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Démocratie

extrait du bulletin n°25 - RCN Justice & Démocratie

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Aux vues de la législation sur le viol et du nombre croissant de victimes enregistrées, Olivier NIYO-<br />

NIZIGIYE, Chargé d’actions-Projet « Appui à la société civile » et Sylvestre BARANCIRA, Coordonnateur<br />

de programme, nous offre une réflexion sur la problématique de la répression du crime de<br />

viol au Burundi.<br />

Le viol, transaction sociale ou répression judiciaire ?<br />

Depuis la crise de 1993, le Burundi, comme d’autres<br />

pays de la région, a connu une guerre aux multiples<br />

conséquences sur la vie des populations. La presse, tant<br />

écrite que parlée, ne manque de décrier les viols commis<br />

notamment par des hommes en armes. Les associations<br />

de défense des droits humains haussent le ton et crient<br />

au scandale devant l’impunité des auteurs de viol.<br />

Selon la Ligue Burundaise des Droits de l’Homme Iteka<br />

(1), 2089 cas de viol ont été enregistrés dont 1435 au Centre<br />

Seruka. 75% des victimes de ce Centre, c’est-à-dire<br />

1076 personnes, ont été recensés rien qu’à Bujumbura en<br />

2007. Les mineurs âgés de moins de 18 ans seraient la<br />

cible principale des auteurs de viol, y compris dans un<br />

contexte familial ou de voisinage. Les victimes semblent<br />

enfin être sorties de leur mutisme, ce qui expliquerait<br />

aussi, en partie, le gonflement progressif des chiffres.<br />

Elles auraient de plus en plus tendance à se confier aux<br />

structures de prise en charge et à la communauté, décidées<br />

à briser le silence et à éradiquer ce mal qui s’est<br />

enraciné au cours des années.<br />

L’évolution du phénomène de viol<br />

de 2003 à 2007<br />

Année 2003 2004 2005 2006 2007<br />

Total 983 1675 1791 1930 2089<br />

Les chiffres renseignés ici ne constitueraient qu’une<br />

infime partie des cas de viol réellement commis, la<br />

grande majorité demeurant inconnue.<br />

Selon les témoignages recueillis lors des séminaires des<br />

autorités de base, que nous venons d’organiser cette<br />

année à l’échelle nationale (10 séminaires) et dans les<br />

différentes régions naturelles, tous les participants s’accordent<br />

à dire que le crime de viol n’est pas véritablement<br />

réprimé au Burundi. Cette impunité trouverait sa<br />

cause dans divers phénomènes tels que la réticence à<br />

dénoncer le viol suite aux tabous sociaux, au passage<br />

difficile de la justice classique transactionnelle à la justice<br />

pénale moderne, la fuite des criminels vers les pays voisins,<br />

le dysfonctionnement et moyens réduits de la police<br />

et de l’appareil judiciaire…<br />

De nombreux acteurs nationaux et internationaux mettent<br />

en œuvre des projets dans divers domaines pour<br />

faciliter la lutte contre ces infractions et assister les victimes.<br />

Nous citerons en particulier les campagnes de sensibilisation<br />

sur les violences sexuelles (CARE, ASF, OHCDH),<br />

le transport des parties au procès (APRODH, Ligue Iteka,<br />

ABDP), l’assistance judiciaire et/ou le paiement des frais<br />

de justice (ASF, AFJ, APRODH, Ligue Iteka), l’assistance<br />

médicale, l’accompagnement psychologique (MSF, TPO)<br />

et la formation des acteurs judiciaires (ASF, AFJ, UNI-<br />

FEM).<br />

Que dit le code pénal burundais ?<br />

Bien que la définition du viol demeure imprécise, l’infraction<br />

est prévue et réprimée par le code pénal burundais<br />

en ses articles 385 à 387 (2) :<br />

« Est puni d’une servitude pénale de cinq à vingt ans,<br />

celui qui aura commis un viol, soit à l’aide de violences<br />

ou menaces graves, soit par ruse, soit en abusant d’une<br />

personne qui, par l’effet d’une maladie, par l’altération<br />

de ses facultés ou par toute autre cause accidentelle,<br />

aurait perdu l’usage de ses sens ou en aurait été privée<br />

par quelque artifice » (art 385).<br />

« Tout attentat à la pudeur commis sans violences,<br />

ruse ou menaces sur la personne ou à l’aide de la personne<br />

d’un enfant âgé ou apparemment âgé de moins<br />

de dix-huit ans, sera puni d’une servitude pénale de cinq<br />

à quinze ans. L’âge de l’enfant pourra être déterminé<br />

notamment par examen médical, à défaut d’état civil<br />

» (art 382).<br />

« L’attentat à la pudeur commis avec violences, ruse ou<br />

menaces sur des personnes de l’un ou de l’autre sexe sera<br />

puni d’une servitude pénale de six mois à cinq ans » (art<br />

383).<br />

Le code énumère également toute une panoplie de<br />

circonstances aggravantes à l’article 387.<br />

L’identification et la qualification des crimes touchant à<br />

la sexualité sont complexes. En effet, culturellement, il<br />

est difficile de décrire les pratiques sexuelles. En juin<br />

2008, une de nos organisations partenaires a organisé un

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