OCIO Y OCIOS DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLES)
ESPAGNE XVIIIe â XXe SIÃCLES - CREC ESPAGNE XVIIIe â XXe SIÃCLES - CREC
Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporaine309création, comme par la qualité de ses adhérents, ce club ne peut détacher les loisirs d'uncontexte, d'un mode de vie, plus vaste, qui implique un certain code de l'honneur, uncomportement de caste plutôt, qu'on ne saurait enfreindre impunément.Les membres du Veloz Club : le désir de rester entre (jeunes) gens de bonnecompagnieOn se souvient que le faux comte de Vasili avait parlé, à propos du Veloz Club, dupoint de réunion de la « jeunesse dorée » et la moyenne d'âge des fondateurs est,effectivement, d'une trentaine d'années 28 , ce qui donne à ce club une de sescaractéristiques. L'écrivain Luis Coloma, dans la peinture de l'aristocratie madrilènequ'il ébauche dans son roman Pequeñeces, mentionne abondamment le Club dont lesmembres sont systématiquement qualifiés de « gommeux » 29 . C'est ainsi qu'en 1906,encore, en passant devant l'édifice, Corpus Barga déclare : « Nous sommes passésdevant le « Veloz Club » des petits messieurs ; en face, les balcons fermés de l'étageprincipal du palais de la Equitativa, compagnie d'assurances, où est installé le Casino deMadrid des grands messieurs… » 30 . C'est donc un club des enfants de la très hautesociété, fermé aux gens qui n'appartiennent pas à son monde, mais, cependant, plusouvert que ce qu'on aurait pu penser de prime abord. On est frappé, en lisant les statuts,de constater qu'ils offrent, dès le début, la possibilité aux étrangers d'entrer dans ce club.Ces derniers apparaissent dès l'article 6, on leur définit un statut, celui d'adhérent depassage (transeúnte) applicable, certes, de façon plus large à tous les non résidents àMadrid, tandis que l'article 14 mentionne spécifiquement les « ambassadeurs, ministreset chefs des légations étrangères » 31 , qui peuvent être introduits, sur recommandation28 Le comte de Carlet était né vers 1840, le marquis de las Amarillas en 1835, etc.29 « Gomosos ». Cité p. 70, p. 73, p. 96, dans Luis COLOMA, Pequeñeces, ed. de Rubén BENÍTEZ,Madrid, Cátedra, Colección Letras Hispánicas, n°28, 1999.30 « Hemos pasado por delante del “Veloz Club” de los señoritos; enfrente, los balcones cerrados del pisoprincipal del palacio de la Equitativa, compañía de seguros, donde está el Casino de Madrid, de losseñorones… ». Cité p. 43, dans CORPUS BARGA, Los pasos contados. Una vida a caballo en dos siglos(1887-1957), T. II, Madrid, Visor libros / Consejería de educación de la Comunidad de Madrid, 2002.31 « Sólo serán transeúntes los extranjeros o forasteros que, presentados por dos socios fundadores o tresnumerarios, deseen pertenecer al Club durante su estancia en esta capital ». Puis : “Los Embajadores,Ministros y Jefes de Legación extranjeros serán admitidos como presentados”. Cité dans les articles 6 et14, chapitres I et II, respectivement, p. 3 et p. 4, respectivement. Remarquons que des termes semblablessont employés dans les statuts du Casino de Madrid où il est précisé que « Los jefes de Legación seránadmitidos como presentados en cuanto lo soliciten, y los demás miembros del Cuerpo DiplomáticoISSN 1773-0023
310DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLESd'autres membres, comme n'importe quel aspirant. Il est vrai que les élites, la hautenoblesse, font état, à l'époque, d'un certain cosmopolitisme de bon ton, quand, parailleurs, les alliances matrimoniales à l'étranger ne sont pas rares. Parmi les fondateurs,le Comte de Carlet y Castellví voyageait très fréquemment en Angleterre ; de mèreirlandaise, il avait épousé une Écossaise, doña Mercedes Gordon y Prendergast, et lafamille se rendait donc souvent à Londres et à Aberdeen, où le clan Gordon possédait unchâteau 32 . Cet exemple est sans doute révélateur d'une tendance en train de se diffuser etexplique aisément que les fondateurs aient été sensibilisés à ce problème. Cependant,des restrictions sont immédiatement posées puisqu'il est précisé que « les charges dePrésident, Vice-présidents, Trésorier, Comptable et Secrétaire échoiront précisément àun membre fondateur qui soit espagnol » 33 . La seconde mouture des Statuts est encoreun peu plus restrictive puisque cette clause concerne dorénavant la totalité des membresde la Direction, en y incluant, cette fois, les quelques personnes sans charge qui en fontégalement partie. Cette espèce d'oscillation, une fois encore, entre deux positions, entrel'accueil de l'autre ou son exclusion des sphères de direction, semble n'être qu'une desmanifestations de la volonté de fermeture d'un club qui est, cependant, potentiellementouvert à beaucoup. Ou, de façon peut-être plus schématique, cela souligne leschangements introduits par ces élites madrilènes en perte de vitesse dans un modèle declub qu'elles ont pris à l'extérieur. En effet, il y a fort à parier que l'idée du Veloz Clubest issue, directement, d'un cercle semblable que l'un des fondateurs aurait connu durantun voyage à l'étranger 34 . Du moins le Club est-il vécu, par certains, comme uneimportation étrangère, un mode de sociabilité qui rompt avec la tradition hispanique 35 .cuando sean propuestos por sus jefes respectivos ». Cité par José MONTERO ALONSO, Historia delCasino…, p. 109.32 Ces détails m'ont été fournis par l'actuelle Comtesse de Carlet y del Castellá, que je remerciechaleureusement pour son aide précieuse et efficace.33 « Los cargos de Presidente, Vicepresidentes, Tesorero, Contador y Secretario, recaerán precisamente ensocio fundador que sea español ». Article 10, chapitre II des statuts, Estatutos y Reglamento…, 1870, p. 4.Dans les Statuts de 1871, c'est l'article 7 du Chapitre II qui précise : « Los socios fundadores españolesserán los únicos que formarán y tendrán cargos en la Junta Directiva del Club », p. 4.34 Sans toutefois justifier son affirmation, le critique Rubén BENÍTEZ, dans son édition commentée duroman Pequeñeces, de Luis COLOMA précise, en note à la première apparition du Veloz Club dans leroman que « el Veloz Club madrileño imita al Veloz Sport, club parisino ». Cité p. 70, dans LuisCOLOMA, Pequeñeces…35 Le Professeur Ana María FREIRE LÓPEZ, de la UNED, m'a rapporté cette anecdote selon laquelle uncritique de l'époque aurait déploré que des institutions étrangères, telles que le Veloz Club par exemple,qu'il citait nommément, aient détrôné d'autres modes de sociabilité, nationaux et anciens, comme lesreprésentations dans les théâtres particuliers des grandes familles madrilènes, notamment.ISSN 1773-0023
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