Statistiques judiciaires burundaises

Statistiques judiciaires burundaises
Rendement, délais et typologie des litiges dans les tribunaux de résidence
Dépouillement des données et commentaires:
Dominik Kohlhagen
Relevés des dossiers judiciaires et des rapports d’activité effectués par Raphaël Horumpende,
Elodie Inamahoro, Dominik Kohlhagen, Inna Kohlhagen-Diarra, Adolphe Manirakiza, Thierry
Nahindorera et Normand Ndayiragije, Patrick Ndikumana, Fernand-Dior Remesho et Yvonne
Uwimana
Organisation et supervision des enquêtes assurée par Sylvestre Barancira, Olivier Goureaux,
Dominik Kohlhagen et Patrick Ndikumana

© RCN Justice & Démocratie 2009
Siège social: Avenue Brugmann, 76; B-1190 Bruxelles
info@rcn-ong.be
Programme Burundi: 21, Avenue Muyinga; BP 1340; Bujumbura
Illustration de couverture: Dominik Kohlhagen

Table des matières
Situation géographique des tribunaux recensés ................................................................ 2
Introduction ..................................................................................................................... 3
1. Rendement .................................................................................................................. 5
Taux de litiges (nombre d’affaires civiles sur 100 000 habitants)......................................... 7
Nombre de juges pour 100 000 habitants............................................................................. 8
Affaires jugées par juge et par an (droit civil et pénal) ....................................................... 10
Affaires en attente de jugement au 1 er janvier 2009 .......................................................... 11
Jugements en attente d’exécution au 1 er janvier 2009....................................................... 12
2. Délais..........................................................................................................................13
Délais de jugement.............................................................................................................. 14
Délais d’exécution ............................................................................................................... 15
Délai global entre l’inscription de l’affaire et l’exécution du jugement ............................. 16
3. Genre..........................................................................................................................17
Demandes introduites par des femmes .............................................................................. 18
Demandes introduites contre des femmes......................................................................... 20
Demandes introduites par une femme contre une femme................................................ 21
Proportion de femmes représentées par un avocat........................................................... 22
Proportion d’hommes représentés par un avocat.............................................................. 23
Proportion de justiciables (h+f) représentés par un avocat ............................................... 24
4. Types de litiges............................................................................................................25
Litiges fonciers..................................................................................................................... 26
Litiges portant sur une somme d’argent............................................................................. 28
Divorces ............................................................................................................................... 30
Recherches de paternité ..................................................................................................... 31
Litiges portant sur le paiement de dommages-intérêts...................................................... 32
Litiges portant sur un contrat de location........................................................................... 33
Litiges portant sur une terre de marais............................................................................... 34
Litiges portant sur une terre de paysannat......................................................................... 35
Litiges liés au retour de réfugiés et de déplacés................................................................. 36
Litiges opposant des membres d’une même famille .......................................................... 38
Litiges impliquant un conflit sur du bétail........................................................................... 40
5. Conflits relevant de la coutume ...................................................................................41
Prise en compte des autorités coutumières ....................................................................... 42
Litiges impliquant un problème de succession (héritages)................................................. 44
Conflits portant sur un problème de dot ............................................................................ 46
6. Détails par tribunal......................................................................................................47
Totaux et moyennes générales ......................................................................................150
Comment évaluer le travail de la justice en région rurale? .............................................152

Situation géographique des tribunaux recensés
2

Introduction
3
Cette compilation de statistiques constitue le volet quantitatif d’une recherche sur les
problèmes de fonctionnement de la justice et d’exécution des jugements dans les régions
rurales du Burundi. Elle complète deux études qualitatives publiées en 2008 et en 2009.
En privilégiant une méthode d’approche socio-anthropologique, la première publication,
intitulée "Le tribunal face au terrain", entendait surtout apporter un éclairage théorique sur
les problèmes de distorsion entre les dispositions légales d’une part, les coutumes et les
pratiques sociales d’autre part.
Etendue à quatre régions naturelles supplémentaires, la poursuite du projet de recherche a
abouti, en 2009, à un état des lieux plus concis et exhaustif de la justice en milieu rural. La
publication intitulée "Burundi: La justice en milieu rural" dégage des pistes d’action et de
réflexion concrètes pour l’amélioration de la situation actuelle.
C’est dans ce contexte qu’une équipe d’enquêteurs juristes a visité un ensemble de 51
tribunaux de résidence, soit un peu moins de la moitié des 129 tribunaux existants. Pour la
première fois, dans chacun de ces tribunaux, un relevé complet des dossiers judiciaires a été
effectué sur les deux dernières années d’exercice. Pour la région pilote du Mugamba, la
période étudiée couvre les années 2006 et 2007. Dans les autres tribunaux, la période prise
en compte concerne les affaires inscrites en 2007 et 2008.
Au total, 7899 dossiers ont été recensés. L’ensemble des pièces constitutives a été étudié afin
de permettre le rassemblement du plus grand nombre d’informations. Outre les indications
les plus évidentes (tel que la nature du litige ou le sexe des justiciables) il a ainsi été possible
de relever par exemple l’ensemble des dates renseignées sur les copies d’actes de procédure
(permettant un calcul précis des délais d’instruction et d’exécution), les liens familiaux entre
les parties en litige ou la prise en compte de procès-verbaux émis par des autorités
coutumières.
Pour compléter les analyses de dossier, un relevé complet des rapports d’activité conservés
dans les tribunaux a été effectué sur les années d’exercice 2006 à 2008. Ces rapports
demeurent à ce jour encore sous-exploités et rencontrent de sévères problèmes de
conservation au niveau de l’Inspection Générale de la Justice à Bujumbura. La première
section de ce document démontre pourtant qu’en effectuant des calculs très simples, ils
permettent de renseigner des indicateurs de performance des tribunaux qui n’avaient jamais
été publiés précédemment.
Les tableaux récapitulatifs ne sont accompagnés que d’un minimum de commentaires. La
vérification de certaines informations et la réalisation d’un volet de recherche qualitatif sur la
perception des tribunaux par la population permettront de proposer, au second semestre
2009, une publication complémentaire qui dressera un état des lieux commenté du
fonctionnement des tribunaux dans les régions rurales.
Le bon fonctionnement des tribunaux de résidence dans ces régions constitue un gage
important pour la consolidation durable de la paix au Burundi. Une connaissance approfondie
des réalités auxquelles sont confrontés ces tribunaux se révèle être particulièrement
importante pour mesurer l’impact social et évaluer les besoins actuels des juridictions. La
compilation ci-présente souhaite apporter un éclairage constructif pour le renforcement d’un
système judiciaire socialement reconnu, indépendant et doté de moyens suffisants.

4

1. Rendement
5
A la différence des autres parties de ce recueil, les chiffres publiés dans cette première
section ne reposent pas sur l’étude des dossiers judiciaires, mais sur les rapports d’activité
établis par les tribunaux. Dans le cadre du contrôle administratif prévu par le statut de
l’Inspection Générale de la Justice, l’ensemble des juridictions burundaises est tenu d’établir
mensuellement de tels rapports et d’en effectuer une synthèse annuelle. Outre le nombre
d’affaires en litige et en attente d’exécution, les rapports donnent des indications précises sur
les affaires inscrites, jugées et exécutées pendant la période d’exercice ainsi que sur le
personnel affecté au tribunal 1 .
Pour certains tribunaux, les données reposent sur les rapports mensuels de 2008 disponibles
au moment des premiers relevés dans les tribunaux entre octobre et décembre 2008. Pour la
plupart cependant, la synthèse annuelle de 2008 a pu être utilisée. Le calcul des moyennes
mensuelles ou annuelles a systématiquement été effectué au prorata.
De manière générale, les données reproduites dans cette première section doivent être
considérées comme des indicateurs approximatifs. En effet, la vérification des registres et
des dossiers judiciaires dans le cadre du projet de recherche a mis en évidence des erreurs
dans de nombreux rapports d’activités. Très généralement, les chiffres recensés sont
légèrement surévalués. A défaut de données exhaustives plus fiables sur le rendement des
tribunaux, il a néanmoins semblé pertinent de se référer à ces données officielles.
Le nombre d’habitants dans le ressort de chaque tribunal a été évalué à partir des résultats
préliminaires du troisième recensement général de la population et de l’habitation du
Burundi de 2008 2 . Dans les communes disposant de deux tribunaux de résidence (Matongo
avec le TR de Banga et Rusaka avec le TR de Makamba), le nombre d’habitants de la
commune a été divisé par deux afin de permettre un calcul approximatif pour chaque tribunal
concerné.
Le taux de litiges – c’est-à-dire le nombre d’affaires inscrites en première instance par
100 000 habitants – est en moyenne de 249. Ce taux, très bas lorsqu’il est comparé avec celui
de pays industrialisés, a cependant augmenté de plus de 25 % au cours des deux dernières
années. Il s’élevait à 196 en 2006 et à 218 en 2007. La croissance s’observe dans quasiment
tous les tribunaux. Sur le tableau reproduit, les disparités entre les tribunaux s’expliquent en
partie par la paralysie temporaire de certaines juridictions occasionnée par des manques
d’effectifs. La plupart des tribunaux renseignant un taux inférieur à 200 a ainsi subi des
difficultés à réunir le siège (3 juges) pendant une période déterminée. L’activité du tribunal de
Buhinyuza, quant à elle, avait été perturbée en raison de l’incarcération du juge-président.
Enfin, les taux exceptionnellement élevés des tribunaux de Bukirasazi (province de Gitega) et
de Matongo (province de Kayanza) nécessiteraient des investigations plus approfondies; ils
sont constants depuis 2006.
1 Le contenu des rapports est précisé à l’article 53 de l’ordonnance ministérielle n° 550/101/90 du 10 mars 1990
portant règlement d’ordre intérieur des juridictions du Burundi. Les rapports sont très généralement disponibles
dans les tribunaux concernés. Ils doivent également être transmis en copie au TGI et à l’Inspection Générale de
la Justice qui rencontrent cependant d’importants problèmes d’archivage.
2 Annexés au décret n° 100/11 du 16 janvier 2009.

Le nombre de juges pour 100 000 habitants s’élève en moyenne à 8,0. Cette densité connaît
cependant des variations régionales très importantes qui ont été représentées sur une carte.
Le nombre d’affaires jugées par juge et par an est en moyenne de 24,9 (droits civil et pénal
confondus). Ce calcul repose sur une simple division du nombre de jugements par le nombre
de juges affectés au tribunal. Les jugements étant généralement rendus par des formations
collégiales de trois juges, les chiffres recensés devraient être approximativement multipliés
par trois s’il s’agissait de déterminer l’activité individuelle de chaque juge. Le nombre de
jugements rendus reste nettement en dessous du nombre d’affaires inscrites qui s’élève en
moyenne à 35,1 par juge. Les variations entre les tribunaux sont considérables.
Les dossiers en attente de jugement sont en moyenne au nombre de 212 dans chaque
tribunal, alors que les tribunaux ne rendent en moyenne que 131 jugements par an, droits
civil et pénal confondus. Les variations sont importantes entre les différents tribunaux.
Les jugements exécutés au cours d’une année civile sont en moyenne de 10,8 par juge 3 et de
56,8 par tribunal. Au vu des très fortes disparités entre les différents rapports d’activité, le
nombre d’exécutions effectuées n’a cependant pas été jugé assez fiable pour pouvoir être
reproduit dans un tableau de synthèse. Il convient de se référer aux récapitulatifs individuels
pour chaque tribunal dans la section 6. Concernant ces chiffres, il est à noter qu’un grand
nombre de tribunaux a recensé des exécutions de jugements pénaux, alors que la
compétence en la matière incombe au Ministère Public. Lorsque cette anomalie s’est
produite, les chiffres se rapportant au droit civil et au droit pénal ont été additionnés.
Les jugements en attente d’exécution sont en moyenne au nombre de 206 dans chaque
tribunal. Les chiffres reproduits doivent cependant être analysés avec beaucoup de réserves
car ils sont généralement fortement surévalués. Une fois de plus, pour certains tribunaux, ils
incluent des jugements pénaux. Par ailleurs, il importe de souligner que les tribunaux ne
disposent pas, actuellement, de moyens suffisants pour vérifier quels jugements sont
véritablement exécutoires: les jugements frappés d’appel ou ayant connu une exécution
volontaire sont ainsi régulièrement comptabilisés à tort.
6
3 Dans les tribunaux de résidence en région rurale, ce sont principalement les juges qui exécutent les jugements.
Par ailleurs, il n’existe pas d’huissiers. Cf. RCN Justice & Démocratie, Le Tribunal face au Terrain, Bujumbura
2007.

Taux de litiges (nombre d’affaires civiles sur 100 000 habitants)
7

Nombre de juges pour 100 000 habitants
8

Nombre de juges pour 100 000 habitants
9

Affaires jugées par juge et par an (droit civil et pénal)
10

Affaires en attente de jugement au 1 er janvier 2009
11

Jugements en attente d’exécution au 1 er janvier 2009
12

2. Délais
13
Effectué à partir des dates renseignées sur et dans les dossiers judiciaires, le calcul des
moyennes des délais de jugement et d’exécution restitué dans cette partie permet pour la
première fois d’avancer des données fiables et exhaustives concernant la rapidité des
tribunaux de résidence. Ces chiffres contredisent très nettement l’appréciation assez
largement partagée selon laquelle l’ensemble des tribunaux burundais se heurterait à des
problèmes de lenteur. Si cette appréciation peut se révéler être correcte dans d’autres
tribunaux (notamment dans les juridictions supérieures), elle ne concerne pas, en tout état de
cause, les tribunaux étudiés.
Le délai de jugement – c'est-à-dire le temps entre l’inscription de l’affaire et le jour du
jugement définitif – est en moyenne de 5,1 mois (154 jours).
Le délai d’exécution – c'est-à-dire le temps écoulé entre le jour du jugement et celui de son
exécution définitive – est en moyenne de 4,2 mois (127 jours). Ce chiffre doit cependant être
nuancé car pour l’écrasante majorité des affaires jugées (94,8 %), les dossiers concernés ne
mentionnent pas de date d’exécution 4 . A défaut de données, le calcul repose donc sur une
sélection restreinte de 411 dossiers seulement.
Le délai global entre l’inscription de l’affaire et l’exécution du jugement rendu reproduit
dans le troisième tableau correspond à une simple addition du délai de jugement et du délai
d’exécution moyens.
4 Cette situation ne signifie cependant pas que tous les jugements concernés n’ont pas été exécutés. Pour
beaucoup de tribunaux, il s’agit plutôt d’un manque de rigueur concernant le classement des PVs d’exécution
et/ou l’inscription de la date d’exécution sur le dossier concerné.

Délais de jugement
14

Délais d’exécution
15

Délai global entre l’inscription de l’affaire et l’exécution du jugement
16

3. Genre
17
Les données reproduites dans cette partie concernent principalement l’accès à la justice des
femmes. Il aurait pu sembler intéressant de renseigner d’autres données permettant par
exemple de constater des différences dans les délais de traitement des dossiers ou la
typologie des litiges selon les sexes. Les recoupements effectués n’ont cependant pas permis
de constater des différences significatives. Concernant les taux de recours aux tribunaux par
contre, les différences entre les sexes sont parfois considérables.
Les demandes introduites par des femmes sont généralement moins nombreuses que les
procès intentés par des hommes. Au total, elles représentent 35,7 % des dossiers, mais les
variations régionales sont importantes. Alors que dans l’ensemble des tribunaux de la région
du Mugamba, la proportion de femmes reste en-dessous du tiers, elle dépasse les 50 % dans
deux tribunaux situés au Kirimiro voisin. Globalement, ces chiffres relativement élevés
semblent indiquer une certaine facilité d’accès au droit et à la justice pour les femmes.
Les demandes introduites contre des femmes – c’est-à-dire les procès intentés contre des
femmes par un homme ou par une autre femme – ne représentent au total que 2,0 % des
dossiers. Dans la plupart des tribunaux du Mugamba, ce type de procès est même tout
simplement inexistant. Ces chiffres exceptionnellement bas sont quelque peu difficiles à
interpréter. Comment comprendre que les femmes intentent un grand nombre de procès
mais n’en sont presque jamais la cible? Vraisemblablement, les raisons sont avant tout
culturelles.
Les demandes introduites par une femme contre une femme – c’est-à-dire les litiges
opposant deux femmes devant un tribunal – représentent 1,0 %.
La proportion de femmes représentées par un avocat s’élève à 2,7 %. Bénéficiant localement
du soutien d’associations, elles sont généralement plus nombreuses que les hommes à
bénéficier des services d’un avocat. En particulier dans la province de Muyinga (région du
Bweru), cela explique des taux relativement élevés.
La proportion d’hommes représentés par un avocat, à titre de comparaison, s’élève à 0,6 %.
La moyenne générale (hommes et femmes) est de 1,0 %.

Demandes introduites par des femmes
18

Demandes introduites par des femmes
19

Demandes introduites contre des femmes
20

Demandes introduites par une femme contre une femme
21

Proportion de femmes représentées par un avocat
22

Proportion d’hommes représentés par un avocat
23

Proportion de justiciables (h+f) représentés par un avocat
24

4. Types de litiges
25
La typologie de conflits proposée ici n’est d’évidence pas exhaustive, mais tient compte des
principales spécificités des régions étudiées. Certaines informations recensées n’ont aucune
incidence juridique, mais reposent sur une appréciation des dossiers par les enquêteurs. En
particulier les éléments caractérisant les justiciables (membres de même famille, rapatriés)
n’ont pu être renseignés que si des informations suffisantes figuraient dans les dossiers. Entre
les différents types de litige identifiés, les recoupements sont fréquents.
Les litiges fonciers représentent en moyenne 71,9 %. A l’exception de la commune de Kabezi
qui connaît un grand nombre de terres enregistrées (ce qui exclut la compétence du TR), ce
type de litige est majoritaire dans l’ensemble des tribunaux.
Les litiges portant sur une somme d’argent constituent 20,6 % des affaires portées devant les
tribunaux. Dans la plupart des tribunaux du Mugamba, ils représentent moins d’un dixième
des affaires, alors qu’ils sont majoritaires dans la commune périurbaine de Kabezi. Les
variations très fortes donnent un aperçu intéressant du caractère variable des besoins en
huissiers dans les tribunaux de résidence. En effet, en droit burundais, c’est uniquement ce
type de litige qui nécessite l’intervention d’un huissier au moment de l’exécution. Les
jugements fonciers sont exécutés par les juges assistés d’un greffier.
Les divorces représentent 4,2 % des affaires recensées. Ce sont surtout les communes du
Nord où ce taux est plus élevé. Sur l’ensemble des tribunaux, il s’agit à 52,1 % de demandes
introduites par des femmes. Les recherches de paternité correspondent à 2,5 % des dossiers.
Elles se concentrent surtout sur la province de Gitega.
Les litiges portant sur le paiement de dommages-intérêts s’élèvent en moyenne à 12,4 %. Ils
ont également été inclus dans les litiges portant sur une somme d’argent. Les litiges portant
sur un contrat de location immobilière représentent 1,3 %.
Les litiges portant sur une terre de marais représentent 4,1 %, alors que le statut juridique
des marais est actuellement encore ambigu. Selon les caractéristiques naturelles de la
commune, ce chiffre atteint parfois près de 15 %. Les litiges portant sur une terre de
paysannat ne concernent que certaines communes, mais peuvent y atteindre une proportion
remarquable. A Gihanga, c’est ainsi un litige sur cinq qui porte sur ce type de terre.
Les litiges liés au retour de réfugiés et de déplacés représentent 3,8 % des dossiers, tout en
connaissant des variations régionales très importantes. Il convient de rappeler que sur la
période d’exercice étudiée, ce type de conflit pouvait également être soumis à la CNTB,
réduisant ainsi le nombre d’affaires portées devant les tribunaux.
Les litiges opposant des membres d’une même famille correspondent à 42,4 %. Les cas de
divorce ont également été inclus dans ce chiffre. Même des liens de famille distants ont été
pris en compte lorsque des précisions correspondantes se trouvaient dans le dossier.
Les litiges impliquant un conflit sur du bétail concernent 5,9 % des dossiers et sont plus
élevées dans les régions traditionnelles d’élevage que dans les plaines de l’Imbo ou du
Kumoso.

Litiges fonciers
26

Litiges fonciers
27

Litiges portant sur une somme d’argent
28

Litiges portant sur une somme d’argent
29

Divorces
30

Recherches de paternité
31

Litiges portant sur le paiement de dommages-intérêts
32

Litiges portant sur un contrat de location
33

Litiges portant sur une terre de marais
34

Litiges portant sur une terre de paysannat
35

Litiges liés au retour de réfugiés et de déplacés
36

Litiges liés au retour de réfugiés et de déplacés
37

Litiges opposant des membres d’une même famille
38

Litiges opposant des membres d’une même famille
39

Litiges impliquant un conflit sur du bétail
40

5. Conflits relevant de la coutume
41
De facto, la grande majorité des conflits soumis aux tribunaux est régie par "la coutume". Le
code foncier actuel énonce en effet qu’à défaut d’enregistrement, la plupart des terres
répond à des "droits privatifs exercés en vertu de la coutume". Cette situation concerne la
très grande majorité des conflits fonciers qui représentent à eux seuls 71,9 % des affaires
dont connaissent les tribunaux de résidence (cf. section précédente). Il importe de souligner
cette situation, car la formation des magistrats et l’appréciation du travail des juges –
centrées sur les règles du droit écrit – sont toujours en décalage avec cette réalité.
A défaut de formation adéquate, les juges trouvent actuellement des moyens propres pour
répondre à ce déficit de compétence. A cet égard, un indicateur intéressant est la
conservation des procès-verbaux émis par des autorités coutumières dans les dossiers
judiciaires. Malgré la suppression, en 2005, de l’obligation de produire un procès-verbal des
Bashingantahe lors de l’inscription d’une affaire foncière, de nombreux tribunaux continuent
à verser une telle pièce dans les dossiers. Dans certains tribunaux, l’importance des procèsverbaux
est telle qu’elle laisse supposer que les tribunaux les exigent systématiquement. En
moyenne, ils se trouvent dans 17,0 % des dossiers. S’y ajoutent 3,0 % de dossiers contenant
un procès-verbal du Conseil de Famille, une pièce obligatoire en cas de divorce mais qui se
trouve également dans des dossiers se rapportant à des problèmes de dot ou à des conflits
fonciers familiaux.
Les litiges impliquant un problème de succession représentent par ailleurs 26,0 %. Ils
constituent un autre indicateur pour l’importance des règles coutumières dans les tribunaux
car il s’agit également d’un domaine non réglé par la loi.
Les conflits portant sur un problème de dot couvrent 0,5 % des dossiers, mais atteignent
parfois près de 5 %. Il convient de rappeler que le droit écrit ne reconnaît pas la dot.
Une donnée intéressante mais omise lors des recensements porterait sur les conflits liés à la
polygamie. Ce phénomène, non reconnu en droit officiel, concerne plus particulièrement le
Nord de l’Imbo et du Mugamba ainsi que le Bweru et le Kumoso qui sont les régions aux taux
de divorce les plus élevés. Il est à supposer que la polygamie y motive également de
nombreux litiges fonciers introduits par des femmes.

Prise en compte des autorités coutumières
42

Prise en compte des autorités coutumières
43

Litiges impliquant un problème de succession (héritages)
44

Litiges impliquant un problème de succession (héritages)
45

Conflits portant sur un problème de dot
46

6. Détails par tribunal
47
Les prochaines pages détaillent, tribunal par tribunal, les données recueillies. Elles sont
suivies, à la fin, d’un récapitulatif des totaux et moyennes générales.
Les tribunaux sont classés par ordre alphabétique. Le regroupement ci-dessous permet de les
situer par provinces:
Bubanza: Gihanga et Mpanda
Bujumbura-Rural: Ijenda, Kabezi, Mukike et Mutimbuzi
Bururi: Mugamba et Rumonge
Cankuzo: Cendajuru et Gisagara
Cibitoke: Buganda et Cibitoke
Gitega: Bugendana, Bukirasazi, Buraza, Giheta, Gishubi, Gitega, Itaba, Maramvya, Mutaho et
Nyarusange
Karusi: Buhiga et Gitaramuka
Kayanza: Banga, Kabarore, Matongo et Muruta
Makamba: Kayogoro, Kibago et Nyanza-Lac
Muramvya: Bukeye, Mbuye, Muramvya et Rutegama
Muyinga: Buhinyuza, Butihinda, Gashoho, Gasorwe, Giteranyi, Muyinga et Mwakiro
Mwaro: Gisozi, Kayokwe, Makamba, Nyabihanga et Rusaka
Rutana: Bukemba et Giharo
Ruyigi: Gisuru et Kinyinya

Banga (commune de Matongo)
Délais et rendement
48

Banga (commune de Matongo)
Typologie des litiges
49

Buganda
Délais et rendement
50

Buganda
Typologie des litiges
51

Bugendana
Délais et rendement
52

Bugendana
Typologie des litiges
53

Buhiga
Délais et rendement
54

Buhiga
Typologie des litiges
55

Buhinyuza
Délais et rendement
56

Buhinyuza
Typologie des litiges
57

Bukemba
Délais et rendement
58

Bukemba
Typologie des litiges
59

Bukeye
Délais et rendement
60

Bukeye
Typologie des litiges
61

Bukirasazi
Délais et rendement
62

Bukirasazi
Typologie des litiges
63

Buraza
Délais et rendement
64

Buraza
Typologie des litiges
65

Butihinda
Délais et rendement
66

Butihinda
Typologie des litiges
67

Cendajuru
Délais et rendement
68

Cendajuru
Typologie des litiges
69

Cibitoke
Délais et rendement
70

Cibitoke
Typologie des litiges
71

Gashoho
Délais et rendement
72

Gashoho
Typologie des litiges
73

Gasorwe
Délais et rendement
74

Gasorwe
Typologie des litiges
75

Gihanga
Délais et rendement
76

Gihanga
Typologie des litiges
77

Giharo
Délais et rendement
78

Giharo
Typologie des litiges
79

Giheta
Délais et rendement
80

Giheta
Typologie des litiges
81

Gisagara
Délais et rendement
82

Gisagara
Typologie des litiges
83

Gishubi
Délais et rendement
84

Gishubi
Typologie des litiges
85

Gisozi
Délais et rendement
86

Gisozi
Typologie des litiges
87

Gisuru
Délais et rendement
88

Gisuru
Typologie des litiges
89

Gitaramuka
Délais et rendement
90

Gitaramuka
Typologie des litiges
91

Gitega
Délais et rendement
92

Gitega
Typologie des litiges
93

Giteranyi
Délais et rendement
94

Giteranyi
Typologie des litiges
95

Ijenda
Délais et rendement
96

Ijenda
Typologie des litiges
97

Itaba
Délais et rendement
98

Itaba
Typologie des litiges
99

Kabarore
Délais et rendement
100

Kabarore
Typologie des litiges
101

Kabezi
Délais et rendement
102

Kabezi
Typologie des litiges
103

Kayogoro
Délais et rendement
104

Kayogoro
Typologie des litiges
105

Kayokwe
Délais et rendement
106

Kayokwe
Typologie des litiges
107

Kibago
Délais et rendement
108

Kibago
Typologie des litiges
109

Kinyinya
Délais et rendement
110

Kinyinya
Typologie des litiges
111

Makamba (commune de Rusaka)
Délais et rendement
112

Makamba (commune de Rusaka)
Typologie des litiges
113

Maramvya
Délais et rendement
114

Maramvya
Typologie des litiges
115

Matongo
Délais et rendement
116

Matongo
Typologie des litiges
117

Mbuye
Délais et rendement
118

Mbuye
Typologie des litiges
119

Mpanda
Délais et rendement
120

Mpanda
Typologie des litiges
121

Mugamba
Délais et rendement
122

Mugamba
Typologie des litiges
123

Mukike
Délais et rendement
124

Mukike
Typologie des litiges
125

Muramvya
Délais et rendement
126

Muramvya
Typologie des litiges
127

Muruta
Délais et rendement
128

Muruta
Typologie des litiges
129

Mutaho
Délais et rendement
130

Mutaho
Typologie des litiges
131

Mutimbuzi
Délais et rendement
132

Mutimbuzi
Typologie des litiges
133

Muyinga
Délais et rendement
134

Muyinga
Typologie des litiges
135

Mwakiro
Délais et rendement
136

Mwakiro
Typologie des litiges
137

Nyabihanga
Délais et rendement
138

Nyabihanga
Typologie des litiges
139

Nyanza-Lac
Délais et rendement
140

Nyanza-Lac
Typologie des litiges
141

Nyarusange
Délais et rendement
142

Nyarusange
Typologie des litiges
143

Rumonge
Délais et rendement
144

Rumonge
Typologie des litiges
145

Rusaka
Délais et rendement
146

Rusaka
Typologie des litiges
147

Rutegama
Délais et rendement
148

Rutegama
Typologie des litiges
149

Totaux et moyennes générales
Délais et rendement
150

Totaux et moyennes générales
Typologie des litiges
151

Comment évaluer le travail de la justice en région rurale?
152
Après plus de 10 ans de guerre civile, la justice burundaise s'est engagée dans un important
processus de reconstruction. Dans ce contexte, les apports étrangers sont actuellement
nombreux, aussi bien sur le plan de l'expertise que sur le plan financier. A la suite de la
Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide entérinée en 2005, cet engagement soulève un
certain nombre de questions. Comment déterminer l'impact des efforts de reconstruction
actuels? Comment s'enquérir du bien-fondé des soutiens étrangers? Comment savoir, dans
l'avenir, si la justice "va mieux"?
Les réponses à ces questions sont loin d'être simples. Si, au vu des problèmes généraux
identifiés aujourd'hui, certaines données méritaient d'être renseignées dans ce recueil, leur
pertinence ne sera peut-être plus la même si le contexte général change ou évolue.
Dans le contexte de la justice, les notions d'efficacité et de performance sont non seulement
subjectives, elles sont, dans une large mesure, même dépourvues de bon sens. Comment
mesurer si un jugement est "bien" rendu? Comment savoir si la justice est véritablement au
service de la population? Où, comment et quand l'évaluer? Tout particulièrement au Burundi,
il existe de nombreux exemples de jugements inéquitables dont les conséquences véritables
n'ont pu être constatées qu'après des décennies. Parfois, de tels jugements ont fini par
devenir le mobile d'un massacre. Quelle évaluation saura prendre en compte de telles
conséquences catastrophiques?
Malgré ces problèmes, il s'est développé, au cours des dernières années, une littérature
scientifique dédiée aux outils d'évaluation des institutions judiciaires dans les pays du Sud. Les
publications proposent et discutent, dans une perspective opérationnelle, différents
indicateurs tout en soulignant leur interdépendance et leurs limites respectives. Associant des
universités de renom, financés par la Banque Mondiale et différents organismes onusiens et
anglo-saxons, ces travaux pourraient, à l'avenir, influencer la manière d'apprécier le travail
des institutions judiciaires dans le monde du développement.
D'un point de vue scientifique, il est intéressant de constater le caractère étonnamment
autoréférentiel des publications en question. Le lecteur qui suit la chaîne des renvois
cycliques constate rapidement qu'elle court-circuite avant tout la remise en question du
postulat initial: celui du bien-fondé d'une réflexion sur des indicateurs. De manière
révélatrice, dans une des études, l'existence de la principale science s'intéressant aux droits
des pays du Sud est balayée d'un coup de main. Ainsi, le début de la réflexion sur le
pluralisme juridique est attribué à quelques conférences tenues au cours des années 2000 5 ,
alors que cette question est abordée par l'anthropologie juridique depuis des décennies. Il va
de soi que les conférences citées, financées ou animées par les mêmes organismes qui
poussent la réflexion actuelle, s'intègrent parfaitement à la boucle bibliographique.
A défaut de prendre en compte une méthodologie comme celle qui caractérise le programme
de recherche de RCN Justice & Démocratie, la littérature se rapportant aux indicateurs arrive
à des conclusions très différentes. Même le travail des "institutions non-étatiques" (comme
les bashingatahe) y est considéré comme quantifiable, on y recommande par ailleurs
5 Vera Institute of Justice, 2003, Measuring Progress toward Safety and Justice: A Global Guide to the Design of
Performance Indicators across the Justice Sector, New York, Vera Institute of Justice, 73 p., p. 66: "Not much is
known about this world of non-state institutions. Researchers and governments are only beginning to collect
ethnographic and other evidence about how they operate, whom they serve, and how they interact with state
institutions". Par la suite, une note de bas de page renvoie à des papiers préparés pour des conférences.

l'utilisation de l'écrit; du côté des tribunaux, les outils d'appréciation ne prennent nullement
en compte d'éventuelles spécificités locales et culturelles 6 .
Bref, c'est avec beaucoup de réserves que sont néanmoins avancées ici quelques pistes pour
permettre aux acteurs du développement d'élaborer un système de monitoring et
d'évaluation pour la justice institutionnelle. Le tableau reproduit ci-apzès avait été diffusé
sous la même forme en février 2009 et a donc déjà connu des corrections, ajouts et
ajustements de la part des acteurs concernés. L'essentiel de ce que doit réussir à produire la
justice burundaise ne pourra cependant jamais y être intégré: une contribution utile à la
réconciliation et à une paix durable dans le pays.
153
6 Voir, par exemple, ce même document (Vera Institute of Justice 2003).

154

155

156