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Démocratie

extrait du bulletin n°25 - RCN Justice & Démocratie

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Burundi<br />

atelier sur les relations compromettantes entre élèves et<br />

enseignants. S’agissant des violences sexuelles, les participants<br />

employaient successivement et pour le même type<br />

de faits, les termes de « viol », « détournement d’une<br />

jeune fille dans sa chambre », « consommation d’un acte<br />

sexuel », « harcèlement sexuel », « engrosser une fille ».<br />

Le code pénal en vigueur traite de l’attentat à la pudeur<br />

et du viol, sans préciser les éléments matériels de<br />

ces infractions ni les limites. Actuellement, seule la jurisprudence<br />

permet de décider s’il y a eu viol ou non, la<br />

charge de la preuve revenant souvent à l’expertise médicale.<br />

qui leur est arrivé pour échapper à cette stigmatisation.<br />

Dans une société où, jusque récemment « le linge sale<br />

se lavait en famille », il paraît difficile que des faits considérés<br />

comme « honteux » soient portés devant des personnes<br />

étrangères à la famille (« abantu bo hanze »).<br />

De même, dans les mentalités des Burundais, si quelqu’un<br />

porte plainte ou dénonce une infraction à la justice<br />

(même s’il s’agit d’un chef), la tendance est de dire<br />

« c’est lui qui est responsable de son emprisonnement<br />

» (« urya niwe yamupfungishije »), sous-entendant<br />

qu’il pourrait le faire libérer selon son bon vouloir. La<br />

Le nouveau projet de code pénal apporte heureusement<br />

une définition légale et précise du<br />

viol.<br />

La répression du crime de viol au Burundi :<br />

une brève présentation d’une expérience<br />

des SAB (3)<br />

Dénonciation timide du crime<br />

due aux usages et tabous sociaux<br />

Pour réprimer une infraction, il est impératif<br />

qu’elle soit connue et dénoncée. De plus, toute<br />

la société doit avoir conscience qu’elle est témoin<br />

d’une transgression dangereuse. Si le Ministère<br />

public est là pour représenter la société<br />

et plaider pour elle, il a besoin du concours de la<br />

victime et de ses proches, des administratifs, des<br />

associations de défense des droits de la personne<br />

humaine, qui doivent dénoncer et faire<br />

connaître le crime.<br />

Or, dans les cas de viol, les victimes ont souvent<br />

peur de dénoncer leurs agresseurs.<br />

En effet, les personnes victimes de viol sont<br />

stigmatisées et cachent, elles aussi, les faits dont<br />

elles sont victimes. Pour la victime et sa famille,<br />

il s’agit d’une « honte ». Pour une jeune fille<br />

violée, la publicité génère un « handicap »,<br />

c’est-à-dire le risque de ne plus trouver un mari<br />

ou difficilement, lorsqu’elle ose en parler. Pour<br />

une femme mariée, il s’agit souvent « d’une<br />

cause de divorce », le mari se sentant trahi. La<br />

société burundaise a tendance à stigmatiser la<br />

victime plutôt que condamner l’auteur. C’est une seconde<br />

victimisation qui renforce les souffrances de la<br />

personne violée. Les gens ont tendance à dire : « Qu’estce<br />

qu’elle faisait à cette heure dans cet endroit… »,<br />

« C’est parce qu’elle a été attrapée en fragrant délit<br />

qu’elle imagine cette astuce de crier au viol… ». C’est<br />

une façon de dire que le violeur et sa victime se seraient<br />

entendus.<br />

Les parents eux-mêmes aident leurs enfants à cacher ce<br />

Photo : Audrey Pallier<br />

« Toyi-Toyi mama 4 » Toos Van Liere<br />

famille du violeur et celle de la personne violée deviennent<br />

alors des ennemis jurés.<br />

Les Officiers de Police Judiciaire (OPJ) et les Officiers du<br />

Ministère Public (OMP) nous ont rapporté qu’ils reçoivent<br />

maintes fois, en cours d’instruction, des victimes ou<br />

leurs familles venant leur dire : « Vous pouvez libérer le<br />

coupable présumé maintenant, nous nous sommes entendues…<br />

». Si l’OPJ ou l’OMP refusent d’obtempérer et<br />

continuent les poursuites, les familles contestent en pré-

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