OCIO Y OCIOS DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLES)
ESPAGNE XVIIIe â XXe SIÃCLES - CREC ESPAGNE XVIIIe â XXe SIÃCLES - CREC
Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporaine365estos entretenimientos instruido en los puntos más esenciales de todo género dematerias, especialmente en las Físicas, que para poner la primera mano en esta Obra, nopudieron ser más oportunas » 14 . En 1801, Pedro Montengón présentait avec une feintedésinvolture ses Frioleras eruditas y curiosas para la pública instrucción comme unmodeste chapelet de bagatelles. On y trouvait, entre autres choses, un discours sur lebon goût dans les arts et les sciences, de courtes dissertations sur le systèmeéconomique romain, sur le polythéisme de cette civilisation, de même que de brefsexposés sur la mesure de la longitude et de la latitude et sur les curiosités de la nature,telles que l’obsidienne. En somme, comme l’écrit, en 1793, l’auteur anonyme de Eltiempo de ferias : « Es menester que un libro divierta, agrade y recree, pero sobre todoes necesario que instruya, que enseñe y que corrija. ¿La diversión y la utilidad, el placery el provecho no pueden caminar juntos? La obra de pasatiempo puede ser también deutilidad » 15 .Face à cette promotion croissante au fil du XVIII e siècle de l’idée d’une philosophieet d’une science amènes et accessibles, mises à la portée d’une audience dépassant celled’une salle d’université ou d’un cénacle d’érudits, les esprits conservateurs ont tôt faitde crier au dévoiement du vrai savoir. Certains veulent y voir une forme de démagogieavant la lettre. Pour Luis de Losada, les novatores, n’ayant pas recueilli l’approbationdes spécialistes autorisés et issus du milieu universitaire, aspirent, de façon aberrante, àgagner la reconnaissance auprès d’un public de béotiens, incapable d’apprécier lapertinence réelle de leur propos. Ils flattent l’orgueil d’un lectorat inexpérimenté, quidoit constituer une rampe de lancement de la pensée nouvelle et illégitime. Pour Losada,le public visé ne peut être que de second, voire de troisième choix, autrement dit, lesiletrados et les femmes. En 1731, Salvador Mañer dénonce la vulgarisation de lanouvelle philosophie auprès des dames des tertulias. 16 . Cette technique dedisqualification de la science moderne par la bande est récurrente au XVIIIe siècle 17 . Onse plaît notamment à moquer les femmes savantes, détournées de leur vrai lieu (le14 Ibid., « prólogo », sans pagination.15 El tiempo de ferias o Jacinto en Madrid. Madrid, Ramón Ruiz, 1793, « Prólogo. A los jóvenes », p. 3-4.16 Salvador MAÑER, Réplica satisfactoria a la Ilustración apologética del Padre Feyjoo […]. Segundaparte del tomo segundo. Madrid, [1731], p. 275, cité par Pedro ÁLVAREZ DE MIRANDA, « Palabras eideas : el léxico de la Ilustración temprana en España (1680-1760) », Anejos del Boletín de la RealAcademia Española, Madrid, LI, 1992, p. 646.17 Il suffit de songer à Forner, dans les années 1780, ou encore à Fray Diego de Cádiz qui à la fin dusiècle stigmatise un public dévoyé, composé de femmes, de gens idiots et d’hommes ignorants.ISSN 1773-0023
366DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLESfoyer), de leurs devoirs de mère et d’épouse, et plongées dans un dangereux espritd’indépendance. Le savoir, en général, doit être réservé à l’élite de droit et demeurerinaccessible au profane. L’accès facilité que l’on offre désormais à une science devenueamène s’accorde bien à l’esprit d’un siècle, qui fustige l’idée d’excès d’effortintellectuel, tempêtent les représentants des anti-Lumières : « Todo lo que cuesta trabajoy mucha instrucción para entenderse, no puede ser del gusto de las mujeres ni aun de loshombres de la erudición moderna » 18 . La prolifération d’ouvrages légers et aérésfavorise l’érudition superficielle et vaniteuse. Elle flatte la paresse intellectuelle dulecteur et sa recherche du plaisir. On sollicite trop la faculté de mémorisation audétriment de l’exercice de la faculté critique, en un mot de la raison. « Hay muchoseruditos de oreja, sin quemarse las cejas », écrira Martínez Pingarrón à GregorioMayáns en 1753 19 .La sécularisation de la pensée qui s’émancipe graduellement de la tutelle du discoursthéologique et métaphysique, l’élargissement quantitatif du public ébranlent lemonopole de l’Eglise qui, par une confiscation du savoir, cadenassait le débat. Les Anti-Lumières réduisent la postérité des novatores à un pur hédonisme intellectuel, aurebours de la vraie philosophie et de la sagesse chrétienne. Selon le très réactionnaireGómez de Avellaneda, l’éclectisme de ces derniers, qui répondait alors à une postureintellectuelle antidogmatique, fondée sur l’empirisme et le scepticisme, trouve sonavatar direct dans l’esprit d’érudition encyclopédique et superficiel des mondains desalon 20 .En 1787, Fernández Valverce entend montrer dans ses Desengaños filosóficos que ledénigrement du savoir scolastique se fonde d’abord sur une inclination coupable del’esprit pour une séduisante facilité et pour le recreo. L’ancienne philosophie, jugéerébarbative et opaque, a été disqualifiée parce qu’elle entrait en dissonance vis-à-vis dugoût du siècle : « Para lograr ser leído en este siglo, un escrito conviene que parezca conla vestidura que se usa, que salga limpio, y ameno, y que tenga el orden, y método deltiempo, y que sea breve » 21 . Fernández Valverce stigmatise une trop grande liberté18 E.C.D.F.B., Philomanias del siglo XVIII, BNE, Ms. 4513, f. 122r, [sans date : extrême fin du XVIII esiècle].19 Cf. I.M. ZAVALA, Calndestinidad y libertinaje..., p. 207.20 Justo VERA DE LA VENTOSA [pseudonyme du frère José Gómez de Avellaneda), Vida y hechos delinaudito e Ilustrado Cavallero D. Guindo de Zerezo… [1776], BNE, Ms. 1839, chapitre IV, f. 21r.21 Vicente FERNÁNDEZ VALVERCE, Desengaños filosóficos. T. I, Madrid, Blas Román, 1787, p. 52.ISSN 1773-0023
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