordée à RtCtO Yeno. Par<br />

contre. Claudette Carbonneau encourage<br />

l'émergence de nouvelle forces de gauche<br />

sur l'échiquier politique, pour favoriser le<br />

débat démocratique. La CSN a réitère son<br />

appui à une réforme électorale en protondeur<br />

au Québec, avec comme première<br />

balise l'instauration d'un mode de scrutin<br />

proportionnel.<br />

Les incursions de la CSN en politique<br />

lui ont coûté le départ de dizaines de milliers<br />

de membres refusant de suivre Tort;.]<br />

nisation sur ce terrain, dans les années<br />

centres de la petite enfance (CPE), du soutien<br />

aux familles et de la lutte à la pauvreté,<br />

du support aux personnes handicapées,<br />

entre autres. Les noms qui lui viennent<br />

spontanément aux lèvres, quand on lui<br />

demande qui l'inspire chez les féministes,<br />

sont Madeleine Parent et Lea Roback.<br />

Après un temps d'arrêt, elle mentionne<br />

aussi Françoise David, ex-présidente de la<br />

Fédération des femmes du Québec, initiatrice<br />

de la Marche mondiale des femmes,<br />

qui travaille maintenant a Au ki> Jel'ecbille,<br />

une organisation de défense des travailleurs<br />

au salaire minimum.<br />

Si Claudette Carbonneau avait perdu ses<br />

élections a la présidence de la CSN, elle<br />

n'aurait pas tait table rase de son engagement<br />

social, évidemment le suis certainement<br />

pleine d'énergie ••. affirmait-t-elle au<br />

lendemain du congres, maigre la tangue manifeste<br />

de la campagne électoral. «Je n'ai absolument<br />

pas le goût de m'investir à cultiver<br />

des loisirs pour le reste de mes jours.<br />

J'aurais pris une longue période de réflexion,<br />

mais ie suis convaincue que l'aurais<br />

trouvé un autre créneau d'action sociale,<br />

quelque part. • C3<br />

18 I RECTO VERSO JUILLET/AOÛT 2002<br />

JUILLET/AOÛT 200T RECTO VERSO ! 19


Ils comblent les vides dans l'information,<br />

ils filment les résistants. Ces cinéastes,<br />

chroniqueurs des luttes sociales,<br />

sont des éveilleurs de consciences.<br />

PAR ANNE-MARIE<br />

TREMB<strong>LA</strong>Y<br />

LES CAMÉRAS DE<br />

<strong>LA</strong> RESISTANCE<br />

«L'HOMME D'AFFAIRES A<br />

COMPRIS QU'A L'ERE DE <strong>LA</strong><br />

CONNAISSANCE, <strong>LA</strong> PRO­<br />

PRIÉTÉ INTELLECTUELLE<br />

LUI ASSURERAIT LE MÊME<br />

POUVOIR QUE LES USINES<br />

A L'ERE INDUSTRIELLE.»<br />

Carole Poliquin<br />

CAROLE POLIQUIN<br />

ET <strong>LA</strong> MONDIALISATION<br />

L'ASSAUT FINAL. LE BIEN COMMUN, le<br />

dernier film de Carole Poliquin, raconte en<br />

sept jours, comme la Genèse, comment les<br />

compagnies tentent de mettre la main sur<br />

l'eau, les services publics, les gènes humains<br />

et végétaux et les savoirs traditionnels<br />

ou nouveaux. La cinéaste a mis sur pied sa<br />

propre maison de production, Isca. Elle<br />

n'en est pas à son premier film sur la mondialisation.<br />

Turbulences, dès 1997, a été «un<br />

des premiers films, croit-elle, à expliquer les<br />

rouages de la mondialisation". Carole<br />

Poliquin a également analysé la société de<br />

production, avec L'emploi du temps (2000) et<br />

avec L'âge de la performance (1994), où elle démontre<br />

avec de fortes images comment les<br />

humains doivent devenir de plus en plus<br />

productifs, comme des poules et des porcs<br />

destinés à l'alimentation. Ce documentaire<br />

a remporté un prix Gémeaux en 1995.<br />

Choisir de suivre la voie du documentaire<br />

engagé au Québec n'est pas de tout repos.<br />

Rares sont ceux qui survivent sans passer<br />

par les grilles horaires de la télévision.<br />

Et avec l'arrivée des chaînes spécialisées, les<br />

longs-métrages documentaires n'ont plus la<br />

cote. Les diffuseurs financent plus volontiers<br />

des mini-séries. Malgré tout, une poignée<br />

d'irréductibles utilisent le documentaire<br />

pour pointer du doigt les problèmes<br />

sociaux, exposer les luttes ou susciter<br />

des débats.<br />

«Ce que j'aime, c'est créer des liens entre<br />

les diverses informations qu'on reçoit»,<br />

explique Carole Poliquin. «Je cherche toujours<br />

quelle est l'idéologie qui derrière ça,<br />

et ça nous mène à quoi comme vision de<br />

société». Avant de commencer un film, la<br />

réalisatrice, qui est animée par une passion<br />

communicative, découpe tous les articles de<br />

loumaux qui l'intéressent et remet les pièces<br />

du casse-téte en place. «Les citoyens travaillent<br />

huit heures par jour, en plus d'avoir des<br />

enfants, une vie sociale. Ils n'ont pas nécessairement<br />

le temps de faire des liens. Moi,<br />

je suis payée pour être cuneuse!», une goutte<br />

d'eau au moulin du changement social,<br />

mais qui permet au citoyen de s'informer.<br />

«Le changement social ne sera possible<br />

20 I RECTO VERSO IUILUT/AOÙT 2002


qu'avec une masse critique de gens qui<br />

pensent de la même taçon, qui poursuivent<br />

un même but.»<br />

g Carole Poliquin a passé six ans en Tur-<br />

3 quie, entre deux coups d'Etat. Ce voyage a<br />

s signifié beaucoup pour son éveil politique.<br />

g «Quand un jeune de 14 ans t'explique Pim-<br />

5 pénalisme américain, ça fait réfléchir. » De<br />

| retour au Québec, elle suit les luttes pour<br />

« les garderies populaires aux pays, dans les<br />

2 années 1980, et cela donne Les garderies qu 'on<br />

| veut (co-production Télé-Québec, 1983).<br />

s Aujourd'hui, c'est l'urgence de la situation<br />

; dans le monde qui la fait prendre la route,<br />

* armée d'une caméra. -Je suis une citoyenne<br />

| qui a accès au médium qu'est le cinéma. Je<br />

ne peux pas rester indifférente aux enjeux<br />

qui secouent la planète. •><br />

«ON PARLE ENCORE PEU<br />

DES FEMMES ET DE CE<br />

QU'ELLES FONT, SURTOUT<br />

DES FEMMES ORDINAIRES<br />

J'ESSAIE DE RENDRE VISI­<br />

BLE CE QUI N'EST PAS RE­<br />

CONNU : <strong>LA</strong> CONTRIBUTION<br />

DES FEMMES AUX CHANGE-<br />

_ MENTS DANS <strong>LA</strong> SOCIÉTÉ.»<br />

S SOPHIE BISSONNETTE<br />

S ET <strong>LA</strong> MEMOIRE DES FEMMES<br />

| MADELEINE PARENT : TISSEKASDE DES<br />

a solidarités (Virages, 2002) retrace la vie et l'en-<br />

| gagement de cette militante féministe et syndicaliste<br />

dont la voix déterminée nous alerte<br />

touiours et qu'on voit encore, à près de 85<br />

ans, défiler en première ligne des grandes<br />

manifestations de solidarité. (Wov: Madeleine<br />

Parent et la marche pour la paix durable, Recto<br />

Verso, nov.-déc. 2001). Sophie Bissonnette<br />

s'était déjà penchée sur la vie de<br />

Madeleine Parent et de cette autre militante<br />

admirée, Léa Roback, dans Des lumières<br />

o dans la grande noirceur (Contre-jour, 1^1). •<br />

De haut en bas : Partition pour voix de<br />

femmes, de Bissonnette, une fresque<br />

sur la Marche mondiale des femmes<br />

/ Turbulences, de Poliquin: les résistants<br />

à la globalisation imposée par<br />

les spéculateurs / Vue du sommet,<br />

de Isacsson : la bataille du Sommet<br />

des Amériques.<br />

1LLÉTA0ÛT 3002 «ECT0 VERSO ! 21


CAMERAS<br />

Ainsi, au fil d'une dizaine de réalisations,<br />

depuis 1979, Sophie Bissonnette, résolument<br />

féministe, a constitué une mémoire<br />

cinématographique du combat des femmes.<br />

À travers leurs récits, elle immortalise des<br />

tranches de notre histoire :1a lutte pour de<br />

meilleures conditions de travail pour les<br />

femmes dans les usines, leur syndicalisation,<br />

la chasse aux sorcières menée par Duplessis,<br />

la lutte pour le droit à l'avortement, etc.<br />

Dans Partition pour voix de femmes (coproduction<br />

Virages-ONF, 2001), elle a également<br />

montré ces luttes que les femmes<br />

mènent sur quatre continents afin d'enrayer<br />

Magnus Isacsson<br />

la violence et la pauvreté. De l'Inde aux<br />

États-Unis, en passant par l'Afrique, la réalisatrice<br />

a suivi des militantes d'une vingtaine<br />

de pays dans la Marche Mondiale des<br />

femmes en l'an 2000.<br />

Ce parcours n'est pas facile, rapporte la<br />

réalisatrice. «J'ai le parti pris que les choses<br />

changent collectivement lorsque les femmes<br />

s'organisent et font des actions. Par contre,<br />

ce parti pris représente maintenant de<br />

moins en moins d'intérêt pour les diffuseurs.»<br />

Les proiets de longs-métrages traitant<br />

des femmes sont difficilement acceptées. «Il<br />

y a 25 ans, il y avait une discrimination ouverte.<br />

Je pouvais me taire refuser un film<br />

parce que ce n'était pas intéressant, parce<br />

que c'était trop féminin », se rappelle Sophie<br />

Bissonnette. Elle estime que les choses ont<br />

peu changé aujourd'hui, même si les prétextes<br />

sont plus subtils.<br />

«Je crois que les femmes sont en ce moment<br />

de grandes perdantes dans le contexte<br />

d'industrialisation du cinéma et de la vidéo»,<br />

a]oute-t-elle. «Dans le contexte de performance<br />

et de productivité à tout prix aux<br />

dépens de la qualité d'une œuvre, les conditions<br />

de travail des créateurs, et en particulier<br />

des créatrices, se sont considérablement<br />

détériorées.» La documentariste<br />

cumule près de vingt ans de carrière, mais<br />

doit travailler comme traductrice et adaptatrice<br />

pour le cinéma afin de rejoindre les<br />

deux bouts.<br />

UNE SCENE DE VUE DU<br />

SOMMET A SOULEVÉ L'IRE<br />

DES MANIFESTANTS ANTI-<br />

MONDIALISATION : ELLE<br />

IMMORTALISE UN ACCRO­<br />

CHAGE VIRULENT ENTRE DES<br />

MILITANTS D'OPERATION<br />

SA<strong>LA</strong>MI ET DE <strong>LA</strong> C<strong>LA</strong>C.<br />

MAGNUS ISACSSON<br />

DEUX CÔTÉS À UNE MÉDAILLE<br />

MAGNUS ISACSSON A EU CHAUD AVANT<br />

le Sommet des Amériques de Québec, en<br />

avril 2001. En mars, il n'avait toujours pas<br />

l'aval de ses bailleurs de fonds pour Vue du<br />

Sommet. Il voulait sillonner la ville de Québec<br />

avec huit équipes de tournage, pendant<br />

les trois jours de manifestation. Finalement<br />

agréé, le film a braqué ses caméras sur les<br />

péripéties vécues par les militants, qui exprimaient<br />

leur désaccord pendant le Sommet<br />

des Amériques, par les représentants à<br />

l'intérieur du « mur de la honte » et par des<br />

policiers sur les lieux.<br />

À l'intérieur comme à l'extérieur. Vue du<br />

sommet montre les hauts et les bas de l'organisation<br />

malgré les mois de préparation :<br />

policiers dont les walkies-talkies se taisent,<br />

faute de piles; ]ournalistes bloqués en dehors<br />

de salles de presse verrouillées; accrochages<br />

entre militant et policiers, et entre les<br />

militants eux-mêmes.<br />

Un autre de ses films, Un syndicat avec<br />

ça?, s'est aussi mérité de vives critiques, de<br />

la part de la FTQet du syndicat des Teamsters,<br />

qui ont accusé Isacsson de «salissage»<br />

et de «trahison». Le documentaire<br />

montre la déconfiture des militants syndicaux<br />

des Teamsters (affiliés à la FTQJ, à<br />

l'intérieur d'un McDonald's, à Saint-Hubert<br />

(en banlieue de Montréal). Il révélait<br />

en plus que le fonds de pension des Teamsters<br />

était actionnaire de McDonald's. Le<br />

documentaire se termine avec la fermeture<br />

du restaurant et la mise à pied du conseiller<br />

syndical des Teamsters qui suivait<br />

le dossier.<br />

Malgré ces remous, il n'est pas question<br />

pour le cinéaste d'ongine suédoise, à qui on<br />

doit aussi Opération SalAMI, les profits où la<br />

vie et Enfants de choeur, de tomber dans la<br />

propagande ou de livrer des recettes politiques<br />

toute faites. «Je veux soulever des<br />

questions. Il n'y a pas de venté tranquille,<br />

facile, expose-t-il. Les histoires de la vie sont<br />

souvent complexes. •<br />

La dignité fondamentale de la personne, la liberté,<br />

la justice, la solidarité, le respect de l'identité<br />

et des langues, doivent être aussi «mondialisés».<br />

Relation*<br />

international»*<br />

Québec a a<br />

ON PRÉPARE L'AVENIR<br />

22 PECT0 VERSO IUIUEÎ/A0ÛT 2002


LES MEDIAS SE RABATTENT<br />

SUR LES EXPERTS, SOCIO­<br />

LOGUE, POLITOLOGUE,<br />

PSYCHOLOGUE ET AUTRES<br />

«LOGUES» POUR REMPLIR<br />

LEURS REPORTAGES. <strong>LA</strong><br />

RÉALISATRICE EVE <strong>LA</strong>MONT<br />

FUIT CES EXPERTS.<br />

EVE <strong>LA</strong>MONT<br />

<strong>LA</strong> RÉSISTANCE DES EXCLUS<br />

-J'AI <strong>LA</strong> CONVICTION POLITIQUE QU'IL<br />

existe des solutions et je m'intéresse aux<br />

gens qui cherchent les alternatives", explique<br />

Eve Lamont. Elle termine actuellement<br />

(printemps 2002), un documentaire<br />

sur le squat du Centre Préfontaine, à Montréal,<br />

vu par les squatters. «Ceux qui vivent<br />

la situation sont souvent les précurseurs, les<br />

chercheurs de possibles, d'ailleurs meilleurs.<br />

Pour moi, ce sont eux les experts •>, croit la<br />

documentariste. Malgré ses quinze ans de<br />

métier, il ne lui a pas été facile de se faire<br />

accepter dans l'antre des squatters.<br />

«En documentaire, tu es confrontée<br />

aux médias qui font tout à fait un<br />

autre travail ••, constate la réalisatrice,<br />

qui aioute du même souffle que,<br />

dans le cas du Centre Préfontaine, les<br />

médias se sont livrés à une campagne<br />

de dénigrement des militants.<br />

Son précédent long-métrage, Méchante<br />

job, porte à l'écran les témoignages<br />

de citoyens exclus du monde ~<br />

du travail. Le documentaire qui, aux s<br />

dires de la cinéaste, détruit le «sacro- |<br />

saint mythe du travail», montre des 5<br />

assistés sociaux qui se battent pour s<br />

un revenu de citoyenneté, des gens £<br />

qui ont décidé de vivre en quasi-autar- Les<br />

cie à la campagne, des artistes qui survivent<br />

malgré la précarité, etc. Les fonctionnaires<br />

de l'ONF jugeaient marginal le propos<br />

du film, elle a pns cinq ans pour le réaliser.<br />

Eve Lamont se rappelle avoir entendu que<br />

«l'ONF n'est pas là pour faire l'apologie de<br />

ceux qui vivent au crochet de l'Etat. •<br />

«Pourtant, s'indigne-t-elle. un tiers de la<br />

population vit dans la précarité.» Loin de<br />

lui faire baisser les bras, cette réaction a rensquatters<br />

d O ver d aie- Pre font aine<br />

forcé chez elle l'idée son film était nécessaire.<br />

«Si les institutions disent qu'elles<br />

n'en veulent pas, il faut le faire ! » Si le pouvoir<br />

te met des bâtons dans les roues, c'est<br />

une preuve de sa nécessité, car «mes sujets<br />

partent souvent d'un en du cœur. En voyant<br />

ce que les gens vivent, ça te met en colère.<br />

Et la colère, c'est le carburant pour nourrir<br />

une démarche de cinéaste engagé. • Q<br />

HOMMAGE<br />

BÉNÉVO<strong>LA</strong>T-QUÉBEC<br />

A<br />

7m<br />

dan Je la cinquième éJition Ju prix Hommage bénévolat-Québec, /'ai<br />

en le plaisir Je lancer un concours a l'intention Jes artisancs et Jes artisans Ju Québec, en<br />

partenariat avec le Conseil Jes métiers J'art Ju Québec, afin Je créer une œuvre symbolisant<br />

l'action bénévole, la générante et le Jrvouement.<br />

Le 24 avril dernier, a l'Assemblée nationale, les lauréates et les Liureats Ju prix<br />

Hommage bénévolat-Québec se sont ainsi va remettre une œuvre spécialement créée pour<br />

eux : Tara. Ce nouvel objet Je reconnaissance en terra cota • été imagine et réalise par Jeux<br />

artisans Ju Cercle Je créativité Terra, a Lr. al, MM Serge Roy et Gregory Scbhbcurt.<br />

Tira. •• Celle i/m Sauve ». est lyuonymt J'action. Les artisans ont réussi à<br />

Ijmbolinf non seulement l'action bénévole, mais ont également représente les lauréates et les<br />

lauréats Ju prix Hommage benevolat-Quebec. ijui sont Jeioucs. généreux, représentatifs Ju<br />

présent er Je l'avenir Je la société québécoise.<br />

I<br />

Êmpit»<br />

Québec (ICI<br />

Xicole<br />

Léger<br />

Ministre Jelcguee a la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion<br />

Responsable Je l'action bénét ok<br />

JUILLET/AOÛT 2002 IECT0 VIRSO I 23


Marius Barbeau, Gilles Garand,<br />

Michel Faubert : chaque génération<br />

de Québécois a fourni son contingent<br />

de folkloristes pour transmettre<br />

et enrichir la culture traditionnelle.<br />

Petit état des lieux de rendez-vous<br />

estivaux des arts populaires.<br />

PAR ANNE-MARIE TREMB<strong>LA</strong>Y<br />

Aujourd'hui, dans une économie planétarisée.<br />

beaucoup de jeunes se réapproprient la tradition.<br />

qui préside à la Grande Rencontre. » Il y a dix<br />

ans, nous cherchions un quartier qui constituait<br />

un lieu d'histoire et de mémoire.<br />

Hochelaga-Maisonneuve nous a permis de<br />

taire le lien avec l'histoire des travailleurs<br />

de Montréal. -<br />

Avec Garand, la politique n'est jamais<br />

loin de l'art. Il tisse un lien étroit entre le<br />

folklore et les classes ouvrière et les<br />

paysanne. Le folklore est la science du peuple.<br />

Le conteur et chanteur Michel Faubert<br />

explique :1e folklore «est le domaine des<br />

savoirs et des gestes qui se transmettent par<br />

l'oralité. Cela inclut donc la musique, la<br />

danse, mais aussi et surtout les métiers traditionnels,<br />

comme le tissage, le travail du<br />

ter, la gastronomie". Faubert, qui poursuit<br />

une brillante carrière solo, fait aussi partie<br />

des Charbonniers de l'enfer. Il a appris la plus<br />

grande partie de son répertoire de contes<br />

d'Ernest Fradette, un conteur de 78 ans.<br />

Une vingtaine de festivals<br />

Le folklore n'est plus relégué aux traditionnelles<br />

soirées de la Saint-Jean-Baptiste<br />

ou du Jour de l'An. Une vingtaine de festivals<br />

mettent les arts populaires en vedette,<br />

de juin à octobre, entre Montmagny et<br />

Drummondville, dans Lanaudière. à Sherbrooke<br />

et à Tadoussac, etc. Les Québécois<br />

s'empressent de renouer avec leurs traditions,<br />

constate avec satisfaction Gilles Garand.<br />

De racines françaises et irlandaises, le<br />

folklore québécois s'est enrichi des nombreux<br />

apports des ethnies qui s'installent au<br />

pays. La plupart des festivals font désormais<br />

une place grandissante aux musiques du<br />

monde dans leur programmation. C'est<br />

une belle évolution, qui témoigne de la diversité<br />

du Québec d'auiourd'hui », se plait<br />

à souligner Yvon Legendre, un ethnologue<br />

ancien membre du groupe Les Batinses.<br />

«Aujourd'hui, dans une économie mondiale,<br />

planétarisée, beaucoup de jeunes se<br />

reappropnent la tradition", commente<br />

Gilles Garand, qui est également président<br />

du Conseil québécois du patnmoine vivant<br />

«Avec le world beat, on entend la musique<br />

de plusieurs pays, de la Chine comme du<br />

Brésil ou Cuba. Il y a un besoin de nous<br />

retrouver nous-mêmes, dans notre identité. •<br />

Et puis, les soirées traditionnelles tranchent<br />

avec celles des discothèques. Les<br />

Français ont débarqué en Nouvelle-France<br />

avec peu d'instruments de musique. Les<br />

colons ont utilisé tout ce qui leur tombait<br />

sous la main, des cuillères ou des os, ils battaient<br />

la mesure en tapant du pied, ils ont<br />

inventé la turlute.<br />

D y a un aspect convivial, dans les soirée^<br />

traditionnelles, que l'on ne retrouve pas<br />

ailleurs. «Avec ces façons de taire, les gens<br />

se sentent réellement des participants dans<br />

les soirées», dit Garand. O<br />

Quêteux et voyageurs parcouraient nos villages, rapportant<br />

les nouvelles, parfois mises en musique, en échange<br />

du gîte et d'un repas chaud. Chaque camp de bûcheron<br />

et chaque village digne de ce nom possédait son violoneux<br />

pour animer les soirées. Marius Barbeau, premier<br />

iniversitaire à s'intéresser au folklore, au début du siècle, a découvert<br />

des gens qui connaissaient par cœur 300 ou 400 chansons.<br />

Il en a gravé près de 6000 sur des cylindres de cire, et a recueilli<br />

13 000 textes.<br />

Le quartier Hochelaga-Maisonneuve, à Montréal, va vibrer<br />

cet été encore au rythme de ces musiques, pendant la 10 e édition<br />

de la Grande Rencontre, du 14 au 16 juin 2002. «La Place du<br />

Marché Maisonneuve était tout indiquée pour célébrer le folklore<br />

québécois», expose Gilles Garand, le président de la Société<br />

pour la promotion de la danse traditionnelle du Québec (SPDTQ),<br />

Gilles Garand, musicien et ex-conseiller<br />

syndical. Ici, en 199S, manifestant avec<br />

les travailleurs des minoteries Ogilvy.<br />

QUELQUES<br />

ÉVÉNEMENTS<br />

• La Grande rencontre,<br />

du 14 au 16 juin 2002, à la<br />

Place du Marche Maisonneuve,<br />

à Montréal. Info<br />

festival : 514-273-0880.<br />

»> www.spdtq.qc.ca.<br />

La SPDTQ organise plusieurs<br />

autres activités de<br />

danse et de musique, et<br />

opère un camp folklorique<br />

et une école des arts<br />

folkloriques tout au long<br />

de l'année.<br />

• Le Mondial des<br />

cultures, 4 au 14 juillet,<br />

a Drummondville.<br />

• Le festival Mémoire<br />

et racines, 26 au 28 juillet,<br />

à Saint-Charles-Borromee<br />

(près de Juliette).<br />

• Le Carrefour mondial<br />

de l'accordéon, du 29<br />

août au 2 septembre, à<br />

Montmagny. m www.accordeon.montmagny.com<br />

• Les folkloriques de<br />

Tadoussac. du 10 au<br />

13 octobre, à Tadoussac.<br />

• Les jours sont contés<br />

en Estrie. du 10 au 20<br />

octobre, à Sherbrooke.<br />

Autres informations<br />

• Mémo-Art, reseau des<br />

festivals du patrimoine<br />

vivant, 418-643-2772.<br />

- www.memoart.qc.ca.<br />

• L'Association québécoise<br />

des loisirs folkloriques.<br />

* www.quebecfolklore.qc.ca.<br />

• Mnemo : danse et musique<br />

traditionnelles du<br />

Québec, 514-472-3608.<br />

»> www.mnemo.qc.ca.<br />

24 IIECT0 VEIS0 JUILLET/AOÛT 2002<br />

IUIUET/AOÙT 2002 8ECT0 TEP.S0 ! 25


LE PAYS DU<br />

THÉÂTRE FORUM<br />

E<br />

n même temps que le Théâtre de<br />

l'opprimé du Brésilien Augusto Boal,<br />

dans les années 1970. l'Atelier-Theàtre<br />

burkinabé (ATB) mettait au point sa propre<br />

technique de théâtre interactif. Prosper<br />

Kompaore et l'ATB ont plus que tout<br />

autre développé cette formule. A tous<br />

les deux ans depuis 1988, à leur invitation,<br />

troupes africains et occidentales<br />

convergent vers ce rendez-vous mondial<br />

du théâtre pour le développement, à<br />

Ouagadougou. Dans une Afrique encore<br />

faiblement alphabétisée, le théâtre est<br />

le dépositaire d'une culture orale millénaire<br />

et reste la meilleure façon de rejoindre<br />

un large public. Le théâtre qui<br />

s'y pratique s'inspire du théâtre de l'opprimé.<br />

L'une de ses trois formes, la plus<br />

utilisée, le théâtre forum, transforme le<br />

S spectateur en spect'acteur.<br />

| À Catembe (Mozambique), une<br />

i troupe financée par la Croix-Rouge<br />

| joue une pièce pour avertir les<br />

= enfants des dangers des mines<br />

S antipersonnel (deux millions<br />

S encore actives dans le pays).<br />

LE SPECTACLE DES OPPRIMES<br />

En Afrique, le Burkina Faso, 159 e pays le plus<br />

nonne sur le sort de ses entants, mais nous<br />

aussi, qui devons nous inquiéter du sort que<br />

pauvre de la planète, sur 162, est le principal<br />

nous réservons à l'Afrique et à ses entants<br />

lieu d'expérimentation du théâtre-action.<br />

PAR JEAN-GUY GIRARD *<br />

Deux comédiens, et la magie opère.<br />

Sur la scène, nous suivons deux<br />

jeunes mendiants dans les rues de<br />

Dakar. Ces entants, les talibés, de<br />

familles trop pauvres pour assurer<br />

leur survie, ont été confiés à une (Luiras, une<br />

école coranique. À cause de la pauvreté, leur<br />

maître, le marabout, les envoie plutôt mendier<br />

dans les rues pour leur propre subsistance<br />

et celle de leur • maître ». La pièce est<br />

cinglante. Pour les festivaliers, Vitalibé, c'est<br />

26 I RECTO VERSO IUIUET/AOÛT 2002<br />

son titre, fut la révélation du 8 e Festival international<br />

du théâtre pour le développement<br />

(FITD), à Ouagadougou, en février<br />

2002, au Burkina Faso. Les deux jeunes comédiens,<br />

tout juste sortis de l'Ecole nationale<br />

des arts de Dakar (Sénégal), nous répètent<br />

les mots même des talibés. Ils les ont<br />

suivis, intenogés, observés pendant des mois.<br />

Une tournée nationale de la pièce a eu<br />

de l'effet sur le gouvernement, rapportent<br />

les comédiens. Le gouvernement sénégalais,<br />

l'UNICEF et des ONG viennent en aide aux<br />

entants et aux écoles coraniques. Le phénomène<br />

des talibés touche particulièrement<br />

le Sénégal, mais aussi le nord du Bénin où<br />

l'on dénombre 5000 étudiants-mendiants.<br />

Au Burkina, on les appelle des gâribouts.<br />

Phénomène religieux autant qu'économique,<br />

il dérive vers la politique. Par exemple,<br />

en octobre 2001, la puissante confrérie religieuse<br />

des moundes avait mobilisé les talibés<br />

et la rue, à Dakar, pour taire interdire<br />

le film Kiirnhti, du réalisateur Joseph Ramaka,<br />

que les intégristes religieux jugeaient blasphématoire.<br />

Dans la scène finale, l'héroïne,<br />

une lesbienne, se suicide, accompagnée jusqu'à<br />

la fin par un chant incantatoire sur le<br />

poème Kdldimmiiï, de Cheikh Ahmadou<br />

Bamba. •• Vitalibé ••, c'est l'Afrique qui se ques-<br />

L'Afrique est out<br />

Le Québécois ou le Canadien moyen<br />

s'est forgé une image misérabiliste de<br />

l'Afrique, au contact des campagnes de<br />

sollicitation de quelques ONG et des images<br />

offertes par les médias (conflits, famines,<br />

désastret naturels, extrême pauvreté). Au<br />

lendemain des attentats du 11 septembre,<br />

pendant que le G8 se réunit au Canada, à<br />

Kananaskis (Alberta), pour adopter un<br />

Nouveau partenariat pour le développement<br />

de l'Afrique (NPDA), après la récente<br />

tournée africaine de Jean Chrétien en ambassadeur<br />

du G8. il n'est pas nécessaire<br />

Le théâtre africain, dépositaire d'une culture orale<br />

millénaire, demeure la meilleure façon de rejoindre<br />

un large public encore faiblement alphabétisé.<br />

d'être un observateur très attentif de la<br />

scène internationale pour se rendre compte<br />

que le Continent Noir est oui.<br />

BLuk out est ]ustement le titre de la plus<br />

récente production de l'Atelier-Theàtre burkinabé,<br />

la troupe hôte du Festival international<br />

du théâtre pour le développement.<br />

Dans [e village de Broum-broum (nom fictif),<br />

on nous tait vivre en accélère l'ensemble<br />

des problèmes qui handicapent le<br />

développement de l'Afrique : attitude néocolonialiste<br />

des institutions internationales,<br />

sénilité et corruption de la classe politique<br />

burkinabé et des élites locales, m alités<br />

ethniques, bonne volonté mais maladresse<br />

des ONG. désespoir de la jeunesse<br />

qui ne voit de salut que dans l'exil. On se<br />

surprend de la charge entique de la pièce.<br />

en présence des personnalités politiques<br />

venues inaugurer le Festival.<br />

L'ATB a vu le jour en 1978. La troupe<br />

emploie une quarantaine de comédiens,<br />

dont quinze permanents. Depuis 19%,<br />

elle s'est fractionnée en plusieurs troupes,<br />

à Ouagadougou même, et a essaimé ailleurs<br />

au Burkina Faso. Prosper Kompaore. a la<br />

barre de l'ATB, accueille le Festival international<br />

du théâtre pour le développement<br />

depuis 1988. Il nous lance delà l'invitation<br />

pour le Je Festival, en tévner 2004.<br />

Un festival mondial de théâtre dans la<br />

capitale du Burkina Faso est une grosse machine<br />

accueillant vingt-cinq pays africains,<br />

1000 participants, une centaine de spectacles,<br />

et 50 000 spectateurs. L'édition 2002<br />

du FITD marque cependant un repli par •<br />

ÛT 2002 1ECT0 VE1S0 27


B<strong>LA</strong>CK-OUT<br />

rapport aux précédentes éditions,<br />

avec moins de troupes<br />

occidentales et africaines. «Les<br />

partenaires financiers n'étaient<br />

pas au rendez-vous ", explique<br />

Prosper Kompaoré. «Nous avons<br />

été obligés de ne retenir qu'une<br />

trentaine de troupes burkinabées<br />

sur une centaine de candidatures.<br />

C'est de plus en plus difficile<br />

ici et nous avons beaucoup<br />

moins d'aide internationale.»<br />

Tout à l'heure, j'ai dit adieu<br />

à Maxime Houlona Damsou, qui<br />

retourne à N'Diamena, au Tchad.<br />

Pour présenter «La ronde des<br />

vieillards» avec sa troupe, Maxime,<br />

à peine 20 ans, a traversé<br />

la moitié d'un continent en minibus,<br />

par 40° Celsius à l'ombre,<br />

et il sera de retour dans deux<br />

ans, s'il en trouve les moyens.<br />

Théâtre engagé<br />

sous dictature<br />

Et l'argent n'est pas le plus<br />

gros problème. Amadou (nom<br />

fictif, on ne sait jamais...) n'a<br />

presque pas changé. Je l'ai connu<br />

à Ouagadougou en 1996. Je<br />

participais au Festival en compagnie<br />

de trois membres de la<br />

troupe La Ria et AJnqtubec, un regroupement<br />

de six ONG. Nous<br />

étions emballés par son spectacle,<br />

une création à la manière<br />

d'un conte traditionnel africain.<br />

À cause du contexte politique,<br />

le spectacle tournait peu dans<br />

son pays. Il s'agissait d'une petite<br />

production, trois comédiens,<br />

à la lois danseurs et musiciens,<br />

dans un décor ingénieux.<br />

Je vous fais grâce de toutes<br />

les tribulations pour taire venir<br />

la troupe africaine au Québec.<br />

Le ministre André Ouellet, responsable<br />

de l'ACDI à l'époque,<br />

avait mis en déroute le réseau<br />

des ONG d'éducation. En<br />

additionnant les revenus de la<br />

tournée, nous prévoyions quand<br />

même un petit cachet pour les<br />

artistes. Ils voyaient dans cette<br />

tournée un tremplin.<br />

Le 7 septembre 1997, un appel<br />

à l'ambassade canadienne<br />

nous informe que, «non, |e<br />

vous assure, Monsieur Amadou<br />

ne s'est pas présenté» pour obtenir<br />

son visa. Le premier spectacle<br />

au Québec est prévu le 11<br />

septembre. Rien ne va plus, j'essaie<br />

vainement de retrouver<br />

M. Amadou. Quelques jours<br />

plus tard, j'apprends que les<br />

membres de la troupe auraient<br />

eu un accident sur la route en<br />

direction de l'ambassade. Un<br />

mois plus tard, Amadou me<br />

raconte le fin mot de l'histoire :<br />

«La police a refusé de nous<br />

donner nos passeports.»<br />

Depuis, aucun contact avec<br />

Amadou, jusqu'à cet hiver 2002.<br />

Je le revois à Ouagadougou,<br />

l'air aussi vif, malgré qu'il ait<br />

passé depuis quelques années le<br />

cap de la cinquantaine :«Tu sais,<br />

j'ai eu beaucoup de difficultés à<br />

me remettre de l'échec de la<br />

tournée. J'avais tout investi dans<br />

ce projet. Je me suis retrouvé<br />

dans une situation intenable.<br />

Je commence à peine à sortir la<br />

tête hors de l'eau». Oui, mais<br />

que s'est-il vraiment passé?<br />

•Ah !... Le pouvoir a tout simplement<br />

eu peur, et c'était tellement<br />

facile pour eux de nous<br />

empêcher de sortir. Tu sais, j'ai<br />

fait le maquis, je suis directement<br />

identifié à l'opposition,<br />

même si je n'ai aucune activité<br />

politique depuis des années.»<br />

Qu'en est-il aujourd'hui? «Il y<br />

a un certain relâchement. Seulement<br />

pour les communications<br />

internationales, tu te rappelles<br />

comment c'était compliqué<br />

d'avoir le moindre contact,<br />

même par la poste. Maintenant,<br />

les cafés Internet poussent<br />

comme des champignons. La<br />

troupe participe à un Festival en<br />

Europe à l'automne, il ne devrait<br />

pas y avoir de problèmes.»<br />

Et pour le Québec? «J'attends<br />

une invitation. Certainement, je<br />

suis encore intéressé à me rendre<br />

au Québec ! • D<br />

* Jean-Guy Girard est membre de<br />

La Ria, une troupe de théâtre d'intervention.<br />

Il participait au FITD en<br />

compagnie de Pierre Noël m Site<br />

internet du Festival : www.atb.bf<br />

Faculté de l'éducation permanente<br />

La faculté d'évoluer<br />

_ 4<br />

Affichez<br />

vos compétences.<br />

Demandez l'admission<br />

aux programmes en intervention.<br />

• Criminologie<br />

• Droit<br />

• Intervention auprès des jeunes<br />

• Intervention dans les groupes et les organisations<br />

• Intervention de crise<br />

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• Petite enfance et famille<br />

• Relations interculturelles<br />

• Santé mentale<br />

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A<br />

Université<br />

de Montréal<br />

28 1 RECTO VERSO JUILLET/AOÛT 2002


Mexique, janvier 1998 —<br />

Des zapatistes attendent<br />

l'arrivée d'une caravane<br />

de sympathisantes venues<br />

de Mexico jusqu'à Polho.<br />

au Chiapas.<br />

Amérique latine<br />

<strong>LA</strong> GAUCHE DANS <strong>LA</strong> PEAU<br />

Pierre Mouterde est un professeur<br />

de philosophie spécialisé<br />

dans letude des mouvements sociaux<br />

en Aménque latine. Il n'est<br />

pas le seul, mats il se distingue en<br />

cherchant moins à les cntiquer<br />

qu'à « saisir ce dont ils sont le<br />

symptôme», pour «les replacer<br />

dans leur perspective histonque »,<br />

La perspective, c'est bien<br />

sûr la mondialisation qui réduit<br />

le politique à une gestion<br />

comptable et impose partout la<br />

••pensée unique» des sociétés<br />

consensuelles du Nord (le mode<br />

in USA). C'est aussi un trou<br />

béant, que cherchent à combler<br />

les mouvements intégristes faits<br />

de solidarités ethniques étroites<br />

ou de religiosité sectaire, des<br />

programmes grossiers qui en<br />

appellent au «bien contre le<br />

mal» ou à «un dieu taillé à<br />

(leur) piètre mesure». Et, encore<br />

plus dangereux, c'est un<br />

espace disponible pour «tous<br />

les désespoirs terroristes», dont<br />

sa plus aberrante expression, le<br />

«geste kamikaze».<br />

La perspective historique,<br />

c'est aussi le constat que les<br />

mouvements actuels - les zapatistes<br />

du Chiapas, au Mexique, la<br />

Confédération des nationalités<br />

indigènes (Conaie), en<br />

Equateur, le Mouvement<br />

des sans-terre, au<br />

Brésil, et l'expérience<br />

de démocratie participative<br />

à la mairie de<br />

Porto Alegre - parais­<br />

Sans réelle<br />

indépendance<br />

économique,<br />

l'autonomie<br />

politique<br />

s'avère<br />

illusoire.<br />

sent étonnamment<br />

proches de ce qu'on<br />

avait vues fleurir naguère<br />

au Chili, au Nicaragua,<br />

et surtout à Cuba. Aussi<br />

la gauche latino-améncaine<br />

parait-elle déchirée, à bout de<br />

souffle, désenchantée, au terme<br />

de sérieux déboires dans des<br />

pays nouvellement orphelins des<br />

grands modèles (le communisme<br />

ou la social-démocratie héntée<br />

de la décolonisation) qui leur ser-<br />

valent de « boussole ». L'auteur la<br />

met en garde : en quête de nouveaux<br />

repères, elle devra résister<br />

à la grande tentation de continuer<br />

à se définir exclusivement<br />

comme un mouvement national-populiste,<br />

une idéologie qui<br />

lui a mis le pied dans<br />

la tombe. Sans vision<br />

d'une réelle indépendance<br />

économique,<br />

l'autonomie politique<br />

s'avère insuffisante,<br />

illusoire.<br />

En ense, donc, depuis<br />

la tin des années<br />

1980. la gauche n'a tout<br />

de même pas déçu à<br />

ïamais. Et surtout, elle n'a pas<br />

capitulé. À près de 150 ans, son<br />

passé lui a appns que conflits et<br />

débats n'ont pas une connotation<br />

forcément négative et que<br />

le concept même de gauche<br />

fluctue nécessairement, parce<br />

qu'il dépend toujours d'un devenir<br />

à la fois réactionnel et<br />

proactif, un devenir qui s'invente<br />

à coups de luttes à mener,<br />

de champs à défricher.<br />

Des visionnaires idéalistes, il<br />

y en aura toujours, quoiqu'en<br />

disent certains penseurs contemporains.<br />

Parmi ceux-ci, un<br />

Jean-François Lyotard voit, dans<br />

la résistance en vogue au postmodernisme,<br />

les dernières «traces<br />

d'une époque révolue», les<br />

«restes d'une modernité archaïque<br />

à laquelle l'ordre marchand<br />

et technicien est en train<br />

de régler son compte ».<br />

Mouterde fait observer combien<br />

ce cynisme sonne faux,<br />

surtout en Aménque latine, ce<br />

terreau fertile en innovations<br />

fécondes. Il formule le vœu que<br />

la «gauche historique» (qualificatif<br />

qu'il préfère à «traditionnelle»),<br />

nourrie à la table du<br />

socialisme, se réactualise en s'appropriant<br />

le concept de démocratie<br />

politique qu'une nouvelle<br />

gauche s'emploie activement<br />

à intégrer à son profit. Il parle de<br />

pensées mosaïques, de pratiques<br />

unitaires, de synthèses larges,<br />

de recompositions complexes,<br />

de dépassements permanents,<br />

d'un mouvement tout à la fois<br />

éthique, culturel et démocratique,<br />

qui propose à tous les acteurs<br />

une gestion participative.<br />

Autant de mots pour qualifier<br />

le deuxième courant d'une<br />

gauche consciente de ses limites,<br />

des impasses possibles, certes,<br />

mais capable d'obliger les gouvernements<br />

en place « à céder du<br />

terrain aux revendications populaires»,<br />

capable de faire reculer la<br />

mondialisation au profit d'une<br />

économie locale. — D. S.<br />

Pierre MOUTERDE,<br />

Quand l'utopie ne desarme<br />

pas, Écosociété, 2002,<br />

193 pages.<br />

JUILLET/AOÛT 2002 IECT0 VERSO I 29


,ES LIVRES PAR DANIH I h SHFTTTTN<br />

gulièrement assez près de<br />

là où nous conduit François<br />

Biais, dans son essai sur l'allocation<br />

universelle. Régulièrement,<br />

je me dis que le Paradis serait<br />

un pays où, chaque semaine,<br />

dans ma boîte à lettres, je trouverais<br />

un chèque récompensant<br />

mon mente. Comme ]e me perçois<br />

aussi travaillante que la<br />

fourmi de la table (sans son<br />

côté pingre !), je me vois mener<br />

la belle vie. Pas une existence de<br />

farniente, mais au contraire une<br />

activité intense, sans le stress<br />

de l'insécurité financière.<br />

Mais cela ne contribuerait-il<br />

pas à grossir les rangs des inactifs<br />

aptes au travail? Pourquoi<br />

travailler, quand on gagne quasiment<br />

autant sans se fatiguer?<br />

L'État-providence, avance<br />

François Biais, en est arrive i développer<br />

une culture de la dépendance<br />

en transformant les<br />

inactifs aptes au travail en «employés<br />

peu fiables et non persévérants»<br />

aux yeux de bien des<br />

employeurs. Le politologue de<br />

l'université Laval, par contre,<br />

déplore que les conditions d'admissibilité<br />

obligent ceux-ci à dilapider<br />

leur patrimoine, avec<br />

«pour effet d'aggraver davantage<br />

leur dépendance». Il rappelle<br />

que les programmes sélectifs<br />

d'aide «se révèlent généralement<br />

stigmatisants (sic) et humiliants<br />

pour les ayants droit». Ce système<br />

perpétue la pauvreté et<br />

l'exclusion de génération en génération.<br />

En fin de compte, tout<br />

cela entretient l'idée malsaine<br />

qu'une partie de la population<br />

vit «au crochet» de l'autre.<br />

RÉPARTIR <strong>LA</strong> RICHESSE<br />

L'allocation universelle pourrait<br />

résoudre ces problèmes, en<br />

se substituant à tous les mécanismes<br />

actuels de la sécurité du<br />

revenu de façon inconditionnelle.<br />

Tout individu recevrait<br />

une allocation non imposable.<br />

Comment cela serait-il possible?<br />

Pour donner à l'un, ne<br />

faut-il pas retirer à l'autre? Pas<br />

nécessairement.<br />

Il laut comprendre, explique<br />

François Biais, que la «"richesse<br />

collective" demeure le produit<br />

de nombreux éléments<br />

conjoncturels». Loin d'être un<br />

Montréal, novembre 2001 — Soupe populaire pour dénoncer<br />

une consultation gouvernementale sur la pauvreté.<br />

bien fixe, déterminé, cette richesse<br />

doit être vue comme le<br />

« résultat dynamique et en évolution<br />

perpétuelle d'actions<br />

agrégées de millions d'individus»<br />

qui produisent, épargnent<br />

et investissent, remodelant ainsi,<br />

constamment, ce qu'il est<br />

possible de partager.<br />

Pour canaliser une portion<br />

de cette richesse vers la solidarité<br />

sociale, sans annihiler l'initiative<br />

personnelle, il faut commencer<br />

par intégrer sécurité<br />

sociale et fiscalité, pour ensuite arbitrer<br />

avec souplesse entre l'équité<br />

et l'efficacité économique. L'auteur<br />

nous met en garde, en effet,<br />

contre la confusion entre «universalité<br />

et prodigalité».<br />

Il est évident que les mesures<br />

d'assurance sociale instaurées<br />

après la Seconde guerre<br />

ne parviennent plus à enrayer la<br />

pauvreté, tant la situation économique<br />

a changé : les femmes<br />

ont investi le marché du travail,<br />

celui-ci s'est mondialisé et<br />

les machines se sont révélées<br />

«plus rentables que la maind'œuvre»<br />

dans bien des cas.<br />

Rien de tout cela n'est mauvais<br />

en soi. Il faut cependant que<br />

«les bénéfices de ces changements<br />

se répartissent équitablement».<br />

Or, ce n'est pas le cas.<br />

L'instauration d'une allocation<br />

universelle, loin de ruiner<br />

notre économie, s'avérerait équitable<br />

et efficace pour promouvoir<br />

«l'autonomie, la dignité et<br />

la capacité de faire valoir ses<br />

droits et d'être reconnu a part<br />

entière dans la société». La question<br />

du salaire minimum se poserait<br />

alors en d'autres termes<br />

La rémunération resterait soumise<br />

aux contraintes habituelles<br />

de la négociation salariale, mais<br />

sans plancher.<br />

•<br />

301 RECTO VERSO JUILLET/AOUT 2002


w<br />

L'allocation universelle ferait-elle<br />

tabula rasa de cinquante<br />

ans de luttes syndicales? Certainement<br />

pas, répond M. Biais,<br />

surtout en ce qui concerne les<br />

conditions de travail (sécurité,<br />

congés, etc.). Le rapport de force<br />

entre l'employé et le patron<br />

pencherait en faveur du premier,<br />

celui-ci risquant moins à<br />

se retrouver sans emploi. Un<br />

salaire plus bas que le minimum<br />

actuel, aiouté à l'allocation<br />

universelle, améliorerait<br />

néanmoins la situation économique<br />

individuelle du travailleur,<br />

tout en favorisant un<br />

plein-emploi adapté «à la nouvelle<br />

donne économique», en<br />

rendant viables certaines activités<br />

économiques qui ne le<br />

sont pas actuellement, même<br />

au salaire minimum.<br />

On peut assimiler cela à<br />

une subvention aux emplois<br />

les moins rémunérés, notamment<br />

dans le secteur des services<br />

directs aux personnes et<br />

dans des activités fortement<br />

concurrencées par les pays en<br />

voie de développement. Mais,<br />

simple à administrer, peu coûteux<br />

à gérer (beaucoup moins<br />

que les complexes régimes actuels)<br />

et transparent, pareil pro-<br />

L'allocation universelle<br />

sera peu coûteuse à gérer,<br />

transparente et préférable<br />

au workfare actuel.<br />

gramme universel serait de<br />

beaucoup préférable à la politique<br />

du workfare (exigence<br />

d'une contrepartie de travail).<br />

Il aurait aussi pour conséquence<br />

de rendre tout emploi<br />

réellement avantageux, les revenus<br />

du travail s'ajoutant à<br />

l'allocation non imposable.<br />

Si, avec l'allocation universelle,<br />

«l'ensemble des citoyens<br />

recevra plus en transfert direct<br />

de l'État-, «il est entendu (que<br />

le contribuable) sera aussi imposé<br />

davantage sur son revenu<br />

brut». Cela aura pour conséquence<br />

«un rééquilibrage du<br />

fardeau fiscal en faveur des<br />

plus démunis». Les mieux nantis<br />

ne tireront en bout de ligne<br />

aucun bénéfice de ce régime.<br />

Ils se trouveront même à le financer<br />

en partie si, pour l'instaurer,<br />

il faut élargir l'assiette<br />

fiscale, éliminer des abris fiscaux,<br />

taxer davantage le capital,<br />

les héritages, les biens de<br />

luxe, etc. Bref, un régime fiscal<br />

basé sur l'allocation universelle<br />

sera « mieux adapté tant aux<br />

nouveaux contextes (économiques)<br />

qu'à nos aspirations<br />

de justice (sociale) ».<br />

La Grande-Bretagne, la Belgique,<br />

la Finlande, les Pays-Bas,<br />

l'Irlande envisagent d'adopter<br />

cette mesure. L'Alaska l'a déjà<br />

réalisée, en la finançant à même<br />

les profits du pétrole. Au Québec<br />

et au Canada, la peur de voir<br />

« l'État décaisser des sommes astronomiques»<br />

pour une telle<br />

mesure fait ajourner la réforme<br />

fiscale et sociale, constate François<br />

Biais. Il suggère alors que<br />

l'État instaure ne serait-ce<br />

qu'une modeste allocation<br />

universelle en puisant les fonds<br />

nécessaires dans les allocations<br />

familiales, les crédits d'impôt<br />

personnel, la sécurité de vieillesse<br />

et le supplément de revenu<br />

garanti, et enfin dans la<br />

part de l'aide sociale équivalente<br />

à la nouvelle allocation.<br />

Ce scénario se retrouvera, prédit-il,<br />

«au cœur des propositions<br />

de réforme de la politique<br />

sociale du XXI ' siècle ».<br />

— D S.<br />

François B<strong>LA</strong>IS. Un revenu<br />

garanti pour tous — Introduction<br />

aux principes de l'allocation<br />

universelle. Boréal.<br />

17 juin 2002,<br />

Journée Mondiale<br />

une planète /<br />

au sommet \<br />

Rio* 10. Johannesburg<br />

/ ^<br />

Pierre Mouterde<br />

UDflNU L'UTOPIE<br />

NE UEÎJRRME PUS<br />

de lutte contre la<br />

désertification<br />

as^TOMtsa<br />

Les pratiques alternatives<br />

de la gauche latino-américaine<br />

Il existe aujourd'hui, en Amérique latine,<br />

d'importants mouvements sociopolitiques qui<br />

s'emploient envers et contre tout a réinventer<br />

les possibles. Prenant appui sur des reportages<br />

qu'il a effectues récemment, l'auteur témoigne<br />

de la réalité vivante de ces mouvements en<br />

Equateur, au Mexique et au Brésil. De ces<br />

mouvements pourraient peut-être émerger,<br />

là-bas comme ailleurs, des pratiques et<br />

discours de gauche qui soient à la hauteur<br />

des enjeux contemporains.<br />

êfaécosociété<br />

^^[^r www ecosociete org<br />

4«3>. lu* Boy», buivju MO MonllM, (OUMK) («IMI» KIJ UD<br />

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lUIlin/AOÛT 2002 1ECT0 VEKS0 ! 31


4<br />

4<br />

Développement<br />

RIO+10<br />

» Quatrième d'une série<br />

de quatre en vue du Sommet<br />

de la Terre, à Johannesburg<br />

(Afrique du Sud), en août 2002.<br />

durable •<br />

AFFRONTER<br />

TERRE ET MER<br />

Surpêche, coupe à blanc, exode: le Bas-Saint-Laurent<br />

et la Gaspésie sont en péril. Des résistants reprennent<br />

en main leur développement.<br />

PAR DENISE PROULX | PHOTOS BENOÎT AQUIN<br />

Ca tait 40 ans que vous nous enlevez<br />

tout : notre bois pour bâtir vos maisons<br />

« à 200000 piastres, notre agriculture,<br />

nos poissons. En plus, vous nous volez<br />

nos enfants», lance, rageur, Constant Lepage,<br />

un agriculteur porte-parole de l'Action des<br />

Patriotes de la Gaspésie, qui refuse la défaite.<br />

À La Martre, à 25 km à l'est de Sainte-Annedes-Monts,<br />

sur la rive nord de la Gaspésie, les<br />

archéologues ont découvert le plus ancien site<br />

de la tradition Piano (tailleurs de pierres) dans<br />

l'est du Canada. Les artefacts trouvés en 1968<br />

ont montré que les paléo-indiens y trouvaient<br />

leur nourriture en abondance, il y a 10000 ou<br />

12 000 ans. La mer était riche en poissons, crustacés<br />

et mollusques. La forêt abondait en petits<br />

fruits, animaux et oiseaux.<br />

Aujourd'hui, La Martre compte à peine<br />

250 habitants, une église à repeindre, un phare<br />

tout rouge, une scierie du Groupe CEDRICO<br />

qui donne un peu d'ouvrage. L'école a fermé. Au<br />

magasin général, la petite boîte grise à côté de<br />

la caisse contient une pile de factures d'épicerie :<br />

les dettes se paieront à la fin du mois, quand arriveront<br />

les chèques de la Sécurité du revenu.<br />

Les habitants, dans l'estuaire et le golfe Saint-<br />

Laurent, ne comptent plus guère sur les pnses que<br />

rapportaient les pêcheurs côtiers. La surpêche a<br />

détruit la morue et la sébaste. Les stocks de pétoncles<br />

s'amenuisent. Crabes, crevettes et homards<br />

tiennent le coup, malgré la surexploitation,<br />

mais la quasi-totalité de la forêt a été rasée par les<br />

géants du papier et du sciage, Bowater, Abitibi-<br />

Consolidated ou Tembec.<br />

En 1987, le ministre Albert Côté a accéléré<br />

le pillage de la forêt publique en accordant leurs<br />

CAFF (droits de coupe) aux groupes GDS, Deniso<br />

Lebel, CEDRICO, Rexforét, tous de l'exténeur<br />

de la Gaspésie. Les propnétaires de la forêt<br />

privée n'ont pas eu le choix de suivre et ont<br />

perdu leurs lots de bois. Fiers, les Gaspésiens détestent<br />

voir cette réalité affichée dans les médias.<br />

Ils n'aiment pas les journalistes. Encore moins<br />

les politiciens. Ils accusent les exploitants de<br />

s'emparer de leurs ressources sans égard pour les<br />

communautés et de les transformer ailleurs.<br />

Devant la Cour internationale<br />

Les 17000 membres de L'Action des Patrio- s<br />

tes de la Gaspésie, révoltés, ont intenté une ~<br />

poursuite de 15 milliards de dollars pour gé- S<br />

nocide économique contre les gouvernements ï<br />

du Québec et du Canada devant la Cour ï<br />

internationale de justice des Nations Unies à 2<br />

Genève. Des exemples pour attiser leur colè- s<br />

re, ils en ont en masse. £<br />

* >.),<br />

• n^^<br />

Pêcheurs de Matane, en Gaspésie.<br />

Image tirée d'une mission photographique<br />

dirigée par la galerie Espace f:<br />

L'an passé, les Gaspésiens ont dépensé<br />

310 MS en achats d'aliments. En 1960, on envoyait<br />

8000 bêtes par année à l'abattoir en Haute-Gaspésie.<br />

Auiourd'hui, 200 tout au plus. Deux<br />

beurrenes produisaient 250000 livres de beurre,<br />

sans parler de la crème et du lait. Aujourd'hui, plus<br />

rien. Trois frigidaires approvisionnaient nos agriculteurs<br />

et nos pécheurs. Tous fermés. On avait<br />

une usine de transformation du poisson à Tourelle,<br />

elle est fermée aussi. » Constant Lepage énumere<br />

sans reprendre son souffle. «Ça nous prend des<br />

micro-entrepnses et des micro-investissements,<br />

une politique de sounen aux entreprises en démarrage<br />

qui ne s'entarge pas dans la bureaucratie.<br />

C'est bien clair, il faut transformer nos ressources<br />

ici, avec les gens d'ici.»<br />

Pionnier du XXI e siècle<br />

Yannick Ouellette est de ces Gaspésiens qui doutent<br />

que l'investissement de 493 M S pour relancer<br />

l'usine à papier Gaspésia à Chandler 1 soit une solution<br />

durable. Ce jeune chef s'est établi une réputation<br />

nationale avec des succès prometteurs dans<br />

la restauration à Québec. Il a malgré tout décidé<br />

de rentrer chez lui, à Sainte-Anne-des-Monts. À<br />

28 ans, il s'est acheté une terre à cultiver et à reboiser<br />

à Tourelle. Il a confié la gestion des lots torestiers<br />

à son père, un ex-mineur de Murdochville. où,<br />

après la mine, la fondene de cuivre vient de fermer.<br />

Dans ses Carnets gourmands de la Gaspésie, Yannick<br />

Ouellette présente la Gaspésie, et 42 de ses producteurs<br />

agricoles, en 50 fiches-recettes. Au menu, caviar<br />

de lompe. loup de mer, baudroie, loquette<br />

d'Amenque, aiguillot commun, concombre de mer.<br />

Auparavant, les pêcheurs Gaspésiens rejetaient toutes<br />

ces espèces à la mer ou les utilisaient comme appât.<br />

Pourtant, •• ce sont des poissons à la chair ferme<br />

et délicieuse, sans arêtes, connus et recherchés par<br />

les Européens, les Mexicains et les Japonais. Il faut<br />

les taire découvnr aux chefs d'ici. Je veux aussi que<br />

les Gaspésiens développent leur goût et reinvestissent<br />

le secteur bio-alimentaire. •• (Imprime à<br />

2 000 exemplaires, le livre de Yannick Ouellette est<br />

un best-seller, à l'échelle de la Gaspésie. Il en reste<br />

200 copies disponibles.)<br />

En collaboration avec le Centre Explorama de<br />

Sainte-Anne-des-Monts, Yannick Ouellette a créé<br />

un laboratoire de recherche culinaire. Il veut ramener<br />

à la mer une nouvelle génération de pêcheurs,<br />

créer un réseau de producteurs de légumes et aider<br />

à la mise en place de transformateurs. «Notre<br />

force, c'est qu'il n'y a rien. Tout est à faire». D<br />

1. En octobre 1999, Abitibi-Consohdated a ferme la Gaspésia,<br />

en activité depuis 1916 a Chandler. Elle rouvrira<br />

en 2004 grâce un investissement de 140 MS du Fonds<br />

de solidarité FTQ (50%) et de Tembec et SGF-Rexfor<br />

(25% chacun), créant 265 emplois.<br />

32 | RECTO VERSO JUILLET/AOÛT 2002<br />

JLU*.<br />

n<br />

JUILLET/AOÛT 2002 RECTO VERSO I 33


RIO + 10<br />

LES PÉRILS DE <strong>LA</strong> MER<br />

La disparition de la morue dans le golfe Saint-Laurent en dit long sur<br />

la biodiversité dans ce bout d'océan, PAR DENISE PROULX<br />

M<br />

algré le moratoire sur la morue, il<br />

y a dix ans, on continue à la pêcher.<br />

C'est une partie du drame de<br />

l'appauvrissement des communautés. On<br />

n'a pas laissé aux espèces le temps de se rétablir",<br />

reconnaît Martin<br />

Castonguay, biologiste marin<br />

à l'Institut Maurice-Lamontagne.<br />

Les pêcheurs rapportent<br />

maintenant des spécimens<br />

dont la taille n'atteint que le<br />

cinquième de ce qu'elle était<br />

en 1974. À Pêches & Océans<br />

Canada, on demeure discret<br />

sur ces données. La dénonciation<br />

de l'industne de la pèche<br />

est une pratique à haut<br />

risque. Le mépris du milieu<br />

et les menaces de disgrâce<br />

sont les meilleurs garants de<br />

l'autocensure et du silence<br />

des chercheurs.<br />

Près de 1 000 espèces de<br />

poissons voyagent dans les eaux canadiennes,<br />

dont 200 en eau douce. Les espèces de<br />

l'Atlantique et du Pacifique pâtissent de la<br />

surpèche. Environnement Canada rapporte<br />

que 49 espèces de poissons sont menacés<br />

d'extinction. Le lac Ené a perdu son brochet<br />

bleu. Dans le lac Supérieur, on a<br />

enregistré le déclin de 13 espèces de truites,<br />

et les trois espèces restantes sont également<br />

en péril. La morue représentait 55%<br />

du total des stocks, en 1963, sur le Banc<br />

Georges, dans l'Atlantique. En 1986, elle ne<br />

comptait plus que pour 11 % des prises.<br />

Sur la côte Pacifique, la surpêche et la<br />

destruction des habitats menacent le saumon,<br />

le flétan et le hareng. L'aquaculture<br />

et les poissons d'élevage échappés en mer<br />

réduisent la diversité biologique. La mer<br />

Arctique, elle, n'est pas affectée par la<br />

surpéche, mais l'est par les contaminants,<br />

les barrages hydroélectriques et la prospection<br />

pétrolière.<br />

À cause de sa population entière peu<br />

nombreuse, la biodiversité dans l'estuaire et<br />

le golfe Saint-Laurent n'est pas lugée catastrophique.<br />

"Comparée au Golfe du<br />

Mexique, â la Mer du Nord et aux mers asiatiques,<br />

la situation est encore bonne », analyse<br />

Emilien Pelletier, éco-toxicologue â<br />

l'Institut des sciences de la mer (ISMER),<br />

â Rimouski, créateur de la Chaire de recherche<br />

du Canada en éco-toxicologie marine.<br />

Premier pollueur: le pétrole<br />

Toutefois, M. Pelletier s'inquiète des<br />

conséquences de la pollution des océans par<br />

cinq contaminants subtils mais très vicieux.<br />

"Le premier grand pollueur des<br />

océans demeure le pétrole perdu ou vidangé<br />

par des armateurs sans scrupules», dénonce-t-il.<br />

Il pointe aussi du doigt la peinture<br />

antisalissure {antifulling point) au<br />

tnbutyl-étain (TBT), un puissant pesticide<br />

appliqué sur la coque de 60% des navires<br />

commerciaux, qui attaque le système immunitaire<br />

des invertébrés. Suit la pollution des<br />

affluents par l'industrie et l'agriculture.<br />

Le chercheur de I'ISMER s'inquiète delà<br />

présence de molécules biomédicales<br />

modifiées, les amphétamines, anovulants<br />

et autres perturbateurs endocriniens. «On<br />

ne sait franchement rien sur les effets de<br />

cette soupe inouïe sur les espèces aquatiques.<br />

En laboratoire, les résultants sont extrêmement<br />

alarmants". Enfin, "on commence<br />

à voir des marées rouges causées par<br />

les nitrates et les pesticides agricoles. On ne<br />

sait touiours rien de l'effet de cinquante ans<br />

d'agriculture industrielle en<br />

amont de l'estuaire.»<br />

Le problème des océans<br />

sera évoqué lors du prochain<br />

Sommet mondial sur le développement<br />

durable, à Johannesburg,<br />

mais loin demère les<br />

autres problèmes reliés à la<br />

- diversité biologique. Les par-<br />

« ticipants aux rencontres pré-<br />

; paratoires de la Convention<br />

S sur la diversité biologique<br />

s (CDB), adoptée en 1992,<br />

^ sont préoccupés d'abord par<br />

I la biodiversité dans les fo-<br />

; rets, par le pillage des ressources<br />

génétiques et l'imposition<br />

de droits de<br />

propriété intellectuelle sur<br />

leur exploitation, par la banalisation des<br />

OGM (organismes génétiquement modifies)<br />

et la bio-sécurité.<br />

Ils ont aussi fort à faire pour éviter que<br />

les règles internationales sur le commerce<br />

et les investissements aient préséance sur<br />

les accords multilatéraux sur l'environnement,<br />

comme le désirent les Etats-LInis et<br />

leurs alliés (dont le Canada) dans tes négociations.<br />

La dernière rencontre des parties à la<br />

Convention, en avril 2002, à La Haye<br />

(Pays-Bas), a montré combien la protection<br />

de la biodiversité s'oppose au type de développement<br />

économique préconisé par<br />

l'OMC (Organisation mondiale du commerce).<br />

La protection des zones côtières<br />

contre la surpêche et la pollution, ainsi que<br />

des modes traditionnels de subsistance essentiels<br />

pour garantir la sécurité alimentaire,<br />

risquent dans ce contexte de passer au<br />

second plan. Tout restera à taire pour l'application<br />

de la Convention des Nations<br />

Unies sur le droit de la mer. G<br />

34 I RECTO VERSO IUIIUT/AOÙT 2 00?


<strong>LA</strong> VIE<br />

EN VERRE<br />

Savez-vous que la SAQ est à l'origine de la collecte<br />

sélective? Papiers, cartons, plastiques... nous<br />

récupérons le maximum de matières. Évidemment,<br />

la récupération et le recyclage du verre sont au cœur<br />

de notre politique environnementale.<br />

La grande majorité des bouteilles de vin et<br />

de spiritueux mises sur le marché sont récupérées<br />

et recyclées! Un engagement d'entreprise et<br />

une performance dont nous sommes fiers. Notre<br />

contribution, mais aussi la vôtre, à la sauvegarde<br />

de nos espaces verts et à l'amélioration<br />

de notre qualité de vie.<br />

Recycler pour protéger<br />

notre environnement.<br />

SAO


• avec g»<br />

licats<br />

FTQ, la plus importante<br />

centrale syndicale<br />

québécoise.<br />

La FTQ compte des<br />

membres dans tous les<br />

secteurs d'activités. C'est<br />

la centrale qui représente<br />

-m 'Il 'h M *11<br />

availleuses synaïquees,<br />

de jeunes syndiqués et de<br />

outes oriaines ethniaues.<br />

La FTQ lutte, avec ses membres, pour de<br />

meilleures conditions de travail et de vie,<br />

pour le maintien et la création d'emplois,<br />

pour de meilleurs services publics, pour<br />

Pourquoi ne pas vous joindre à nous<br />

*<br />

FTQ<br />

Fédération<br />

des travailleurs<br />

et travailleuses<br />

du Québec<br />

www.ftq.qc.ca<br />

RANDE<br />

<strong>LA</strong> PLUSC SYHDICALE<br />

CENTRALE<br />

QUÉBÉCOISE

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