OCIO Y OCIOS DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLES)

ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLES - CREC ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLES - CREC

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Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporaine283L’argument économique anti-taurin est cependant de poids à une époque où lafamine réapparaît, et s’intensifie lorqu’il est question de construire de nouvelles arènes.Les détracteurs s’insurgent devant un tel gaspillage. Cet argument, tant utilisé au coursdes siècles passés, se double d’un souci moral : que faire de son temps ? Un journaliste,dans Juan Rana, considère que les aficionados le sont parce qu’ils s’ennuient :« ¿Y por qué va usted? se les pregunta y contestan: […] se mata la tarde ». Aquí estáexplicado todo el misterio de la afición: « matar la tarde ». Un aficionado es ante todo un granaburrido, un hombre que carece de vida espiritual, que va poco a poco atrofiando suinteligencia 22 .La corrida est conçue comme un spectacle inutile, qui endort le cerveau et l’esprit del’homme, victime de son oisiveté. Elle cause donc le retard culturel et intellectuel dupays, ruine les familles modestes, mais aussi l’ensemble de la nation qu’elle pousse à ladébauche.Une entrave aux bonnes conduitesCe qui, aux yeux de certains, est une fête joyeuse où priment le mélange des classessociales 23 et le mélange des sexes, représente, pour les autres, la chose plus immoralequi soit, incitant à la promiscuité des sexes, à un comportement dégradant, à une libertéd’expression qui n’est pas tolérable. La corrida incite à la perversité, à l’oisiveté, àl’immoralité. C’est la liberté de s’amuser bassement qui est ici visée, voire censurée. Etla presse se fait l’écho de ce discours moralisateur. L’image d’une foule qui s’entasse,d’un désordre le plus absolu, où règne la plus grande confusion, revient sans cesse dansles descriptions des arènes.El amplio circo taurino apareció a nuestra entrada inundado de gente : no faltabantampoco en las localidades de preferencia damas distiguidas y hersas : la caridad las alentópara dar su mejor ornato a la fiesta. Ni hay nada tan genuinamente español como una funcióntaurina. Allí todo el mundo se trata con espontaneidad y confianza : en ellas se emiten francas22 Timoteo ORBE, « La afición », in Juan Rana, Madrid, 3-V-1901.23 Sonsoles DíEZ de RIVERA, « De toros y toreros »…, p. 191 : « Gran mezcla de todas las clasessociales. Al entrar en la plaza se borran las categorías y las preferencias políticas, ya no hay más queaficionados y reina un espíritu democrático. Única diferencia: lo que cada cual había pagado por susentradas ».ISSN 1773-0023

284DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe XXe SIÈCLESopiniones y saltan acaloradas disputas, y se aplaude, se grita y vocea con la misma libertadque el vendedor de bocas o de naranjas 24 .La corrida représente un moment privilégié de partage, un moment dedivertissement, où la promiscuité est tolérée, où regarder les jolies femmes n’est pasinterdit. En effet, les arènes ne sont pas qu’un lieu où l’on va se divertir, mais où l’on semontre : ce jour là, les dames osent afficher leurs charmes, et se permettent même deprovoquer les hommes.Mujeres espléndidamente hermosas y soberanamente atractivas porque son mujeres españolas.[…] Sólo por verlas, sólo por aspirar los aromas de su aliento, agitados por el juguetón abanico, ysólo por recibir en el fondo del alma […] un rayo de sol que brote de unos ojos negros, se explicael entusiasmo que produce en los madrileños la inauguración de las corridas 25 .C’est, en somme, l’occasion de trangresser un monde sensuel interdit : « una corridahoy es monótona… Yo no voy a la Plaza por los toros ni por los toreros… Voy por lasmujeres, mi eterna preocupación » 26 .Mais, pour les détracteurs, ce mélange est source de débauche ; selon eux, les arènesservaient d’exutoire, d’école de la grossièreté et de mauvaise éducation, c’est un lieu oùles valeurs morales sont bafouées. Les spectateurs des corridas symbolisent la passivité,la veulerie du pays dans son ensemble. Les femmes sont les premières à être critiquées,car il est entendu que la corrida n’est pas un lieu pour la gent féminine. Face à leurenthousiasme, certains dénoncent l’hypocrisie de leurs valeurs.¡A los toros! éste es el grito que dan hoy muchas damas que luego concurren a cualquieraJunta de Beneficencia […] y muchos varones graves y conspicuos que hablarán de la moralpomposamente en las sesiones del Ateneo o en las reuniones de los Padres de Familia 27 .¡Esto no tiene contestación como no lo tiene lo inmoral de la presencia de la mujer en laplaza un ser sensible y adornado de tan bellos sentimientos presenciando espectáculos de tanfuertes emociones! La verdad es que un espectáculo que es tanto mejor cuanta más sangrecorre en él y donde se oyen y están permitidas todas las palabras que el diccionario por nomanchar el papel no estampa en sus páginas se califica él solo 28 .24 Enrique BALDELOMAR Y FABREGUES, « Pan y Toros », in Correspondencia de España, Madrid,9-IV-1892.25 Calixto BALLESTEROS, « ¡Toros! », in La Iberia, Madrid, 25-III-1894.26 « ¿ Toritos a mí ? », in Don Jacinto (semanario taurino batallador que no admite billetes de favor),Madrid, n°31, 12-X-1903, p. 2-3.27 Calixto BALLESTEROS, « ¡Toros! », in La Iberia, Madrid, 25-III-1894.28 Félix de la TORRIENTE, « Carta abierta », in La Libertad, Salamanca, 16-X-1891. Réponse à PedroDorado.ISSN 1773-0023

Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporaine283L’argument économique anti-taurin est cependant de poids à une époque où lafamine réapparaît, et s’intensifie lorqu’il est question de construire de nouvelles arènes.Les détracteurs s’insurgent devant un tel gaspillage. Cet argument, tant utilisé au coursdes siècles passés, se double d’un souci moral : que faire de son temps ? Un journaliste,dans Juan Rana, considère que les aficionados le sont parce qu’ils s’ennuient :« <strong>–</strong>¿Y por qué va usted? <strong>–</strong> se les pregunta y contestan: […] <strong>–</strong> se mata la tarde ». Aquí estáexplicado todo el misterio de la afición: « matar la tarde ». Un aficionado es ante todo un granaburrido, un hombre que carece de vida espiritual, que va poco a poco atrofiando suinteligencia 22 .La corrida est conçue comme un spectacle inutile, qui endort le cerveau et l’esprit del’homme, victime de son oisiveté. Elle cause donc le retard culturel et intellectuel dupays, ruine les familles modestes, mais aussi l’ensemble de la nation qu’elle pousse à ladébauche.Une entrave aux bonnes conduitesCe qui, aux yeux de certains, est une fête joyeuse où priment le mélange des classessociales 23 et le mélange des sexes, représente, pour les autres, la chose plus immoralequi soit, incitant à la promiscuité des sexes, à un comportement dégradant, à une libertéd’expression qui n’est pas tolérable. La corrida incite à la perversité, à l’oisiveté, àl’immoralité. C’est la liberté de s’amuser bassement qui est ici visée, voire censurée. Etla presse se fait l’écho de ce discours moralisateur. L’image d’une foule qui s’entasse,d’un désordre le plus absolu, où règne la plus grande confusion, revient sans cesse dansles descriptions des arènes.El amplio circo taurino apareció a nuestra entrada inundado de gente : no faltabantampoco en las localidades de preferencia damas distiguidas y hersas : la caridad las alentópara dar su mejor ornato a la fiesta. Ni hay nada tan genuinamente español como una funcióntaurina. Allí todo el mundo se trata con espontaneidad y confianza : en ellas se emiten francas22 Timoteo ORBE, « La afición », in Juan Rana, Madrid, 3-V-1901.23 Sonsoles DíEZ de RIVERA, « De toros y toreros »…, p. 191 : « Gran mezcla de todas las clasessociales. Al entrar en la plaza se borran las categorías y las preferencias políticas, ya no hay más queaficionados y reina un espíritu democrático. Única diferencia: lo que cada cual había pagado por susentradas ».ISSN 1773-0023

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